A l'occasion de l'assemblée générale de l'Association Départementale des Retraités Agricoles, le député d'Agen Nérac a prononcé le discours ci-après devant près de 6000 personnes:
Discours Retraités Agricoles – Vendredi 25 avril 2003
Monsieur le Président National de l’ADRA,
Cher Monsieur DRAPEYROUX,
Madame la Présidente de la section féminine de l’ADRA, Chère Madame ROUSSET
Monsieur le Président de l’ADRA 47, Cher Monsieur LOUVANCOUR,
Mesdames et Messieurs les Présidents Régionaux,
Mes chers collègues Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Chers congressistes,
Que de chemin parcouru depuis la création de l’ADRA, somme toute assez récente en Lot-et-Garonne. En effet, l’ANRAF National n’a que 9 ans d’âge et l’ADRA 47 8 ans et le beau congrès d’aujourd’hui célèbre ce double anniversaire.
L’association Nationale des Retraités Agricoles Français créée en 1993, en Dordogne, compte désormais 52 000 membres en France et 7500 pour l’ADRA 47. C’est une association en pleine forme reconnue par les pouvoirs publics, capable d’organiser un superbe congrès comme celui d’aujourd’hui à Agen – bien peu d’associations, je n’ose même pas parler d’associations politiques, sont capables de réunir 6 000 personnes pour leur congrès national.
C’est une association redoutablement efficace et permettez-moi un souvenir de jeune député. Dès le 1er juillet 2002, M. LOUVANCOUR m’a pris en main, soit à peine 14 jours après mon élection, pour faire mon éducation sur vos principales revendications. J’ai eu droit, alors, à une plaquette longue et détaillée et à la fin, M. LOUVANCOUR, fin politique, me précisait « que les actuels retraités ne sont pas favorables à toutes solutions amenant l’augmentation sensible des charges des actifs de l’agriculture, laissant aux Pouvoirs Publics la responsabilité de trouver les financements nécessaires . C'est-à-dire, Monsieur le Député, ne pompez pas trop d’argent sur nos fils et cousins agriculteurs et débrouillez vous pour en pomper ailleurs ! »
Cela dit, il est vrai que les retraités agricoles ont été une des injustices les plus odieuses de la société française de l’après guerre et aujourd’hui, il n’est pas inutile de faire un travail de réflexion en profondeur sur le chemin restant à parcourir mais aussi le chemin parcouru depuis par tous les gouvernements successifs. En 1993, Edouard BALLADUR a commencé à corriger cette injustice pour terminer par ce qui est sans doute faisable à l’horizon du mandat législatif actuel.
Le chemin restant à parcourir, d’abord :
Les Retraités Agricoles sont, dans l'ensemble, ceux qui détiennent le record des retraites les plus basses. Il est très courant de rencontrer des personnes qui perçoivent moins de 230 € par mois, voire moins de 152 €, pour certaines d’entre elles. Cela concerne notamment des femmes (Conjointes ou aides familiales à carrière, certes incomplètes ou poly-pensionnées). Les femmes, à carrières égales et cotisations égales et souvent travail supérieur, perçoivent de 90 à 100 € de moins que leurs époux.
Ce qui pouvait à la rigueur se concevoir il y à 30 ou 40 ans, se trouve remis en cause aujourd'hui du fait de la modification de la structure familiale. Les exploitations ne peuvent pas faire face à la coexistence de plusieurs générations, cela pour des raisons économiques et sociales.
Il faut donc donner aux générations retraitées la possibilité de survivre décemment par leurs propres moyens. Il est nécessaire de donner à tous le minimum vieillesse (ce qui est accordé, à juste titre sans doute, à des catégories de retraités récemment arrivés en France) et qui est à notre avis une revendication importante et primordiale. Le terme « minimum » étant par définition, ce, en dessous duquel on ne peut se situer.
La revendication première et principale des Retraités Agricoles demeure l'obtention d'une retraite minimum égale à 75 % du SWC BRUT, pour tous ceux et toutes celles qui prétendent à une carrière complète égale à 37,5 ans.
