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19/01/05 - Discours sur la 2ème lecture de la proposition de loi tendant à redonner confiance au consommateur

Publication : 19/01/2005  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

La proposition de loi de M. Chatel qui vient aujourd'hui en deuxième lecture comporte bien des aspects utiles et positifs sur lesquels je vais revenir dans le détail. Mais je tiens à dire d’emblée que pour le Groupe UDF elle n’est pas encore à la hauteur des enjeux que nous aurions voulu voir traités dans le domaine du crédit à la consommation. C’est ce qui explique l’initiative législative que nous allons prendre la semaine prochaine avec la proposition de loi de mon collègue Jean-Christophe Lagarde sur la prévention du surendettement.

En ce qui concerne le système de reconduction tacite du crédit « revolving », le texte qui nous est proposé apporte trois améliorations qui interviennent au niveau de l’article L. 311-9 du code de la consommation :
– elle ouvre à l’emprunteur, à tout moment, la faculté de demander soit la réduction de sa réserve de crédit, soit la suspension de son droit à l’utiliser, soit la résiliation de son contrat ;
– elle impose au prêteur de rappeler à l’emprunteur ses facultés de résiliation, de suspension et de réduction de la réserve à chaque relevé mensuel ;
– elle soumet l’augmentation de la réserve de crédit à la signature d’une nouvelle offre préalable.

Le Groupe UDF approuve et soutient ces dispositions qui contribuent à rééquilibrer la relation contractuelle prêteur/emprunteur.
Mais nous regrettons que la rédaction initiale de la proposition de loi déjà modifiée en première lecture à l’Assemblée nationale n’ait pas été retenue : celle-ci indiquait très clairement que lors de la reconduction annuelle du contrat revolving, le silence de l’emprunteur, c'est-à-dire le non-renvoi du bordereau-réponse, valait refus. Malheureusement, la commission et le Gouvernement n'ont pas souhaité aller aussi loin dans la réforme, si bien que le dispositif retenu (résiliation du contrat si silence au bout de trois années consécutives sans utilisation du contrat) demeure insuffisant au regard des difficultés posées par les crédits renouvelables.


Les sénateurs sont revenus sur le principe de la signature conjointe des époux pour les opérations de crédit à la consommation, ainsi que sur la mention des seuils d'usure sur les offres préalables correspondant aux prêts ou crédits proposés.
Sur le premier point je ne suis pas vraiment convaincu par les arguments juridiques qui ont été avancés par les sénateurs et qui sont rappelés dans le rapport de M. Chatel. Et je partage l’avis de notre collègue Brottes qui fut à l’origine de cette disposition en première lecture. Je pense en effet que l'article 220 du code civil, qui dispose que la solidarité entre époux ne s'exerce pas à l'égard des dépenses manifestement excessives, n’est qu’une protection théorique qui ne permet pas de réparer les dégâts du surendettement.
Je conçois en revanche qu’on puisse s’interroger sur les conséquences d’une telle disposition sur le lien conjugal. Mais précisément je crois que cette disposition est intrinsèquement vertueuse et favorable à cette noble institution qu’est le mariage dans la mesure où elle responsabilise les époux et leur gestion commune des dépenses du ménage. Combien de témoignages avons-nous pu lire sur des femmes ou des hommes mariés cachant à leur conjoint leur fuite en avant dans les crédits à la consommation, et qui s’enfoncent tout à la fois dans un gouffre financier et dans le piège du mensonge… Le Groupe UDF avait d’ailleurs soulevé un problème assez semblable lors des débats sur la loi pour l’initiative économique. Il s’agissait alors de protéger le patrimoine matrimonial lorsqu’une entreprise individuelle est créée alors que le couple est marié sous le régime de la communauté de biens.
Nous avions alors attiré l’attention sur les drames que peuvent vivre les ménages lorsque la faillite de l’entreprise individuelle d’un des conjoints entraîne la saisie de tous les biens du ménage, quels que soient leur origine. Ces drames se traduisent non seulement par des difficultés financières mais plus encore par des divorces qui interviennent dans des proportions inquiétantes, notamment dans le monde de l’artisanat et du commerce qui compte 600 000 entreprises dirigées par un couple. Nous proposions alors que lorsqu’une entreprise individuelle est créée par une personne vivant sous le régime de la communauté de biens, son conjoint ou sa conjointe puisse donner son autorisation pour engager sa responsabilité dans le patrimoine de l’entreprise.

