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05/07/04 - Réforme Assurance Maladie - Intervention de Jean-Luc Préel, porte-parole du groupe UDF sur ce projet de loi

Publication : 06/07/2004  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

La réforme de notre système de santé est urgente et indispensable. Tous nous en sommes convaincus. Elle doit permettre de garantir un haut niveau de santé à chacun de nos concitoyens et un égal accès de tous à des soins de qualité grâce à un financement solidaire.
La réforme est indispensable car notre système de soins connaît une grave crise morale, organisationnelle et financière. Tous les secteurs, ambulatoire et hôpital, sont en crise.
La réforme est urgente car le déficit est abyssal. 32 milliards d’euros de déficit cumulé en 3 ans. 14 milliards d’euros prévus en 2004. Si rien n’était entrepris, tout notre système auquel les Français sont très attachés, serait remis en cause.
Le diagnostic, posé après les travaux du haut conseil, est consensuel et partagé. L’étiologie est plus discutée. Le traitement plus douloureux doit demander à chacun un effort.
Notre système de soins est bon, voire excellent pour le curatif. Il permet une grande liberté de choix de son médecin, du lieu d’hospitalisation, de prescription, sans connaître de files d’attente. Certes, il est relativement coûteux, 9,7 % du PIB, mais les dépenses de santé participent elles aussi au PIB et à la croissance. Elles ne se perdent pas dans un puits sans fond. Il permet surtout une grande solidarité. Mais des progrès sont indispensables : évaluation et qualité ; séparation ville – hôpital et non fongibilité des enveloppes ; prévention et éducation de la santé ; coordination des soins ; démographie des professions de santé, formation initiale et continue, responsabilisation des acteurs. La tâche est énorme.
Quelles sont les raisons de la crise ?
Certes les dépenses sont appelées à augmenter, mais les raisons de la crise proviennent très clairement de l’absence de pilote du système et de l’absence de responsabilité à tous les niveaux.
Aujourd’hui, qui pilote le système ? L’État, l’Assurance Maladie, le Parlement, les professionnels. La réponse est clairement : personne.
Nous vivons dans la fiction d’un paritarisme dépassé, injustifié et inefficace. L’étatisation est quasi achevée sans contrôle démocratique. Puisque le ministère est responsable de l’hôpital, du médicament, de la quasi-totalité de l’ambulatoire, décide seul de la répartition des enveloppes, valide les conventions, sans rendre compte au Parlement de ses décisions.
Vous nous présentez donc une réforme qui se veut différente des réformes précédentes. Elle doit modifier la gouvernance, améliorer la qualité et aboutir en 2007 à l’équilibre financier.
Est-ce donc la réforme que nous attendons tous, qui définira clairement le rôle de chacun et réunira la prévention, l’ambulatoire et l’hospitalisation ? Ou n’est-ce qu’une étape avec des mesures intéressantes et d’autres plus discutables ?
Franchement, ce projet nous a déçu. Pour l’UDF, il s’apparente davantage à un nouveau plan de financement dans lequel les recettes sont certes quasi certaines pour 5 milliards, mais les économies de dépenses 10 milliards à l’horizon 2007 nous semblent aléatoires comme semble d’ailleurs le confirmer la note de Bercy.
Quant à en faire la grande réforme de la Gouvernance, nous sommes là aussi restés sur notre faim : la place du Gouvernement, du Parlement, de l’Assurance Maladie, est-elle clairement définie ? Il ne semble pas. Tout le monde s’accorde pour reconnaître que notre système a 2 défauts majeurs : séparation de la ville et de l’hôpital avec la non-fongibilité des enveloppes, gros retard dans la prévention et l’éducation à la santé par ailleurs séparée du soin. Corrigez-vous ces 2 graves défauts ? Clairement non. Vous répondez que vous l’envisagerez ultérieurement, donc dans une deuxième étape. Ce qui signifie que le projet actuel n’est que provisoire. Dès lors se pose la date de la deuxième étape ?
Enfin, ce projet de loi manque de visibilité.
En effet depuis un an, de multiples textes concernent la santé : ordonnances de septembre, loi de santé publique qui confirme en l’aggravant la séparation du « soin » et de la prévention confiant celle-ci aux préfets, loi sur les territoires ruraux, loi de décentralisation, nouvelle loi habilitant à légiférer par ordonnance pour l’hôpital. Bref, le Gouvernement s’intéresse au secteur de la santé, mais on cherche en vain une réelle cohérence. Pourquoi n’avez-vous pas profité du texte actuel pour définir et clarifier votre politique sur la santé ?
