La semaine dernière, le Haut-Commissaire au plan, François Bayrou, puis le Président de la République ont pris publiquement des positions fortes quant au développement de la filière nucléaire française. C’est assez nouveau pour être remarqué. Ce qui l’est plus encore, c’est maintenant le lien assumé entre développement du nucléaire et la lutte contre le réchauffement climatique. Lorsqu’il affirme : « Notre avenir énergétique et écologique passe par le nucléaire », Emmanuel Macron rétablit le lien de causalité entre la lutte contre le réchauffement climatique, la lutte pour la baisse des émissions de gaz à effet de serre et enfin,…le développement du nucléaire.
Tout est donc clair, maintenant sur ce sujet absolument stratégique ? Pas vraiment,…D’abord parce qu’il reste à faire un énorme de travail pédagogique à destination du grand public, qui à plus de 80 % est convaincu, contre toute rationalité, que les centrales nucléaires émettent du CO2 (sic…) et parce que les femmes et les hommes qui portent l’écologie politique en France lui restent farouchement opposés.
Ni François Bayrou, ni Emmanuel Macron n’ont d’ailleurs nié les inconvénients du nucléaire. Ils ont juste posé le nucléaire, comme incontournable et prioritaire, pour réussir la décarbonation de notre société.
Juste un seul exemple : les transports sont responsables de près de 30% des émissions totales de CO2 de l'Union européenne. Parmi ces émissions, 72% proviennent du transport routier, soit 21% des émissions totales. Toute l’industrie automobile se mobilise actuellement pour passer à des modèles décarbonées, notamment par la motorisation électrique…fort bien, sauf qu’il sera difficile d’envisager un basculement rapide d’un secteur aussi massif sans développement de la capacité de production d’électricité nucléaire, qui représente plus de 70 % de la capacité de production d’électricité française et qui assure la « base permanente » de nos approvisionnements.
Mais, ne nous trompons pas, la relance du nucléaire, en France, ne se fera que si nous sommes capables de construire un vrai consensus national sur cette politique si sensible. Que cela nous plaise ou pas, il nous faut donc entendre les critiques faites contre le nucléaire par leurs opposants historiques et essayer d’y répondre.
La sécurité d’abord. C’est une priorité absolue à juste titre. Notre imaginaire collectif a été durablement marqué par les grands accidents nucléaires internationaux (Tchernobyl en Ukraine, Fukushima au Japon…), même s’il est juste d’affirmer que la France a su s’en protéger, à ce jour, depuis plus de 40 ans. Mais justement qui ne comprend pas que la réponse à cette exigence légitime de sécurité passe par le déploiement de la nouvelle génération d’EPR2 , construite justement pour être plus sûre et que la seule réponse nationale ne peut pas être en matière de sécurité le seul prolongement de l’autorisation de fonctionnement (de 10 ans ? de 20 ans ?) de nos centrales actuelles ?
Les déchets ensuite. Les déchets radioactifs qui nécessitent des mesures de protection élaborées et spécifiques sont les déchets de haute activité et à vie longue. C’est notamment le cas du combustible usé des centrales nucléaires. Leur radioactivité reste notable pendant des centaines de milliers d’années (mais pas à un niveau « hautement radioactif » sur toute cette période). La solution de gestion actuellement retenue est le confinement géologique. Une fois enfouis, ces déchets restent in situ pendant une longue durée : le fait d'être sous terre ne change pas leur nature, leur radioactivité y baisse progressivement. La nature de la « barrière de sécurité » (conditionnement, évolution des couches géologiques), plus ou moins sûre sur la longue durée, est évidemment l'élément de sécurité à bien évaluer pour définir le niveau de protection. Pas génial, me direz-vous ? Oui, c’est vrai. D’autres solutions technologiques émergeront peut-être dans les décennies à venir. En attendant, ce n’est pas sur cette partie du process de production que sont survenus les accidents de la filière du nucléaire.
Enfin, le nucléaire serait une énergie exigeant des moyens de production hyper-centralisés et induirait une société hyper-centralisée. C’est, à mon avis, l’argument le plus faible des anti-nucléaires. Oui, les centrales nucléaires sont des investissements très lourds. Oui, elles sont gérées de manière centralisée. Mais, c’est ignorer que la gestion entière du réseau électrique national est elle-même interconnectée et centralisée et que c’est justement cette interconnexion et cette centralisation qui permettent de desservir des régions sans centrales nucléaires (Bretagne, PACA…) et qui permettent d’éviter les ruptures d’approvisionnement en cas de défaillances locales.
