Le site officiel
Actualités

› Voir toutes les actualités

Toute l'actualité de Jean Dionis

11/04/07 - François Bayrou : "Industrie - Emploi : ça marche ensemble !"

Publication : 11/04/2007  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Après sa visite de l'usine Iamato, François Bayrou a tenu à rencontrer les citoyens de Noyelles-Godault pour évoquer avec eux sa vision et son ambition pour une politique industrielle, son projet de social-économie. Evoquant la participation, le rôle de l'état, ou la reprise d'entreprise, le candidat à la présidence a notamment mis en avant la nécessité de lutter contre les licenciements dissuasifs grâce à un système de "bonus malus".

"Mes chers amis, je suis très ému par votre présence nombreuse. Ce n'est pas un meeting. Le meeting, nous l'aurons au Zénith à Lille, le 17 avril et ce sera un grand rassemblement populaire qui viendra de toute la Région.

Aujourd'hui, j'ai voulu quelque chose de tout différent. J'ai voulu une rencontre à Noyelles Godault, c'est-à-dire au cœur même du bassin minier le plus touché par les restructurations, la succession de crises dans les entreprises, la succession de déceptions pour un grand nombre de femmes et d'hommes qui voient remettre en cause, dans ces entreprises, leur vie de tous les jours, leur vie professionnelle, l'avenir de leurs enfants et la survie de leur famille.

Évidemment, comme vous le savez, Noyelles Godault n'est pas le lieu des meetings politiques habituels. Les candidats à l'élection présidentielle ne s'y pressent pas. Cependant, il m'a semblé que c'était le lieu où il fallait venir rencontrer les ouvriers, les employés, ceux pour qui l'industrie, ce n'est pas seulement un chapitre économique, c'est aussi leur vie, la chance pour eux de leur vie et la chance pour la région de trouver un tissu d'entreprises qui offrent de l'emploi.


François Bayrou à Noyelles-Godault : "Le Nord : la vitalité !"
François Bayrou 2007


Je n'ignore rien du contexte électoral habituel de cette région. Je sais très bien quels sont les résultats que, d'ordinaire, on y rencontre et, cependant, j'ai trouvé toute la journée formidable. Je voudrais vous raconter rapidement la journée qui a été la nôtre et pourquoi nous avions choisi chacune des étapes de cette journée, avec Jean-Marie Vanlerenberghe, avec mes amis qui sont les élus du Nord et du Pas-de-Calais. Je vais les saluer pour vous, Valérie Létard, sénatrice du Nord, Francis Vercamer, député du Nord, Gérard Vignoble, député du Nord-Est et maire de Wasquehal. Je salue Jean-Jacques Jégou, qui a fait le déplacement, sénateur du Val-de-Marne, Marcel Deneux, sénateur de la Somme.

Je remercie Jean Urbaniak de son accueil comme maire de Noyelles Godault. Il est votre maire, j'espère qu'il redeviendra votre député, parce qu'il le mérite et Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur du Pas-de-Calais, maire d'Arras, autrement dit, la plus haute autorité naturelle du département du Pas-de-Calais.

Jean-Marie Vanlerenberghe m'a d'abord amené chez Lamato. Lamato, c'est Rhodia, c'est l'entreprise -il ne l'a pas dit par modestie- dans laquelle il a commencé sa vie professionnelle. Il a été cinq ans un très jeune ingénieur méthode chez Rhodia, autrement dit, dans le nylon, cette grande innovation d'après la guerre qui est encore, ô combien, d'actualité aujourd'hui. L'entreprise Lamato, c'était une entreprise condamnée, l'entreprise Rhodia à Arras, c'était une entreprise condamnée. Vous savez à quel point on se faisait du souci autour de cette entreprise. Il y avait cent cinquante emplois. Puis, l'entreprise a été fermée. On est arrivé au bout du processus qui était celui de la fin de vie de cette entreprise et, à ce moment-là, une poignée de responsables autour de M. Tosca qui était un chef de petite entreprise après avoir occupé des responsabilités chez Rhodia, ont décidé de la reprendre. Ils sont partis avec rien.

Il y a dix-huit mois, ils avaient perdu leurs clients. L'entreprise était fermée depuis plusieurs mois. Toutes les difficultés étaient évidemment des difficultés qui traumatisaient leurs clients éventuels et, peu à peu, en dix-huit mois, ils ont remonté l'entreprise, remonté les carnets de commandes, de sorte qu'ils ont réembauché près de 70 % des employés de l'entreprise, et cette progression n'est pas achevée.

Tout d'un coup, ils sont devenus ou redevenus une entreprise de pointe dans un secteur qui en compte peu. Bref, le sauvetage a eu lieu et ce sauvetage est naturellement un immense motif d'espoir.

J'ai voulu commencer par une entreprise que l'on avait redressée et je veux vous dire ce que le responsable de l'entreprise, M. Tosca, nous a dit. Il m'a dit : "Monsieur Bayrou, si les élus de tous les bords ne s'étaient pas mis pour travailler ensemble, n'avaient pas décidé d'unir leurs forces, de vaincre tous les obstacles devant nous, il n'y avait aucune chance que la reprise et le redressement de l'entreprise puissent se faire."

C'est l'union qui a fait la force et c'est l'union qui a sauvé l'entreprise Lamato. L'un des cadres a dit : "Monsieur Bayrou, c'est parce que vous proposez cela pour la France que je suis décidé à vous aider, parce que j'ai vu, dans la réalité, ce qu'était la force de tous les politiques qui se mettent ensemble, quel que soit leur bord. Ce que nous avons fait pour Lamato, vous avez raison de le proposer pour la France. Je veux que cela réussisse pour notre pays."

J'étais très heureux de ce témoignage de redressement et de renaissance.

Après, on est allé à Metaleurop. Il y a peut-être des anciens de Metaleurop dans la salle. Je les salue avec ce qu'ils portent d'inquiétudes. Ils ont été victimes d'un abandon en rase campagne, d'une trahison de la part de responsables d'entreprise, de financiers qui les ont laissés choir, tomber, abandonner, non seulement eux-mêmes dans la situation de chômage et de précarité qui frappe un grand nombre d'entre eux, mais y compris des collectivités locales avec, sur les bras, un site industriel pollué de toutes les manières. Je crois que l'on a trouvé plus de neuf cents produits et métaux dangereux dans le sol de Metaleurop sur les cinquante hectares qui représentaient le site de Metaleurop.

