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08/11/04 - Budget ENSEIGNEMENT SUPERIEUR (intervention du Député)

Publication : 09/11/2004  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

La nation et l’université françaises sont aujourd’hui confrontées à un défi redoutable : comment rester dans la course à l'innovation au niveau mondial, alors que les universités du monde entier sont en concurrence les unes avec les autres et alors que la compétitivité d’un pays repose désormais sur l’innovation ?

Traditionnellement, le système éducatif français a formé des gestionnaires, des administrateurs et des ingénieurs plus que des innovateurs ; notre enseignement supérieur est peu financé (par rapport au secondaire), tourné vers les formations bac +5 (et bac +2) et marginalement mobilisé pour des objectifs de recherche.

En effet, le modèle français d'organisation de la recherche repose encore aujourd'hui sur des établissements publics puissants (CNRS, CEA, CNES…). Ce modèle a d'ailleurs permis de brillantes réussites technologiques et industrielles françaises (spatiale, nucléaire…). Il est pourtant aujourd'hui responsable en partie du retard français en matière d'innovation, comme en atteste la faible part prise par la France dans les dépôts de budgets mondiaux.

La France ne retrouvera les premiers rangs en matière d'innovation qu'en mobilisant à nouveau son université sur les priorités nationales de recherche. En effet, l’université est, plus que tout autre système, propre à mettre en réseau le monde de la recherche et celui de l’entreprise. Elle mêle recherche, enseignement et formation continue. A la différence des grands organismes de recherche, elle est en interface permanente avec les entreprises qui recrutent les diplômés. Elle a une structure et un mode de raisonnement localisés ; elle a un rayonnement international et est le dénominateur commun de l’organisation de l’enseignement supérieur, dans tous les pays. Elle est le milieu où s’organise la mobilité entre recherche et enseignement.

Il est évident que l’ouverture de l’université au monde économique entraîne une très grande fertilisation entre la recherche universitaire et le monde de l’entreprise. L’ESPCI en fournit un exemple éloquent : elle cumule les records français en matière de brevets par chercheur, tout en abritant 5 Prix Nobel.

Or l’université française remplit aujourd'hui mal ce rôle : elle est doublement marginalisée par les grandes écoles dans la formation des élites scientifiques et économiques, et par les organismes nationaux dans la gestion de la recherche.

Le chemin pour impliquer l'université dans les grands enjeux de recherche de la nation, ce peut être les pôles de compétitivité, c’est-à-dire une synergie entre recherche, universités et entreprises. Le gouvernement, reprenant les conclusions du rapport de notre collègue UDF Christian Blanc, vient de lancer un appel d’offres pour la mise en place des pôles de compétitivité. Au-delà du concept, l'heure est maintenant venue de faire un certain nombre de choix décisifs pour préciser la place de l’université dans ces pôles de compétitivité.

Quelle sera la place faite aux universités dans la gouvernance de ces pôles de compétitivité ? Quelle autonomie sera donnée aux universités pour qu'elles puissent réagir effectivement en synergie avec les industries présentes dans ces pôles ; de quelles ressources disposeront les universités pour mener à bien leurs programmes de recherche ?

C’est pourquoi l’UDF appelle le gouvernement à mettre en place une profonde réforme de l’organisation de l’enseignement supérieur et de la recherche, en fondant cette organisation autour des acteurs ouverts, internationalement identifiables, et territorialisés que sont les universités.

Pour nous, ce renforcement des universités doit s’opérer en 2 temps : d’une part, rendre les universités capables d’assumer des responsabilités plus importantes ; d’autre part, leur confier les moyens et la souplesse de gestion nécessaires à leur développement et à leur rôle d’entraînement de l’économie de la connaissance. Cela implique des présidents responsables pour gérer l’argent public ; cela implique également de rendre aux universités la souplesse dans l’emploi de leurs moyens ; cela implique enfin de développer la culture de résultat.

Une autre interrogation majeure porte sur la carte universitaire française. Celle-ci fait preuve d'une rigidité extrêmement pénalisante :
• L'université française fonctionne encore sur la nécessité de couvrir dans un même lieu l'ensemble des disciplines existantes et rejette la proposition d'universités thématiques. Y a-t-il des perspectives de modification de cette approche ?
• L'université française est aujourd'hui quasi exclusivement concentrée dans les métropoles régionales et à Paris. Or avec la croissance forte des effectifs universitaires dans les années 1990, les sites universitaires ont été multipliés, des antennes universitaires ont essaimé dans la plupart des départements français. Mais aujourd’hui, ces antennes vivent mal.
• La plupart de nos universités ont un problème de taille critique, tant pour exister sur le plan international que pour tirer un plein parti de la multidisciplinarité. Pourquoi ne pas ouvrir aux universités et grandes écoles la possibilité d’associations, de formes de regroupements plus ou moins légères, à travers des « établissements publics de coopération universitaire » ?
• La réponse aux besoins d'un bassin d'emploi par la création de formations courtes (IUT, BTS) adaptées à ces besoins est, elle aussi, d'une rigidité effrayante. Quelle modification des procédures d'évolution de la carte universitaire des formations courtes envisagez-vous ?

Chaque année qui s’écoule dans le cadre actuel, chaque budget éloigné des nécessités du monde d'aujourd'hui nous éloigne un peu plus des pays concurrents qui ont su s’adapter aux nouveaux modes de fonctionnement de la société de la connaissance.

Or, la réforme des universités envisagée par Luc Ferry nous semble aujourd'hui repoussée aux calendes grecques ou au moins à la prochaine législature politique puisqu'il semble aujourd'hui acté que la future loi d'orientation sur l'Ecole s'arrêtera au baccalauréat.

N'y a-t-il pas là une impasse grave, quelle que soit la difficulté politique de la mise en œuvre d'une telle réforme ?

Notre modèle universitaire français, en déterminant le futur niveau d’éducation du pays, détermine aussi son avenir économique, social, politique et culturel. Avec l’université, c’est donc tout l’avenir de nos enfants qui est en jeu.

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