Comme la plupart d’entre vous, ce sont ces images terribles d’immigrés parqués dans les cales de cargos fantômes désertés par leurs équipages et lancés - moteur bloqué - vers les côtes italiennes, obligeant la Marine Italienne « à prendre la main » pour éviter le drame, qui m’ont marqué en ce début d’année 2015.
Ces images sont terribles.
A elle seules, elles illustrent le défi considérable que représente la lutte contre l’immigration illégale et nous font ressentir le discernement que cette lutte exige de notre part, nous citoyens européens pour apprécier la diversité des situations : En effet, et à titre d’exemple, des réfugiés politiques syriens avec passeurs turcs n’ont pas grand-chose à voir avec des immigrants économiques maliens ou nigériens avec passeurs libyens.
J’ai voulu, ensuite, dépasser l’émotion pour établir les réalités structurantes de cet enjeu politiquement et socialement explosif :
1°) Il ya bien une explosion de l’immigration clandestine en Europe : Environ 229 000 passagers clandestins en Europe entre Janvier 2014 et Octobre 2014. + 144% par rapport à la même période en 2013 ! Directement lié à cet afflux d’immigrants, le nombre de décès en Méditerranée explose : 2500 en 2014 contre 600 en 2013 !
2°) Deux filières d’immigration dominent. La première, de loin, part de la Lybie (153 000 départs sur 10 mois) pour aller chercher directement les côtes italiennes. Elles concernent d’abord…les Erythréens, puis les maliens et les Nigérians. La deuxième filière (43 000 départs sur 10 mois) part de la Syrie, transite par Chypre, pour ensuite aborder les côtes grecques. Elles concernent d’abord des immigrants Syriens et Irakiens.
3°) Les deux pays directement concernés par ces arrivées d’immigrants sont l’Italie et la Grèce. Mais ce ne sont que des pays de transit, les pays de résidence de ces immigrants sont …l’Europe entière et principalement l’Europe du Nord.
Que pouvons –nous faire devant cet afflux d’immigrés clandestins ? Pouvons-nous les renvoyer dans leur pays d’origine comme le préconisent plusieurs populistes comme Marine Le Pen ?
La réponse est clairement non, et ceci sans même évoquer la dimension morale, pourtant fondamentale de l’accueil des réfugiés politiques. « Pour la simple et bonne raison qu'il existe un droit humanitaire et un droit maritime international, et qu'il est strict. Des gens sur une embarcation en difficulté doivent être secourus et pris en charge sous exigence de sécurité. A l'époque, on agissait en partenariat avec la Libye, mais depuis son effondrement... Il n'est plus possible pour raison sécuritaire (tant pour les migrants que pour les équipages européens) de les ramener en Libye. Et quand au reste de la façade africaine... Le Maroc collabore déjà énormément avec l'Espagne, et au final, la route marocaine ne représente qu'un volume faible. La Tunisie, l'Algérie et l'Egypte, relativement épargnées, n'ont eux aucune raison de se proposer pour la prise en charge ! Tout ce qu'on peut faire pour l'instant, c'est soutenir une stabilisation, même partielle, de la Libye.
En ce qui concerne la route orientale, c'est plus complexe. La majorité des migrants fuient la guerre en Irak et en Syrie,... Ici, c'est la Turquie qui n'a aucune raison de jouer les nounous à migrants » (commentaire venant du site le Point.fr.)
Il n’y a donc ni solution immédiate à ce défi, ni solution facile à mettre en œuvre.
A moyen terme, deux pistes de travail émergent :
1 °) Encore plus que la carte de la misère socio-économique, la carte de l’immigration clandestine se superpose avec celle des guerres qu’elles soient civiles ou non (Syrie, Irak, Erythrée, Libye, Mali,….). L’urgence est donc dans la résolution de ces conflits, quelque soit leur sensibilité, leur complexité. Pas de paix dans le monde, pas de politique de l’immigration efficace. Question à titre d’exemple : qu’avons-nous fait, nous Union Européenne, pour stabiliser la Lybie depuis la mort de Kadhafi ?
2°) S’il y a un domaine dans lequel l’Europe est carrément et littéralement indispensable, c’est bien celui de de l’immigration. Il faudra bien que les Européens se payent ensemble une surveillance efficace de leurs frontières de « première ligne » ( Les frontières grecques, Italiennes et dans une moindre mesure Espagnoles et Maltaises) . Et cela ne suffira pas. Il faudra aussi repenser les accords de Schengen pour rendre cohérentes et efficaces les politiques de lutte contre l’immigration clandestine dans les pays de « première ligne » avec les politiques dans les pays « de résidence »
Enfin et surtout, nous devons clarifier notre volonté réelle par rapport à certains immigrants clandestins. Faut-il oui ou non accueillir en Europe et plus particulièrement en France les refugiés Syriens et Irakiens qui vivent l’horreur dans leur pays ? Je pense que oui et mon pays s’honorerait à le dire clairement.
Il est grand temps de construire une politique Européenne de lutte contre l’immigration clandestine qui soit à la fois ferme, efficace et généreuse quand l’Union Européenne aura décidé de l’être.
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Immigration : le choc des cargos fantômes.
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