Ce que j'ai vu à Metaleurop, et vous le savez bien puisque vous vivez dans la région, ce n'est pas que tout soit rose, il y a un grand nombre de familles qui sont abandonnées, qui se sentent abandonnées. Il y a un grand nombre de familles qui sont dans la précarité, mais là-bas, il y a des petites pousses qui montrent qu'un espoir est envisageable.

D'abord, le site a été dépollué. C'est probablement un des plus grands sites dépollués en Europe. On a curé tout ce qui était pollution, toute la terre. On l'a remplacée par un sol sain. On a fait en sorte que les produits dangereux ne le soient plus. On a rendu à ce site une apparence, un rayonnement qui est un espoir.

J'ai été frappé de ce que, déjà, sur le site de Metaleurop, deux cents emplois ont été créés dans le tertiaire, dans les entreprises et qu'un autre projet industriel, consistant à retraiter un certain nombre de déchets -des déchets électroniques ou les vieilles voitures pour les recycler, pour faire de ces objets abandonnés des richesses- prévoit de créer deux cents emplois de plus d'ici à dix-huit mois.

Vous voyez, dans ces deux cents plus deux cents, soit quatre cents emplois, dans un site réhabilité, il y a quelque chose qui est de l'espoir et, sur les deux cents emplois qui vont être créés, les anciens salariés de Metaleurop vont être prioritaires.

Je suis heureux de voir qu'il y a quelque chose à croire, une petite lumière au bout du tunnel qui montre que l'on n'est pas complètement abandonné, au contraire, que de nouvelles forces d'intelligence et de création sont en train de se mettre en place.

Ceux-là aussi, je les salue. Je salue l'espoir comme j'ai salué les difficultés des gens. Cet espoir mérite qu'on l'applaudisse.

Puis, troisième halte à l'usine Samsonite dont vous savez l'incroyable difficulté : c'est un outil industriel absolument remarquable, absolument prêt à redémarrer, si l'on appuie sur le bouton, un outil industriel avec des emplois nombreux et, tout d'un coup, non seulement se retrouvant en difficulté, cela arrive à beaucoup d'entreprises, mais se retrouvant aussi abandonné de manière, je crois, frauduleuse, vendu, vraiment ou faussement, à une entreprise qui s'est présentée comme une entreprise de repreneur, à laquelle les salariés ont cru, ils ont cru qu'ils allaient vraiment trouver une solution. C'était destiné à fabriquer des panneaux solaires. On n'a jamais fabriqué un seul panneau solaire dans l'usine et l'entreprise s'est retrouvée fermée et même, le plan social, qui devait être mis en place, n'a pas été honoré.

Il y a là une attitude de voyou et cette attitude de voyou mérite d'être sanctionnée et punie. Ce n'est pas normal et ce n'est pas juste. Voyez-vous, Samsonite, c'est une des plus grandes entreprises de bagages au monde. C'est une entreprise qui a pignon sur rue. C'est une entreprise dont la marque est évidemment extrêmement forte dans les bagages dans le monde entier. Il n'est pas normal qu'une entreprise comme cela puisse échapper à ses responsabilités avec sa puissance, avec le fait qu'elle gagne de l'argent, simplement en trouvant des pseudo-repreneurs, des gens qui font semblant de reprendre pour n'avoir aucune obligation à l'égard des salariés et pouvoir se défiler à la suite sans évidemment que personne ne puisse répondre, ne serait-ce que des obligations légales. Lorsque l'on ferme une entreprise, on a des obligations légales à l'égard des salariés. Ceci n'est plus acceptable.

Je le dis aussi pour Suplistat. Comme vous le savez, c'est une entreprise qui a fait l'objet exactement du même abandon. On a vendu les machines aux enchères. Cela était un crève-coeur pour les salariés. Ils nous l'ont raconté tout l'après-midi. Il y a là quelque chose qui n'est pas acceptable et je considère que, parmi les obligations qui sont les nôtres, il faut faire de l'Europe un espace juridique capable de faire respecter ces lois, même à l'égard des gens qui cherchent des échappatoires pour ne pas faire face aux obligations qui sont les leurs.

Si nous sommes, l'Europe, un grand espace économique, un grand espace commercial, alors, il faut que nous soyons capables de faire respecter les obligations que nous avons fixées surtout à l'égard des très grandes entreprises qui font du commerce sur notre sol.

Il n'y a aucune raison d'accepter que ceux qui viennent nous apporter leurs produits pour que l'on puisse les vendre ne respectent pas les règles, notamment les règles sociales et juridiques, que nous avons fixées lorsqu'une entreprise est en difficulté.

Il y a là, de la part de notre pays, la France, et surtout de l'ensemble européen, l'impératif de construire un espace de droit dans lequel nous ferons respecter nos lois.

Je vous promets que, élu Président de la République, je demanderai que l'Europe soit capable de faire respecter les lois qu'elle s'est fixée, que ses ressortissants doivent respecter et elles doivent être respectées par les autres.

Voilà pourquoi j'ai voulu faire ces trois haltes et je suis heureux que nous nous rencontrions dans cette ambiance familiale, dans le gymnase de Noyelles Godault, pour réfléchir ensemble à ce que nous pouvons dire de l'avenir industriel de notre pays, des emplois de notre pays, de la situation des ouvriers et des salariés chez nous, parce que, pour moi, la certitude est que, depuis vingt-cinq ans que gauche et droite alternent au pouvoir, la France, en tout cas, est à la queue de l'Europe pour son niveau d'emplois.

Ce que je vais vous dire aujourd'hui, je le dis avec la certitude que je ne vous raconterai pas d'histoires. Je ne suis pas venu avec une baguette magique. Je n'en ai pas. Je ne suis pas venu pour raconter des histoires à ceux qui sont dans la difficulté la plus grande et dans l'inquiétude la plus grande. Ce que je veux, c'est un pays qui regarde en face les problèmes qui sont les siens et qui puisse apporter une stratégie de réponse.

