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09/01/07 - Voeux à la presse de François BAYROU

Publication : 09/01/2007  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis


Une année politique pluraliste

Dans ses vœux à la presse, le 9 janvier, François Bayou a souhaité que l’année 2007 soit « une année politique pluraliste », qui puisse faire sauter de nombreux verrous, qui permette à l’Etat de retrouver sa capacité à faire respecter la démocratie dans l’information. Dénonçant une « république finissante » sclérosée par « une ambiance de cour » qui cultive « les privilèges de complaisance » », il a dévoilé sa vision du nouvel Etat qu’il mettra en place dès son élection à l’Elysée. Ses maîtres mots : réduire le train de vie de l’Etat, développer la création de richesses, établir un nouveau contrat de confiance entre l’école et la République et lutter contre les exclusions. Il a enfin souhaité que l'Etat porte ses efforts sur deux autres secteurs clés de l’avenir de notre pays : l'entreprise et la recherche.




Seul le texte prononcé fait foi


Mesdames, Messieurs,

L’année 2007 promet d’être intéressante. Les relations entre journalistes et politiques sont nécessaires mais fréquemment passionnelles. C’est une passion professionnelle. Je n’oublie pas en vivant avec vous, à votre contact, que vous êtes d’abord femmes et hommes, avec chacun son bonheur et ses tristesses. Je souhaite donc que cette année, qui sera nécessairement intéressante, soit aussi bienfaisante pour vous-même et pour les vôtres.


Pour l’année politique, je souhaite d’abord qu’elle soit pluraliste.


Depuis des années, deux modèles politiques sont proposés aux Français. L’un est notre modèle pluraliste républicain, l’autre le modèle américain.


Le modèle américain, il repose sur la concurrence de deux partis, et de deux seulement, étroitement dépendants des dizaines de millions de dollars qu’il est nécessaire de collecter pour conduire une campagne électorale. Ainsi, il est impossible de résister à un certain nombre d’influences et de lobbys, et notamment d’influences financières.


En France, heureusement, grâce à l’engagement d’un certain nombre d’entre nous, nous avons réussi à modérer l’influence de l’argent sur la politique. On peut être pauvres et cependant entendus.


Mais il existe d’autres moyens d’influence, d’autres moyens de verrouillage. La force de frappe médiatique est de ceux-là.


L’idée s’est répandue selon laquelle le soutien de grandes puissances médiatiques, était la clé du destin électoral.


La présentation perpétuelle de deux candidats, et deux seuls, deux partis, et deux seuls, vise à faire évoluer la politique française du modèle pluraliste français au modèle américain de monopole à deux.


Or les Français, comme peuple souverain, n’ont jamais fait ce choix. Ils savent que le pluralisme réel est la garantie des citoyens. S’il n’y a que deux partis, il suffit que l’influence « souterraine » s’exerce sur les deux pour que le citoyen n’ait plus aucun recours.


C’est pourquoi le combat pour le pluralisme réel est un grand combat démocratique et le champ le plus important de ce combat est le champ médiatique.


Il est vrai que les grandes chaînes ont d’immenses moyens de pression. Ces pressions s’exercent désormais publiquement.


Alors, j’ai un message pour ces grandes puissances médiatiques : vous n’êtes pas les patrons de la France. Il est clair que vous avez envie que le deuxième tour oppose Nicolas Sarkozy à Ségolène Royal, que cela vous arrangerait pour le présent et pour l’avenir, que vous déroulerez le tapis rouge à vos deux favoris. Mais nous, Français, sommes un peuple de citoyens : nous ne céderons pas à votre matraquage.


Et il nous reste toujours une liberté, celle de nous exprimer librement dans notre pays de liberté.


Il faut que le prochain président de la République française soit indépendant en face de ces pressions. Il faut que le prochain président de la République française soit capable de résister à toutes ces intimidations.


C’est la raison pour laquelle je rappellerai chaque fois que nécessaire que les conditions de préparation de l’élection présidentielle, comme le CSA vient de le montrer, ne sont pas équilibrées.


Et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que ces pressions ne conduisent pas, comme cela est en cours, dans la préparation d’une loi dont personne ne parle, à des cadeaux faits, sans aucune contrepartie, à ces chaînes puissantes, au détriment des petites chaînes, selon l’habitude française qui consiste à donner aux gros, puisqu’ils ont les moyens de l’intimidation, et à refuser aux petits puisqu’ils ne l’ont pas.


