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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

« La Région Nouvelle-Aquitaine à la croisée des chemins : Jacobine ou Girondine ? »

Publication : 06/05/2019  |  14:38  |  Auteur : Jean Dionis

Le SRADDET ? Vous connaissez ? Non, normal…c’est un de ces sigles barbares qui ont pour résultat de rendre l’action publique de plus en plus opaque. SRADDET comme Schéma régional d’aménagement , de développement durable et d’égalité des territoires. (ouf ! )

En France, le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires est un schéma régional de planification qui fusionne plusieurs documents sectoriels ou schémas existants : schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT), plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD), schéma régional de l'intermodalité (SRI), schéma régional climat air énergie (SRCAE) et SRCE. Le SRADDET, qui remplace le SRADDT, créé en 1995 et modifié en 1999, a été institué par la loi NOTRe dans le contexte de la mise en place des nouvelles Régions (en 2016).

Jusque là, rien à dire…

La Région Nouvelle-Aquitaine tient, le lundi 6 mai, sa séance d’approbation de l’avant-projet de SRADDET tel qu’il est exigé par la loi NOTRe de 2016.

Sur le fond, l’avant-projet de SRADDET est dominé par les enjeux de la transition écologique, quitte à réduire à la portion congrue des autres enjeux imposés par la loi de 2015 à savoir le développement durable et l’égalité des territoires. C’est un choix politique d’Alain Rousset.

Et je vais vous surprendre : je comprends ce choix politique. Il  s’inscrit dans l’élan qu’Alain Rousset veut donner à la transition écologique pour notre territoire régional. Reconnaissons-le, dans cette dimension, le texte, qui est soumis au débat, ne manque ni d’intérêt ni de force. Et pour que cela soit très clair avant un certain nombre de débats qui nous opposeront, je veux d’abord en profiter pour saluer, une nouvelle fois, l’apport sur le long terme du mouvement écologiste et de ses élus dans notre prise de conscience collective et dans le changement de nos comportements.

Du verre d’eau de René Dumont en 1974 et son fameux « je bois devant vous un verre d’eau précieuse… » aux manifestations de notre jeunesse pour le climat de cet hiver, il y a une continuité dont je reconnais la fécondité dans l’action publique de notre pays.

Alors, tous écolos ? Le président Rousset écolo, la majorité écolo ? les différentes oppositions, écolos ? Et moi, dans tout ça, écolo, aussi ?

En ce qui me concerne, fidèle à la tradition sémantique de ma famille politique, ce sera un « Oui » pour être écolo mais un « Oui mais »...

Oui mais, d’abord parce que je suis vacciné. On m’a déjà fait le coup du grand élan écologique, c’était en 2007 dans la foulée de l’élection présidentielle. Avec habileté, Nicolas Hulot avait transformé sa non-campagne en une promotion de sa charte pour l’environnement qui fut signée par les principaux candidats à cette élection et notamment par son vainqueur Nicolas Sarkozy. Cette charte prévoyait un Grenelle de l’Environnement, rassemblant toutes les parties prenantes de la nation autour des enjeux écologiques. Ce grenelle de l’environnement eut lieu, sous la conduite de Jean-Louis Borloo et à un niveau modeste, j’y ai participé. Et c’est vrai qu’il y avait de l’écoute, du souffle, un élan.

Puis ensuite, sont venues les lois Grenelle de l’environnement 1 et 2. J’étais député, actif dans ces débats. Et j’ai voté avec enthousiasme ces lois qui étaient, par certains côtés, positives.

Qu’en reste-t-il aujourd’hui sur le terrain ?

Pas grand chose, si ce n’est une centralisation des décisions autour de l’Etat et de ses DREAL. Avec une ligne de partage législative catastrophique, l’Etat gérant les risques, les collectivités territoriales gérant soi-disant l’aménagement du territoire et l’urbanisme ou plutôt ce qu’il en reste. En effet, l’Etat s‘est servi de la gestion des risques pour vider partiellement de son contenu les compétences des territoires. Et ce faisant, une énorme machine à contentieux entre l’Etat et les collectivités territoriales a été créée qui paralyse des centaines de dossiers en France.

Et bien, je ne veux pas que ce scénario se reproduise avec le SRADDET. En aucun cas, je ne soutiendrai un SRADDET qui serait un nouvel outil de centralisation régionale qui contraigne et réduise à peau de chagrin la liberté des territoires, garantie par notre constitution et par des lois fondatrices comme celles de décentralisation en 1982.

Et il y aura un débat fondateur et révélateur autour du foncier, qui fixera la position de la Région.

Ou bien le texte définitif du SRADDET maintiendra l’objectif de 50% de réduction des surfaces constructibles. Objectif aujourd’hui adouci par le discours habile qui entoure ce document. Mais l’Etat fera une prescription de ce 50% dans chacun de nos documents locaux d’urbanisme et ceci notamment, après l’ordonnance prévue par la loi en 2020 pour application dès 2021, qui fixera véritablement le statut juridique du SRADDET.

Mais, j’en prends date aujourd’hui, l’ordonnance ira dans le sens de la prescription, ira dans le sens de l’exigence de la compatibilité de nos documents locaux (SCOT et PLUI de nos territoires) avec le SRADDET. Et si cet objectif est maintenu, le piège se refermera sur les collectivités locales comme il s’est refermé sur elles après les lois de 2007.

A ce moment là, le SRADDET et son objectif de 50% de réduction du foncier constructible sera devenu un autre outil de centralisation et de recul des libertés des territoires.

Ou bien…

Ou bien, au bout du processus de concertation, nous aurons assez d’audace pour concilier ambition écologique et liberté territoriale. Et cela passe par une approche conventionnelle, territoire par territoire. Et là, nous aurons une chance d’avoir créé un élan partagé, consensuel, sur notre immense région hétérogène.

La Région Nouvelle-Aquitaine est à la croisée des chemins.

Ou bien, elle devient un nouvel outil jacobin de recentralisation archaïque autour de Bordeaux et Paris.

Ou bien, elle s’inscrit dans la grande tradition Girondine qui fait confiance aux territoires pour participer librement aux objectifs de la Nation.

Quant à moi, je resterai, fidèlement, dans le camp des Girondins.

 

 

Les réactions

Excellente analyse. Ce Sraddet peut en effet être un piège ou bien un outil de vraie délégation vers les collectivités territoriales, mais comme vous l’enoncez  si bien,  encore faut il leur faire confiance. Restons optimistes mais vigilants en espérant la 2ème solution. 

Il faut rester très très vigilant car c’est maintenant que tout ce joue.  J’adere A cette analyse.

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