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17/02/2011 - Proposition de loi pour l'exonération des cotisations patronales sur le travail agricole permanent

Publication : 17/02/2011  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Veuillez retrouver ci-dessous l'intégralité de la proposition de loi déposée par Jean Dionis, qui sera débattue à partir du 14 avril à l'Assemblée nationale.
Proposition de loi visant à renforcer durablement la compétitivité de l'agriculture française présentée par Messieurs Jean Dionis du Séjour et Charles de Courson, et par François Sauvadet, Jean-Pierre Abelin, Christian Blanc, Pascal Brindeau, Hervé de Charrette, Stéphane Demilly, Raymond Durand, Francis Hillmeyer, Michel Hunault, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Jean-Christophe Lagarde, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, Francis Vercamer, Philippe Vigier, Thierry Benoit, Philippe Folliot.

Pour signer la pétition de soutien à cette proposition de loi: http://www.jeandionis.com/soutien-projet-de-loi.asp

Proposition de loi visant à renforcer durablement la compétitivité de l'agriculture française
présentée par Messieurs Jean Dionis du Séjour et Charles de Courson, et l'ensemble des membres du Nouveau Centre, François Sauvadet, Jean-Pierre Abelin, Christian Blanc, Pascal Brindeau, Hervé de Charrette, Stéphane Demilly, Raymond Durand, Francis Hillmeyer, Michel Hunault, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Jean-Christophe Lagarde, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, Francis Vercamer, Philippe Vigier, Thierry Benoit et Philippe Folliot.

EXPOSE DES MOTIFS

Synthèse

Le coût élevé du travail agricole en France représente un handicap lourd pour la compétitivité de l'agriculture française au regard du coût très inférieur chez nos voisins européens.

On constate, en effet, une grande disparité du coût du travail agricole dans les différents États producteurs de l'Union européenne, qui favorise injustement les productions allemandes, espagnoles, italiennes ou polonaises au détriment des productions françaises. Ainsi, l'agriculture française connaît une érosion significative de ses parts de marché et à une baisse continue de sa production comme des surfaces cultivées, en particulier dans les filières les plus intensives en main d'oeuvre (fruits et légumes en particulier).

Menacés d'asphyxie face à cette distorsion croissante de concurrence de la part de nos voisins européens, des pans entiers de notre secteur agricole pourraient s'effondrer voire disparaître à court terme. Ce délitement de l'agriculture française aurait des conséquences sociales désastreuses en termes d'emploi, d'aménagement et de revitalisation des territoires ruraux, et d'autonomie et de sécurité alimentaire, dans la mesure où le secteur agricole représente 3,5% de la population active, 4,5% du PIB et occupe 53,3% du territoire français.

Le soutien de l'Etat français au secteur agricole et la mise en oeuvre d'initiatives fortes pour atténuer cette distorsion de concurrence en renforçant la compétitivité de l'agriculture française s'avèrent donc indispensables. Concernant les travailleurs occasionnels, le gouvernement a déjà entrepris d' « offrir à l'agriculture française les moyens de se battre à armes égales en Europe », en mettant en oeuvre, à la suite du discours du Président de la République à Poligny le 27 octobre 2009, l'exonération quasi-totale de leurs cotisations sociales patronales. Cette mesure était nécessaire, mais elle est nettement insuffisante au regard des enjeux, et pourrait induire par ailleurs une forme de précarisation du travail agricole.

La présente proposition de loi vise à amorcer un transfert du financement de la protection sociale agricole d'une assiette contributive pesant sur le coût du travail à une assiette fiscale basée sur la consommation. L'extension à l'ensemble des travailleurs salariés du secteur agricole du dispositif mis en place pour les travailleurs occasionnels réduirait mécaniquement l'injustice à laquelle sont confrontés nos agriculteurs, participerait à une reconquête de marchés et ferait bénéficier les salariés agricoles d'une sécurisation de leur protection sociale.

Le coût de cette mesure, évalué à environ 1 milliard d'euros, serait compensé par la création d'une « contribution pour la compétitivité de l'agriculture », inspirée de la « taxe poissons » introduite dans la loi de finances rectificative pour 2008 : elle serait ainsi assise sur la vente au détail, en grande et moyenne surface, de produits agro-alimentaires issus de l'agriculture et de l'élevage, et serait acquittée par les distributeurs. Le taux de cette taxe devrait avoisiner 1%. Caractérisée par une assiette très large et un taux très faible, elle présente le double avantage d'assurer un financement pérenne et légitime au dispositif d'exonération et ferait participer les importations au financement de la protection sociale des salariés agricoles en France.

