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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Violences contre les maires : Pourquoi elles vont augmenter, Comment Réagir

Publication : 14/08/2019  |  09:24  |  Auteur : Webmaster

Les faits sont maintenant connus de la France entière. Ils  se sont déroulés lundi 5 Août vers 16 heures sur une route départementale traversant Signes, une commune boisée du Var, qui se situe au cœur du parc naturel régional de la Sainte-Baume, entre Marseille et Toulon.

Alors qu'il revenait d'une inauguration de bacs de tri dans un lotissement, le Maire de la commune, Jean-Mathieu Michel, accompagné de trois personnes, a surpris une camionnette en train de décharger illégalement des gravats sur un site naturel de la commune. Il aurait alors demandé aux deux hommes présents, deux employés de travaux publics, de recharger leur véhicule, ce qu'ils ont fait. Mais lorsque le maire leur a demandé d'attendre la police municipale, le conducteur a effectué une manœuvre en marche arrière, a roulé sur l'élu, qui se trouvait derrière le fourgon. Celui-ci en est mort. 

Pourquoi le nier ? Nous avons tous été bouleversés par cette annonce. En tant que citoyens français. Mais la famille des maires de France  - car, cela en est une !  et nombreuse (36 000 maires …..) – l’a été encore plus violemment.

Pourquoi ? Parce qu’au fond  de nous-mêmes, nous savons que cet acte n’est pas et ne sera pas isolé. Nous savons qu’il y en aura d’autres…..

Pourquoi, me direz-vous, cette certitude de violences dures et plus  fréquentes contre les Maires ?

Cette certitude nous vient des rares chiffres qui circulent sur le sujet, comme ceux fournis par le JDD par exemple. En 2018, 361 maires et adjoints ont été victimes « d’atteintes volontaires à l’intégrité physique ». (Chiffres non exhaustifs). Près de 60% de ces élus (216) ont été victimes de menaces ou de chantages, 40% (145) de violences physiques. 178 ont été victimes d’outrage à personnes dépositaires de l’autorité publique. Ces chiffres sont en augmentation de 9 % par rapport à 2017, soit un chiffre supérieur à celui constaté sur l’ensemble des professions.

Mais cette certitude nous vient, aussi, de l’exercice du mandat tel que nous le vivons. Nous vivons la montée des tensions quotidiennes dans la gestion de ce mandat très spécial que celui de Maire. Pourquoi ? à cause de changements de comportement sociétaux, facilitant le passage à l’acte violent (réseaux sociaux, etc…) ? Peut-être, mais la vérité est que nous manquons de données objectives pour affirmer solidement ce qui n’est qu’un ressenti.

Mais ce que nous pouvons affirmer, c’est que, sur le terrain, la fonction de Maire change : avec des marges financières réduites, avec des compétences-clé transférées aux Présidents d’intercommunalité (urbanisme, eau, assainissement, développement économique, etc.…,) la fonction d’aménageur, de bâtisseur du Maire, recule et occupe moins de temps dans nos agendas. En même temps, avec des moyens en matière de sécurité en recul  de la part de l’Etat sur le terrain (police, gendarmerie, …..), le maire s’affirme de plus en plus comme l’arbitre, le médiateur de nos tensions quotidiennes, de proximité. Sa fonction de policier du quotidien, de « chef du village » comme nous aimons à nous décrire, s’impose tous les jours un peu plus ….

Et ne nous mentons pas, ce basculement est porteur de violences verbales et physiques plus fréquentes contre les Maires. Que ce soit dans la gestion des déchets, que ce soit dans la relation avec les minorités qui composent la Cité, que ce soit dans la gestion du domaine public (le stationnement, l’organisation des marchés et des fêtes foraines, ou  pour des raisons de gestion de la santé mentale de nos concitoyens (hospitalisation d’office….), le Maire est en première ligne et de plus en plus souvent….. cette affirmation mériterait bien sûr d’être nuancée selon l’importance de la commune (Paris, métropoles, villes moyennes, périphérie urbaine , petites communes rurales)…. Mais la tendance de fond est bien là : le Maire exerce de plus en plus les responsabilités d’officier de police judiciaire que lui confère la Loi. Cet exercice plus fréquent l’expose. Nous ferons donc face à une montée des agressions contre les maires. Inutile de s’enfoncer la tête sous le sable. L’urgence doit être à s’adapter pour protéger le plus efficacement les maires lorsque l’agression arrive.

Le président de l'Association des Maires de France, François Baroin,  réclame, à juste titre,  "une meilleure protection des maires, une amélioration de leurs conditions d'exercice du mandat et une identification des sujets sensibles". Selon lui, "Les maires sont en danger. Ils ont de plus en plus de responsabilités (...), poursuit François Baroin. Il faut donc protéger ces élus de proximité, leur donner des garanties de protection plus élevées, un pouvoir de police administrative plus important, la possibilité d'installer des caméras dans des zones à risque. »

Oui, il faut anticiper ces agressions. Cela ne sera pas toujours faisable. Mais dans beaucoup de situations, la dangerosité de la médiation, voir de la confrontation, entre le Maire ou les élus locaux et certains de nos administrés est prévisible.  Dans ces situations tendues, le Maire doit pouvoir compter sur la protection physique des policiers municipaux en situation d’intervention (armement adapté, etc.….) ainsi que sur celle de la police nationale, si cela est nécessaire.

Enfin, et surtout, la loi sur la police administrative du Maire doit changer. Le Maire doit pouvoir dresser des procès verbaux des incivilités, avoir des pouvoirs de police administrative élargis (saisie immédiate des véhicules en cas de conflit, etc….) et surtout, le pouvoir de sanctionner efficacement et rapidement. En l’occurrence, pour le respect de l’autorité du Maire, l’ennemi public n° 1 est la lenteur des procédures judiciaires.

Un exemple ? : Un quartier sur les nerfs parce qu’un jeune fait craquer tout le monde avec le vacarme d’un quad, il faut que le Maire puisse saisir le quad et dresser procès-verbal sur place exigeant paiement immédiat d’une amende suffisamment importante (150 € par exemple ?) avant restitution de l’engin saisi.  

Ceci n’est qu’un  exemple. Nous y verrons plus clair lorsque le Sénat, en coordination avec l'Association des maires (AMF) de France, aura tiré les conclusions du questionnaire qu’il va envoyer aux 35.000 maires de France pour leur permettre de témoigner sur les risques encourus dans l'exercice de leur mandat.…

Le reste est affaire de volonté politique. J’ai la conviction que, dans leur immense majorité, les maires feront  face, y compris dans le contexte que j’anticipe d’agressivité accrue à leur égard. J’ai la conviction que les citoyens qui soutiennent leur maire à plus de 83% seront avec nous dans ce combat. Comme le proclamait justement François Baroin, ils savent, au fonds d’eux-mêmes, « qu’haïr les élus, c’est haïr la république ».

 

 

 
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