La France est à la queue de l'Europe pour son niveau d'emplois, mais tout le monde n'est pas égal face au chômage.

Le chômage frappe, d'abord, les plus faibles, d'abord, les ouvriers, d'abord, les employés, d'abord, les classes moyennes. C'est vous qu'il frappe et c'est pourquoi il faut en parler ensemble.

Il y a d'autres pays européens autour de nous, le Royaume-Uni, l'Irlande, les Pays-Bas, les pays scandinaves, où le chômage a été combattu efficacement et ce sont d'ailleurs le plus souvent des grands gouvernements du centre, du centre gauche et du centre droit, qui ont construit ces politiques, qui ont combattu efficacement le chômage.

Les trente-cinq heures n'ont pas réglé la question du chômage. Les seuls emplois qui ont été créés ou maintenus l'ont été avec des subventions massives, des exonérations qui se montent à près de vingt milliards d'euros. On dit que cela a permis de sauver ou de maintenir ou de créer quelque chose comme quatre cents mille emplois. Si vous comptez bien, cela fait cinquante mille euros par emploi. Donc, cela veut dire que l'on a dépensé beaucoup d'aides publiques et que, en réalité, cela n'a pas réellement créé d'emplois.

J'ai entendu naturellement l'idée qui a été proposée par ma concurrente socialiste sur le thème de ce contrat première chance qui est une espèce de CPE de gauche inventé de manière curieuse. Je ne sais d'ailleurs pas si elle l'a maintenue ou retirée, parce que j'ai vu beaucoup d'allers-retours sur ce sujet, mais, ce que je veux dire simplement, c'est que, ce contrat-là, tout le monde a compris qu'il coûte extrêmement cher à l'État, des dizaines de milliers d'euros pour payer une année pleine de salaire et de charges au bénéfice d'entreprises qui n'en demandaient pas tant et que cette immense dépense publique, qui allait être faite, est d'abord évidemment, en principe, à l'encontre de ce que l'idéologie ou la vision de la gauche voulait obtenir des entreprises, parce que, voir l'État subventionner directement les entreprises, ce n'est pas exactement ce que l'on pouvait imaginer comme une stratégie de gauche.

Mais, avec certitude, étant donné le nombre de jeunes qui pourraient être concernés, nous n'avons pas le quart du dixième des moyens qui nous permettront de répondre à un tel engagement.

Nous, au contraire, nous proposons la création, payés par l'entreprise, de deux emplois sans charges pendant cinq ans pour toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d'activité, entreprise commerciale, entreprise artisanale, entreprise industrielle, entreprise agricole.

Toutes les entreprises auront le droit de créer deux emplois sans avoir à payer de charges pendant cinq ans, sauf 10 % pour la retraite, mais l'entreprise paiera le salaire. Ce sera un vrai emploi. Ce sera un emploi en CDI, pas un emploi que l'on pourra bazarder, excusez-moi de l'expression, au bout de l'année et qui sera un élément de précarité de plus au terme duquel les jeunes se trouveront sans aucune garantie d'engagement.

Il y a là un déséquilibre qui ne me paraît pas juste dans la situation actuelle du pays. Nous proposons, nous, de vrais emplois, payés par l'entreprise, mais dans le cadre desquels la solidarité nationale s'exerce de manière que l'entreprise n'ait pas à payer de charges pendant cinq ans.

D'un côté, il y a une stratégie de véritables emplois, d'emplois en CDI où l'entreprise assume sa part de la charge. De l'autre, il y a une stratégie d'irresponsabilité et de précarité.

Je préfère notre proposition à celle de Ségolène Royal. Elle est plus juste pour les jeunes, plus juste pour l'État et plus juste pour les entreprises et nous verrons alorsse rapprocher ceux qui s'opposent depuis longtemps.

Chaque fois que l'on parle de ces sujets de l'emploi, il y a ceux qui disent : les charges ne sont pas un problème. La question des charges est une question... Il y avait tout à l'heure un responsable syndical qui le disait de cette manière : la question des charges est une question que les entreprises remettent sur le tapis, mais qui, en réalité, n'empêche pas la création d'activités. Et, il y a ceux qui, comme nous, disent : en concentrant les charges de la santé, de la maladie, de la vieillesse sur le travail, en fait, vous faites fuir les emplois.

Moi, je suis de ceux qui pensent qu'il y a un problème avec le poids trop lourd des charges sociales sur le travail. Je suis de ceux qui pensent qu'il y a énormément de créations d'emplois qui sont dissuadées simplement parce que celui qui devrait les créer, et spécialement les toutes petites entreprises, se dit : oui, mais cela ne me rapportera pas assez pour que je puisse faire face à la création d'un emploi. Il y a là quelque chose de trop inquiétant pour une majorité de créateurs d'emplois dans notre pays, souvent de toutes petites entreprises.

Savez-vous combien il y a d'entreprises qui n'ont aucun salarié en France ? Il y en a un million cinq cents mille. Ce sont des gens qui ont une entreprise artisanale, commerciale, mais qui n'ont pas de salariés et, les entreprises qui ont moins de dix salariés, même moins de neuf salariés, il y en a un million de plus, soit deux million cinq cents mille entreprises sur les deux millions sept-cent cinquante mille que compte notre pays.

Eh bien, je suis certain que cette question des charges, cette question du coût de l'emploi travaille un très grand nombre de ceux qui pourraient faire naître des emplois nouveaux. En tout cas, nous allons avoir, là, la vérification grandeur nature de ce que représente, dans un pays comme le nôtre, ce que j'appelle le continent des emplois gelés, c'est-à-dire les centaines de milliers, je crois, millions, car je crois que l'on atteindra le million d'emplois- qui ne demanderaient qu'à être créés, mais qui ne peuvent pas l'être en raison du caractère trop lourd des charges qui pèsent sur ces emplois.

