Il y a deux semaines, L'Express publiait de larges extraits du livre de Hélène Constanty et Vincent Nouzille, "Députés sous influences, le vrai pouvoir des lobbies à l'Assemblée Nationale", aux éditions Fayard. Vous pouvez retrouver cette enquête sur le site de L'Express http://www.lexpress.fr (N'hésitez pas à participer au débat ouvert sur le blog des auteurs : http://blogs.lexpress.fr/influence/).
Parmi ces extraits, les auteurs établissaient un classement de l'activité des députés à partir des interventions en séances publiques entre 2004 et 2006. J'y apparais bien classé puisque 16ème sur 577. J'avais d'abord, dans un premier temps, décidé de ne pas m'exprimer dans mon blog sur cette enquête. Mais le nombre de réactions que j'ai eues à ce sujet m'invite à changer d'avis, à m'exprimer et à dialoguer avec vous à ce sujet.
OK, ce genre de classement est éminemment contestable pour une raison claire. Ce n'est pas parce qu'un député parle dans l'hémicycle, qu'il y dit des choses intelligentes et qu'il est influent sur la législation de notre pays. Il y a d'ailleurs d'excellents contre-exemples parmi les députés les mieux classés.
Mais, ne soyons pas hypocrites. Je ne connais pas, en sens inverse, de députés influents à Paris qui ne s'expriment pas relativement fréquemment dans l'hémicycle.
Alors, oui, ce livre ouvre un débat essentiel : celui du travail effectif des députés à Paris, de nos marges de manoeuvre, de nos conditions de travail……Mettons les pieds dans le plat. L'élection d'un député se fait sur le terrain. Il y a donc une tentation très forte de « zapper Paris » et de se concentrer sur le seul travail électoral payant, à savoir celui du terrain. Et c’est une réalité : l’absentéisme et le manque de travail législatif sont deux plaies du parlement français.
Or, le travail législatif est le cœur même du mandat de député. Entendons-nous bien sur ce point clé. Faire un vrai travail de médiation et d’interventions pour nos concitoyens notamment les plus fragiles fait depuis toujours partie du travail parlementaire. Mon équipe parlementaire et moi-même essayons de le faire avec passion et professionnalisme. Même chose pour la promotion des projets locaux à Bordeaux ou à Paris……mais, le cœur du mandat, c’est l’élaboration de la loi et le contrôle du gouvernement.
Alors, bien sûr, ce n’est pas facile. Quand vous arrivez à Paris de votre Lot-et-Garonne profond, personne ne vous attend et il faut jouer des coudes. Plus important, il faut séparer nettement la plupart des domaines où votre travail se limitera à faire entendre la voix des Lot-et-Garonnais à Paris des domaines où vous décidez de peser sur l’élaboration de la loi.
En ce qui concerne les premiers, je fais systématiquement remonter à Paris ce que j’entends à Agen ou à Nérac, quelque soit le sujet et mon expertise dans ce domaine. Les infirmières libérales viennent m’expliquer leurs difficultés, j’alerte le ministre et je l’interroge par question écrite. Même attitude pour les intermittents du spectacle ou les mille et une autres composantes de notre société si diverse……Je crois à l’utilité de ce travail de capteur de terrain si l’on ne veut pas que la tête de notre système soit sourde et aveugle.
Mais, il est vrai que peser sur la loi, participer à son élaboration, c’est un tout autre sport. Il faut lire les projets gouvernementaux, recevoir les socioprofessionnels pour écouter ce qu’ils en pensent (les fameux lobbies ou groupes d’influence…..), prendre du temps pour forger vos propres convictions, rédiger ou faire rédiger vos amendements pour les traduire en droit, les défendre en commission et dans l’hémicycle.
Bref, c’est un vrai travail….passionnant …et fatiguant. Comme vous découvrez assez rapidement que vous ne pouvez pas peser sur des domaines trop vastes, il vous faut vous spécialiser, en fonction de l’identité du territoire dont vous êtes le représentant, ainsi que de votre propre personnalité. C’est pour ces raisons que j’ai choisi d’être membre de la commission « Economie » et de me spécialiser dans les domaines du médicament, des filières agricoles des grandes cultures et des fruits et légumes (et oui, la réalité socio-économique du lot-et-garonne commande !!!!) et enfin dans le domaine des nouvelles techniques de l’information et de communication (Internet, la téléphonie mobile, etc……) dont je suis issu professionnellement.