Ce projet de loi a trois objectifs :
- financer le déficit cumulé,
- réformer la Gouvernance,
- pour, grâce à une maîtrise médicalisée, aboutir à un équilibre financier en 2007.
 Financer le déficit cumulé de 32 milliards d’euros en 3 ans.
Le Gouvernement a fait le choix de le reporter sur la CADES en prolongeant sa durée de vie. Prolonger la durée de vie de la CADES de 10 à 12 ans pour absorber un déficit de 3 à 5 ans en d’autres termes prolonger de 3 ans par an est moralement inacceptable.
Est-il acceptable de faire payer aux générations futures ce que nous n’avons pas su ou pas pu assumer ?
L’UMP a donc présenté un amendement tentant de couper la poire en 2 augmentant le CRDS de 0,15 %, mais prolongeant malgré tout la CADES de 6 ans pour 3 ans de déficit et minorant manifestement les déficits 2005-2006. C’est mieux mais toujours inacceptable. La CADES a été créée par Alain Juppé pour reprendre les déficits antérieurs à 1995, durée de vie prévue jusqu’à 2009. Martine Aubry a chargé la barque en prolongeant la durée de vie à 2014. La CADES devait rembourser 53 milliards, il reste 38 milliards d’euros à financer. Il est logique de lui confier le déficit cumulé actuel. Mais pour remettre les compteurs à zéro et financer ce déficit, il nous semble préférable d’augmenter le CRDS de 0,35 %. Ainsi, nous assumerons nous-mêmes nos déficits sans les reporter sur les générations futures qui seront par ailleurs confrontées au financement de leurs retraites.
 Les compteurs remis à zéro, vous proposez des mesures pour améliorer la Gouvernance et d’autres mesures financières.
Pour l’UDF, il convient de définir le rôle de chacun et de s’engager clairement et fermement dans une maîtrise médicalisée. Celle-ci sera possible lorsque chacun des acteurs professionnels et malades seront impliqués dans les décisions et dans la gestion. Nous pensons qu’il convient de réunir l’hôpital, l’ambulatoire et la prévention. C’est pourquoi nous plaidons, comme l’ont mis en œuvre beaucoup de nos voisins, pour une régionalisation de la santé permettant de développer une politique de santé de proximité, de prendre en compte les besoins et de veiller à l’adéquation de l’offre et des besoins.
Nous sommes partisans dès maintenant de la création d’agences régionales de santé. Repousser à plus tard, à quand d’ailleurs ? Cette création souhaitée par beaucoup serait pour nous une grave erreur. L’ARS doit être le responsable unique de la santé au niveau régional, pour l’ambulatoire, les établissements, la prévention, la formation.
En 1995, les ARH ont été créées par ordonnances. Franchissez le pas supplémentaire, n’attendez pas. Il ne s’agit pas, Monsieur le Ministre, comme vous l’avez dit de mettre les hôpitaux sous la coupe de l’assurance maladie, mais d’avoir un responsable unique de la santé. Il ne s’agit pas non plus de doter les ARS de nouveaux fonctionnaires, mais de mettre à leur disposition les personnels des DRASS et des CRAM.
L’UDF a déposé des amendements pour permettre cette création. De même, nous souhaitons que les conseils régionaux de santé soient élus par collèges. Ils doivent être l’organe essentiel de la régionalisation permettant de responsabiliser les acteurs et de gérer l’ONDAM régionalisé. C’est ainsi que sera réussie la maîtrise médicalisée. L’UDF propose également la création d’une caisse spécifique autonome gérée paritairement pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Dans ces secteurs, le paritarisme est pleinement justifié.
Hélas, votre projet ne va pas dans ce sens.
Vous proposez à la fois un renforcement de l’étatisation et la mise en place d’un paritarisme rénové alibi sans pouvoir réel.
Vous vous intéressez essentiellement à l’ambulatoire, renvoyant la réforme de l’hôpital à un autre texte, de même que la prévention.
Vous prévoyez un directeur général très puissant puisqu’il sera le directeur de l’union des caisses nommé par l’État et ayant en réalité tous les pouvoirs.
