Les résultats des élections sénatoriales sont maintenant connus :
1 – Les Républicains et leurs alliés se renforcent et gardent la majorité absolue :
Le groupe des Républicains va rester le premier groupe au Sénat. Au moins 171 candidats (+29) ont été élus avec une étiquette LR ou divers droite. La droite sort donc renforcée de cette élection, puisqu'elle possédait que 142 élus dans l'assemblée sortante.
2 - Le groupe LREM sanctionné :
La République en Marche est en recul et devrait compter au final entre 23 et 27 membres, avant d'éventuels ralliements. Une déroute pour le mouvement fondé par Emmanuel Macron puisque, dans l'Assemblée sortante, LREM pouvait s'appuyer sur 29 membres. Le mode de scrutin des élections sénatoriales n'est pas favorable aux jeunes mouvements, mais LREM espérait malgré tout faire beaucoup mieux. François Patriat, président du groupe LREM au Sénat, avait même annoncé un objectif de 50 à 60 élus.
3 – le groupe Union centriste charnière :
Le groupe Union centriste, qui a obtenu au moins 41 élus, avait décidé avant l'été de se placer dans la majorité présidentielle tout en gardant une liberté de vote. Ce groupe est actuellement un agrégat de différentes sensibilités (MoDem, UDI, radicaux valoisiens). Il pourrait voir ses contours redéfinis au gré des discussions post-électorales.
4- La gauche limite la casse :
Les socialistes craignaient une nouvelle déroute, mais ils s'en sortent finalement mieux que prévu. Certes, le PS va perdre des élus, en passant de 86 sièges à une estimation située entre 67 et 72 sièges. Mais il pourra compter sur le renfort d'une quinzaine de divers gauche.
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Il nous faut maintenant nous lancer dans le difficile travail d’interprétation de ces résultats.
Les 76 000 grands électeurs qui se sont exprimés constituent pour l’essentiel un corps électoral de conseillers municipaux élus lors des élections municipales de 2014, favorables à la droite et au centre. Il y a donc un effet mécanique entre ce corps électoral plus à droite depuis 2014 et les résultats de ce soir où la droite et le Centre progresse.
Mais ces mêmes grands électeurs de gauche et de droite auraient pu suivre le même parcours que les électeurs de base en juin dernier lors des élections législatives. Ils ne l’ont pas fait et ont préféré confirmer par leur vote leur appartenance initiale. Les scores faits par LREM dans la plupart des départements sont très faibles (dans mon département, le Lot-et-Garonne, ils atteignent à peine 10% au 1er tour !).
Pourquoi cette résistance ?
Osons quelques explications de fond.
Les annonces budgétaires du gouvernement ont clairement inquiété et exaspéré les élus locaux. Quand on met bout à bout la suppression de la taxe d’habitation, la diminution de crédits budgétaires à destination des collectivités locales, la suppression de plus de 30% des contrats aidés, l’annonce d’économies à faire à hauteur de 13 milliards/an en fin de mandat, il ne faut pas s’étonner de l’extrême méfiance des élus locaux par rapport au message gouvernemental.
Mais ce n’est pas tout. La communication de ce gouvernement y compris celle du Président a été maladroite et humiliante. Aller dire lors de la dernière conférence des territoires la volonté du Président de supprimer 1/3 des élus locaux, alors que ceux-ci sont dans leur très grande majorité des bénévoles n’était pas spécialement la campagne électorale la plus intelligente dont on puisse rêver.
Et si l’on creuse un peu cette maladresse surprenante de LREM avec les élus locaux, on s’aperçoit vite que le Président et sa garde rapprochée connaissent très mal les collectivités locales. Pour un jeune Président (39 ans), à l’aise à l’international, avec les entreprises et avec la haute administration, il n’y a aucun scandale à cela… à condition d’être lucide sur cette carence et s’entourer de vrais poids territoriaux. Râté. Les poids lourds politiques avec une véritable connaissance de ces enjeux (Bayrou, Le Drian, Collomb) de cette époque ont été soit écartés, soit sont bizarrement absents de la communication gouvernementale.
Enfin, l’échec de LREM lors de ces sénatoriales est aussi – et ç’est ce qu’il ya de plus grave et de plus structurel – l’absence d’une véritable stratégie d’alliance. Au 2ème tour des élections sénatoriales, les candidats de LREM se sont trouvés bien seuls, sans réserves de voix ni à droite, ni à gauche. Et l’on retrouve içi toutes les limites de la stratégie d’Emmanuel Macron de démolition de son opposition, plutôt que la construction d’une véritable alliance avec une partie d’entre elle. De l’autre côté du Rhin, Angela Merkel nous donne une véritable leçon de politique en mettant toute son énergie à construire une alliance large et durable avec les libéraux, avec les écologistes pour élargir sa base politique et électorale.
Soyons honnêtes. Le fait qu’Emmanuel Macron ne dispose pas d’une majorité absolue au Sénat n’est pas un drame pour lui, sauf peut-être pour son projet de réforme constitutionnelle exigeant sur l’ensemble du parlement 3/5 des votes émis.
Son incapacité, à ce jour, a nouer un dialogue de confiance avec les élus locaux est autrement plus grave. Jupiter doit impérativement descendre de l’OLYMPE et venir mettre les mains dans le camboui avec les Tauliers de la république que sont notamment ses maires.