Jeudi 10 novembre 2022, nous y inaugurions la deuxième édition des Rencontres Philosophiques Michel Serres au théâtre Municipal d'Agen, et voici mon discours :
Monsieur le Préfet,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Madame la présidente du Conseil Départemental, chère Sophie,
Mesdames, Messieurs les élus, conseillers régionaux et départementaux, maires et conseillers municipaux
Chère Hélène, Cher Jacques, Cher Jean-François, chers amis membres de la famille de Michel Serres,
Monsieur le président de l’association des Amis agenais de Michel Serres, cher David et tous les membres de votre association,
Chers amis d’Agen et d’ailleurs qui ont répondu à notre invitation.
Au nom du Conseil Municipal de la Ville d’Agen, je salue chacune et chacun d’entre vous et je vous souhaite chaleureusement la bienvenue dans ces Rencontres Philosophiques Michel Serres à Agen et je salue spécialement celles et ceux d’entre vous qui nous viennent d’ailleurs. Nous allons vivre ensemble une fin de semaine particulièrement enrichissante.
La Ville d’Agen a de nouveau l’honneur de vous accueillir au sein de son Théâtre Ducourneau pour cette soirée d’ouverture des Rencontres Philosophiques Michel Serres. Celui-ci aimait ces lieux et nous sommes nombreux à garder en mémoire la conférence lumineuse qu’il y prononça sur l’histoire de la communication le 08 mars 1991 lors de la soirée d’hommage que lui rendait sa ville en l’honneur de son élection à l’Académie Française.
Il y a un an, nous organisions les premières rencontres qui sont nées comme vous le savez peut-être, d’une promesse. Celle prononcée par moi-même, le 8 juin 2019, lors des obsèques de Michel Serres en la cathédrale Saint-Caprais d’Agen.
J’ai alors fait le serment de faire mémoire de Michel Serres et de promouvoir son œuvre à Agen.
Ces Rencontres ont tout leur sens ici à Agen.
A Agen, parce que son œuvre est enracinée dans un parcours personnel qui le lie exclusivement, jusqu’à l’âge adulte, à Agen.
Agen, ville de Garonne, ville de plaine, ville au contact de la ruralité, ville de rugby.
Agen est assurément une des clés de lecture et de compréhension de Michel Serres.
Faire mémoire parce que nous sommes profondément convaincus de la portée philosophique, moderne et même prophétique de son œuvre et, notamment, sur ses deux lignes forces que sont la Communication et l’Ecologie.
Mais au fond, que veut dire faire mémoire ?
Loin de vouloir nous contenter de poser un regard attentionné mais passéiste sur notre Illustre, nous voulons puiser dans l’héritage philosophique de Michel Serres, la matière et l’énergie pour nourrir et éclairer nos vies présentes, nos attitudes, nos politiques publiques, comme un souffle prophétique nous ramène aux vérités essentielles et les rattache à nos réalités quotidiennes.
Ainsi sont nées les Rencontres Philosophiques, parce que comme Michel Serres, nous croyons à la vertu du débat, du contradictoire, d’une dialectique ouverte et accessible. Et comme Michel Serres nous croyons à l’importance d’une culture populaire, mieux, d’une sagesse populaire, et ces rencontres sont au service de cette culture et de cette sagesse populaire !
Et finalement c’est bien cela l’ambition profonde de nos Rencontres Philosophiques. Participez, à Agen, à l’élaboration d’une culture populaire sur les grands défis du monde actuel.
L’an dernier, lors de la première édition des Rencontres Philosophiques qui portaient alors sur les 5 sens, vous étiez plus de 5000 personnes à y participer pendant 3 jours.
En mêlant des conférences menées par des personnalités reconnues, avec des animations musicales, des ateliers pour les petits et les grands, des débats, ce fut l’opportunité pour chacun de rencontrer la philosophie sous un angle moins scolaire et plus spontané.
Et cette année, le thème, de nos rencontres, s’est imposé comme une évidence « Demain, notre terre » inspiré librement du « Contrat Naturel », œuvre prophétique de Michel Serres.
Ce thème est d’abord une réponse en écho à l’actualité et aux dérèglements climatiques dont nous percevons confusément les conséquences.
L’évidence de ce dérèglement fait à la fois progresser notre prise de conscience et notre anxiété collective.
Plus que jamais nous avons besoin de sagesse, de raison, de détermination pour faire face à ces défis.
Merci à l’association des Amis Agenais de Michel Serres.
Merci à son président, David Djaïz, pour avoir créé un espace et un temps pour réfléchir à ce défi planétaire, avec bienveillance.
J’adresse mes plus sincères remerciements aux bâtisseurs de ces rencontres, David et les membres de l’association, Les Amis de Michel Serres, ainsi qu’à Philosophie Magazine, dont nos deux commissaires Sven ORTOLI et Martin LEGROS, véritables cheville ouvrière de ces Rencontres.