L'adoption de cette proposition de loi pourrait constituer la première étape d'une réforme globale du financement de la protection sociale agricole, dont le deuxième volet reposerait sur un allègement des cotisations exploitants, financé par la création d'un taux de TVA intermédiaire sur les produits agroalimentaires.

Si le financement de la protection sociale par le travail est un poison pour toute l'économie française, il s'avère un poison mortel à court terme pour notre agriculture.

I. LE DIAGNOSTIC : L'AGRICULTURE FRANÇAISE EST MENACÉE À COURT TERME PAR LE COÛT ÉLEVÉ DU TRAVAIL AGRICOLE

1) Les distortions de concurrence intra-européennes en termes de coût du travail agricole et leurs conséquences sur la production française

Le fardeau que fait peser le coût élevé du travail agricole sur la compétitivité de l'agriculture française est un constat établi de longue date. Le député Jacques LE GUEN, chargé en 2005 par le gouvernement d'examiner l'impact de la concurrence sur l'emploi agricole dans l'Union Européenne , a ainsi observé d'importantes distortions de concurrence entre États européens en matière de coût du travail agricole.

Il a démontré leur impact négatif sur la compétitivité de l'agriculture française. Les professionnels des différentes filières agricoles ont également, depuis de nombreuses années, attiré l'attention de pouvoirs publics sur ce préjudice.

Ces distortions de concurrence sont fondées sur une grande diversité des réglementations relatives au travail agricole dans les différents États européens.

En premier lieu, les principaux concurrents de l'agriculture française ont conservé une durée hebdomadaire légale du temps de travail supérieure aux 35 heures françaises. Par ailleurs, les réglementations relatives aux minima salariaux et /ou les dispositifs mis en place pour diminuer le coût du travail contribuent à d'importants écarts de coût de la main d'oeuvre :

• En Espagne, la compétitivité du secteur agricole est favorisée par un salaire minimal très inférieur au SMIC français (633 euros bruts en 2010, contre 1343 euros en France). Par ailleurs, la part des cotisations sociales payées par l'employeur s'élève à 22%, et est calculée sur une base forfaitaire de 25 euros par jour pour les salariés agricoles temporaires.
• En Italie, où il n'existe pas de salaire minimal fixé par l'Etat, les minima salariaux font l'objet de négociations par branche entre les partenaires sociaux, et s'avèrent globalement inférieurs au SMIC français dans le secteur agricole. En revanche, la part des cotisations sociales acquittées par l'employeur reste élevée (environ 35% du salaire brut).
• Aux Pays-Bas, des abattements sur le salaire minimum légal (à peu près équivalent au SMIC français) ont été mis en place pour les salariés de moins de 22 ans, qui constituent près d'un quart de la main d'oeuvre permanente ou temporaire du secteur agricole.
• En Allemagne, la situation est d'autant plus exacerbée car les employeurs agricoles ne sont pas contraints de se conformer aux minima conventionnels et s'acquittent de cotisations patronales équivalant à environ 20% du salaire brut. Les emplois de salariés qui travaillent moins de 50 jours par an sont totalement exonérés de cotisations sociales. Par ailleurs, les exploitations allemandes ont bénéficié depuis les accords germano-polonais de 1990 d'une réglementation spécifique leur permettant de recourir massivement à la main d'oeuvre à bas coût originaire d 'Europe de l'Est. Les Polonais représentent ainsi 30 à 40 % de la main d'oeuvre agricole des exploitations allemandes. La mise en oeuvre de la libre-circulation de travailleurs dans l'Europe à 27 d'ici 2014 pourrait éventuellement rendre caducs ces dispositifs.
Le premier tableau en bas de page récapitule rapidement la diversité des réglementations relatives au travail agricole dans les principaux pays producteurs de l'Union Européenne.

La position de la France, championne des États européens pour le coût de la main d'œuvre agricole , s'avère ravageuse pour toutes les filières agricoles françaises, et en particulier pour les plus intensives en main d'oeuvre, telle la filière des fruits et légumes.