Pour autant comme nous l’avions dit avec force en première lecture, nous regrettons que la proposition de loi défendue par le Groupe UMP et soutenue par le gouvernement élude la question majeure du surendettement.
Pour le Groupe UDF, il faut bien sûr redonner confiance au consommateur. En tant que rapporteur de la LEN, je m’y suis beaucoup employé dans le domaine encore peu encadré des communications électroniques et des télécommunications, que ce soit avec la tarification à la seconde pour la téléphonie mobile ou pour sécuriser le e-commerce qui est en pleine explosion.

Et j’ai conscience que par ces législations nous confortons la consommation des ménages et donc nous créons des conditions propices pour la croissance dont nous avons tant besoin.
Mais il nous faut prendre conscience de la situation de plus en plus préoccupante du surendettement dans notre pays, si bien qu’on peut aujourd'hui en parler comme d’un véritable sujet de société qui révèle une nouvelle source d’exclusion. Le rythme annuel de dépôt des dossiers connaît en effet une croissance forte : il s’établit à plus de 190 000 en 2004, soit en augmentation de 160 % par rapport à 1994. Aujourd'hui le lien n’est plus à faire entre le surendettement et un usage déraisonnable des crédits revolving : 80 % des dossiers de surendettement comportent plus de quatre crédits revolving. Ces crédits sont accordés sans étude approfondie de la situation des bénéficiaires, parfois directement à la caisse d’un grand magasin.
Pour remédier à ce phénomène, nous avons fait en première lecture plusieurs propositions pour responsabiliser les établissements de crédits en rendant obligatoire la vérification de la situation financière et de la solvabilité des souscripteurs. S'il apparaît que l’établissement de crédit n’a pas procédé à cette vérification, il serait dès lors responsable de la non solvabilité éventuelle du souscripteur et ne pourrait donc pas engager de procédures de recouvrement, sauf si le souscripteur a délibérément fourni de fausses informations le concernant.
Pour rendre ce contrôle opérationnel, nous proposions la création d’un répertoire des crédits aux particuliers pour des besoins non professionnels, qu’on appelle « fichier positif » et qui existe sous différentes formes dans pas moins de 13 pays européens. Ce répertoire offrirait une double protection aux consommateurs : il serait géré par la seule Banque de France à l’exclusion de tout organisme privé, bancaire ou non, et les établissements de crédit n’auraient accès aux informations que dans l’hypothèse où l’emprunteur potentiel les y aurait explicitement autorisés, interdisant ainsi tout usage commercial de ce répertoire.
Nous proposerons la semaine prochaine de compléter ce dispositif par l’instauration d’un délai d’agrément de sept jours avant l’acceptation du contrat et surtout le versement de la somme prêtée. Ce délai nous paraît essentiel tant pour l’établissement de crédits que pour l’emprunteur, afin que la banque ait le temps de procéder à l’étude de la solvabilité de l’emprunteur.
Depuis 2003, nous avons fait ces propositions à plusieurs reprises sous la forme d’amendements sur divers projets de loi. Je vous épargnerai la lecture de la compilation des réponses. A chaque fois, on nous a répondu d’accord sur le principe du fichier positif mais réfléchissons encore un peu ! Eh bien nous avons continué à réfléchir de notre côté et nous sommes désormais en mesure de vous présenter un dispositif complet que nous discuterons dans le détail la semaine prochaine.

En conclusion si les propositions du Groupe UDF avaient été retenues, on aurait pu faire de cette proposition de loi d’une pierre deux coups : d’une part redonner confiance au consommateur par un renforcement de ses pouvoirs et de ses libertés face au crédit et d’autre part responsabiliser le prêteur face à la fragilité financière et commerciale de certains consommateurs. A défaut, il nous faudra nous y prendre à deux fois en adoptant aujourd'hui cette proposition de loi et la semaine prochaine celle de notre collègue Lagarde.

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