Avec un bel enthousiasme militant (enfin retrouvé), j’ai fait ce week-end, avec sept collègues lot-et-garonnais, un périple de 1600 km pour participer à l’université de rentrée du Modem. (lire ma chronique http://jeandionis.com/blog/pourquoi-je-rejoins-modem).
Je n’ai pas été déçu. Les intervenants étaient de grande qualité et les sujets traités, ceux de nos priorités et de notre actualité : laïcité, Europe, Education nationale, immigration….
Mais le sommet politique de cette rentrée fut, bien entendu, le discours de François Bayrou (lire : http://www.mouvementdemocrate.fr/article/discours-de-cloture-de-francois-bayrou-a-luniversite-de-rentree-du-mouvement-democrate-2018 )
Ce soir, de retour dans mes pénates, j’ai envie de partager avec vous une des interrogations centrales du discours de François Bayrou ainsi que les réponses qu’il suggère pour cet an II d’Emmanuel Macron.
Après avoir rappelé le désir de sortir des anciennes impasses de nos concitoyens exprimé en mai 2017 ainsi que la qualité du bilan de l’An I d’Emmanuel Macron, François Bayrou s’interrogeait : « Alors, d'où vient que la rentrée, comme l'a dit le Premier ministre devant les députés de notre groupe, soit une rentrée difficile ? Que les études d'opinion, les sondages divers et variés, montrent quelque chose qui s'apparente ou rappelle la morosité des temps précédents ? »
Examinons et débattons sur chacune des analyses proposées par le Président du Modem.
1/ L’affaire Benalla :
« On a voulu faire une affaire d'Etat d'un accident de parcours….. ni mise en danger de la République, ni mise en danger de l'Etat, ni quoi que ce soit qui justifie à mes yeux un tel barouf ! »
F. Bayrou ne croit ni à la gravité de ce dysfonctionnement, ni à un impact majeur de cette affaire sur l’opinion publique. Soyons directs : moi non plus ……
2/ L’indispensable pédagogie du Président Emmanuel Macron
Toujours selon François Bayrou, « Premièrement, les Français ont besoin non pas seulement de l'énoncé des réformes successives et séquentielles, mais les Français ont besoin d'un plan d'ensemble. La politique, ce n'est pas dossier après dossier, un dossier qu'on ouvre et un dossier qu'on referme : il faut que s'exprime à l'intention des Français, la vision qui organise ces réformes. On a besoin non pas seulement de savoir les pas que l'on fait, mais on a besoin de savoir où l'on va.»
F. Bayrou appuie ici sur une des causes les plus indiscutables du décrochage actuel d’Emmanuel Macron, (à mon humble avis). La semaine dernière nous avons assisté, un peu sonnés, à la présentation de trois plans sectoriels majeurs : le plan santé, le plan pauvreté et le plan vélo …..sans que personne ne veuille nous les resituer dans l’image plus large du projet présidentiel et des valeurs qui le structurent : priorité au travail, à la formation, au mérite individuel ……et comme F. Bayrou le dit plus loin dans son discours. Le professeur doit être le Président lui-même de manière régulière tordant ainsi le cou à la vieille théorie de la « rareté de la parole Présidentielle ».
Franchement pas facile, cher François, de mettre en cohérence l’immensité de l’action gouvernementale. Je crois qu’il faut pour ma part assumer le caractère sectoriel de la plupart des dossiers et réserver la cohérence globale à un sujet transverse……les finances publiques et la fiscalité qui nous rassemblent tous, citoyens français …..
3/ « Et s’il avait raison ? »
Avec fermeté et solennité, F. Bayrou a alerté le Président sur le risque de bunkerisation voire de paranoïa lorsqu’il est sous la critique (la semaine dernière du Sénat, par exemple): « Le pouvoir appelle les contre-pouvoirs, et c'est heureux : le Parlement, la presse, les associations, l'opinion organisée, et le pouvoir doit accepter les contre-pouvoirs, les regarder comme nécessaires, et comprendre que c'est cet équilibre qui tient lieu de garde-fou, garde-fou pour le pouvoir ou les gouvernants eux-mêmes, et plus souvent garde-fou pour ceux qui les entourent. Il faut, nous sommes là pour ça, défendre cet équilibre des pouvoirs, défendre les contre-pouvoirs, et il faut acquérir cette philosophie, cette compréhension, et je dirai même cet humour, qui sont la plus efficace des défenses quand on est dans ces situations de responsabilité. »
Moi qui « suis » F. Bayrou depuis longtemps, je retrouve sa fameuse question « et s’il avait raison ? » qu’il nous demandait de nous poser vis-à-vis de chacun de nos contradicteurs. Cette sagesse là est inoxydable.
4/ Faire la paix avec les élus locaux par une réforme profonde de l’Etat
Le Maire de Pau ne pouvait pas ne pas avoir entendu siffler « la cocotte des collectivités locales » et effectivement, il a entendu et il y répond par une proposition forte de réponse en profondeur de l’Etat :
« Tout le monde dit, et beaucoup l'ont exprimé ces deux jours, qu'il y a une crise larvée entre l'Etat et les collectivités locales. Eh bien cette crise est absurde, elle est infondée, elle est une impasse. Et donc, il faut en sortir ! Et pour réfléchir à la manière d'en sortir il faut que nous abordions la grande question, parce que cette crise de confiance est très étroitement liée à la question de la réforme de l'Etat. Toutes ces questions sont liées.
Par exemple, on a beaucoup parlé de dépense publique : ma conviction est qu'il n'y aura pas de réelles économies dans la dépense publique s'il n'y a pas une réforme profonde de l'Etat. »
A ce moment précis de son discours, je buvais du petit lait tellement cette recentralisation de l’Etat épuisante pour les élus locaux est mon quotidien (lire ma chronique http://jeandionis.com/blog/macron-an-ii-second-souffle ).
Bref, le diagnostic et l’ordonnance de F. Bayrou m’ont paru très pertinents.
Reste l’observance de cette ordonnance. Reste maintenant à convaincre le Président. C’est à toi, François, que revient cette tâche capitale.
Vous avez su vous trouver au Printemps 2017. Vous vous retrouverez.