On constate ainsi une tendance de fond à la baisse structurelle de nombreuses productions fruitières et légumières comme l'illustrent plusieurs exemples dans les graphiques situés en bas de page concernant la fraise, la pomme et l'asperge.

En 20 ans, la compétition entre la France et l'Allemagne illustre parfaitement cette tendance : quand bien même la France bénéficie d'avantages comparatifs non négligeables (surface agricole utile, climat, qualité des sols, modernisation, structuration des filières, etc.) et a connu une hausse avérée comparable de la productivité générale des facteurs.

Le différentiel de coût du travail est donc objectivement un facteur d'explication principal de cette tendance.

Le deuxième tableau en bas de page démontre le net décrochage des surfaces de productions de fruits et légumes françaises par rapport aux productions allemandes en dix ans :

2) La gravité de la situation actuelle nécessite une réponse urgente

La menace que fait peser le coût élevé du travail agricole appelle ainsi un soutien urgent de l'Etat français à la compétitivité du secteur agricole.

Quand bien même une harmonisation des salaires et des cotisations sociales est souhaitable à l'échelle européenne, elle n'est pas d'actualité à court ou moyen terme, dans la mesure où la protection sociale et la réglementation relative au travail n'entrent pas à l'heure actuelle dans le champ de compétences de l'Union Européenne.
De plus, les écarts en coûts salariaux dans l'Union Européenne sont tels que tout mécanisme de convergence salariale serait excessivement complexe à mettre en oeuvre. Les nouveaux membres de l'Union Européenne sont évidemment très loin de renoncer à l'un de leurs rares avantages comparatifs en matière de compétitivité agricole.

Ainsi, le coût élevé du travail agricole en France va constituer un handicap de plus en plus lourd pour notre agriculture, à mesure que les nouveaux États-membres d'Europe centrale et orientale, tels la Pologne et la Roumanie, développent leur production agricole et émergent comme des concurrents de premier plan de l'agriculture française.

Ensuite, les perspectives peu réjouissantes pour nos agriculteurs de la réforme de la PAC, en 2014, rend plus urgente encore la mise en oeuvre d'initiatives fortes en faveur du renforcement de la compétitivité de la production agricole française.

La réduction significative des aides accordées aux agriculteurs français, concentrées à l'heure actuelle sur certaines filières (grandes cultures, élevage), provoquera une baisse substantielle des revenus des agriculteurs concernés (dont les aides PAC représentent en moyenne 25% du résultat, et jusqu'à 50% pour certaines filières), et fragilisera davantage des exploitations agricoles déjà très affaiblies.

Les terres cultivées, réparties en 527 350 exploitations, représentent plus de la moitié du territoire métropolitain (près de 32 millions d'hectares). Le secteur agricole compte pour environ 3,5% de la population active, avec 1.200.000 d'actifs, dont près de 200 000 salariés permanents.

La disparition de pans entiers de notre agriculture aurait donc des conséquences sociales majeures globales en termes d'emploi, d'aménagement et de dynamisme des territoires, de balance commerciale, d'autonomie et de sécurité alimentaire et partant de souveraineté nationale.

Le Président de la République et le Gouvernement ont pris la mesure de la menace que représente le coût élevé du travail agricole pour la compétitivité de l'agriculture française, et ont entrepris de résorber l'injustice pour les salariés occasionnels.

Le Président de la République avait en effet annoncé à Poligny, le 27 octobre 2009, l'exonération quasi totale des cotisations sociales patronales pour les emplois saisonniers, adoptée dans le cadre du dernier projet de loi de finances rectificative pour 2010.

Cette exonération représente un coût d'environ 170 millions d'euros pour le budget de l'Etat et a pour conséquence une baisse significative du coût du travail temporaire, approximativement de 11,29 euros à 9,29 euros de l'heure.

Cette décision louable n'en reste pas moins nettement insuffisante au regard des enjeux de la compétitivité de l'agriculture française. Elle a par ailleurs comme effet collatéral un risque de précarisation du travail agricole, dans la mesure où les exploitants agricoles sont désormais incités à recourir davantage au travail occasionnel et à des contrats de travail précaires.

Une réduction plus significative du préjudice du coût élevé du travail agricole en France est clairement indispensable. N'oublions jamais que notre agriculture constitue un enjeu stratégique majeur pour l'ensemble de la société et de l'économie française.