Au bout de ce parcours, il y a le bonheur de s’apercevoir que l’élaboration de la loi n’est pas seulement un processus kafkaïen, mais quelque chose d’accessible à la démocratie pour peu que celle-ci se donne la peine de jouer son rôle.
Alors, oui, si l’on veut, comme je le veux, voir émerger de nouvelles pratiques politiques dans mon pays, mettons tout sur la table et d’abord la réalité de notre travail parisien….Mais, me direz-vous, seul le terrain compte pour les élections….pourquoi ouvrir ces débats oiseux ? D'accord, mais le nombre de réactions au dossier de l’Express montre que la France du terrain commence à s’occuper de ce qui se passe là-haut et ça, c’est une sacrément bonne nouvelle pour la France.
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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire
Réponse à Christophe sur la démocratie participative
Je suis moi aussi très intéressé par l'idée de démocratie participative.
dans les nouvelles pratiques politiques que j'essaie modestement de faire émerger, elle tient même une très grande place.
Cele-ci est indispensable pour représenter correctement des personnes qui vous ont mandaté pour les représenter sur une ligne politique globale, mais sans vous dire quelle était leur sensibilité sur tel outel problème précis.
Prenons un exemple : Le texte énergie GDF-Suez.....J'ai reçu à trois reprises les syndicats lot-et-garonnais pour échanger avec eux sur les enjeux de ce texte et cela a été passionnant et cela a été carrémment décisif dans ma perception du projet et dans ma position finale.
Ce qui est clair pour moi, c'est qu'il ne faut pas opposer démocratie représentative et démocratie participative, mais qu'il faut au contraire lees faire travailler ensemble,
....et c'est là que je suis absolument contre la proposition de jury populaire mis en avant par Ségolène Royal !!!!!!
Bref, ce qui compte dans la démocratie participative, ce n'est pas le flacon, le concept, c'est l'alcool, le contenu.....
A +
Amitiés,
Jean,
ta réaction suite à l'article de l'Express
Personne ne peut ignorer le travail que tu abats: continue sur ta lancée et apporte chaque jour ta pierre à l'édifice de la vraie démocratie; je partage ton analyse du rôle d'un député et j'ose croire que les idées que tu défends à Paris ne feront que conforter ta place en Lot-et-Garonne! l'honnêteté intellectuelle et le travail ont ,et sont toujours appréciés par nous, gascons, à leur juste valeur. Tu mérites que nous choisissions de te laisser du temps pour accomplir d'autres changements nécessaires et je sais que nombreux sont ceux qui partagent ce sentiment.
Pas de souci pour 2007, le terrain te suivra!
Réponse à Nadine Salmons
Il est Dimanche après-midi.....et je trouve le temps de bloguer un peu.
D'abord pour te dire merci pour ton message. Il m'a fait chaud au coeur. J'espère que ton analyse est la bonne. L'avenir nous le dira....
mais, il reste que les élus nous ne sommes pas des machines. Tu l'as appris douloureusement, Nadine....Alors, j'ai apprécié que quelqu'un d'engagé et qui a fait bouger sa commune me fasse ce clin d'oeil d'encouragement....;
Amitiés,
A propos des jurys citoyens de Madame Royal....
Je réagis aux deux messages de christophe....;
A propos des juryscitoyens de Ségolène Royal, et au risque de le décevoir, je ne suis pas du tout d'accord avec elle e, pour l'argumentaire, Christophe, je vous renvoie à ma dernière rubrique sur le blog. Je serai très heureux de lire votre réaction à mon analyse.
A propos du rôle de la technocratie, c'est une immense question, qui est effectivement au centre de la question démocratique moderne. Avant tout débat, il faut d'abord reconnaître que la tendance lourde de nos sociétés est à la complexification et que tout discours sur le retour à un monde simple est mensonger.
Car, l'émergence de la technocratie, c'est d'abord, la réponse à la complexité de l'art de gouverner....
Toute décision publique doit être préparée par une phase d'analyse, bref d'expertise.....et cela ne me choque pas et je me méfie comme la peste des doscours populistes contre les experts.
Il reste que la décision est, elle, politique et doit rester aux élus qui ont, seuls, légitimité pour décider au nom de l'intérêt général. encore faut-il soit préparés pour se faire respecter par rapport aux experts.....Vaste débat,
Voilà quelques réflexions pour ouvrir le débat.....