A bien y réfléchir, je ne vois là rien de rédhibitoire, y compris pour les Verts français. Je comprends que cette famille politique s’est construite largement dans les années 70-90 contre le choix nucléaire très marqué fait par la France. Mais, de deux choses l’une : ou bien la priorité est la lutte contre le réchauffement climatique et il faudra faire avec le nucléaire et avec ses défauts rappelés ci-dessus, ou bien la lutte contre le réchauffement climatique n’est pas prioritaire et il faudra avoir le courage politique de le dire.
Notre pays a besoin d’un consensus sur cet enjeu prioritaire. Les Verts et avec eux l’écologie politique française va devoir impérativement sortir de l’ambiguïté sur ce sujet. Ils se grandiraient à faire leur « Aggiornamento » nucléaire. Si pour des raisons politiciennes, ils choisissent de ne pas le faire, alors, ils s’enfonceront dans la perte de crédibilité.
La campagne présidentielle de 2022 ne pourra pas faire l’économie de ce débat prioritaire. Elle sera, pour tous, le moment de vérité quant au sérieux de son discours sur la lutte contre le réchauffement climatique. Avec sa prise de position de la semaine dernière, Emmanuel Macron a pris dans ce domaine une longueur d’avance. La réponse des autres familles politiques majeures de ce pays, et notamment celle des Verts, va être très attendue.
Et, si sur le climat, au moins, la France choisissait la raison, le long-terme,….il n’est pas interdit d’espérer.
Bravo !
J’approuve vos écrits et votre position à l’encontre du nucléaire.
Il est certain que les humains devraient se comporter comme des locataires et non comme des propriétaires (St Exupéry)…Parce que ce n’est pas demain, que nous aurons une planète de rechange.
En cette période, où on se rend compte que nos technocrates dirigistes (dont très peu ont le niveau scientifique nécessaire) se sont trompé de tactique depuis bientôt quarante ans, je pense qu’il faudrait :
1)-Continuer à améliorer et développer le nucléaire, spécialité dans laquelle notre connaissance et notre technologie sont dans les meilleures au monde.
2)- Ne pas punir les Français en les incitant fallacieusement à acheter des voitures électriques équipées de batteries au lithium-cobalt( produits rares et toxiques que nous ne possédons pas) et qui sont très polluantes, notamment à la production, alors qu’il faudrait opter directement pour la voiture électrique équipée de batterie au sodium( du sel de mer… nous en avons !), car :
- C’est une découverte et une réalisation du CNRS dont les chinois ne nous ont pas encore »piqué » le principe !
- Sa fabrication est peu couteuse et elle est beaucoup plus fiable.
- Elle confère une autonomie d’au moins 800 kms. Se recharge en une minute, soit encore moins de temps qu’il n’en faut pour faire le plein d’essence, au lieu d'une heure pour une batterie actuelle.
3)- Rentabiliser et moderniser le transport ferroviaire et fluvial.
4)-Taxer tous les camions diesels qui traversent la France en polluant.
5)-Augmenter nos recherches dans la stabilisation de l’hydrogène liquide puisque grâce à « Arian Group », qui maîtrise les systèmes de propulsion fondés sur l’hydrogène liquide et les infrastructures associées depuis plus de 40 ans, nous avons une grande avance en ce domaine.
Bonjour , Enfin un peu de clairvoyance de la part de nos dirigeants !! l'energie atomique nous a sortie de l'ère du fuel et du charbon !! Mais ce ne sont que les prémices de l'utilisation de l'atome . Aujourd'hui la fission ,demain la fusion . On va passer de quelques tonnes d'uranium à quelques grammes avec une dangerosité de 100 actuellement ramenée à 1 . Il suffit d'etre patient et dans quelques années tout ça, sera de l'histoire ancienne . VIVE LA SCIENCE
Merci Monsieur le Maire, Monsieur le Président pour la pertinence de votre analyse.
Une projection à l'horizon de vos petits-enfants fait apparaître une raison complémentaire majeure de poursuivre nos efforts de R&D sur le nucléaire. C'est l'épuisement des réserves d'énergies fossiles que sont le pétrole, le charbon et le gaz. Il y a chaque année plus d'humains sur la terre dont le niveau de vie moyen augmente sans cesse, contribuant à la consommation sans cesse croissante de ces énergies. Qui toutes produisent du gaz à effet de serre. Nous sommes donc pris dans un cercle vicieux ququel la raréfaction des fossiles mettra fin. Mais à quel prix? Seuls de gros efforts de R&D et de lourds investissements dans le nucléaire permettront à l'humanité de survivre dans des conditions acceptables. Si la France ne relance pas ses efforts en la matière, elle se mettra sous la dépendance d'autres qui les auront faits, les chinois par exemple qui ont bien compris la situation.
Vous êtes invité à écouter un expert en la matière, Jean-Marc JANCOVICI, sur YouTube.
Respectueuses salutations.