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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Alerte rouge de Saint-Brevin

Publication : 15/05/2023  |  13:00  |  Auteur : Webmaster
LAMBERT Florence | Crédits : PHOTOPQR/OUEST FRANCE/MAXPPP

Je ne connaissais pas Saint-Brevin-Les Pins.

Depuis, je me suis renseigné… Commune de Loire-Atlantique, proche de Saint-Nazaire, sur le rivage atlantique, 14 473 habitants…

Le 9 mai j’ai appris stupéfait que son maire Yannick Morez, médecin généraliste dans cette ville depuis plus de 32 ans, avait démissionné à la suite de l’incendie de son domicile et de ses deux voitures par des opposants au projet de transfert d’un centre d’accueil des migrants (déjà existant sur la commune) à proximité d’une école.

La maison d’un maire incendiée dans un conflit sur le transfert d’un centre de migrants !!! J’avoue avoir été touché au fond de moi-même. Car l’affaire est doublement sensible, d’abord parce qu’elle est une agression très grave contre un élu de la République, ensuite, parce qu’elle a pour enjeu l’accueil des étrangers sur notre territoire.

Faire brûler la maison d’un maire à l’occasion d’un contentieux avec lui, représente clairement en soi une ligne rouge franchie dans la violence brutale contre les élus. Mais, pour être honnête, j’ai été plus attristé que surpris. Déjà, en 2019,  à l’occasion de l’assassinat d’un maire dans le Sud-Est de la France, j’avais prévu la montée des violences contre les maires (lisez ma chronique à ce sujet ici)  constatant tous les jours que le travail de maire glisse un peu plus vers celui de « chef de village », de « sheriff » en s’éloignant de notre vocation initiale d’aménageur, de bâtisseur.

 Le nombre d'actes de violence contre les élus a augmenté de 32% en 2022 , selon une étude du ministère de l'Intérieur. 2265 plaintes et signalements ont été recueillis par les forces de l'ordre. Entre les attaques verbales, les insultes sur les réseaux sociaux ou les violences physiques, plus de 1 500 élus ont subi des incivilités l’année dernière.

Devant cette montée prévisible des violences contre les Maires, les intéressés et l’Etat peinent à trouver des solutions rapides et efficaces, aussi les violences, physiques et verbales, commises contre eux sont clairement une des principales causes de la vague de démissions parmi les élus municipaux. Depuis les dernières élections municipales en 2020, 1 293 maires ont démissionné – soit environ 4 % de la population totale - de nombreux conseillers municipaux ont fait le même choix.

La démission du Maire de Saint-Brevin se situe donc clairement dans ce contexte national de relations compliquées entre l’Etat et les Maires, mais on aurait tort de la limiter à ce prisme d’analyse.

Si Saint-Brevin interroge la France entière, c’est aussi parce que le contentieux concerné est celui l’immigration et de l’accueil des étrangers. A Saint-Brevin, il ne s’agit pas, comme souvent, d’un contentieux entre un ou plusieurs citoyens s’estimant lésés par la gestion municipale. Il s’agit d’un contentieux d’une toute autre dimension,  d’un contentieux politique , opposant une municipalité relayant une initiative de l’Etat et de partis politiques hostiles idéologiquement à cette initiative.

Le Maire, Yannick Morel, a d’ailleurs clairement dit que dans les manifestations hostiles à son initiative s’étaient tenues au mois de mars et, qu’à cette occasion, il n’y avait qu’une dizaine d’habitants de sa commune sur les centaines de manifestants opposants au projet municipal.

C’est donc clairement l’autre dimension de ce conflit : la mobilisation de l’extrême droite, y compris avec des militants du Rassemblement National et de Reconquête (et que les directions nationales de ces mouvements de ces deux partis aient tardivement pris leurs distances par rapport à ces manifestations ne changent rien à la présence de leurs militants), contre les élus qui participent à des initiatives d’Etat d’accueil des étrangers sur notre territoire.  

 

Une des leçons que nous devons retenir de Saint-Brevin, est que nous sommes à nouveau dans une période historique où l’étiage politique des forces politiques d’extrême droite (Rassemblement National, Reconquête) libère les forces obscures de la haine de l’étranger, bouc-émissaire tellement commode de tous nos problèmes nationaux.

Sur ces sujets-là, aujourd’hui, en France, la lucidité commande d’anticiper des conflits très durs et potentiellement violents. Et c’est cette lucidité qui a manqué aux services concernés de l’Etat, comme le reconnait implicitement la Première ministre, Elizabeth Borne, en affirmant « Si nous avons été insuffisamment réactifs, nous allons davantage nous mobiliser pour protéger les élus face à la montée des violences », alors que le Maire avait déploré un « manque de soutien de l'Etat » au moment de sa démission.

 Oui, l’Etat a failli en ne prenant pas la mesure de la violence et de la dimension politique de ce conflit . Et, entendre un maire dire qu’il a eu un sentiment d’abandon de l’Etat alors, qu’au final, il n’était qu’en situation d’accompagnement d’une initiative de l’Etat est parfaitement révoltant.

Il faut donc corriger des pratiques défaillantes, vite, fortement, notamment sur tous les conflits concernant l’immigration. Ce sont clairement les plus explosifs.

J’ai la conviction profonde qu’une large majorité de Français tient à la fois à une lutte sévère contre l’immigration clandestine, mais aussi à un accueil dans la dignité et l’hospitalité des étrangers qui ont un titre de séjour légal pour rester sur notre sol.

 L’Etat n’était d’ailleurs par le seul à être défaillant à Saint-Brevin . J’ai en effet la triste impression que le Maire s’est retrouvé bien seul devant les milices d’extrême droite. Où était son Conseil municipal ? les associations, les églises de Saint-Brevin et plus largement les citoyens de cette ville pour défendre leur maire et son projet ? Leur silence, vu de loin, je le reconnais, m’apparait bien pesant.   

Saint-Brevin, alerte rouge sur notre démocratie française… Saint-Brevin appelle une prise de conscience citoyenne des républicains de ce pays. Elle appelle des actes forts de celles et ceux qui sont en responsabilité.

En France, dans une démocratie, dans un Etat de droit, si on a un contentieux avec un élu, la Justice, les élections sont là pour régler ce contentieux.

Mais, agresser physiquement un élu, faire bruler sa maison !!!!! Ça, jamais, ce n’est pas la France !

@+,

  Jean Dionis  

Maire d’agen  

Les réactions

Lamentable ...on ne respecte plus aucune autorité , ni civile , ni religieuse ....plus de contraintes ...voilà à quoi a conduit l'enfant , puis l'élève roi ! Il ne faut surtout pas le contrarier ( et merci Chirac d'avoir supprimé la seule contrainte du début de lâge adulte ...le service militaire ) ! ! 

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