Selon que vous serez puissants ou misérables, les jugements de cour vous rendront blancs ou noirs…


Or précisément, il ne s’agit pas de jugements de cour monarchiques, il s’agit de la République, c’est pourquoi je m’exprimerai à la tribune de l’Assemblée nationale le 23 janvier dans le débat sur les nouveaux avantages, durée de concession sans appel d’offres, chaînes gratuites, publicité des grandes surfaces, bradés par le gouvernement, dans le silence général, à ces puissants opérateurs privés.


Jusqu’à maintenant, personne n’a résisté à ces puissances, parce que les gouvernants sont impressionnés par leur capacité supposée d’entraîner l’opinion. Supposée et réelle, comme on l’a vu dans les dernières heures de la campagne de 2002…


La République nouvelle que nous avons à construire ne s’accommode pas de ces frayeurs.


Dans la constitution, il est écrit : la République est démocratique.


Les droits du citoyen à une information juste, équilibrée, pluraliste, indépendante de l’État, protégée des concentrations excessives et des puissances d’argent, selon les termes du programme du Conseil national de la Résistance, sont au premier rang de ces exigences démocratiques.


Il faut rétablir la capacité de l’État, au nom des citoyens, à faire respecter les principes démocratiques dans l’information. C’est ce que j’ai l’intention de faire par l’exercice de la liberté de parole et, élu président de la République, en proposant des lois qui garantiront ces libertés.


De même que je proposerai une loi électorale juste qui assurera la représentation au Parlement de tous les courants d’opinion du peuple français, équitablement, même ceux dont je combats les principes. De même que je proposerai une constitution nouvelle qui obligera au respect du parlement, en lui donnant une maîtrise de son ordre du jour, en empêchant le passage en force, par la suppression du 49-3 et de l’abus des ordonnances.


De même que j’assurerai l’État impartial. L’absence de séparation des pouvoirs, la colonisation de l’État, dans toutes ses fonctions, par des proches du pouvoir, cette ambiance de cour, tout cela qui marque une République finissante, est une des faiblesses de la France.


Toutes ces dérives nous empêchent d’exprimer la force qui est présente en notre peuple et qu’on n’a cessé de ligoter, de miner par des connivences et des ententes implicites, à la recherche d’avantages actuels ou futurs.


La Cour, c’est : « qui n’est pas avec moi est contre moi », la carotte et le bâton. Si tu es docile avec le pouvoir, il assurera tes succès. Si tu es indocile, prépare toi au placard et aux ténèbres de l’oubli.


Ceci est exactement le contraire de la République.


Le peuple français le sent, dans ses profondeurs : il veut quelque chose de très simple, qui est dans la logique de son histoire, le rétablissement de la République et la fin des privilèges de complaisance.


Cette perspective est une bonne nouvelle pour tout le monde. Dans ce rétablissement de l’État impartial, il n’y a pas de vaincus, sinon la servilité, le mépris et le cynisme. Mais chaque opinion est assurée d’être respectée, chaque compétence de trouver à faire ses preuves et d’être reconnue.


Le rétablissement de l’État impartial est la condition de l’esprit d’ouverture et de rassemblement que je crois nécessaire en ce moment de l’histoire de notre pays.


Ce rassemblement se met en place dans nombre de pays européens.


Hier, l’Autriche, après l’Allemagne, a choisi de faire vivre une grande coalition entre sociaux-démocrates et démocrates-chrétiens.


Et les succès de l’Allemagne depuis la formation du gouvernement d’Angela Merkel sont assez spectaculaires pour que l’Europe entière les note avec envie.


La conviction que j’exprimerai tout au long de cette campagne est celle-ci : le clivage droite contre gauche, la guerre perpétuelle PS/UMP, ne correspondent plus aux problèmes que nous avons à résoudre.


C’est un clivage du XX° siècle, et nous sommes au XXI° siècle : il y a d’autres clivages.


Je veux en citer quelques uns, pour une année lucide.


Nous devons avoir une vision nouvelle de l’État. Je suis frappé de voir en cette période de vœux combien la machine à promesses s’est remise en route, toutes promesses tirées sur un compte unique, et qui en fait n’existe pas qui est le compte de l’État tout-puissant.


Or l’État n’est pas tout-puissant, il est ruiné, parce que trop dispersé, se chargeant de trop de promesses, dans le désordre, incapable de les assumer, et plus on le chargera d’obligations, plus il sera impuissant, et plus il sera ruiné !


Si l’on ne regarde pas en face le problème de l’excessive dépense publique, le problème de la dette, le problème du train de vie de l’État, on court droit à la catastrophe.


