Merci de prendre connaissance de mon intervention en séance plénière du 6 mai :
Monsieur le Président, chers collègues,
La Région Nouvelle-Aquitaine tient aujourd’hui sa séance d’approbation de l’avant-projet de SRADDET tel qu’il est exigé par la loi NOTRe de 2015.
Premier constat : notre région est en retard. Et une manière de mesurer ce retard est de souligner qu’aujourd’hui par rapport aux 11 autres Régions métropolitaines concernées par l’élaboration d’un SRADDET, 4 Régions ont déjà passé la première étape sur laquelle nous allons travailler aujourd’hui. “Pas grave ce retard”, me direz-vous. Et bien si, et le calendrier de nos séances plénières en attestent.
En effet, excellente initiative que de prévoir pour le lundi 9 juillet une séance consacrée à la transition écologique, mais franchement au fond de nous-mêmes nous sommes tous unanimes pour penser qu’il aurait fallu que ce débat ait lieu maintenant. Pour qu’il nourrisse notre SRADDET, plutôt qu’en juillet où il sera suspendu en l’air entre la première version du SRADDET et le retour des territoires qui ne vous sera pas encore parvenu.
Or c’est bien parce que nous sommes en retard et que vous êtes contraint par la procédure législative du SRADDET que vous convoquez dans la précipitation cette séance. Si on peut comprendre certaines raisons objectives de ce retard (le décès de notre collègue Gérard Vandenbroucke, l’harmonisation plus difficile ici avec trois anciennes régions qu’ailleurs) une partie non négligeable du retard est dûe à de longs et laborieux ajustements au sein de la majorité régionale. Ces ajustements auraient mérité d’être faits démocratiquement, de manière transparente, avec toutes les composantes de notre assemblée. Comme d’ailleurs vous le faites avec raison pour la séance de juillet. Et bien entendu, nous allons lors de notre séance, retomber sur ces fameux ajustements. Le foncier, le photovoltaïque, les réserves en eau seront autant de points durs qu’il faut absolument résoudre de manière consensuelle. Ou le SRADDET sera alors un échec.
Deuxième constat : Sur le fond, votre avant-projet de SRADDET est dominé par les enjeux de la Transition Écologique, quitte à réduire à la portion congrue les autres enjeux imposés par la loi de 2015 à savoir le développement durable et l’égalité des territoires. C’est un choix politique et je vais vous surprendre.
Le groupe Union Centriste non seulement le comprend, mais s’inscrit dans cet élan que vous voulez donner à la Transition Écologique sur notre territoire régional. Reconnaissons-le, dans cette dimension, votre texte ne manque ni d’intérêt ni de force. Et pour que cela soit très clair avant un certain nombre de débats qui nous opposeront, le groupe Union Centriste veut en profiter pour saluer l’apport sur le long terme du mouvement écologiste et de ses élus dans notre prise de conscience collective, et dans le changement de nos comportements.
Du verre d’eau de René Dumont en 1974 et son fameux “je bois devant vous un verre d’eau précieuse” aux manifestations de notre jeunesse pour le climat de cet hiver, il y a une continuité dont nous reconnaissons la fécondité dans l’action publique de notre pays.
Alors, tous écolo ? Le Président Rousset écolo, la majorité écolo ? Et pourquoi pas les différentes oppositions ?
En ce qui nous concerne, l’Union Centriste, fidèles à notre addition sémantique, ce sera un Oui pour être écolo mais un Oui Si.
Oui si, d’abord parce que nous sommes vaccinés. On nous a déjà fait le coup du grand élan écologique, c’était en 2007 dans la foulée de l’élection présidentielle. Avec habileté, Nicolas Hulot avait transformé sa non-campagne en une promotion de sa charte pour l’environnement qui fut signée par les principaux candidats à cette élection et notamment par son vainqueur Nicolas Sarkozy. Cette charte prévoyait un Grenelle de l’environnement, rassemblant toutes les parties prenantes de la nation autour des enjeux écologiques. Ce Grenelle de l’environnement eut lieu, sous la conduite de Jean-Louis Borloo et à un niveau modeste j’y ai participé. Et c’est vrai qu’il y avait de l’écoute, du souffle, un élan.
Puis ensuite, sont venues les lois Grenelle de l’environnement 1 et 2. Et Monsieur le Président, nous étions députés ensemble. Vous et moi avons voté avec enthousiasme ces lois, qui étaient par certains côtés positives.
Qu’en reste-t-il aujourd’hui sur le terrain ? Si ce n’est une centralisation des décisions autour de l’Etat et de ses DREALs. Avec une ligne de partage législative catastrophique, l’Etat gérant les risques, les collectivités territoriales gérant soi-disant l’aménagement du territoire et l’urbanisme ou plutôt ce qu’il en reste. En effet, l’Etat s‘est servi de la gestion des risques pour vider partiellement de son contenu les compétences des territoires. Et se faisant, une énorme machine à contentieux entre l’Etat et les collectivités territoriales a été créée qui paralyse des centaines de dossiers en France.