Cette situation appelle donc une initiative structurelle urgente pour un renforcement global, légitime et durable de la compétitivité de notre agriculture et de la protection sociale de nos agriculteurs.

II. L'EXONÉRATION DE COTISATIONS SOCIALES CONSTITUE UNE SOLUTION ÉQUITABLE, SIMPLE ET EFFICACE À COURT TERME POUR RÉPONDRE AU DÉFIS DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE

1) L'extension du dispositif pour les travailleurs saisonniers à la totalité des salariés agricoles

La proposition de loi a pour objet d'étendre aux salariés permanents de la production agricole le dispositif d'exonération de cotisations sociales patronales mis en place pour les travailleurs occasionnels par la dernière loi de finances rectificative pour 2010, afin de diminuer le coût du travail agricole et de renforcer la compétitivité de notre agriculture.

Elle s'inscrit ainsi dans la continuité directe du discours de Poligny du Président de la République.

L'exonération de cotisations concernerait toutes les filières agricoles. En effet, il est impossible, du fait de la polyculture pratiquée par de très nombreux exploitants, d'isoler l'emploi permanent par filière. En outre, la concentration des exonérations sur une filière en particulier risquerait de constituer une entorse aux réglementations européennes.

Cette exonération serait limitée en revanche au secteur de la production, le plus exposé aux distortions de concurrence européenne, et exclurait donc le secteur agro-alimentaire ou le tertiaire agricole.

Cette exonération présente le double avantage, d'une part, de réduire immédiatement une partie du handicap compétitif que représente le coût global élevé du travail agricole en France, et d'autre part, d'être une première étape vers l'harmonisation de ce même coût global du travail à l'intérieur de l'Union Européenne.

Elle se substituerait aux différentes mesures d'allègement ou d'exonération partielle dont bénéficient certains segments de l'emploi agricole, telles l'allègement Fillon sur les bas salaires ou l'exonération sur les embauches par les groupements d'employeurs et simplifierait considérablement le droit social en consolidant toutes les différentes mesures.

Les modalités de mise en oeuvre de l'exonération seraient calquées sur le dispositif retenu pour les travailleurs occasionnels :

. dégressivité de l'exonération selon le niveau de rémunération (totale jusqu'à 2,5 SMIC, dégressive de 2,5 à 3 SMIC) ;

. prise en charge de certaines cotisations conventionnelles par la MSA, cotisations au titre de la formation professionnelle et de la retraite complémentaire, cotisations à Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF), pour l'Association nationale pour l'emploi et la formation en agriculture (ANEFA), pour l'Association pour le financement de la négociation collective en agriculture (AFNCA), pour le conseil des études, recherches et prospectives pour la gestion prévisionnelle des emplois en agriculture (PROVEA) et cotisation due au titre du fonctionnement du service de santé et sécurité au travail (SST);

.exonération des cotisations légales de sécurité sociale (assurances sociales agricoles : maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès, allocations familiales et accidents du travail).

2) La création d'une « contribution pour la compétitivité durable de l'agriculture » acquittée par la grande et moyenne distribution pour assurer un financement légitime

Cette extension du dispositif d'exonération représenterait un coût important pour les comptes sociaux, de l'ordre d'un milliard d'euros , qu'il est exclu de financer par le budget de l'Etat sans proposer de compensation, compte tenu de la nécessité de maîtriser l'endettement public.

Pour financer légitimement cette mesure, nous proposons la création d'une taxe appelée « contribution pour la compétitivité durable de l'agriculture » d'un taux avoisinant 1% sur la consommation de produits agroalimentaires, similaire à la taxe « contribution pour une pêche durable », dite « taxe poissons », adoptée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Compte tenu de l'asymétrie des rapports de force entre la grande et moyenne distribution et nos agriculteurs, il est à la fois pertinent et légitime de prévoir une assiette en rapport avec le secteur agricole. D'abord pour garantir la conformité aux normes européennes en vigueur , et surtout pour mettre à contribution les distributeurs et faire ainsi participer l'aval de la filière agricole et agro-alimentaire (les distributeurs) au soutien de l'amont de la filière (les producteurs).