Nous allons avoir la démonstration grandeur réelle. Nous allons voir qui a raison et, au bout de deux ans, nous ferons l'évaluation de ce système et nous verrons s'il a, en effet, permis de dégeler des centaines de milliers d'emplois, pour eux, là, pour les jeunes, souvent diplômés, qui ne trouvent pas un contrat de travail, parce qu'ils n'ont pas l'expérience nécessaire et que, sans expérience, ils coûtent trop cher ou pour une autre catégorie de salariés dont le sort est particulièrement injuste, qui sont les plus de cinquante ans que l'on écarte du travail peu à peu, sans le dire, en prétendant qu'ils sont trop vieux et, naturellement, la question, ce n'est pas la question de l'âge, c'est la question de leur niveau de salaire. Au stade où ils sont arrivés, au bout de leur carrière professionnelle, à la vérité, ils coûtent trop cher pour l'entreprise. On préfère les mettre sur la touche et les remplacer par de plus jeunes.

Ceci est un drame national, parce que si vous reliez cette question des personnes de plus de cinquante ans, qui sont sur le bord de la route, qui ne trouvent plus à travailler avec des charges de famille, qui sont souvent des charges de famille beaucoup plus lourdes que celles que l'on avait autrefois, avec des familles recomposées, avec quelquefois de jeunes enfants, avec cette angoisse de ne pas arriver à faire face à leurs responsabilités, quand vous reliez cette question à celle des retraites, dont tout le monde voit bien qu'elle va exiger une réforme qui fera que librement, j'espère, ou autrement obligatoirement, on va devoir prolonger le nombre d'années de travail…. Vous savez que tous les pays autour de nous ont reporté l'entrée en retraite à des âges beaucoup plus avancés, mais à quoi cela sert-il d'avoir une réforme des retraites si les personnes de plus de cinquante ans sont de plus en plus nombreuses au chômage ?

Il y a un chiffre qui est, pour moi, un chiffre impressionnant : le jour où ils prennent leur retraite, il y a plus d'un Français sur deux qui a perdu son emploi depuis déjà longtemps. En réalité, aujourd'hui, la majorité des Français qui prennent leur retraite la prennent à partir d'une situation de chômage et pas à partir d'une situation de travail.

Vous vous rendez bien compte que cette question de l'emploi des plus âgés, des plus de cinquante ans est une question terrible pour l'équilibre de la France. Voilà un pays qui a le taux de chômage des jeunes le plus important d'Europe et le taux de chômage des seniors, comme l'on dit. Je n'aime pas cette expression, parce que, seniors, cela veut dire plus vieux et je trouve que, au-dessus de cinquante ans, on n'est pas encore tout à fait vieux. En tout cas, je connais des gens qui défendront cette idée ! Les jeunes n'applaudissent pas trop ! Pour eux, cela paraît du grand âge. On a besoin d'apporter des solutions nouvelles aux salariés de plus de cinquante ans.

Voilà les deux catégories : les jeunes souvent diplômés qui ne trouvent pas d'emploi, les jeunes sans diplômes et les personnes âgées de plus de cinquante ans, qui bénéficieront de la vague de créations d'emplois, si elle intervient. En tout cas, nous aurons la vérification de tout cela.

J'en viens au problème que l'on a traité tout l'après-midi. A la vérité, un très grand nombre des personnes que j'ai rencontrées, au fond, se disent : qu'est-ce que vous allez faire contre les délocalisations ? Est-ce que vous allez interdire, une bonne foi pour toutes, les délocalisations ?

Je sais que bien des candidats ont laissé entendre, sans le dire explicitement, qu'au fond telle serait leur politique et peut-être un certain nombre d'entre vous sont-ils venus pour m'entendre dire cela.

Eh bien, je veux vous dire que celui qui vous dira : je vais interdire les délocalisations, celui-là ne vous dira pas la vérité. Celui-là où celle-là ne vous dira pas la vérité.

Les États-Unis n'ont pas réussi à empêcher les délocalisations. Le Royaume-Uni n'a pas réussi non plus à les empêcher ni les Pays-Bas, ni la Suède, ni le Danemark. Aucun de ces pays n'a réussi ni même voulu empêcher, c'est vrai, les délocalisations. En revanche, chacun de ces pays a réussi à faire descendre son taux de chômage si bas que le chômage a pour ainsi dire disparu.

La question qui doit être la nôtre est celle-là : comment faire que, lorsqu'il y a des délocalisations, les personnes ne se retrouvent pas sur le carreau, abandonnées comme elles le sont aujourd'hui ?

Comment faire pour que les délocalisations soient des délocalisations sérieuses et pas des délocalisations financières ?

Comment faire pour que les salariés ne soient pas abandonnés ?

Quelle stratégie mettre en place pour cela ?

C'est cette stratégie que je voudrais défendre devant vous aujourd'hui.

La première stratégie que je voudrais défendre, et nous l'avons vue dans plusieurs des entreprises que nous avons citées, c'est qu'il faut rendre, non seulement possible, mais obligatoire, la reprise quand il y a un repreneur.

J'ai vécu avec vous le drame de Stora & So, immense papeterie, qui arrête trois sur quatre de ses lignes de fabrication. Les salariés, qui vont être mis au chômage, inventent un projet de reprise et trouvent des financiers qui apprécient ce projet de reprise consistant à fabriquer un papier de très grande résistance à partir de la fibre de chanvre, et non plus à partir des fibres de bois ou de papier récupéré dont on se sert à l'heure actuelle.

Pourquoi la fibre de chanvre ? Pour deux raisons : premièrement, elle peut être cultivée localement. C'est une vieille tradition agricole, et notamment agricole du Nord, que de faire naître le chanvre et, deuxièmement, cette fibre, par sa structure très longue, a une capacité de résistance énorme. Cela peut, par exemple, servir à faire des sacs papiers de supermarché qui résisteront à des poids auxquels habituellement ils ne résistent pas.