Et bien Monsieur le Président, nous ne voulons pas que ce scénario se reproduise avec le SRADDET. En aucun cas les Centristes ne tolèreront que le SRADDET soit l’outil de centralisation régionale qui contraigne et réduise à peau de chagrin la liberté des territoires.
Et il y aura Monsieur le Président, un débat fondateur autour de votre Objectif 31 et de vos Règles 1 à 5 sur le foncier.
Ou bien vous maintiendrez cet objectif de 50% de réduction des surfaces constructibles. Objectif aujourd’hui adoucit par le discours qui l’entoure dans votre document, mais dont l’Etat fera une prescription dans chacun de nos documents et ceci notamment après l’ordonnance prévue par la loi en 2020 pour application dès 2021 qui fixera véritablement le statut juridique du SRADDET.
Mais Monsieur le Président, j’en prends date aujourd’hui, l’ordonnance ira dans le sens de la prescription, ira dans le sens de l’exigence de la compatibilité des SCOT et des PLUI de nos territoires avec le SRADDET. Et si vous maintenez cet objectif, le piège se refermera sur les collectivités locales comme les lois de 2007 se sont refermées sur elles. A ce moment là, vous aurez créé avec le SRADDET et votre objectif de 50% un autre outil de centralisation et de recul des libertés des territoires.
Ou bien au bout du processus de concertation, vous aurez l’audace de concilier ambition écologique et liberté territoriale. Et cela passe par une approche conventionnelle, territoire par territoire. Et là, vous aurez une chance d’avoir créé un élan partagé, consensuel, sur l’immense région hétérogène dont vous avez la responsabilité.
Vous l’aurez compris, ce débat là est pour nous un débat fondateur. Comme le seront les débats sur l’énergie et sur l’eau.
Sur l’énergie, finalement c’est le titre de la chanson de Francis Cabrel qui me vient spontanément à l’esprit : Est-ce que ce monde est sérieux ?
Allons-nous être sérieux dans notre volonté de promouvoir les énergies renouvelables au-delà de l’acquis actuel, notamment hydraulique, de notre région. Nous le savons, nous ne construirons pas beaucoup de nouveaux sites d’hydro-électricité. Nous le savons aussi, mise à part la façade charentaise, notre région n’est pas une région climatiquement favorable à l’éolien. Nous le savons enfin, l’exploitation des méthaniseurs et plus largement de la filière bois-énergie restera marginale.
Reste le photovoltaïque, où notre région a un véritable potentiel. A cause de ses heures d’ensoleillement, à cause aussi de son relief très plat favorable à l’optimisation de cette énergie sur la majeure partie du territoire. Alors nous sommes devant un vrai choix stratégique : Nous pouvons être ambitieux sur le photovoltaïque, et cela veut dire ne pas le cantonner aux surfaces déjà artificialisées (parkings et toitures) et notamment accepter le concept de fermes photovoltaïques sur des terrains à faible valeur agronomique. Et nous avons alors le chemin pour développer significativement la part d’énergie renouvelable en Nouvelle-Aquitaine, en multipliant réellement par 4 notre production d’électricité solaire. Nous vous proposerons un amendement très important pour aller dans ce sens.
S’il n’était pas accepté, là encore il y aurait un risque très fort à ce que le SRADDET soit utilisé comme un outil de blocage du développement du photovoltaïque.
Sur l’eau, enfin, nous en avons déjà eu le débat dans cette assemblée.
Et je veux saluer ceux d’entre-nous, et notamment Henri Sabarot, qui cherchent des chemins de compromis entre celles et ceux qui de fait ne veulent qu’aucune réserve en eau ne soit faite en Nouvelle-Aquitaine; et celles et ceux dont nous sommes, qui appellent à la constitution d’une véritable politique publique de réserves en eau pour nous adapter à une des réalités les plus établies du changement climatique dans notre territoire néo-aquitain.
En effet, la pluviométrie en Nouvelle-Aquitaine a changé, pas tellement en quantité annuelle mais en répartition mensuelle. Les pluies sont maintenant beaucoup plus concentrées sur les mois d’hiver, provoquant des situations de sécheresse généralisée sur notre territoire. La Région, avec le Train du Climat, a pris une très belle initiative de sensibilisation. Je suis allé écouter les climatologues qui animaient cette initiative. Ils ont été très clairs, la Région Nouvelle-Aquitaine se méditerranéise et il faut maintenant passer à une politique publique de l’eau telle que la mènent chacun des pays méditerranéens (Portugal, Espagne, Italie, Grèce, etc).
Voilà, Monsieur le Président, quelles seront les lignes-force des amendements que nous proposerons à notre assemblée. Nous y avons apporté beaucoup de travail et de conviction.
Nous demandons à chacune et à chacun de nos collègues de les considérer avec sérieux et bien évidemment, la position de notre groupe sur le vote d’approbation de cet avant-projet en fin de séance dépendra très directement du sort qui leur auront été réservé.
Je vous remercie.
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