Le chemin parcouru maintenant :
1/ l’amélioration progressive des retraites agricoles
C’est le Gouvernement Balladur, en 1994, qui a initié un processus de revalorisation des retraites de l’ensemble des anciens exploitants agricoles. Les gouvernements successifs ont continué ce processus, par des mesures nouvelles qui, chaque année, ont généralement été adoptées par l’ensemble de la représentation nationale, tous bords politiques confondus. Ces mesures ont concerné les exploitants, mais aussi les conjoints et les aides familiaux.
10 ans après, on peut mesurer le chemin parcouru.
Ces mesures ont des conséquences financières tout à fait concrètes :
Globalement, pour une carrière complète, les pensions auront été revalorisées de :
43% pour les chefs d’exploitation
80% pour les personnes veuves
93% pour les conjoints et aides familiaux
Un indicateur important est celui des personnes qui percevaient les prestations du FSV. Grâce aux revalorisations, ce nombre a été divisé par 4 en 10 ans. Il y a quatre fois moins d’anciens agriculteurs qui, du fait de retraites insuffisantes, sont obligés de demander cette prestation, qui outre son montant faible, présente comme vous le savez le défaut d’impliquer des récupérations sur succession.
En termes financiers, on estime globalement que ces mesures représentent un montant de 1,5 milliards d’euros par an, hors économies faites sur le FSV, ce qui témoigne donc d’un effort très important de solidarité.
A titre de comparaison, il peut être noté qu’un retraité salarié, bénéficiaire d’un taux plein (40 ans de cotisations) et ayant ces 25 années de référence basée sur le SMIC percevrait une retraite de base de 6 307,62 € par an. L’exploitant agricole, au terme d’une carrière complète (37,5 ans) toucherait au minimum, une pension de base au niveau du minimum vieillesse, soit 6 832,58 €.
2/ la retraite complémentaire obligatoire
A compter de la mensualité d’avril 2003, soit concrètement début mai 2003, 450 000 anciens chefs d’exploitation agricole vont percevoir cette retraite complémentaire obligatoire.
Pour les personnes ayant eu une retraite complète, sera ainsi atteint l’objectif d’avoir une retraite minimale égale à 75% du SMIC net.
La retraite de base, intégrant les revalorisations de ces dernières années s’élève à 6935 € par an
La RCO s’élève à 1078 €.
En année pleine, le régime est financé pour partie par les cotisations des actifs (280 millions d’€) et pour partie par une subvention de l’Etat (160 millions d’€).
Les versements commencent donc à partir d’avril, alors que cela était initialement prévu en janvier. Ce report est essentiellement dû à la très mauvaise situation financière du BAPSA que nous avions trouvé en 2002. Il a fallu trouver plus de 700 millions d’euros de financement supplémentaire en 2002, et augmenter fortement la subvention au BAPSA en 2003. Compte tenu de cette situation, chacun a du faire des efforts, et le Gouvernement et le Parlement ont donc du décider de ce décalage.
Enfin, ce qu’il est possible de faire à l’horizon du mandat législatif qui est le notre :
Vous le savez, le Président de la République, lors des ses vœux 2003, Jean-Pierre RAFFARIN, devant le Comité économique et social et M. FILLO, hier soir sur France 2, ont présenté le projet gouvernemental de réforme de notre système de retraite. Hervé GAYMARD, notre Ministre de l’Agriculture, prendra toute sa place pour défendre les spécificités du régime des exploitants agricoles pour les actifs d’aujourd’hui, les futurs retraités de demain comme pour vous-même les actuels retraités.
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Pour ma part, je vois 4 grands chantiers difficiles à ouvrir :
1. La mensualisation des retraites agricoles
2. L’harmonisation des coefficients de minoration
3. La majoration pour enfants de la retraite de base
4. L’extension du champ de la retraite complémentaire obligatoire à d’autres bénéficiaires
La mensualisation des retraites agricoles d’abord :
Tout d’abord, sur le principe, tout le monde est d’accord : il n’y a aucune raison que les retraités agricoles ne perçoivent pas leur retraite tous les mois, comme les autres retraités. D’ailleurs, la retraite complémentaire obligatoire est mensualisée.
Or, paradoxalement, cette mesure est coûteuse pour l’Etat, mais elle ne change pas fondamentalement la situation des retraités eux mêmes : il s’agit de donner la même somme en trois fois au lieu de la donner en une seule fois, mais sans l’augmenter.