Donc, ils trouvent une idée, un secteur, un marché. Ils sont courageux. Ils trouvent des financiers. A ce moment-là, commence le processus de bâton dans les roues. On leur avait promis qu'ils pourraient reprendre les machines de cette entreprise avec une somme symbolique. On avait même, au début, parlé de l'euro symbolique. Les machines existent. Elles sont sur place. Elles sont sur le site. Elles vont être arrêtées, démantelées. On propose de les céder à un repreneur, c'est-à-dire à eux, à une coopérative, avec des financiers, pour reprendre cette fabrication qui aurait fait, en plus, des emplois agricoles.

Puis, on leur dit : "Non, un euro, cela ne suffit pas. "Donnez-nous un million d'euros." Ils mettent un million d'euros. Cela ne suffit pas : "Donnez-nous cinq millions d'euros ". Ils mettent cinq millions d'euros. Cela ne suffit pas : "Donnez-nous neuf millions d'euros." Ils mettent neuf millions d'euros et, au bout du compte, on s'aperçoit que, en réalité, ce qui est refusé, ce n'est pas la somme pour acquérir les machines, c'est le principe même de la reprise.

De la même manière, dans plusieurs entreprises que nous avons visitées, peut-être, après tout, chez Samsonite de la même manière, en réalité il y a des entreprises qui ferment des usines, mais dont la stratégie est d'empêcher ces usines d'être reprises.

Je trouve que ce n'est pas normal. Je trouve que nous devrions avoir une législation, en France, qui dise quelque chose de simple : si vous voulez fermer l'entreprise, au moins, vous ne pouvez pas empêcher des repreneurs de faire repartir cette entreprise en acquérant les machines et l'outil de travail.

Deuxièmement, il faut que cette recherche de repreneurs soit un choix, une priorité de la part des pouvoirs publics. J'ai promis, tout à l'heure, aux ouvrières et aux ouvriers de Samsonite que, si j'étais élu Président de la République, je nommerai une autorité en charge de rechercher partout les repreneurs qui pourraient offrir un nouvel avenir à cette entreprise.

Je le nommerai et je lui demanderai de démultiplier les efforts pour proposer la reprise de cette entreprise qui est un très bel outil de travail et cela marche. A Saint-Etienne, j'ai visité une entreprise qui est aujourd'hui la première entreprise de forge industrielle en France. Cette entreprise compte aujourd'hui trois cents ouvriers de très haute qualification. Elle était, il y a dix ans, en liquidation. Elle avait été abandonnée par ceux qui l'animaient. Une équipe courageuse est arrivée, avec un commercial, un industriel, ils ont, cette équipe courageuse, en 10 ans… Il y avait vingt-cinq salariés quand ils l'ont reprise. Ils ont multiplié l'effectif par douze et ils en ont fait la première entreprise, alors que tout le monde aurait parié que, les forges, c'était pour l'Inde, pour la Chine, pour les pays en voie de développement, pour la Roumanie et qu'évidemment ce n'était pas pour un pays comme le nôtre.

Eh bien, parce qu'ils font des produits de qualité, parce qu'ils sont extrêmement réactifs et qu'ils peuvent garantir aux entreprises des petites séries dans un temps très court, tout d'un coup, ils ont réussi à reprendre pied et à construire un des plus beaux outils industriels, le plus bel outil industriel qui existe dans le domaine des forges en France.

Il y a des espoirs dans les entreprises abandonnées. Il y a une stratégie de reprise. Je considère que, c'est un chapitre intéressant d'une politique industrielle de voir l' État favoriser la reprise et non pas assister, impuissant, à l'abandon de ces usines.

Je veux une politique de reprise, pour une vraie politique industrielle, pour permettre aux usines abandonnées de repartir lorsque des repreneurs existent, afin de les aider, de les soutenir, de les promouvoir et de les rechercher.

Il y a beaucoup à réfléchir à la situation des personnes qui perdent leur emploi. Je vais m'adresser ici aux grandes centrales syndicales et aux représentants des entreprises, parce que j'ai entendu, depuis longtemps, de leur part, un message qui m'intéresse. Ce message, maintenant, mérite d'être acté, écrit et que l'on commence à s'en occuper de manière sérieuse.

Toutes les centrales syndicales que j'ai rencontrées disent, et aussi le patronat évidemment : c'est vrai que nous savons bien qu'un des freins à l'embauche, c'est qu'un certain nombre d'entreprises ont la crainte, en cas de baisse du cahier des charges, de baisse du travail, de ne pas pouvoir rompre ou remettre en cause le contrat de travail avec le salarié et ils disent, dans le même temps : nous savons bien que cette flexibilité-là peut s'accompagner d'une sécurité.

Il y a un grand nombre de pays, les pays scandinaves, par exemple, qui ont réussi à faire en sorte que l'on puisse à la fois remettre en cause le contrat de travail et, cependant, offrir une sécurité nouvelle aux salariés, par exemple, en lui permettant de garder son salaire pendant plus longtemps ou en lui permettant de suivre une formation qu'il aurait choisie, pas une formation parking, pas une formation bidon, mais une formation qu'il aurait choisie ou d'être embauché sur le même bassin de travail par des entreprises du même genre qui, au fond, auraient mutualisé leurs capacités d'emploi et qui auraient dit : nous, dans ce secteur d'activité, si quelqu'un a une difficulté dans l'usine à côté, nous sommes prêts à le reprendre pour toujours ou pour une certaine durée, quitte à le rendre à l'entreprise si cela va mieux pour elle.

Toute cette réflexion porte des noms différents : pour les uns, la CGT, cela s'appelle la Sécurité Sociale professionnelle. Pour d'autres, cela s'appelle la sécurisation des parcours professionnels. D'autres encore emploient le mot de flexi-sécurité, mais tout cela veut dire la même chose.

Eh bien, maintenant, il va falloir qu'on les mette, ces organisations, au pied du mur, parce que c'est au pied du mur que l'on voit le maçon, comme l'on dit. C'est là, maintenant qu'ils disent qu'au fond ils ont tous adopté les mêmes principes, qu'il va falloir que l'on donne des choses concrètes aux salariés. Il va falloir que l'on réfléchisse à la manière dont, en effet, on peut garantir, dans notre pays, à quelqu'un qui a un accident de parcours professionnel, à une entreprise qui a un accident de parcours professionnel, à un salarié s'il se trouve devant un accident de parcours professionnel, qu'il va pouvoir affronter sa situation nouvelle sans tout perdre de ce qu'il avait avant.

