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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Salaires abusifs : Pourquoi la France doit suivre l’exemple Suisse

Publication : 04/03/2013  |  00:12  |  Auteur : Jean Dionis

La Suisse n’a pas la réputation d’être ni trop imprudente, ni un pays spécialement coercitif en matière de liberté d’entreprendre…..et pourtant, ce Dimanche, les Suisses, par référendum, et à une très large majorité (68% de Oui) viennent d’approuver une initiative réellement novatrice (l’Initiative Minder) pour limiter dès sa mise en œuvre (à priori au début 2014) les salaires abusifs des cadres dirigeants dans leurs plus grandes entreprises.

Ecoutez plutôt l’audace de nos voisins Suisses:

• Les Assemblées générales d’actionnaires devront approuver chaque année la rémunération du Conseil d’administration et des dirigeants. Ils pourront opposer aux propositions de leurs dirigeants un droit de veto en la matière

• Les parachutes dorés sont interdits à l’entrée et à la sortie d’une entreprise

• Toute violation de ces dispositions, qui auraient valeur constitutionnelle, sera punie jusqu’à trois ans de prison et une amende pouvant représenter jusqu’à six ans de rémunération.

Qui est ce M.Minder ? Et pourquoi est-il parti en croisade contre ces salaires abusifs ? C’est d’abord la révolte d’un entrepreneur dont la PME familiale, spécialisée dans les soins buccaux et capillaires, Trybol SA, fondée au tout début du XXe siècle, a été à deux doigts de faire faillite il y a une douzaine d’années. Elle avait un énorme contrat (500 000 francs suisses) avec la compagnie aérienne Swissair, pour la fourniture de tubes de dentifrices et autres produits hygiéniques.
Après le 11 septembre 2001, Swissair a connu comme bien d’autres compagnies aériennes des difficultés financières. Elle a décidé de dénoncer le contrat avec Trybol, poussant celle-ci au bord du dépôt de bilan. Mais ce qui a le plus énervé Minder, c’est que le patron de Swissair de l’époque, Mario Corti, s’était vu octroyer une indemnité de 12,5 millions de francs suisses qu’il n’avait pas eu le bon goût de rembourser. Quand il évoque cet épisode dans la presse, Minder ne décolère pas : que Corti ait cassé le contrat d’un fournisseur bien géré plutôt que de restituer sa prime personnelle devrait être considéré comme « criminel », selon lui……et voilà Minder parti en croisade qu’il vient de gagner aujourd’hui même.

Pourquoi les Suisses, peuple de culture libérale, sont-ils les premiers à se révolter face au scandale de ces rémunérations abusives ? C’est la quasi-faillite de la banque UBS en 2008, minée par des placements risqués à l’origine de bonus juteux pour les banquiers, qui a alimenté la colère des Suisses, indignés par ses pratiques et leurs conséquences. Suite à cet épisode, il n’aura pas été difficile de recueillir dans la population les 100 000 signatures nécessaires à l’organisation d’un vote.
L’affaire du parachute doré versé au patron de Novartis a encore conforté les tenants d’un meilleur contrôle. Fin février, le conseil d’administration du géant pharmaceutique a en effet attribué une prime de départ de 72 millions de francs suisses (60 millions d’euros) à Daniel Vasella. L’information a suscité un tel tollé qu’il a finalement renoncé à ce parachute doré garanti 24 carats.

Mais nous aurions tort de n’y voir qu’un problème suisse. La France a connu depuis les années 1980 la même explosion des salaires des dirigeants des grandes entreprises. On connait le discours de justification de cette dérive. Les dirigeants contribuent de manière décisive aux résultats de leurs entreprises. Leur contribution, leur utilité sociale justifieraient les salaires véritablement délirants que certains dirigeants s’octroieraient. ……Il y a bien sûr une part de vérité dans cet argumentaire : oui, l’emploi des cadres dirigeants est bien un marché répondant aux lois de l’offre et de la demande, oui les cadres dirigeants sont de plus en plus mobiles, comme s’en sont aperçus avec beaucoup de naïveté initiale nos responsables socialistes avec leur dispositif de taxation à plus de 75 % des revenus supérieurs à 1 million d’€…… Mais, il faut être bien aveugle pour ne pas voir le dysfonctionnement de ce « marché des cadres supérieurs » : primes données alors que les résultats de l’entreprise sont négatifs, explosion irrationnelle de ces rémunérations au regard de la rentabilité de l’entreprise…..qui mine la cohésion sociale de notre pays ?