Je remercie chaleureusement nos partenaires institutionnels au premier rang desquels l’Agglomération d’Agen, le Conseil Départemental de Lot-et-Garonne et sa présidente, Sophie Borderie, le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et son président Alain Rousset, ainsi que les Services Départementaux de l’Education Nationale et leur Directeur, Patrice Lemoine.
J’adresse également mes sincères remerciements à toutes les entreprises qui ont acceptées d’être nos partenaires.
« Demain, Notre Terre » est un thème qui s’impose à nous compte tenu de l’urgence climatique et énergétique. Mais cher David, est-ce que Michel Serres aurait aimé ce titre pour éclairer nos Rencontres ?
En toute franchise, je vous répondrai oui et non.
Oui, Michel Serres aurait particulièrement aimé ces mots, cette expression « Demain, Notre Terre », parce qu’il y retrouverait son cri d’alerte le plus fort et le plus humain, il est le premier à nous avoir dit : « nous sommes tous embarqués dans le même bateau, le même vaisseau, fût-il spatial »
Parce que nous sommes tous embarqué sur ce petit bateau planétaire, les images d’astronaute montrant, dans sa globalité et dans sa finitude, notre planète, cette bille bleue, marquent un moment de rupture pour Michel Serres.
A partir de ce moment, il va nous rappeler sans cesse, à temps, à contretemps, que nous réussirons ou nous coulerons, ensemble, et que sur ce petit bateau, nos divisions politiques furent-elles nationales, sont définitivement devenues secondaires.
Et d’un autre côté, je crois que Michel Serres se serait méfié de cette expression, de cette appropriation…
Méfiance, parce qu’il n’aurait pas cautionné que nous puissions dire « notre Terre ». Le penseur qu’il était, fustigeait dans Le Contrat Naturel, l’anthropocentrisme qui nous mène à croire que l’humanité possède la Terre.
Méfiance, y compris par rapport au mot même « d’environnement » qui encore une fois suppose l’Homme au centre du monde, vision combattue par Michel Serres.
Lui qui nous enjoignait à cesser de vivre en parasite de notre terre.
Lui qui appelait ardemment à une symbiose entre la Terre et l’humanité.
En préparation de ces Rencontres Philosophiques, j’ai lu « Le Contrat Naturel », cette œuvre écrite en 1990, et je l’ai lu avec les yeux du Maire que je suis en 2022.
J’ai été frappé par sa dimension prophétique, mais aussi par l’avertissement tragique de Michel Serres, fait en 2018, lors de la réédition de son livre. Il y écrit :
« Je persiste, certes, et en signe les propos, mais cette tranquillité (de l’édition initiale de 1990) m’a et nous a quittés. Je suis certain que nous allons à une catastrophe dont notre histoire ne nous donne aucun exemple, si nous ne changeons pas au plus vite, nos coutumes, notre économie et nos politiques ».
Agen, sa ville, notre Ville, a entendu son message.
Oui, nous devons tous bouger et faire bouger l’ensemble de notre société pour lutter contre le réchauffement climatique. Et pour cela il n’y a pas d’autre stratégie, que celle du petit Colibri popularisée par Pierre Rabi : quand la maison brûle que je sois éléphant ou colibri, je dois faire ma part. Chacun d’entre nous doit faire sa part.
Et la Ville d’Agen fait sa part dans la transition écologique et dans la bataille qu’est celle du réchauffement climatique, en limitant les émissions de gaz à effet de serre et en économisant nos ressources : par le développement des navettes électriques en Centre-Ville, par l’aménagement de pistes cyclables, par l’extinction des points lumineux urbains de 23h00 à 06h00, par l’isolation massive de nos immeubles en Centre-Ville mais aussi de nos logements sociaux à Rodrigues et ailleurs.
Notre municipalité s’engage également à réaménager notre Ville pour qu’elle soit plus résiliente face au changement climatique : c’est notre engagement de verdir la ville de 5000 arbres et de micro-forêts supplémentaire, mais c’est également l’aménagement d’un éco-quartier rue Henri Barbusse.
Bref nous sommes sur le pont du navire et nous tenons le cap pour faire notre part.
Aussi, ce soir j’aimerai vous appeler, chacune et chacun d’entre vous, à faire votre part dans ces Rencontres Philosophiques Michel Serres.
J’ai un service à vous demander : soyez les ambassadeurs de ces rencontres. D’abord de cette deuxième édition.
Il y a un magnifique programme, qui se déroule sur 4 jours, de jeudi à dimanche. Il y en a pour tous les goûts, tous les niveaux, pour ceux qui veulent parler de sciences dures ou de sciences sociales. A vous de convaincre vos proches, vos amis, vos collègues de venir selon vos sujets de préoccupation.
Au-delà de cette édition, je vous appelle à devenir des ambassadeurs durables des Rencontres Philosophiques Michel Serres. Agen est une terre fertile pour enraciner cet évènement dans notre patrimoine culturel.
Soyons-en collectivement, les acteurs.
Vive le débat raisonnable et respectueux,
Vive la philosophie populaire et citoyenne,
Vive Michel Serres et son œuvre, chez lui, à Agen !