Le MAAPAR étudie comment, techniquement et financièrement, mettre en place cette mensualisation, en liaison avec les services de la CCMSA. Mais il est vrai que, par rapport aux différentes priorités auxquelles l’ETAT est confronté, le fait de prendre une mesure coûteuse et qui a peu d’effet positif pour les intéressés pose problème.
L’harmonisation des coefficients de minoration
En fonction des problèmes rencontrés, des adaptations peuvent être envisageables, mais naturellement en tenant compte de leur coût, puisque toute dépense supplémentaire doit être financée.
Une mesure limitée diminuant ces minorations pourrait coûter 18 millions d’€. Leur suppression totale coûterait plusieurs dizaines de millions d’€.
S’il fallait donner une priorité dans cette rubrique, pour ma part, je la donnerai aux problèmes des pensions de reversions des veuves. Cela me donne l’occasion de saluer et de vous demander d’applaudir 3 femmes pour leurs actions, au niveau national, madame Ginette ROUSSET, au niveau local, puisque nous sommes à Agen et Nérac, de saluer chaleureusement Madame SEAILLES et de tirer un coup de chapeau à Madame DUBOIS pour le combat qu’elle vient de mener en faveur des pensions de reversions des veuves et qu’elle vient de gagner devant la plus haute instance judiciaire de notre pays à savoir la Cour de Cassation.
La majoration pour enfants de la retraite de base
La majoration pour enfants est actuellement de 10% de la retraite de base. La demande consiste à la transformer en allocation forfaitaire, quelque soit le montant de la retraite.
Or, cette disposition de 10% existe dans l’ensemble des régimes de base. Il convient de l’étudier en liaison avec les ministères chargés des affaires sociales et de la famille.
Enfin, L’extension du champ de la retraite complémentaire obligatoire à d’autres bénéficiaires
Les Parlementaires de ce département savent que vous souhaitez améliorer le système, en matière de prestations, par exemple concernant la création d’une majoration pour enfants, ou en élargissant le champ des bénéficiaires, par rapport aux conjoints.
Se pose sur ce point un problème financier. Si l’on veut augmenter les dépenses, il faut augmenter les recettes. Et il n’y a que deux sources de recettes possibles, l’Etat et les cotisations. Concernant l’Etat, il a versé 28 millions d’euros en 2003, et cette aide devra fortement augmenter en 2004 (160 millions d’€). Il est difficile sur ce point, de demander plus. Concernant les cotisations, elles ont été fixées à un peu moins de 3%. C’est déjà beaucoup pour beaucoup d’actifs. Il paraît aujourd’hui difficile de demander plus.
Une extension massive de la RCO aux veuves, conjoints collaborateurs et aux aides familiales pourrait coûter jusqu’à plus de 400 millions d’€ par an, soit doubler la RCO actuelle.
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Cette remarque, Monsieur le Président National, mes Chers amis congressistes, me permettra de conclure.
Oui nous devons continuer à corriger cette injustice majeure qu’était les retraites agricoles mais je sais aussi que l’honneur de majorité d’entre vous est de prendre en compte l’intérêt général et national. A quoi servirait de faire de la démagogie dans le système des retraites agricoles.
Si, pour payer cette démagogie, il faudrait augmenter de manières excessive les charges pesant sur nos agriculteurs ou sur le reste du pays.
Les agriculteurs ont le droit autant que d’autre à la solidarité nationale. La nation, elle, attend du monde agricole qu’il se comporte de manière raisonnable et qu’il refuse tous égoïsme catégoriel. Bref, qu’il se comporte en citoyen français. Nous faisons pleinement confiance à la fois aux responsables de l’ANDRAF et de vous Mesdames et Messieurs qui en êtes les adhérents pour défendre vos droits quant ceci seront justes et pour être d’abord les citoyens français lorsque la réforme sera nécessaire et lorsqu’une certaine patience sera incontournable.
Aujourd’hui avec mes collègues, je sens que vous êtes dans cet état d’esprit. Nous sommes comme vous da la même terre que vous et vous pouvez compter sur nous pour être votre voix au sein du parlement français.
Je vous remercie.
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