Ce qui est frappant pour les salariés de Samsonite, c'est le risque de tout perdre. S'ils avaient des solutions qui leur permettent d'avoir un bol d'oxygène et de passer un cap difficile, de se retrouver après dans des entreprises qui, au fond, font le même métier… Les salariés de Samsonite m'ont dit : Nous, ici, on est entièrement adaptable. Le travail que l'on a fait dans l'entreprise, cela a toujours été de faire face à tous les postes de travail. On sait tout faire et on est capable de tout faire.

Cette réflexion sur : comment passer un cap difficile ? C'est une réflexion au pied de laquelle il faut mettre l'ensemble des organisations syndicales et patronales. L'idée est de garantir aux travailleurs une continuité de leurs droits, même s'ils sont affrontés à des situations de rupture difficile comme celle que nous rencontrons aujourd'hui.

Cela veut dire que les droits des travailleurs doivent être attachés au travailleur lui-même et pas au contrat de travail ou plus seulement au contrat de travail.

Il y a là un extraordinaire champ pour un retour du dialogue social qui a été très largement utilisé dans les mots, mais pas beaucoup dans la réalité. La négociation vraie, réelle, efficace entre ceux qui représentent les entreprises et ceux qui représentent les salariés, c'est à cette négociation-là que les pouvoirs publics doivent maintenant donner rendez-vous aux grandes organisations.

Ce sera, à n'en pas douter, une tâche essentielle au lendemain de l'élection présidentielle. Par exemple, comme président de la république, je mettrai à profit le mois qui sépare l'investiture du nouveau président de l'élection de la nouvelle assemblée -donc, il n'y a pas d'Assemblée nationale ni de réunions du Sénat. On est en situation de se trouver avec un gouvernement de transition- pour ouvrir ce dialogue social avec les organisations syndicales et patronales.

Je considère que le président de la République ne déchoit pas. Il ne perd pas son statut lorsqu'il invite l'ensemble des organisations représentatives du pays à s'asseoir autour de la table et à dire : maintenant, comment fait-on, pour apporter du concret et du réel aux travailleurs et aux salariés et faire en sorte qu'ils ne soient pas seulement avec des mots, mais avec des réalités ? Cela prendra le temps que cela prendra, mais c'est nécessaire et indispensable.

Puis, il y a une idée que je voudrais avancer. C'est une idée autour des cotisations sociales qui tiennent à l'assurance-chômage. Je trouve qu'il n'est pas juste de faire payer le même prix d'assurance-chômage aux entreprises qui font tout pour défendre l'emploi et aux entreprises qui, au contraire, considèrent que l'emploi est une variable d'ajustement et que, après tout, il est aussi simple de se débarrasser des salariés plutôt que de rechercher toutes les solutions pour les garder.

Voilà pourquoi je propose que l'on change de formule autour de l'assurance-chômage et je propose, en particulier, que l'on mette en place, comme pour les accidents, comme pour l'assurance automobile, un système de bonus/malus qui avantagera les entreprises qui ne licencient pas et qui font tout pour défendre les emplois et qui donnera une pénalité qui rendra le chômage moins agréable financièrement aux entreprises qui considéreront qu'il est plus facile de se débarrasser des salariés.

Je suis pour que l'on ait un système dans lequel il devienne intéressant financièrement de garder les salariés pour l'entreprise et il soit dissuasif financièrement de se débarrasser des salariés. Peut-être que, ainsi, en mettant un avantage à ceux qui gardent les salariés et un inconvénient à ceux qui s'en débarrassent, on va un peu changer l'état d'esprit autour de la création et de la destruction d'emplois dans notre pays.

Je suis pour que le licenciement soit dissuasif financièrement pour l'entreprise qui le pratique. Après tout, cela se fait pour les accidents du travail. Il y a un système de bonus/malus. Cela se fait pour l'assurance auto. Je pense que cela doit se faire en matière d'assurance-chômage.

Agir contre le chômage, c'est aussi travailler sur les jeunes qui m'entourent, parce qu'évidemment tous les jeunes sont exposés au chômage. Évidemment, la situation des jeunes exposés au chômage quand ils sont diplômés, est une situation particulièrement douloureuse, mais la vérité oblige quand même à dire que les jeunes sans qualification sont trois ou quatre fois plus souvent chômeurs que les jeunes qui ont et obtiennent un diplôme.

C'est vrai qu'il est choquant que, ayant un diplôme, on doive attendre longtemps, plusieurs mois, quelquefois années, à la porte du travail, mais il demeure que, au bout de trois ans, la jeunesse diplômée a généralement trouvé un emploi. La jeunesse non diplômée est malheureusement en galère et sur la route de l'exclusion.

Il y a là quelque chose qui est profondément choquant. Si l'on veut mener une vraie politique de lutte contre le chômage, une vraie politique de défense de l'emploi, alors, nous devons nous fixer un objectif : il faut diviser par trois au moins le nombre d'élèves qui sortent du système scolaire sans aucune qualification. Ces élèves sont au nombre de cent cinquante mille à deux cents mille.

Il faut que notre système scolaire soit capable de répondre à ces questions-là et, vous savez, j'ai fixé plusieurs objectifs : le premier est que tout le monde sache lire et écrire avant d'entrer en sixième, parce qu'on ne peut pas continuer à avoir entre 15 et 20 % des enfants qui entrent en sixième sans savoir lire, parce que, s'ils entrent en sixième sans savoir lire, ils sont malheureusement fichus pour la suite. C'est de la non-assistance à enfant en danger que de s'en débarrasser ainsi vers le collège et l'enseignement secondaire, parce qu'on sait très bien qu'ils ne rattraperont pas leur retard.

Je trouve qu'il faut imposer au système éducatif français cette loi : aucun élève ne doit entrer en sixième sans avoir appris à lire et à écrire avant d'entrer en sixième.