La contribution proposée reprend donc globalement les modalités de mise en oeuvre de la « taxe poissons ». Elle serait assise sur les ventes au détail de produits alimentaires à base de produits de l'agriculture et de l'élevage, et serait due par les distributeurs qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 766 000 euros par an.
Le dispositif proposé participe donc d'un mouvement de modification de l'assiette du financement de notre protection sociale, et ainsi est précurseur de l'évolution que l'économie française va nécessairement devoir connaître.

En effet, une réforme globale du financement de la protection sociale par un transfert des prélèvements sur le travail vers des assiettes fiscales différentes est à terme inévitable pour faire face à la concurrence, comme l'ont notamment démontré les études économiques et dernièrement les deux rapports de la Commission Attali pour la libération de la croissance française.

Le refus du gouvernement d'ouvrir le débat sur l'instauration d'une TVA sociale en 2007 et 2010 montre toutefois qu'elle reste improbable à court terme. Il paraît donc nécessaire de parer à l'urgence de la situation de l'agriculture française en proposant une application sectorielle.

En effet, malgré les gains de productivité avérés réalisés par nos meilleurs agriculteurs, ils ne pourront pas lutter à armes égales avec leurs concurrents européens et mondiaux tant qu'ils seront pénalisés par un handicap structurel de départ aussi prégnant.

Cette mesure pourrait donc constituer la première étape d'un ambitieux projet de renforcement global de la compétitivité de l'agriculture française.
A moyen-terme, il conviendrait de réfléchir aux modalités d'une réforme globale du financement de la protection sociale agricole, qui pourrait inclure les cotisations exploitants dans le champ des exonérations et être financée par la création d'un taux intermédiaire de TVA pour les produits agroalimentaires à taux réduit.
Si le financement de la protection sociale par le travail est un poison pour toute l'économie française, il s'avère un poison mortel à court terme pour notre agriculture.

III. ETUDE D'IMPACT DU DISPOSITIF : LES DEUX DOUBLES EFFETS POSITIFS

1) Les répercussions de la mesure sur le secteur de la grande et moyenne distribution

L'extension du dispositif d'exonération de cotisations patronales à la totalité des emplois salariés agricoles va contribuer à une baisse significative du coût du travail et donc du coût de production des produits agricoles français.

A titre de comparaison, la mise en place du dispositif TO/DE (travailleurs occasionnels) a permis de diminuer le coût horaire du travail saisonnier de près de 25%.

La suppression quasi-totale des exonérations de cotisations sociales patronales dégagerait d'importants revenus complémentaires pour les exploitations agricoles employant des salariés, que l'on peut évaluer en moyenne à près de 5000 euros par an et par salarié.

Elle se traduira par des arbitrages économiques divers, suivant la filière et la santé financière des exploitations concernées : baisse des prix des produits agricoles, hausse des investissements, revalorisation des salaires travailleurs agricoles ou augmentation de l'offre de travail.

Elle contribuerait dans tous les cas à renforcer la compétitivité et la rentabilité de la production agricole française et à diminuer le désavantage de départ que doivent surmonter nos agriculteurs.

La taxe sur la consommation de produits agroalimentaires serait assise sur les ventes au détail, en grande et moyenne surface, de produits agro-alimentaires à base de produits de l'agriculture et de l'élevage (eaux minérales/boissons non alcoolisées et pêche exclues).

D'après les comptes de l'INSEE, la consommation de ces produits représente près de 154 milliards d'euros en 2009, dont 70% dans les grandes et moyennes surfaces d'alimentation générale concernées par la taxe.

Son assiette serait ainsi proche de 100 milliards d'euros, ce qui implique que son taux, qui serait précisé par décret en fonction des simulations établies par les organismes compétents, devrait avoisiner 1% pour compenser l'extension du dispositif d'exonération.

Les entreprises de la grande et moyenne distribution touchées par la taxe devraient la répercuter de trois façons différentes :
 en exerçant une pression à la baisse sur les prix d'achat des produits agro-alimentaires, qui pourrait impacter directement les prix de vente de produits agricoles ;
 en diminuant les marges importantes qu'elles réalisent sur la vente de produits agricoles, notamment dans les bassins de vie où la concurrence entre les différents groupes de la distribution est effective et vertueuse sur les prix ( cf études DGCCRF - UFC);
 en augmentant les prix de vente des produits compris dans l'assiette de la taxe.

