Notre pays sort à nouveau meurtri de l’acte 4 de la crise de Gilets Jaunes qui s’est déroulé samedi dernier. Si les désordres publics ont été – semble-t-il - mieux contenus dans la capitale que lors du Samedi 1erDécembre, 125 000 personnes, selon les chiffres du Ministère de l’intérieur, ont participé à cette nouvelle journée de mobilisation sur tout le territoire Français et les forces de l’ordre ont procédé à 1385 interpellations pour cette seule journée, chiffre tristement record. Cette courte synthèse nous rappelle une évidence : La France traverse une crise politique gravissime et il est urgent qu’elle en sorte…..
Je sais qu’en ces temps troublés, il faut parler avec humilité. Mais, c’est aussi le moment d’avoir des convictions et du courage. Je me risquerai donc à une prise de parole « à chaud », qui sera peut-être jugée sévèrement par ceux qui analyseront cette crise confortablement à l’abri une fois qu’elle aura été dépassée.
Il parait qu’en chinois, le mot crise veut dire à la fois « danger et opportunité ». Et si la sagesse chinoise était pertinente pour la crise des Gilets Jaunes ?
J’ai dit dans ma précédente chronique sur les gilets jaunes (lire http://jeandionis.com/blog/gilets-jaunes-ce-que-nous-nous-sommes-dits) que cette crise, c’était une vraie question, la question sociale et deux lignes rouges, celle de la démocratie et celle de la paix civile.
Et cette grille de lecture mérite d’être approfondie.
Oui, la crise des gilets jaune va devenir dangereuse si elle n’est pas désamorcée rapidement.
Elle est dangereuse parce qu’elle est déjà, pour reprendre les mots de Bruno Le Maire, notre Ministre de l’Economie, une catastrophe économique pour nos commerçants et nos entreprises privés de l’activité indispensable de la période de pointe des fêtes de fin d’année. Nous paierons la facture de cette catastrophe en croissance plus faible et en emplois détruits.
Mais surtout, elle est dangereuse parce qu’elle menace la paix civile du pays. Cette crise a déjà fait un mort et des centaines de blessés. Mais elle menace d’en faire beaucoup plus si son potentiel de violence n’est pas contenu.
Si, par malheur, d’un affrontement entre le Gouvernement et les Gilets Jaunes, ce conflit glisse, jour après jour, vers un affrontement d’une partie de la nation contre l’autre. Rien ne justifie l’horreur de la déchirure civile d’un pays avec son cortège d’atrocités. Comme toujours, ce sont ceux qui sont en première ligne qui paieront le prix de ces violences et non pas ceux, bien au chaud, qui jettent de l’huile sur le feu… Le moment est venu, pour moi, de se rappeler la sagesse de Georges Brassens : « Mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente ».
Du plus profond de moi, j’espère que le Président, garant de l’unité nationale, aura trouvé, ce soir, à 20 h, le chemin de la réconciliation, de la fin des manifestations et du début du dialogue.
Car la crise est dangereuse aussi parce qu’elle peut avoir une issue potentiellement anti-démocratique. A chaque échange avec les gilets jaunes, je leur ai dit que je ne les suivrai jamais sur les chemins glissants de la contestation de la légitimité démocratique de nos parlementaires et, à fortiori, du Président de la République.
« Macron, démission ….. » fort bien et après ? Cahin, caha notre constitution s’appliquerait - et non pas toutes les fadaises qu’on entend à droite ou à gauche - le Président du Sénat assurerait l’intérim… jusqu’à une nouvelle élection présidentielle et là, les partis extrêmes auraient une vraie chance de l’emporter. Et cet avenir là, glauque, indigne de la France, je n’en veux à aucun prix. Et à mon humble niveau, je me battrai de toutes mes forces pour que la France évite ce drame.
Bref, il faut que tout le monde se retrouve dans le respect sacré de la République et de ses institutions démocratiques. C’est une ligne rouge non négociable.
Pour autant, faut-il s’interdire d’améliorer notre fonctionnement démocratique ? certainement pas, mais c’est un débat âpre, complexe qu’il faudra mener devant le Parlement et, si nécessaire, devant le peuple à l’occasion de la réforme constitutionnelle. Je note qu’en amont de la révolution française, les Lumières avaient construit une alternative à la Monarchie, la république. Mais aujourd’hui, où est-elle l’alternative à la V ième république ? nulle part, si ce n’est dans les tentations autoritaires.
Reste le cœur de la protestation des Gilets jaunes, à savoir la question sociale. J’ai dit clairement que l’heure était venue d’un allégement fiscal significatif des classes moyennes et populaires financé par un effort fait par les plus riches de nos concitoyens.
Le Président de la république tient un discours favorable au travail. Il a raison. Mais il faut maintenant qu’il mène une politique résolument favorable à tous les travailleurs, même les plus modestes. Le Président a tenu un discours et mené une politique fiscale par trop favorable aux riches, à ces fameux « premiers de cordée » avec derrière la conviction que les avantages donnés à ceux-ci auraient un effet d’entrainement, par leur « ruissellement ». Ce discours, cette politique doit être rééquilibrée vers plus de justice sociale. Il est de s’occuper aussi de celles et ceux qui sont au milieu et en fin de cordée !
Au Président de trouver le bon mélange entre des mesures court-terme qui recréeront un climat de confiance entre lui et les Gilets Jaunes et une démarche forcément plus longue, forcément plus complexe, du genre « conférence de toutes les parties prenantes - dont les Gilets Jaunes – en matière salariale et fiscale ».
Tous les républicains, tous les démocrates doivent maintenant aider à cette sortie de crise.
Par le haut. Dans l’unité nationale.
Cher Jean, j'apprécie beaucoup ta sagesse ... chinoise ! J'apprécie également le fond de ton article: se battre pour ne pas laisser la place aux extrêmes, qui n'ont jamais rien prouvé.
Tous mes meilleurs voeux 2019 pour toi et tes proches. Avec toute mon amitié, René PICHAN