Donc, ces cent cinquante mille ou deux cents mille jeunes, il va falloir s'en occuper en amont. Il va falloir aller les chercher un par un, analyser les difficultés qui sont les leurs, leur proposer des pédagogies différentes, car, cela, c'est le seul moyen, à terme, de réduire réellement le chômage pour ces catégories scolaires-là.

C'est un travail de la Nation. C'est un travail de l'Éducation nationale.

Vous m'avez souvent entendu. Je serai le défenseur de l'Éducation nationale. Je ne laisserai pas attaquer et cibler l'Éducation nationale, comme on le fait perpétuellement. Je considère que c'est une erreur et même une faute. Je garantirai les moyens, mais, en échange, je veux que nous ayons des objectifs plus ambitieux que ceux que nous avons eus depuis des années sur ce sujet.

L'Éducation nationale, c'est l'arme, le bras armée de la Nation, pour que nous atteignons le seul objectif que nous devrions nous fixer dans ce monde de la mondialisation aussi concurrentiel : avoir les jeunes les plus formés de la planète. Nous en avons les moyens. Nous en avons l'ambition et nous devons apporter le soutien à ces jeunes-là.

Je voudrais dire un dernier mot sur la manière dont fonctionne l'économie de marché et le capitalisme financier chez nous. Ce mot, il faut le dire très simplement. On ne peut pas demander perpétuellement aux petits, aux ouvriers, aux salariés, de respecter les règles, de respecter le droit et faire que les grands responsables d'entreprise se donnent, à eux-mêmes, des facilités et des avantages qui sont tellement énormes et tellement choquants qu'en réalité cela détruit l'image de l'entreprise auprès des citoyens.

Je ne sais pas quelle stratégie il faut choisir, mais, pour moi, je souhaite que nous ayons, en France, une réflexion sur la manière dont on donne des stock-options, comme l'on dit, la manière dont on donne les parachutes dorés, la manière dont on garantit des sorties faramineuses, même en cas d'échec, à la tête de l'entreprise.

Je suis pour que, au contraire, on invente un autre modèle européen et français qui sera un modèle d'exemplarité de l'entreprise par rapport aux salariés et au reste de la société. En particulier, je suis pour que, au lieu de pousser dans le sens des stock-options, on pousse dans un autre sens qui est cette idée française que je trouve extrêmement forte de l'intéressement des salariés aux bénéfices de l'entreprise.

Je suis pour que l'on trouve et mette en place tous les moyens pour que les salariés puissent partager les fruits de l'entreprise à la fin de l'année, pour que les bénéfices de l'entreprise soient partagés avec les salariés dans un treizième mois pour tout le monde ou un quatorzième mois pour ceux qui en ont déjà treize, avec l'idée qu'il faut faire du pouvoir d'achat et il n'y a qu'un moyen de le faire. Comme je le disais à l'instant, en matière de licenciement, il faut que le coût du licenciement soit dissuasif et que le fait de défendre l'emploi rapporte à l'entreprise, de la même manière, il faut mettre en place une incitation financière et fiscale suffisante, afin que l'entreprise ait intérêt à partager son bénéfice avec les salariés plutôt que de se retrouver dans la situation où elle est obligée de donner ce bénéfice sous forme d'impôts qui part vers l'État. Je suis pour que l'on pousse l'entreprise à partager son bénéfice par une démarche d'intéressement avec les salariés.

Voilà les idées que je voulais défendre devant vous. Ces idées, naturellement, elles n'existent pas si nous ne réussissons pas à mettre en place le dernier chapitre que je voulais défendre devant vous, chapitre très important qui est celui-ci : nous avons besoin d'avoir une politique qui défende les industries, nous avons besoin d'avoir une politique qui défende les usines, nous avons besoin d'une politique qui ne se résigne pas à voir la France devenir seulement un pays de services. C'est très bien les services, c'est très bien pour le tourisme, c'est très important, il y a beaucoup de gisements d'emplois, il y a beaucoup de valeur ajoutée ; c'est bien les services à la personne que le gouvernement veut déployer, c'est utile, c'est nécessaire, surtout avec l'évolution de l'espérance de vie, mais les usines, les entreprises industrielles, c'est de l'exportation, c'est de l'emploi, ce sont d'énormes valeurs ajoutées pour le pays.

Il n'est pas imaginable que les Allemands soient en train de réussir un miracle économique et que les Français soient incapables d'envisager ce même miracle économique. Je demande que nous fassions de ce chapitre d'une politique industrielle une priorité pour notre pays.

Cela veut dire qu'il faut que l'Union européenne, sous notre impulsion, considère qu'il est de son devoir de défendre l'industrie européenne et il y a deux choses à faire pour défendre l'industrie européenne. La première, c'est de réfléchir à la manière dont on peut aborder, avec un certain nombre de grandes puissances, dont la Chine en particulier, la question de savoir pourquoi il y a de telles différences entre l'heure de travail travaillée en Chine et l'heure de travail travaillée en Europe parce que la différence actuellement, selon certains économistes est de un pour la Chine à soixante-quinze chez nous, avec une sous évaluation de la monnaie chinoise qui est savamment entretenue et qu'il est nécessaire de poser comme problème politique avec nos partenaires chinois.

Évidemment, si nous sommes tout seuls, la France, à poser cette question, les Chinois vont simplement nous faire un petit clin d'œil en nous expliquant que, si nous continuons à parler sur ce ton, nos Airbus, on va pouvoir les garder !… -j'allais employer une expression plus rapide- ou bien que les centrales nucléaires qu'ils ne nous ont d'ailleurs pas achetées, ils vont renoncer pour toujours à la possibilité de les accueillir ou bien que, nos voitures, nous allons devoir les garder.

Mais si tous les pays européens sont ensemble, premier marché de la planète, première capacité économique de la planète, bientôt première monnaie de la planète, et si nous disons quelque chose, alors là, la musique changera. Mais, pour l'instant, cette volonté politique européenne, personne ne la défend. On la laisse à l'abandon et c'est ainsi que l'on voit, peu à peu, les usines s'en aller.

Je suis pour que l'on décide, et je le ferai si vous me choisissez comme président de la République, que l'Europe va défendre ses industries et ses emplois, qu'elle va imposer au moins la loyauté et pas le déséquilibre dans les échanges au bénéfice des uns et au détriment de ses propres entreprises.