Et quand je lis tous les jours, quel que soit le bien-fondé de la cause, les additions vertigineuses auxquelles nous conduisent les promesses électorales et les « urgences » de toute nature, alors je mesure les déceptions qui ne vont pas manquer pas de venir.


Lorsque je lis que la première mesure du programme socialiste sera d’augmenter massivement la dépense publique de l’ordre de plus de 50 milliards d’Euros, et que l’on augmentera massivement les impôts, alors, en effet, je vois un clivage…


Nous sommes le pays du monde (Suède exceptée pour quelques mois encore) où les prélèvements obligatoires sont les plus hauts… du monde ! Ils n’ont pas baissé, ces dernières années, malgré les promesses, ils ont augmenté… Est-il raisonnable et juste, au moment où l’on s’inquiète à juste titre du pouvoir d’achat des salariés, d’annoncer des hausses d’impôts massives. Est-il raisonnable et juste, alors que les petites retraites sont en crise d’annoncer l’augmentation continue de la CSG, pour éviter toute réforme de fond des retraites ?


Nous ne pouvons pas continuer à faire croire que l’État résoudra tout, en tirant sur un compte depuis longtemps à découvert, celui des finances publiques…


C’est pourquoi j’inscrirai les économies de l’État au premier rang des obligations de la nation.


Comme première mesure symbolique, élu président de la République, je baisserai les dépenses de l’Élysée de 20 % dès la première année de mon mandat.


Je ne suis pas prisonnier des habitudes du passé : je veux un État sobre, économe, respectueux de l’argent public.


Nous ne pouvons pas faire remonter la France, le revenu des Français, celui des plus modestes, des petites retraites, des salariés à faible revenu, ou des classes moyennes qui s’asphyxient, sans une politique déterminée de création de richesses dans notre pays.


C’est pourquoi le soutien à deux secteurs clés de l’avenir de notre pays est un clivage.


La France doit soutenir la recherche. La France doit soutenir l’entreprise.


Je définirai et je mettrai en place une politique planifiée, sur une décennie, d’augmentation continue des moyens de la recherche et d’amélioration, parallèlement, de l’utilisation de ces moyens.


Et je définirai et je mettrai en place une politique volontaire de soutien à l’entreprise, spécialement à la petite entreprise, vivier des moyennes entreprises, spécialement des entreprises industrielles, des entreprises d’innovation, présentes sur le marché mondial, entreprises dont le réseau et la vitalité font la force d’un pays.


Le plan que j’ai à l’esprit, c’est une loi de protection et de soutien de la petite entreprise, un small business act à la française, qui comportera quatre volets : simplification et adaptation des contraintes administratives ; soutien actif notamment pas l’ouverture de la création de deux emplois nouveaux, sans charges (limitées à 10 % du salaire net), pendant cinq ans pour toute entreprise ; réservation d’une part des marchés publics ( totalité à moins de 50 000 € et 20 % au-dessus de 50 000 €) ; obligation pour l’État de respecter les règles qu’il impose aux autres, notamment en termes de délais de paiement.


Ce plan de soutien impose un changement d’état d’esprit de l’administration qui doit passer de la suspicion a priori à la confiance a priori, à l’accompagnement et au conseil préalable à la sanction, et non pas le contraire…


La condition de ce développement de la recherche et de l’entreprise, c’est l’éducation du pays.


Je veux un nouveau contrat de confiance entre l’école et la nation. Un contrat de compréhension et de soutien réciproques. Ce contrat garantira la continuité de l’effort national en matière d’éducation et fixera des objectifs qui importent aux familles et à la nation.


Ces objectifs républicains impliquent que la République renouvelle son engagement d’égalité devant l’école au lieu d’y renoncer. La carte scolaire n’est pas périmée comme le croient conjointement Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal. Elle est une obligation de résultat. Et c’est une obligation de résultats qui s’adresse moins aux familles qu’à l’État. Elle veut dire que la République s’oblige à la même offre de qualité en transmission de connaissances et en éducation à l’humanité partout sur son territoire.


À Vaulx-en-Velin, où je passais la journée dans les derniers jours de décembre, j’entendais avec peine de jeunes mères de famille musulmanes et fières de l’être m’expliquer qu’elles avaient choisi de scolariser leurs enfants dans l’enseignement privé catholique parce qu’ils y étaient en sécurité ! J’ai ressenti une défaite pour la République à l’idée que l’on puisse considérer que ses enfants ne sont plus en sécurité dans ses collèges publics.


