Le Président de la République, Emmanuel Macron, a tenu un de ses engagements de campagne en installant, ce 17 Juillet, au Sénat la conférence nationale des territoires en présence de nombreux parlementaires et représentants des associations des élus locaux.
Cette conférence – dont la gouvernance et le fonctionnement restent à fixer- se réunirait en séance plénière tous les six mois pour fabriquer les bons compromis dans les relations nombreuses et complexes entre l’Etat et les collectivités locales. Saluons à la fois la tenue de l’engagement et la méthode participative, presque « grenellienne » …. So far, so good, comme disent nos amis Anglais.
Et maintenant, creusons un peu ensemble derrière la communication des uns et des autres. Que faut-il retenir de cette première Conférence nationale des territoires ?
Retenons d’abord que la rigueur continuera de 2017 à 2022.
En effet, les collectivités locales devront réaliser 13 milliards d'euros d'économies d'ici 2022... C'est 3 milliards d'euros de plus que ce que prévoyait le programme électoral d'Emmanuel Macron. Montant non négociable, a tenu à préciser d’entrée le Premier ministre.
Au regard des dépenses totales des collectivités territoriales (229 milliards d'euros en 2015), l'effort qui leur est demandé est "important", a reconnu un peu plus tôt le même Premier ministre. Comme lors du précédent quinquennat, il est proportionnel au poids des administrations publiques locales dans la dépense publique totale (20%).
Pour celles et ceux qui comme moi essayent de se tenir au courant de l’état des finances publiques de la France, cette annonce n’est pas surprenante et sur le fond, je la trouve légitime. J’en ai d’ailleurs moi-même soutenu le principe pendant toute la campagne présidentielle.
Dont acte. Les collectivités locales pour atteindre cet objectif devront faire preuve de rigueur, d’innovation, de productivité, sans exclure, dans certains cas, la révision à la baisse du service public local…..et c’est bien tout le débat.
Mais les interrogations et les divergences portent sur le comment. Ecoutons finement le Président : « Nous ne procéderons pas par baisse brutale des dotations", "C'est un pari que nous faisons ensemble. Je vous fais confiance. [...] Les collectivités locales, toutes leurs composantes, feront pour 2018 la part de ce qui leur revient de baisse de dépenses de fonctionnement et d'investissement", a-t-il dit. "Je crois à la logique de confiance, en la capacité que nous avons de procéder à des économies intelligentes", a-t-il par ailleurs affirmé. Mais, a-t-il prévenu, pour "ceux qui ne joueront pas le jeu, il y aura un mécanisme de correction l'année d'après."
Bref, tout cela est encore parfaitement flou. Mais, en final, ….il y aura bien baisse des dotations d’Etat (le mécanisme de correction).
Il faut ensuite retenir que le Président Macron garde pour le moment le cap de la suppression de la Taxe d’Habitation et de son éventuellement remplacement par une fraction de la CSG. Et pour bien enfoncer le clou, le Président enterre - pour le moment – la révision des bases locatives, bloquant ainsi toute modernisation de cet impôt vers plus d’équité. (lire ma chronique à ce sujet http://jeandionis.com/blog/
Le reste est plutôt positif, mais clairement dans le registre sympathique, mais moins décisif de déclarations d’intention : De nouvelles libertés pour organiser et faire fonctionner avec plus de souplesse les collectivités territoriales, un combat contre les normes, un droit facilité en matière d'expérimentation …….Fort bien, mais nous attendrons de voir pour croire comme pour la couverture de la France entière "en haut et très haut débit" d'ici "à la fin de l'année 2020", soit avec deux ans d'avance sur le plan de la précédente majorité.
Et pour finir, une nouvelle grosse bêtise avec l’objectif de diminuer le nombre d’élus locaux de 1/3 ??? Contre sens absolu quand on sait que sur 640 000 élus locaux, 450 000 sont des conseillers municipaux bénévoles. Supprimer ces élus bénévoles et vous ferez pousser… des fonctionnaires rémunérés.
Cette première Conférence Nationale, au final, est bien confuse – et soyons honnêtes, ce n’est pas scandaleux au début d’un processus participatif – et …. bien jacobine sous ses abords plaisants.
Alors, « Aux armes », les Girondins ! A nous d’exprimer fortement et simplement les lignes-force de nos positions : Nous voulons plus de solidarité financière entre les territoires de la République et nous voulons plus de liberté, d’autonomie dans la gestion de nos territoires.
De la conférence nationale des territoires, nous attendons d’abord une grande loi de péréquation entre la France des Métropoles et la France périphérique. Pourquoi ? Merci de lire ma chronique sur ce sujet http://jeandionis.com/blog/
Il n’est pas possible d’avoir comme seul objectif des 5 ans à venir de participer à la réduction du déficit de l’Etat. Si la France riche ne peut pas financer le redressement de la France de toutes les fragilités, alors le discours sur la république deviendra vite insupportable.
Nous attendons ensuite une grande loi de liberté, d’autonomie et d’avancée dans la décentralisation. Il faut être sourd pour ne pas entendre la colère des élus locaux et des citoyens envers le poids de leur administration et nous ne progresserons pas nettement dans ce domaine si nous ne rapprochons pas radicalement les décisions du terrain. Un seul exemple : l’Etat conserve aujourd’hui la gestion des risques (inondations, incendie, glissement de terrains, etc….) et a fait de cette maîtrise un outil insupportable de recentralisation qui vide de leur substance des compétences que la loi confie aux collectivités locales comme l’urbanisme.
Péréquation financière entre la France prospère et la France qui souffre, Autonomie et avancée dans la décentralisation…..voilà ce que nous voulons trouver dans les pactes « Girondins » que nous propose le Premier Ministre…
M. le Président, Ecoutez « les girondins », Ecoutez-nous. Et quand on vous dira « solidarité financière et autonomie », je suis sûr que vous entendrez aussi « liberté, égalité, fraternité » la belle devise de la République que vous présidez.