Je suis pour que l'Europe fasse son boulot de protection, et cela signifie en particulier qu'il faut que l'Europe fasse respecter, par ses concurrents, les règles en particulier en matière environnementale qu'elle impose à ses propres entreprises.

Il n'y a aucune honte, puisqu'on les impose aux entreprises européennes, que l'on regarde de quelle manière on peut exiger de ceux qui nous apportent des importations, qu'ils les respectent aussi.

Cela ne s'appelle pas du protectionnisme au sens où l'on fermerait les frontières autour de notre pays, cela s'appelle la loyauté, la loyauté des échanges et ceci est une immense politique à mettre en place. Je suis pour que le gouvernement français et le Président français défende devant les autres pays européens cet impératif d'avoir enfin une politique industrielle sérieuse à l'échelon de notre pays.

L'Europe s'est beaucoup occupée de concurrence, énormément, elle a beaucoup insisté sur ce sujet, sans doute dans la plupart des domaines avec raison, mais dans certains autres domaines, je me suis toujours interrogé sur l'intérêt réel d'un certain nombre de décisions comme, par exemple -je dis cela au passage, peut-être vais-je me faire des ennemis, je n'en sais rien- celle qui concerne le 12. Je n'ai jamais trouvé absolument génial que l'on remplace le 12 pour les renseignements qui marchait par une multitude de numéros dont on n'arrive pas à se souvenir et dont je ne sais même pas à quoi ils correspondent et vous non plus d'ailleurs. Ce que je sais, c'est que des centaines d'emplois ont disparu et sont partis à l'étranger.

Je suis pour la concurrence en général, mais je trouve que, parfois, l'obsession de la concurrence va un peu trop loin. C'est notamment le cas, je dis cela pour les élus locaux des zones rurales et de banlieue, pour la Poste parce que je trouve que la Poste mérite d'être défendue en tant qu'une entreprise en charge d'un service public.

Donc l'Europe s'est beaucoup intéressée de concurrence. Je pense qu'il est nécessaire qu'elle s'occupe aujourd'hui aussi de la manière dont elle peut promouvoir, sauver, défendre, le tissu des entreprises industrielles européennes.

Comme je le disais, il y a de l'espoir, car il y a des pays qui réussissent à défendre leur industrie, des pays qui apparaissaient en perdition il y a quelques mois à peine.

Il y a quelques mois à peine, l'Allemagne était à la traîne de l'Europe. L'Allemagne apparaissait comme l'homme malade, comme l'on disait, ou comme le mauvais élève de la place européenne, puis voilà que, dix-huit mois après, l'Allemagne apparaît comme le pays qui est en train de donner des leçons à l'ensemble de l'Europe, devant lequel tous les observateurs écarquillent les yeux en disant : "Mais comment se fait-il que ce pays qui était à la traîne réussisse aussi bien en quelques mois son redressement et une réussite sans précédent ?" Tellement que l'Allemagne qui était, comme nous, sur la pente d'une dette constamment en train de grandir se trouve en quelques mois avec une dette qui décroît. L'Allemagne, qui avait une croissance extrêmement faible, se trouve avec une croissance extrêmement forte, ils étaient à 1,2 de croissance, ils sont à 3 % de croissance en quelques mois. Tout le monde se demande quel est le secret allemand.

Le secret allemand est très simple. Les électeurs allemands ont décidé que les deux partis qui s'opposaient depuis quarante ans perpétuellement, principal parti de droite et principal parti de gauche, on allait les obliger non plus à s'opposer, mais à travailler ensemble et les électeurs allemands ont pris la décision politique d'obliger leurs parties opposés à travailler ensemble.

Eh bien, cela a été le secret du miracle allemand. Je suggère qu'en regardant le miracle allemand, nous proposons un miracle français. Je suis pour que, par l'élection présidentielle parce que c'est la seule clé que nous ayons, les électeurs français envoient un message sans ambiguïté aux états-majors de partis qui, depuis si longtemps, épuisent leur énergie dans une guerre perpétuelle qui ne trouve jamais de fin et qui nous envoie dans le mur. Je suis pour que, en élisant un nouveau Président de la République, les citoyens français décident que le temps de la querelle est fini et que l'on va entrer dans le temps du rassemblement, que ceux qui se sont disputés pendant des années vont maintenant, pendant cinq ans, travailler ensemble.

À ce message-là, personne ne peut résister parce que vous, nous, citoyens français, nous avons entre les mains l'arme absolue, c'est que, cinq semaines après l'élection présidentielle, il y a des élections législatives. Autrement dit, si jamais les appareils de partis -je ne le crois pas- refusaient d'entendre ce message du peuple français, vous avez, cinq semaines après, le moyen de les renvoyer à leurs chères études, le moyen de leur faire réfléchir aux raisons qui font que, s'ils ne veulent pas écouter les Français, les Français vont, eux, s'occuper de les faire entendre.

Et donc, ce que je vous propose, c'est un nouveau système politique, une nouvelle démarche politique pour que les Français se retrouvent enfin avec la certitude que ces partis, qui ont tout le pouvoir depuis vingt-cinq ans, au lieu de s'occuper d'eux et de leurs querelles et de marquer un point contre les autres et d'être perpétuellement en embuscade, les uns contre les autres, cette fois-ci on va les obliger, pendant cinq ans à s'occuper des Français.

Je serai le garant de cette nouvelle volonté française. Je serai celui qui obligera le monde politique à changer. Avec le soutien des citoyens français, des électeurs qui m'auront élu, c'est ce changement que je défendrai jusqu'au premier et deuxième tours de l'élection présidentielle, jusqu'au 22 avril et au 6 mai.

Je vous remercie d'être venus à Noyelles Godault ce soir pour être les soutiens de cette nouvelle démarche politique et pour offrir à la France un nouvel avenir.

Merci de votre gentillesse et de votre présence."


Réagir à cet article

Filtered HTML

  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Tags HTML autorisés : <a> <em> <strong> <blockquote> <ul> <ol> <li> <p> <br>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.