Parmi les obligations de la nouvelle carte scolaire, obligation d’égalité de traitement des enfants sur le territoire de la République, il y aura le changement de climat et la sécurité de tous, la bonne tenue, dans les établissements, et la garantie de trouver partout le parcours d’excellence que l’on croit aujourd’hui réservé aux élèves des établissements privilégiés.


De la maternelle à l’université, le nouveau contrat de confiance exigera les moyens et une vision, républicaine, exigeante, innovante de chacun des maillons de notre système éducatif, l’université constituant évidemment une urgence que chacun mesure et voit.


La nation ne peut pas accepter que des millions de personnes s’enfoncent dans l’exclusion.


Le RMI, les minima sociaux de toute nature, l’entrelacs et la complexité des aides ont pris des millions de nos compatriotes au piège.


Je proposerai une stratégie nationale de lutte contre l’exclusion, qui visera à aider chacun à trouver une activité, quel que soit son statut, et un emploi dès qu’il le pourra. L’activité peut être universelle, et la rencontre de l’emploi ne doit pas être un moins, mais toujours un plus.


Vous voyez que soutien à l’entreprise, emplois sans charges, activité universelle, tout cela constitue un ensemble cohérent pour rendre la France désenchantée à l’activité, à la création, au travail.


Je ne veux pas finir ces vœux, en ce début d’année très important, sans un mot de l’esprit de notre politique européenne et étrangère.


Ma vision n’est pas celle de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal.


Ségolène Royal vient de faire, en Chine, un voyage troublant. Les images étaient très belles, comme toujours. Mais que ce voyage ait été entièrement organisé par le parti communiste chinois, avec des interlocuteurs choisis par les dirigeants chinois, dans un pays où du Tibet à Tien-an-men, chacun sait ce qu’il en est de la réalité des droits de l’homme et de la main de fer qui interdit même la liberté sur internet, tout cela est révélateur. Et le silence sur les conditions du commerce international, le soutien explicite à une accélération des transferts de technologie, l’oubli de la si forte sous-évaluation de la monnaie chinoise qui fausse les conditions de l’échange, la déclaration selon laquelle « c’est d’ici que viendra la survie et l’invention d’un nouveau modèle de développement », tout cela, pour le moins qu’on puisse dire, a choisi de ne pas être dérangeant…


L’émerveillement de Ségolène Royal devant la Chine m’a rappelé l’émerveillement jumeau de Nicolas Sarkozy devant Georges Bush, au cours d’un autre voyage récent.


Si la France choisit d’être à ce point silencieuse devant des enjeux aussi lourds, et qui la concernent, si elle renonce à ce point à être dérangeante, alors elle n’est pas vraiment la France. Être la France, c’est ne pas renoncer à déranger, à faire entendre une voix différente qui défend ses intérêts, bien sûr, mais aussi les intérêts des faibles, des opprimés, des oubliés. Ceux qui n’ont pour allié que le Droit.


Ce sont des conceptions différentes du message international de la France. Si nous croyons que nous serons mieux reconnus en étant à ce point non dérangeants, je rappelle l’exemple de François Mitterrand lorsqu’il décida de soutenir l’installation des Pershing en Allemagne ou lorsqu’il alla soutenir Sakharov ; c’est pour cette même raison que j’ai soutenu Jacques Chirac lorsqu’il a adopté la position courageuse que l’on sait au moment du déclenchement de la désastreuse guerre en Irak.


C’est parce que la France était capable de cet esprit de résistance qu’elle a voulu et porté dans son histoire le projet européen. Nous sommes un grand pays, qui a voulu s’accorder avec d’autres grands pays pour peser sur l’ordre du monde. Pour peser, et non pas pour suivre. Pour défendre des valeurs et des règles, un projet de société, un projet de civilisation, et non pas pour accepter que se poursuivent les manquements et que s’en créent de nouveaux.


C’est ainsi que tout se tient : notre démocratie, notre projet de société républicain, notre message universel, notre projet européen.


Cette année commence, et chacun sent et sait qu’elle sera déterminante pour la France.


Bien entendu, ce sera une année rude. La tâche que nous avons entreprise est tout sauf facile. Je vous souhaite donc le courage et la fermeté d’âme, la combativité qui font les victoires. Car c’est bien de victoire qu’il s’agit. C’est la victoire que nous devons à ces millions de Français, qui ont tant de mal à se faire entendre, et qui vivront différemment si le président de leur pays rappelle à tous, aux gouvernants et aux puissants en particulier, ce que c’est que la France et ce que c’est que la République. Bonne année !


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