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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Leçons Galloises

Publication : 21/10/2024  |  07:54  |  Auteur : Webmaster

Je reviens d’un long week-end de trois jours passés au Pays de Galles, dans la ville jumelle d’Agen, Llanelli.

J’y étais invité par le conseil municipal de Llanelli pour fêter le 50e anniversaire de leur autonomie municipale, à l’occasion de l’installation de leur conseil municipal en 1975. 15 ans plus tard, un des gestes fondateurs de ce jeune conseil municipal fut de se jumeler avec la ville d’Agen.

À vrai dire, ce fut un mariage arrangé. Dans les années 1970, l’équipe nationale du Pays de Galles était la meilleure du monde avec des joueurs de légende : Gareth Edwards, Barry John, Phil Bennett, Derek Quinnell… Et #Agen dominait le rugby français, que ce soit sportivement ou politiquement. Nous cherchions un jumelage avec une ville anglaise… Et les autorités rugbystiques de l’époque ont vite fait de nous rapprocher de villes qui ont le rugby dans le sang, comme passion commune : Agen, la française, et Llanelli, la galloise. Mais les mariages arrangés peuvent aussi être des mariages heureux. Et ce fut le cas pendant maintenant 36 ans avec nos amis gallois.

Notre week-end commençait comme il se devait : par un match de rugby, celui de l’équipe des Scarlets, qui fait la gloire de nos amis de Llanelli.

Les Scarlets jouaient dans leur stade fétiche, Parc y Scarlets, magnifique stade d’une capacité de 10 000 places, complètement fermé, à l’anglaise, avec une pelouse hybride impeccable. L’adversaire de la soirée était l’équipe des Bulls de Pretoria dans le cadre de l’URC, championnat qui rassemble quatre équipes galloises, quatre équipes irlandaises, deux équipes italiennes, deux équipes sud-africaines et quatre équipes écossaises.

Le match fut de très haut niveau, gagné de justesse par nos amis gallois : 23 à 22. Nous eûmes la chance, en début de soirée, d’avoir un moment de conversation avec le numéro huit de légende du Pays de Galles : Derek Quinnell.

Seule surprise un peu triste de la soirée : la très faible assistance à ce match, à peine un peu plus de 2000 personnes. J’ai interrogé nos amis à ce sujet. Ils m’ont répondu qu’effectivement le public n’était plus au rendez-vous parce que cette formule de championnat était illisible et impopulaire, mais aussi que le rugby au Pays de Galles était maintenant critiqué comme sport dangereux, perdant des joueurs, notamment chez les jeunes, au profit du football.

Ce triste constat amène, de ma part, deux observations : D’abord, le rugby français a de la chance d’avoir deux compétitions, le Top 14 et la Pro D2, à la fois de très haut niveau et passionnantes. Ce n’est visiblement pas le cas du championnat de l’URC, apatride et illisible. Enfin, rien n’est gagné pour le rugby dans le cœur des jeunes et des familles actuelles. Il doit impérativement répondre à certaines de leurs exigences incontournables : celle de la santé des joueurs est clairement la première de celles-ci.

Après une bonne nuit réparatrice, le samedi fut consacré à la partie protocolaire de notre voyage. Autant nous sommes proches des administrations territoriales de nos voisins allemands (lire ma chronique « Leçons Allemandes ») et espagnols en ce qui concerne le bloc municipal (commune et intercommunal), autant nous sommes différents de l’administration territoriale britannique. Il y a plus de 3 fois moins de communes au Royaume-Uni qu’en France : 10 000 pour le Royaume-Uni, 34 000 pour la France. Le niveau municipal britannique est relativement récent (50 ans d’âge à peine pour la municipalité galloise contre des siècles d’autonomie municipale agenaise). Et en plus, cette autonomie municipale est très limitée : nos amis gallois gèrent un budget modeste de 1,8 million d’euros et emploient pour cela 40 personnes, là où la ville d’Agen gère un budget annuel de 50 millions d’euros et emploie à peu près 650 personnes. Alors qui fait le travail, à Llanelli ? Eh bien, c’est le comté – County de Carmarthenshire exactement – : 190 000 habitants, soit entre les 100 000 habitants de notre agglomération d’Agen et un petit département (on pense aux 330 000 ha du département de Lot-et-Garonne). Ces différences d’administration allemande, espagnole et galloise nous permettent de cerner notre spécificité française.

Elle est faite de deux maillons forts que sont le bloc communal (communes et intercos) et l’État national, et de deux maillons faibles : les départements et les régions. C’est en réfléchissant à partir de ce constat que l’on pourra, dans le respect de notre histoire nationale, améliorer l’efficacité de l’administration territoriale en France.

Trois pistes me semblent à creuser :

1- faire émerger des communes « pôles de centralité » entre 2000 et 5000 habitants dans notre ruralité, si possible en accueillant les petites communes comme communes associées autour de celles-ci.

2- revenir sur la réforme instituant les grandes régions. Cette réforme est un échec (pas de réduction de coût, etc.). Un retour à des régions à taille plus humaine doit favoriser les fusions des échelons départementaux et régionaux.

3- envisager un nouvel élan de la décentralisation française avec le transfert des compétences nationales d’éducation et de santé à ce nouvel échelon régional.

Enfin, nos amis gallois nous ont impressionnés par la vitalité de leur bénévolat (ils ne sont pas loin d’être champions du monde), leur mobilisation pour la défense et la promotion de la langue galloise (39,9 % de la population parle le gallois, ce que nous n’avons pas su faire, nous, avec notre occitan)… et avec humilité, ils nous ont dit avoir le même débat national que nous sur l’immigration avec les mêmes symptômes (montée de l’extrême-droite…).

Un grand merci à nos amis gallois pour leur disponibilité, leur gentillesse, leur originalité… Depuis 36 ans, nous sommes devenus des amis fidèles.

À nous, citoyens d’Agen, de faire notre part dans l’entretien et le développement de ce qui est notre « patrimoine commun ».

@+,

Jean Dionis, Maire d’Agen

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