Alors que faire ? Le gouvernement a pris une sage décision en limitant l’écart de rémunérations dans les entreprises publiques de 1 à 20. Nous avons vu qu’il s’était fourvoyé par la suite avec cette mesure ni faite, ni à faire de la taxation à plus de 75%, en confondant politique de rémunération et politique fiscale….Depuis plus rien….jusqu’à ce que les Suisses nous réveillent.....

Je dis bien « nous réveillent ». Car, sur ce sujet, le diagnostic est posé depuis longtemps…..la démocratie dans l’entreprise est souvent dévoyée. Dans l’entreprise, « qui paye, commande », me direz-vous……et bien, non !!!, les propriétaires des entreprises, à savoir les actionnaires, n’ont pas leur mot à dire sur des sujets aussi sensibles et importants……ces décisions se prennent dans les conseils d’administration opaques et verrouillés de ces grandes entreprises où chacun a intérêt à ménager l’autre compte-tenu du caractère « incestueux » de la composition de ces conseils d’administration, pour l’essentiel par les mêmes personnes qui se renvoient de manière très étudiée …l’ascenseur. L’un des premiers à avoir modélisé la captation d’une partie importante de la richesse des entreprises par les personnes les mieux payées représentant moins de 1 % de l’effectif est le Prix Nobel Joseph Stiglitz dans son remarquable livre « Le Prix de l’inégalité »…..

La solution Suisse est donc la bonne : Elle ne mélange pas politique fiscale et politique de rémunérations, elle rend la pouvoir dans l’entreprise à ses propriétaires, les actionnaires, elle supprime les rémunérations sans justification, …et elle pénalise lourdement les tricheurs…..

Il est temps que la France regarde vers la Suisse et légifère pour aller dans la même direction….Il y a longtemps que Charles de Courson, député UDI de la Marne, propose les principes d’une révolution démocratique dans l’entreprise qui rendrait le pouvoir à ses véritables propriétaires. Charles, c’est maintenant que tu dois agir, que l’UDI doit porter ce projet de loi. Le sujet est trop sérieux pour être abandonné aux populistes de droite ou de gauche. Alors, très chers parlementaires UDI, notre initiative Minder à la Française, notre proposition de loi de Courson, c’est pour quand ?

@+

Les réactions

Adhésion totale!

Un seul oubli, le pouvoir référendaire du peule en Suisse devrait aussi être adapté en France de manière efficace.

Cela permettrait au centre de proposer ses idées les plus importantes directement au peuple sans être bloqué par la structure bipolaire de la représentation nationale.

trés bonne analyse

je suis entièrement d'accord avec toi Jean et quoi rajouter de plus a ce que tu dit si ce n'est que la seul force aujourd'hui de conduire cette politique et de mener la révolution démocratique dans les entreprises est l'UDI seul partie qui est capable d'apporter des solutions et fédérer l'europe pour éviter de tel disproportion dans les rémunérations non justifiables.
Bonne journée et merci pour vos chroniques.

une question de relativité

Qu'est ce qui est abusif? le salaire d'un patron de grand groupe ou du start-upman qui génèrent profits et emplois (direct et indirect) et prennent des risques ou le salaire d'un responsable d'une institution/organisation, vous savez tous ces machins qui ne servent à rien et ne produisent rien (matériellement et immatériellement), financés par le contribuable...
Aujourd'hui, il y a plus de conseilleurs, d'analyseurs, de rapporteurs (vous savez tous ces experts que nous voyons défilé à la télé et qui viennent nous expliquer les catastrophes au lieu de les anticiper*) que de faiseurs, réalisateurs, créateurs, innovateurs... et c'est peut-être là où notre société déraille!!!

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