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Cérémonie de la commémoration du Volkstrauertag à Dinslaken le dimanche 18 Novembre 2018

Publication : 26/11/2018  |  12:02  |  Auteur : Jean Dionis

Monsieur le Maire, Cher Mickaël,

Mesdames et Messieurs les membres du CM de Dinslaken,

Monsieur le Président du Comité de jumelage de Dinslaken,

Monsieur le Président des Anciens combattants de Dinslaken,

Mesdames, Messieurs,

Chers amis de Dinslaken,

Je veux tout d’abord remercier votre Maire le Docteur Mickaël Heidinger pour son invitation adressée à la délégation agenaise et à moi-même, de participer aux cérémonies commémoratives du centenaire de la fin de la guerre de 14-18 et de me permettre de prendre la parole devant vous dans ce lieu marqué de solennité et de gravité.

Notre présence est aussi une réponse à la présence de votre Maire, de votre comité de jumelage et de vos associations d’anciens combattants le 14 juillet dernier à Agen.

Ce jour-là était pour nous un jour extraordinaire car il marquait le retour à Agen de la statue de la Marseillaise, jeune femme incarnant notre hymne national après une longue absence de près de 80 ans à la suite de sa réquisition pour l’effort de guerre allemand.

Ce jour-là votre Maire a touché nos cœurs en reprenant les paroles de bible : « de leurs épées, ils forgeront des socs, et de leurs lances, des serpes ».

Il était écrit que ces jours resteraient dans nos mémoires puisque le lendemain de ce 14 juillet, l’équipe de France de football devenait championne du monde avec le soutien de la délégation de Dinslaken, j’en suis témoin, prenant le relais de la Mannschaft de 2014.

La victoire et le deuil.

La France sort d’une période très forte de mémoire autour du 11 novembre 1918, date de l’armistice de la guerre la plus violente qui ait opposé nos deux pays.

Le deuil d’abord. Samedi soir, j’ai présidé une veillée funéraire à Agen où ont été égrenés les 653 noms des Agenais morts pendant ce conflit. Notre département le Lot-et-Garonne qui se situe à plus de 800 kms de la ligne de front, a fourni 40000 soldats à l’armée française de 14-18.

9500, soit pratiquement 1 soldat sur 4, sont morts pendant cette guerre mais venant ici à Dinslaken, je sais que si la France a perdu 1.4 millions de ses fils lors de cette guerre, l’Allemagne quant à elle, en a perdu 2 millions.

Je sais que vous partagerez en lisant les noms des fils de Dinslaken morts pour l’Allemagne pendant cette guerre, le même frisson que celui qui m’a traversé samedi soir lorsque chacun de ces noms, ou presque, me rappelait une famille agenaise bien vivante aujourd’hui.

Nos deux villes, Agen et Dinslaken, partagent et portent ensemble le deuil de leurs fils engloutis dans ce drame planétaire. Je n’oublie pas non plus que la ville de Dinslaken a été meurtrie dans sa chair, pendant la deuxième guerre mondiale, en subissant les bombardements alliés qui détruisirent une grande partie de la ville.

La victoire ensuite. La France de 1914 était mobilisée et obsédée par la revanche qu’elle avait à prendre sur le désastre militaire de 1870. La troisième république naissante s’était jurée d’effacer cette ignominie et avait fait de la reconquête de l’Alsace et de la Lorraine un devoir sacré pour les générations de 1870 à 1914.

Le 11 novembre 1918 Georges Clémenceau Président du Conseil français, formidable chef de guerre qui remobilisa notre patrie en 1917, prenait la parole devant une Assemblée Nationale en transe : « Nous avons gagné la guerre mais, maintenant, il va falloir gagner la paix et ce sera peut-être plus difficile ». Formidable lucidité dans un moment d’ivresse collective.

On connaît la suite.

La France a perdu la paix, écrasée de douleur et de deuil, elle ne saura pas tendre la main à l’Allemagne meurtrie, humiliée, qui va sombrer dans une des pires crises de son Histoire. De « l’Allemagne paiera » à « l’Autriche-Hongrie doit disparaître », notre pays a clairement sa part de responsabilités dans le fait de ne pas avoir su gagner la paix.

Là aussi, on connaît la suite. L’Allemagne à son tour va être obsédée par la soif de revanche et la mécanique implacable qui mènera jusqu’à la deuxième guerre mondiale avec sa barbarie inouïe, se met en place, rien de l’arrêtera.

Cette histoire est la grande Histoire de nos deux pays. Elle est, me direz-vous, bien loin de notre jumelage, de notre amitié entre Agen et Dinslaken.

Non, j’affirme que notre jumelage est le fruit de la volonté des femmes et des hommes, en France et en Allemagne, qui ont tiré toutes les leçons du passé sanglant de notre Histoire commune. Ils savaient qu’il ne suffisait pas de répéter comme les survivants de 1918 « maudite soit la guerre » ou « c’est la der des ders » pour vacciner les nations contre leurs pulsions les plus meurtrières.

Alors ils les ont imaginés et mis au point ces vaccins. La paix ont-ils dit, est une chose trop sérieuse pour être laissée aux Nations.

Seuls les peuples sont capables d’amitiés réciproques et ils ont décidé de tisser des milliers de petits liens entre Allemands et Français, de manière à rendre la guerre impossible entre nos deux nations.

C’est comme cela qu’est née la grande idée des jumelages entre nos villes.

Agen et Dinslaken, depuis plus de 40 ans, font leur part dans cette construction permanente de la paix.

Enfin, ils ont complété ce premier vaccin anti-guerre par un deuxième, et ce fut l’aventure d’abord de la réconciliation franco-allemande mise en œuvre par deux géants de notre Histoire, le général de Gaulle et le chancelier Konrad Adenauer. Il fallait le faire, réconcilier nos peuples en 1963 juste 18 ans après l’armistice de 1945.

J’ai compris cela en écoutant à Versailles, lieu éminemment symbolique de nos humiliations successives, le chancelier Gerhard Schröder reprendre les belles paroles de Barbara dans  sa chanson  Göttingen : « Faites que jamais ne revienne le temps du sang et de la haine car il y a des gens que j’aime à Göttingen ».

La réconciliation franco-allemande a ouvert la porte à l’aventure européenne.

Ne nous trompons pas, si nous avons, en Europe, bénéficié de plus de 70 ans de paix, nous le devons à l’une et à l’autre.

Mais nous savons aussi que rien n’est jamais acquis et qu’il nous faudra défendre ce qui est notre grande espérance politique, à savoir la construction européenne.

Le Président de la République Emmanuel Macron, dans son discours du 11 novembre 2018, est allé à la racine de ces enjeux.

Je me permets de le citer : » Le patriotisme est l’exact contraire du nationalisme: le nationalisme en est la trahison. En disant « nos intérêts d’abord et qu’importent les autres ! On gomme ce qu’une Nation a de plus précieux, ce qui la fait vivre : ses valeurs morales. »

La délégation d’Agen a entendu le message de son Président. Elle est aujourd’hui venue  faire attention à votre peine et à vos morts.

Au nom de chacune des Agenaises et de chacun des Agenais, au nom du Conseil municipal d’Agen, je m’incline devant leurs tombes et je rends hommage à leur mémoire en vous disant l’amitié de notre ville.

Vive Dinslaken !

Vive Agen !

Vive l’Allemagne !

Vive la France !

Et vive l’Union européenne !

 

 

 

 

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