On peut raisonnablement espérer que ces entreprises aient recours à ces trois canaux de façon équilibrée, ce qui limitera l'impact de la taxe sur les revenus des agriculteurs et sur le pouvoir d'achat en France.
Sans pouvoir s'appuyer sur des simulations précises et incontestables, il est rationnel d'estimer que l'effet inflationniste de cette mesure sur le prix de vente des produits agroalimentaires sera inférieur à 0,5%.

2 ) L'impact infinitésimal sur le pouvoir d'achat en France

Nous savons que la part de l'alimentation (eau minérales et boissons non alcoolisées inclues) dans le budget moyen des ménages en France avoisine 11% et que 65% des produits agroalimentaires sont vendues dans la grande et moyenne distribution.

Si nous considérons, dans une hypothèse haute, la plus pessimiste, une inflation de 0,5% des produits agroalimentaires, l'impact moyen sur le pouvoir d'achat des ménages en France sera alors proche de 0,035 % (et même inférieur puisque les eaux minérales et boissons rafraîchissantes ne sont pas comprises dans l'assiette de la taxe mais inclues dans le budget moyen alimentaire des ménages)

A titre de comparaison, les dépenses médias et multimédias représentent 8,4% du revenu moyen des ménages français et connaissent une inflation sans commune mesure depuis plus de 10 ans.

Ainsi, ce chiffre d'une inflation maximum de 0,035% du coût de la vie nous paraît raisonnable car peu perceptible, et à mettre en perspective au regard des conséquences de la mise en oeuvre de cette mesure structurelle pour notre agriculture et des externalités positives importantes pour l'ensemble de la France.

En outre, l'inclusion des produits agroalimentaires importés (qui représentent près de 40 milliards d'euros en 2009) dans l'assiette de la taxe vont par ailleurs contribuer à renforcer la compétitivité relative des productions françaises.

En effet, elles sont à l'heure actuelle pénalisées par l'impact des prélèvements sociaux sur les coûts de production et les prix à la vente. La création de cette contribution comportera donc le double avantage de réduire les distortions de concurrence entre les pays européens sur le coût du travail et de faire participer au financement de la protection sociale agricole en France les productions importées.

Enfin, la contribution proposée a l'avantage de présenter une assiette très large et un taux réduit, et ne s'applique qu'aux distributeurs en mesure de supporter une très légère réduction de leurs marges.

Elle participe ainsi d'un financement pérenne et équitable de cette mesure d'exonération de cotisations sociales, qui constitue une nécessité pour le maintien et la compétitivité de notre secteur agricole.

ANNEXE : chiffrage des mesures de la présente proposition de loi

1) La mesure d'exonération de cotisations proposée par la présente a été chiffrée à l'appui des données 2009 de la Mutualité Sociale Agricole. Les chiffres avancés ci-après correspondent au coût que représenterait cette mesure d'exonération si elle avait été mise en oeuvre en 2009.

Extension du dispositif TO/DE à l'ensemble des salariés de la production agricole :

Total des exonérations bénéficiant aux salariés agricoles : 2 052 913 727 euros

Coût net de la mesure d'exonération proposée : 1 025 764 672

2) L'impact pour le budget de l'Etat de la création d'une « contribution pour la compétitivité durable de l'agriculture » peut être évalué à partir des données de l'INSEE relative à la consommation des ménages.

L'assiette des produits agro-alimentaires concernés par la taxe (pisciculture et boissons non alcoolisées exclues) représente près de 154 milliards d'euros en 2009, dont près de 65% sont distribués en grande et moyenne surface. L'assiette de la taxe représente donc environ 100,1 milliards d'euros.

La création d'une taxe au taux de 1% dégagerait plus d'un milliard d'euros de recettes supplémentaires pour le budget de l'Etat.

PROPOSITION DE LOI

Article premier

Le code rural est ainsi modifié :

1°) L'article L.741-16 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi rédigé :