Vous renforcez ainsi l’étatisation sans contrôle démocratique. Pensez-vous que la Gouvernance sera améliorée ? Comment empêcherez-vous les professionnels mécontents d’une décision de faire, comme aujourd’hui, le siège du Ministre lequel sensible aux implications politiques des demandes pourra, sans doute très difficilement, éviter de les écouter voire de les entendre ? Quelle sera la place du Parlement dans cette nouvelle Gouvernance ?
Le projet de loi présente cependant des propositions intéressantes mais qui méritent d’être améliorées.
- Un offre de soins mieux organisée avec un parcours autour du médecin traitant. Bien entendu se pose l’accès au médecin spécialiste, le niveau des honoraires et des remboursements. Plutôt que de sanctionner l’accès direct, il nous paraîtrait préférable de favoriser le patient et le médecin respectant le parcours et les bonnes pratiques.
- Le dossier médical personnel est une excellente préconisation. Mais sa finalité doit d’abord être l’amélioration de la qualité des soins, le présenter comme source d’économie est une erreur. D’ailleurs sa mise en place prendra du temps et sera onéreuse. Il convient de le sécuriser, de choisir des hébergeurs, de préciser ses conditions d’accès hiérarchisées, de convaincre les professionnels de le mettre à jour à chaque consultation. Ils demanderont bien évidemment une rémunération pour le temps passé. Il faudra surtout, après avoir rappelé qu’il est la propriété du malade, savoir si celui-ci peut s’opposer à ce qu’il soit exhaustif.
Pour l’UDF, il paraît clair qu’en attendre pour 2007 4 milliards d’économies compte tenu des dépenses engagées pour sa mise en œuvre relèverait du miracle.
L’instauration d’une haute autorité. Celle-ci doit être saluée, demandée par beaucoup, son rôle doit être essentiellement scientifique, chargée de l’évaluation des bonnes pratiques, du service médical rendu.
Le texte est curieux. Pourquoi préconiser une nomination très solennelle de ses membres comme pour le conseil constitutionnel si son rôle n’est que consultatif comme l’actuelle commission de la transparence du médicament ?
L’UDF propose soit de maintenir cette nomination solennelle et de lui donner un rôle décisionnel soit de lui maintenir son rôle scientifique et consultatif et dès lors de faire nommer ses membres par les sociétés scientifiques.
La création d’une union nationale des caisses favorisera la coordination. Cette création a d’ailleurs déjà été envisagée en 1995. Mais comment assurer à la MSA la garantie de ses spécificités, notamment guichet unique pour la retraite et les familles et les élections cantonales de ses administrateurs.
La création d’une union des complémentaires est également intéressante pour permettre notamment une coordination avec l’union nationale des caisses. Reste à définir la place de chacun, la possibilité de contractualiser avec les professionnels mais aussi de savoir si ses membres peuvent également siéger dans les conseils d’orientation des caisses et être ainsi à la fois juges et parties.
Nous saluons également la création de l’institut des données de santé pour avoir déposé une proposition de loi prévoyant la création d’un INSEE de la santé chargé de recueillir l’ensemble des données médicales, de les traiter en temps réel et de les fournir à tous. Mais sa place, ses missions, méritent d’être mieux définies notamment par rapport au service informatique de la CNAM.
Nous sommes à l’UDF beaucoup plus interrogatifs sur le comité de l’hospitalisation, est-il vraiment utile ?, mais surtout sur le comité d’alerte.
Son champ de compétence s’étend-il à la totalité de l’ONDAM c’est-à-dire l’hôpital et le médico-social ? Les caisses alertées sont censées proposer des mesures de redressement. Comment pourront-elles proposer des mesures concernant l’hôpital ? Des mesures concernant les recettes qui sont de la compétence du Parlement ? La raison principale du dépassement de l’ONDAM est qu’il n’a jamais été médicalisé, jamais fixé à un taux réaliste.

Les mesures financières permettront-elles d’atteindre l’équilibre en 2007 ?
Il est vrai que l’annonce d’un plan a toujours entraîné un ralentissement salutaire. Nous pouvons espérer cette fois ci encore un ralentissement bien venu. Mais les dépenses sont appelées à augmenter comme l’a démontré le Haut conseil, 2% de plus que la croissance depuis 20 ans pour des raisons connues de tous. Les deux problèmes majeurs sont de veiller à une bonne utilisation et à l’efficience mais aussi le financement du différentiel PIB – dépenses de santé.
