Faut-il que Renaissance et le MoDem fusionnent ?
La proposition, initiée par Élisabeth Borne, actuellement présidente du Conseil national du parti Renaissance, relayée par la suite par F. Bayrou, en tant que président du MoDem, a surpris, puis passionné les militants des deux partis concernés.
Interrogé sur une fusion des deux partis, évoquée dans Le Figaro par Élisabeth Borne, François Bayrou a répondu : « Bien sûr. Pendant toute ma vie politique, j’ai toujours défendu l’unité du centre. […] Chacun doit être assuré que ses valeurs, son histoire, ses convictions, sa sensibilité, ses intérêts matériels et moraux seront garantis quand nous aurons construit la nouvelle et si nécessaire organisation. »
Comme toujours lorsque l’on a la chance d’être libre, essayons d’entrer, à notre tour, et de le faire par le biais d’une étude comparative des deux options : pour ou contre la fusion de ces deux partis.
Commençons par l’option « fusion du MoDem et de Renaissance » :
Les avantages de cette fusion sont évidents : meilleure efficacité électorale dans les élections locales, le centre enfin remis dans la course à la présidentielle avec un candidat unique choisi par les adhérents eux-mêmes, meilleure visibilité pour l’opinion publique, etc. En clair, si nous réussissions l’exploit de cette fusion, le centre serait plus fort. Nous changerions d’époque…
Fini l’archipel du centre, finie la très humiliante caricature de la brouette remplie de grenouilles centristes n’arrêtant pas de sauter par-dessus le bord de la brouette, abandonnant sans vergogne la brouette commune. Enfin, forts et respectés. Trop beau pour être vrai ? La vraie difficulté n’est pas dans la fusion espérée, elle est dans le chemin compliqué pour y arriver.
Poursuivons par l’option du « statu quo », celle qui nous verrait prolonger la situation actuelle qui voit les appareils du MoDem et de Renaissance rester séparés. D’abord, reconnaissons que cela a marché et qu’il y a un bilan à défendre. Après tout, c’est avec cette configuration que les présidentielles et les législatives de 2017, 2022 et 2024 ont été gagnées. Donc, d’abord merci à toutes celles et à tous ceux qui les ont gagnées, ces batailles. Mais, sans vouloir faire offense à personne, ces victoires sont d’abord celles d’un élan présidentiel de 2017, et dans une moindre mesure, celui de 2022… Pour 2027, sans Emmanuel Macron, ce sera une toute autre histoire, et d’abord celle d’un camp émietté qui devra tout faire pour d’abord qualifier son candidat au deuxième tour de la présidentielle, puis, si possible, le faire gagner au 2e tour… Vaste programme !
Faisons donc le pari de la fusion et engageons-nous sur la route difficile vers celle-ci.
Il me semble que chacun des deux partis, dans cette perspective de fusion, doit commencer par dire très clairement quel est son programme, ses priorités pour les années 2027-2032. Et il ne pourra pas le faire sans faire préalablement un bilan politique des deux mandats présidentiels d’Emmanuel Macron.
En clair, nous avons besoin au MoDem d’un vrai congrès extraordinaire qui fasse ce bilan des années Macron, définisse notre ambition pour la France pour les années 2027-2032 et valide, au regard de notre programme, la décision de fusion avec Renaissance dans un grand parti démocrate.
Nous avons un besoin urgent au MoDem d’un vrai congrès politique. Le congrès de Blois était important car il mettait un terme aux années COVID sans congrès de 2020 à 2023. Mais il n’a pas permis de débattre et de voter sur la ligne politique du MoDem.
Il y a urgence à effectuer ce travail. Nous verrons émerger le socle de convictions communes avec Renaissance, mais aussi avec d’autres formations politiques (l’UDI, le Parti radical, Horizons, etc.) : l’attachement à la construction européenne, les transitions écologiques, numériques, l’État de droit, la priorité à donner au travail. Mais, j’ai en mémoire une conversation avec notre ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, venu faire une réunion publique à Agen. J’avais insisté sur l’urgence qu’il y avait à préciser notre ligne politique, notamment par rapport à celle d’Emmanuel Macron. « Quelles différences majeures entre Macron et nous, à ton avis ? » m’avait-il demandé, et je lui avais spontanément répondu : « La fiscalité ! » tellement la suppression de la taxe d’habitation, celle de l’ISF et des impôts sur la production (CVAE, etc.) m’étaient restées en travers de la gorge.
J’affirme donc qu’il ne saurait y avoir de fusion réelle avec Renaissance sans un accord, aussi, sur les sujets qui fâchent et qui nous opposent entre MoDem et Renaissance.
Alors, finalement, pour ou contre une fusion avec Renaissance ? Je suis sans ambiguïté pour et je souhaite même que l’on élargisse ce projet de grand Parti démocrate à tout l’archipel du centre. Il y a plus de 50 ans, en 1971, l’archipel socialiste (Convention institutions républicaines, SFIO, PSU, …), au congrès d’Épinay, avait réussi une telle opération de refondation pour créer le Parti socialiste. Un élan puissant était né de cette création, portant, dix ans plus tard, et pour longtemps, le Parti socialiste au pouvoir.
Je suis donc favorable à cette refondation. Mais elle ne pourra pas se limiter à d’obscures et absconses négociations d’état-major. Pour aboutir, cette démarche ambitieuse a besoin de lumière, de politique, de démocratie. Bref, d’enthousiasme !!!
Tâche passionnante que celle de refonder le centre…
Tâche urgente et impérative. Si nous échouons, la France se donnera aux extrêmes et à leur cortège de malheurs.
@+,
Jean Dionis, Maire d’Agen