Cela fait exactement deux ans depuis que la Russie a envahi l’Ukraine, soudainement, sauvagement. Deux ans, c’est long et chacune et chacun de nous se demande légitimement où va ce conflit. Quelle est son issue probable ? Quelle est la date probable de son dénouement ? Du doute, voire de la fatigue peuvent commencer à s’insinuer dans nos cœurs et dans nos têtes. Que faut-il en penser ?
Je veux m’adresser, par cette chronique, à celles et ceux qui partagent avec moi la volonté de soutenir l’Ukraine, brutalement agressée parce que son peuple a choisi la voie de la liberté et de la construction Européenne.
« Pourvu que l’arrière tienne bon ! » avaient coutume de dire nos poilus de 14-18, mi-blague, mi-souci et bien nous en sommes un peu là avec la guerre en Ukraine. L’arrière, c’est-à-dire entre autres nations, nous la France qui sommes travaillés par un courant d’inquiétudes devant cette guerre qui s’étire dans la durée …que devons-nous faire, que pouvons-nous faire ici et maintenant, en France et même à Agen ?
J’ai beaucoup réfléchi à ce que devaient être la teneur, le contenu de notre soutien à l’Ukraine pendant cette troisième année d’exil et d’occupation. Nos poilus avaient raison de se soucier de l’opinion publique à l’arrière. Car celle-ci pèse de manière décisive dans les politiques publiques menées, notamment en temps de guerre où la force d’âme et la résilience sont mises à rude épreuve avec ses montagnes (russes)émotionnelles. (Victoires, puis défaites de l’armée ukrainienne, etc.)
Rappelons-nous notre histoire de France, la première guerre mondiale et la terrible année 1917 qui vit à la fois des mutineries de masse dans les rangs de l’armée française et les échecs de toutes les tentatives de contre-offensive française. Heureusement, l’arrivée de Georges Clémenceau avec une ligne stratégique claire (« je fais la guerre ! je fais la guerre ! je fais la Guerre ! »), mais aussi de l’humanité pour nos soldats (fin des fusillades arbitraires, augmentation des permissions pour nos poilus) et enfin une vraie lucidité quant au rapport de forces militaires (« j’attends les tanks et les américains »). Ce qui avait su remobiliser l’arrière et le peuple français derrière son armée.
Et bien, nous en sommes un peu là pour l’Ukraine, sauf qu’en 2024, l’arrière de ce conflit, c’est nous, les pays de l’Union Européenne, certes pas engagés militairement dans le conflit, mais directement impliqués économiquement (pensons au pétrole et au gaz russes, aux céréales ukrainiennes, etc.) et militairement (la guerre fait rage aux frontières de l’Europe et de l’OTAN)
Alors que devons faire concrètement en 2024, à Agen, ville moyenne de France pour soutenir l’Ukraine ?
D’abord, continuer à accueillir fraternellement les 400 réfugiés ukrainiens présents sur notre territoire Lot-et-garonnais. Cela veut dire à la fois les aider à vivre entre eux, en communauté culturelle, nationale et en même temps à devenir, pour la vie quotidienne, de vrais Agenais et lot-et-Garonnais. Je veux saluer, à ce titre, les efforts que font les adultes ukrainiens pour travailler, y compris dans les travaux durs de notre agriculture et de nos usines agroalimentaires. Je veux saluer tout autant les résultats brillants des adolescents ukrainiens dans nos écoles. La France et, à son échelle, Agen peuvent être fiers du soutien apporté aux réfugiés ukrainiens en 2022 et 2023. Il nous faut impérativement continuer en encourageant et en prenant en compte l’autonomie croissante de nos amis ukrainiens.
Ensuite, Il nous faut nous replonger dans la politique française et Européenne en votant pour celles et ceux qui soutiennent l’Ukraine aux élections Européennes du 9 juin 2024. Et là, il faut être clair. Les futurs députés du Rassemblement National élus au Parlement Européen ne soutiendront pas l’Ukraine. Ceux de la France Insoumise, non plus.
Marine le Pen a, dans le passé, dit son admiration pour Vladimir Poutine et il est intéressant de consulter les votes des eurodéputés RN au parlement Européen, constamment hostiles au soutien à l’Ukraine (lire le dossier du Monde).
Même ambiguïté sur ce sujet du côté de Jean-Luc Mélenchon qui a très longtemps considéré Vladimir Poutine et la Russie comme « un partenaire ».
Nous verrons si la campagne pour les Européennes amène des changements sérieux de position de ces deux partis (j’en doute). Mais, en l’état, pas une personne ayant la volonté de soutenir l’Ukraine dans la durée ne doit voter pour ces deux partis aux élections Européennes.
Enfin, si la France est aujourd’hui épargnée des horreurs de la guerre et que l’Ukraine est seule face à l’agresseur Russe à payer un prix du sang tragique (plus de 30 000 morts depuis le début de la guerre), n’ayons pas la naïveté de penser que notre pays est épargné par l’agressivité Russe. Des « usines à mensonge » Russes déversent sur les réseaux sociaux, ici en France, une propagande mensongère, notamment sur la guerre en Ukraine et ses enjeux. A chacun de nous de nous organiser pour nous « protéger » (blocage de comptes fake, recherche systématique d’une information contradictoire et solide…)
De même, pensons à nos soldats déployés en Afrique dans le cadre d’accords bilatéraux ou régionaux, gardons-les en mémoire et dans nos cœurs, eux qui se heurtent en permanence aux milices du pouvoir Russe en Afrique (plusieurs milliers de mercenaires).
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Voilà ce que peuvent faire et doivent faire les citoyens de France – et donc d’Agen – désireux de soutenir l’Ukraine :
- Continuer à accueillir fraternellement les réfugiés ukrainiens,
- Voter aux élections nationales et Européennes pour des candidats qui s’engagent à soutenir l’Ukraine dans la durée,
- Se protéger « sur les réseaux sociaux » de la cyberpropagande russe.
« Pourvu que l’arrière tienne ! » … Il nous faut faire résonner dans nos cœurs cette boutade mi-inquiète, mi-goguenarde des poilus de 14-18.
L’Ukraine a besoin d’alliés solides. Ce sera l’honneur de la France de ce début du XXIème siècle d’être de ceux-là.
L’arrière va tenir.
Slava Oukraïni ! Gloire à l’Ukraine !
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Jean Dionis, Maire d’Agen