Bien entendu, les prévisions de recettes sont quasi assurées, notamment augmentation différentiée de la CSG, selon les catégories de financement ce qui pose un problème constitutionnel, de la C3S. Si nous souhaitons depuis toujours que les taxes sur l’alcool et le tabac servent à financer les soins et la prévention, force est de constater que le transfert de 1 milliard à l’assurance maladie creuse d’une somme identique le déficit considérable de l’État.
L’augmentation de 1 euro par an sur 3 ans du forfait hospitalier après l’augmentation importante de 2004 va le mettre à un niveau très élevé.
La décision d’une contribution d’un euro par acte est compréhensible. Le niveau est aujourd’hui modeste, mais il risque de suivre l’évolution du forfait hospitalier. Mais ou bien il est payé par tous, ou des exceptions sont prévues ; dès lors qu’en est-il des urgences hospitalières et surtout des malades en A.L.D. atteints de pathologies lourdes, consultant fréquemment ? Les éventuelles exonérations ne devraient-elles pas intervenir sur des critères médicaux ?
Les 5 milliards de recettes supplémentaires sont quasi certaines. Par contre, les économies de dépenses 10 milliards sont très aléatoires.
J’ai déjà eu l’occasion de dire que l’économie liée au dossier médical partagé de 3,5 milliards est peu vraisemblable. Espérer 1,6 milliards d’une meilleure coordination des achats hospitaliers est un vœu. Le seul chiffre vraiment crédible est la suppression des frais financiers par transfert de la dette à la CADES. Mais est-ce une économie pour la Nation et le citoyen ?

Pour l’UDF, après avoir remis les compteurs à zéro, il convient de s’engager dans une réelle maîtrise médicalisée concernant et l’hôpital et l’ambulatoire avec pour but la qualité et l’efficience.
Cette maîtrise médicalisée ne peut être obtenue que par une relation de confiance, par le contrat et par la régionalisation.
Il convient en effet d’associer les professionnels pour mettre en œuvre effectivement une formation initiale et continue de qualité, obligatoire, financée et évaluée ; mettre en œuvre les bonnes pratiques, le bon usage avec un réel contrôle des anomalies au niveau des prescriptions , examens, traitements, arrêts de maladie.
Il convient également de responsabiliser le patient en généralisant le principe du contrat passé entre le malade et son médecin pour favoriser la conduite permettant la bonne santé, en insistant sur la prévention et l’éducation à la santé en, plutôt qu’en proposant un crédit d’impôt, transformant la CMU en un aide personnalisée à la santé inversement proportionnelle au revenu pour permettre à chacun de financer la complémentaire de son choix, enfin en favorisant la généralisation de la caution remboursable pour les assurances complémentaires qui a démontré son efficacité.
Notre souhait est de maintenir un système de santé solidaire, en permettant l’égal accès de tous à des soins de qualité en améliorant l’efficience : le ratio coût-efficacité




Monsieur le Ministre, cette réforme est urgente et nécessaire.
Elle est attendue par les Français.
Vous avez indiqué que vous seriez à l’écoute des parlementaires et que nous pourrons améliorer votre projet.
L’UDF vous a entendu et a déposé 80 amendements.
Pour l’instant, certains mineurs ont été acceptés par la commission. Mais d’autres ont pour but de faire bouger votre projet, notamment ceux qui concernent :
- le financement du déficit, en augmentant le CRDS de 0,35% pour ne pas faire peser sur nos enfants notre impéritie.
- la création d’une caisse spécifique pour les accidents du travail et maladies professionnelles, gérée paritairement et qui sont à l’évidence de la compétence des partenaires sociaux à mettre en œuvre en même temps que :
- la mise en place d’agences régionales de santé pour faire vivre ensemble prévention et soins, établissements et ambulatoire,il serait regrettable que nos amendements ne viennent pas en discussion en raison de l’article 40, il s’agit pourtant d’une orientation majeure qui mérite discussion.
- les conseils régionaux de santé élus pour responsabiliser tous les acteurs et mettre en œuvre effectivement une maîtrise médicalisée et une politique de santé de proximité,
- une hiérarchisation des actes et des prescriptions en fonction de la pathologie.
L’UDF considère que ce projet de loi est important, mais il est perfectible et nous abordons donc avec confiance les débats.
Jean-Luc Préel
Député de la Vendée

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