« Les employeurs relevant du régime de protection sociale agricole sont exonérés de cotisations patronales dues au titre des assurances sociales pour les travailleurs salariés qu'ils emploient à des tâches liées au cycle de la production animale et végétale, aux travaux forestiers et aux activités de transformation, de conditionnement et de commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités, accomplies sous l'autorité d'une exploitant agricole, constituent le prolongement direct de l'acte de production.
Cette exonération s'applique à tous les travailleurs agricoles définis au premier alinéa du I, quel que soit le type de contrat conclu entre l'employeur et le salarié.
Cette exonération est déterminée conformément à un barème dégressif linéaire fixé par décret et tel que l'exonération soit totale pour une rémunération mensuelle inférieure ou égale au salaire minimum de croissance majoré de 150% et devienne nulle pour une rémunération mensuelle égale ou supérieure au salaire minimum de croissance majoré de 200%. Pour le calcul de l'exonération, la rémunération mensuelle et le salaire minimum de croissance sont définis dans les conditions prévues aux quatrième et cinquième phrases du premier alinéa du III de l'article L.241-13 du code de la sécurité sociale.

b) Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les travailleurs occasionnels agricoles sont des salariés dont le contrat de travail relève du 3° de l'article L.1242-2 du code du travail ou de l'article L.1242-3 du code du travail pour des tâches temporaires liées aux activités définies au I.

c) Au VI, les mots « notamment la durée maximale d'exonération par année civile » sont supprimés et le deuxième alinéa est supprimé.

2°) L'article L741-16-1 est ainsi modifié :

a) Au II, les mots « et le barème dégressif » sont supprimés et le mot « prévus » est remplacé par le mot « prévue ».

II La perte de recettes qui pourrait résulter pour les régimes sociaux de l'application du présent article est compensée, à due concurrence, par l'augmentation des recettes de l'Etat résultant de la création d'une « contribution pour la compétitivité durable de l'agriculture », telle que définie à l'article 2 de la présente proposition de loi.

Article 2

Après le chapitre VII octies du titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré un chapitre VII nonies ainsi rédigé :

CHAPITRE VII NONIES
« Contribution pour la compétitivité durable de l'agriculture »

Art. 302 bis KI. - Les ventes en France métropolitaine à des personnes autres que des personnes assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée agissant en tant que telles, de produits alimentaires à base de produits de l'agriculture et de l'élevage sont soumises à une taxe.

La taxe ne s'applique pas aux produits de la mer et aux eaux minérales et boissons rafraîchissantes.

Le taux de la taxe est fixé par décret, dans la limite de 1,2 % du montant hors taxe des ventes des produits visés au premier alinéa.

La taxe est due par les personnes dont le chiffre d'affaires de l'année précédente a excédé le premier des seuils mentionnés au 1 de l'article 302 septies A.

Le fait générateur et l'exigibilité de la taxe interviennent dans les mêmes conditions que celles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée. La taxe est constatée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

Le produit de la taxe est affecté aux caisses de mutualité sociale agricole mentionnées à l’article L. 741-1 du code rural et de la pêche maritime.

Article 3

L'article 1er s'applique aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier de l'année suivant la promulgation de la présente loi.

Article 4

L'article 2 s'applique aux ventes réalisées à compter du 1er janvier de l'année suivant la promulgation de la présente loi.

Article 5

La perte de recettes pour les caisses de mutualité sociale agricole résultant de l’article 1er est compensée par la création de la taxe mentionnée à l’article 2.
 
 
 

Les réactions

Enfin l'esprit de résistance

Merci et bravo Monsieur le Député pour votre initiative et la qualité de votre proposition. Il est indispensable que nos élus prennent conscience de toutes les fragilités du tissu économique national quand il est comparé à celui de nos concurrents étrangers. Vos chiffres comparatifs sont édifiants.
J'abonde à votre objection à celles que vous entendrez sur l'augmentation du coût des produits alimentaires. Il est sain de faire payer par tous les produits de plaisir/loisir dont la majorité sont importés (leur production n'enrichit personne en France), le coût du soutien qui sera apporté à tous les producteurs agricoles. Bravo aussi de savoir trouver le moyen de ne taxer que la grande distribution qui fait des bénéfices insultants pour l'ensemble des producteurs.
avec tous nos encouragements pour savoir convaincre vos collègues députés.

Remerciement

Je vous remercie pour vos encouragements et je ferai tout mon possible pour mener à bien cette proposition de loi pour l'agriculture française.

