PARIS (Reuters) - Eleveur de chevaux et fils de paysan, François Bayrou a visité en connaisseur le Salon de l'agriculture, où il s'est posé en défenseur d'un monde rural qui "se sent abandonné".
Auréolé par son nouveau statut de présidentiable sérieux - il vient de franchir la barre des 20% d'intentions de vote au premier tour -, c'est entouré d'une meute de journalistes que le candidat de l'UDF a tenté, deux heures et demie durant, de se frayer un chemin dans les allées du Salon.
"Je me sens chez moi ici", a lancé le député béarnais né dans une ferme de Bordères, et qui a repris l'exploitation familiale à la mort prématurée de son père.
Aujourd'hui encore, l'agrégé de lettres classiques élève des chevaux et possède sa carte d'adhérent à la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).
"On l'a vu sur son tracteur ! C'est un bon gars", a lancé sur son passage un éleveur de vaches du Jura, Christian Sermier, qui, politiquement, "hésite encore entre lui et Sarkozy".
"Il connaît mieux l'agriculture que les autres, les autres sont des rigolos", ont estimé des viticulteurs de Nîmes, Pierre et Marie-Thérèse Anglezan.
Aux dires de plusieurs de ses interlocuteurs, François Bayrou maîtrise, en effet, son sujet.
"C'est un homme de la terre. Il a parlé de notre race, on voit qu'il s'y connaît", a déclaré Richard Delchet après lui avoir présenté une placide vache Salers prénommée Violette.
"C'est un agriculteur comme nous, c'est un voisin", a raconté Claude Bracot, de Vielleségur, à une trentaine de kilomètres de Bordères. L'éleveur, qui a "fait les bals" dans sa jeunesse avec le député UDF Jean Lassalle, présent mardi au Salon, verrait bien ce dernier "ministre de l'Agriculture"...
Malgré la bousculade, François Bayrou a pris le temps de serrer des mains, de goûter des produits, de poser avec des animaux... tout en évitant soigneusement de croiser la route de Philippe de Villiers, le président de Mouvement pour la France, qui est passé tout près de lui.
"L'IMPRESSION D'ÊTRE ABANDONNÉS"
Les agriculteurs "ont l'impression d'être abandonnés. Ils cherchent le président qui les reconnaîtra, qui les estimera. Je suis très touché par l'ensemble de leurs soutiens et par l'affection qu'ils expriment", a dit le président de l'UDF au terme de son parcours.
Interrogé sur l'avenir de la Politique agricole commune, il est resté vague, prônant une politique "qui défende l'agriculture et les agriculteurs". "Ce sera le travail du président de défendre à chaque rendez-vous européen les impératifs d'un tissu agricole suffisant", a-t-il expliqué.
Lors d'une conférence de presse au stand "Bières et saveurs", il a jugé par ailleurs que l'Organisation mondiale du commerce n'était "pas adaptée pour sauver l'agriculture.
"Je suis pour un nouvel équilibre", a dit François Bayrou, qui a dit rejoindre sur ce point Jacques Chirac, auteur samedi d'un sérieux avertissement à l'intention du Commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson.
Défenseur du revenu agricole, qui passe par "le soutien des prix", François Bayrou s'est aussi dit partisan de la "sauvegarde alimentaire", des biocarburants, ainsi que d'un moratoire sur les Organismes génétiquement modifiés (OGM).
Dans sa déclaration de patrimoine, obligatoire pour tout présidentiable, François Bayrou a inscrit plusieurs tracteurs. Il ira sans doute en tester lors de son passage au salon de la machine agricole de Villepinte, prévu dans l'après-midi.
Selon un sondage Ifop-Fiducial publié dans le Journal du dimanche, François Bayrou arrive en deuxième position (26%) derrière Nicolas Sarkozy (32%) au chapitre du candidat dont les agriculteurs se sentent le plus proche.
Au Salon, le président de l'UDF a dit voir dans le franchissement de la barre des 20% des intentions de vote, dans un sondage LH2 publié lundi, "une étape, un signe".
"Ça veut dire que désormais ça devient possible, c'est à portée de main", a-t-il dit.