Discours prononcé par Jean Dionis
Monsieur le Sous-Prefet
Madame la Députée,
Monsieur le Conseiller Régional,
Madame la Conseillère Générale,
Chaque année, le 16 juillet ou le dimanche suivant cette date anniversaire de la rafle du Vélodrome d’Hiver à Paris, la République Française a souhaité faire mémoire aux victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat Français et rendre hommage aux « Justes » de France.
Je salue la présence des représentants des différentes communautés religieuses qui s’associent à cette cérémonie et, ce faisant, nous montrent le chemin de la tolérance et du respect de l’Autre qui doit prévaloir dans la société française du 21ème siècle.
Sous l’occupation nazie en France, une chape de haine s’est abattue sur notre pays et a balayé toutes les valeurs qui sont au cœur de la fondation de notre République. Les chiffres sont terribles mais il faut se souvenir des 76 000 déportés raciaux, pour l’essentiel des Juifs et des Tziganes, des 63 000 déportés non raciaux, résistants, opposants politiques, homosexuels et que sais-je encore !
Pour reprendre les termes du Président Chirac le 16 juillet 1995, « la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des français, par l’Etat Français ». Partout dans le pays, des « Justes » se sont levés, se sont opposés à la terrible logique d’élimination de l’occupant en recueillant, en protégeant ou en défendant celles et ceux que les nazis voulaient éliminer. Ici en Lot et Garonne, le 30 mai 1944, 1200 patriotes furent regroupés en gare de Penne d’Agenais puis déportés vers le camp de concentration de Dachau !
A l’heure de la construction européenne et de son élargissement, à l’heure où tous les populismes prospèrent en désignant des coupables, en condamnant les différences, plus que jamais, les républicains que nous sommes doivent être vigilants et se souvenir de cette période funeste pour notre pays.
Primo Levi disait « quiconque oublie son passé est condamné à le revivre », alors n’oublions surtout pas, soyons vigilants !
Nous célébrions le 27 mai dernier la mémoire de Jean Moulin et le 70ème anniversaire de la création du Conseil National de la Résistance. J’insistais à cette occasion sur l’extrême lucidité de Jean Moulin mais aussi du Général de Gaulle qui ont résisté dès le début alors que le plus grand nombre de nos compatriotes étaient dans la résignation, le découragement et la peur.
Aujourd’hui en France, des voix pleines de haine plaident pour le repli sur soi, pour le rejet de l’autre, je ne veux pas de cette France-là, cette France-là, ce n’est pas la mienne ! Je lutterai de toutes mes forces et avec toutes mes convictions pour faire reculer ces idées-là !
Le nazisme, ne l’oublions pas, est le fruit de la combinaison terrible du nationalisme et d’une forme de populisme qu’était le socialisme de l’époque.
Romain Gary opposait nationalisme et patriotisme lorsqu’il disait : « le patriotisme c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haine des autres ».
Si nous décryptons le contenu des discours des défenseurs d’une France peureuse, rabougrie, mesquine et haineuse, nous retrouvons tous les ingrédients nationalistes et populistes du régime nazi.
Partout en Europe fleurissent des partis nationalistes qui profitent de la profonde crise économique que nous traversons pour diffuser des idées dont nous ne savons que trop jusqu’où elles peuvent nous mener. Lorsque l’on voit le sort réservé aux tziganes, en Roumanie bien sûr, mais pas qu’en Roumanie. Lorsque l’on observe la recrudescence de crimes et de comportements racistes en France et en Europe, on comprend que cette journée de mémoire et de souvenir est plus que jamais d’actualité pour celles et ceux qui, comme moi, respectent les différences et les lois républicaines.
A quelques mètres d’ici, on trouve une rue et une ruelle des juifs, on trouve aussi, juste à côté, une rue Lagrille ainsi dénommée parce qu’elle avait à son extrémité une grille qui empêchait les juifs de sortir de leur ghetto. La toponymie agenaise nous rappelle que les discriminations et les persécutions sont des épidémies terribles qui émaillent, à intervalles réguliers, notre histoire.
Je ne veux plus pour ma ville, je ne veux plus pour mon pays, je ne veux plus pour l’Europe d’autres rues des juifs, des tziganes ou des musulmans !
En ce jour de mémoire, je veux dire avec force mon attachement à une société plurielle où chacun, fort de ses différences, peut s’épanouir avec la volonté chevillée au corps du mieux vivre ensemble.
Je vous remercie