Amitiés

Jean Dionis

Soutien à votre proposition

Bravo pour votre proposition de loi.
Notre Fédération se bat depuis plusieurs années pour que les pouvoirs publics prennent conscience de la distorsion de concurrence que constituent les différences de coût de main d'oeuvre entre les pays européens.
Nous soutenons donc sans réserve votre initiative.
Patrice GENTIÉ
Secrétaire Général de la Fédération Française de la Pépinière Viticole

Ta proposition de loi

Cher Jean,

 J'ai lu ta proposition de loi. Bien que fils d'agriculteur, je me sens un peu démuni pour te répondre. Ma contribution sera donc modeste et se résumera à ces quelques convictions :

1)Oui, tu dois présenter ta proposition de loi. On en saisira toute l'importance dans les mois ou années à venir.
2)C'est exact, en Allemagne, les agriculteurs sont mieux protégés des aléas du marché. Outre-Rhin, l'agriculture a beaucoup progressé, en raison d'une meilleure organisation et du coût du travail plus faible... Solution : pour pérenniser notre modèle, il faut augmenter les revenus des agriculteurs... Si on ne propose pas aux agriculteurs un revenu décent, l'agriculture française disparaitra - Notre ministre Bruno Lemaire abonde dans ton sens -
3)La société Offre et Demande Agricole forme chaque année environ 3000 agriculteurs aux techniques du marché pour apprendre à fixer les prix de leurs futures récoltes.( Mais c'est surtout vrai pour les céréaliers...). Car désormais, les variations vont du simple au double en 1 an. Bien vendre ses récoltes est devenu plus important que bien cultiver... C'est une vraie révolution pour le monde agricole. Les producteurs prennent le réflexe de fixer leurs marges avant leur récolte. Un progrès nécessaire pour sécuriser le revenu des paysans.
4)Les paysans doivent se fédérer face aux acteurs de la distribution très centralisés. Il faut privilégier la concentration entre les agriculteurs et les premiers acheteurs, afin de restaurer les marges des producteurs et d'éviter les conflits - Xavier Beulin, président de la FNSEA et de Sofiproteol -
5)Bien des pistes restent à explorer. L'une d'elles est à la portée de tous :
PRODUIRE LOCAL = CONSOMMER LOCAL
c.à.d. Apprendre à consommer les produits du pays/de la région.
Pourquoi ? Parce que l'agriculture sera bientôt une activité économique décisive : celle de l'AVENIR. Les nations aptes à nourrir leur population et à exporter leur surplus seront les grandes puissances de demain. Car un euro investi dans la terre aujourd'hui, c'est 100 euros d'importation épargnés dans quelques années. Notre pays doit se mettre au vert pour retrouver son rang.

Ceci dit, Jean, je me réjouis que tu puisses contribuer au renouveau de l'ambition française : « appuyer sur la charrue et inciter les jeunes à s'installer. » Comme l'affirme Christophe Barbier, éditorialiste de l'Express. :

LA FERME, NOUVEAU CENTRE DE PROFIT !


Bien amicalement,
 
Jean Luc et Christiane Gabriele


PS : si le prix des matières premières et des intrans agricoles poursuivent leur hausse, on mesurera toute la portée de ta proposition de loi.

proposition de loi

bonjour,

en qualité de filière arboricole du Lot et Garonne, nous sommes favorables à votre proposition de loi même si notre filière, la noisette, est peu consommatrice de main d'oeuvre.

l'avantage concurrentiel que nos partenaires européens ont su mettre en oeuvre ne doit pas être refusée par la France qui a souvent des positions différentes des autres pays semblables. Ce n'est pas tenable.
enfin, en qualité de directeur d'un site industriel, je dois aussi faire part de mon inquiétude sur le pouvoir d'achat procuré par le SMIC qui ne permet plus à un travailleur de vivre décemment.
Votre texte de loi fera peut être baisser un peu la pression sur les prix de revient et donc sur les salaires, toujours plus bas, que la grande distribution nous demande alors que toutes les autres charges augmentent (énergie en particulier alors que l'on nous avait dit que le recours au nucléaire nous mettait hors compétition pétrolière...).
nous pourrons alors partager un peu mieux les revenus de l'activité économique pour envisager un petit coup de pouce au SMIC.

C. PEZZINI
directeur de Unicoque
coopérative de noisettes

jdMoYQZSjvnqfN

Cette pyramide a fait coelur beaucoup d encre au moment et apre8s sa construction. Je l ai personnellement toujours aime9e et je la trouve tre8s bien inte9gre9e dans cette cour du Louvre. Une jolie se9rie qui me rappelle qu il serait temps que je remonte faire une se9ance photos dans la capitale.

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