Je viens de vivre un week-end un peu exceptionnel où, avec une délégation de cinq personnes et notre comité de jumelage, je me suis rendu à Dinslaken, notre ville jumelle en Allemagne, au cœur de la Ruhr, dans le land puissant de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie. L’objet de ce déplacement était de célébrer le 50ᵉ anniversaire de notre jumelage. En 1975, Agen et Dinslaken se sont inscrites dans le grand mouvement des jumelages entre villes françaises et allemandes.
Derrière ce mouvement, il y avait la vision politique des militants de la construction européenne et leurs figures emblématiques : Robert Schuman en France, Alcide De Gasperi en Italie, Konrad Adenauer en Allemagne et, bien sûr, à sa manière, le général De Gaulle. Mais derrière ces noms prestigieux, il y avait aussi la pensée et la détermination d’un homme à qui l’histoire a fait une place plus modeste : Jean Monnet. Il avait retenu les leçons de la Première Guerre mondiale et l’échec d’une approche exclusivement étatique et gouvernementale pour enraciner la paix et éviter le retour de la guerre. Pour lui, « la paix était un bien trop précieux pour la confier aux seuls États nationaux ». Toute politique intergouvernementale devait être complétée par des politiques publiques citoyennes et populaires : « Tissez un million de petits liens entre des ennemis séculaires, et vous rendrez la guerre impossible. »
C’est dans cette vision politique qu’est né le grand mouvement de jumelage des villes au sein de l’amitié franco-allemande. Cinquante ans après, Agen et Dinslaken ont fait leur part. Nous avons créé, depuis 50 ans, des milliers de petits liens : entre nos écoles, nos chorales, nos instituts pour enfants handicapés, nos clubs sportifs et, bien sûr, entre les élus des deux villes et leurs maires. Ce faisant, notre regard a changé. Nous avions à juste titre une vision de l’Allemagne comme pays agresseur, fanatisé par la folie nazie. Mais Dinslaken, en choisissant la date anniversaire du 23 mars 1945 – jour où la ville a été écrasée sous les bombes et où 511 habitants ont perdu la vie –, nous a ouvert les yeux sur le prix vertigineux payé par l’Allemagne et ses 5 millions de morts durant la Seconde Guerre mondiale.
Cependant, nous ne nous sommes pas contentés de commémorer ces heures tragiques. Tout au long de ces cinquante années, nous avons fait des rencontres, noué des amitiés et partagé du bonheur à travers ces échanges. Cela valait bien une première mi-temps pour un bel anniversaire. Nos amis allemands nous ont magnifiquement reçus en nous offrant notamment un cadeau exceptionnel : le concert de la 9ᵉ symphonie exécuté par l’Orchestre philharmonique de Westphalie.
À nous maintenant de réussir la deuxième mi-temps de cet anniversaire ! Cela se passera du vendredi 13 juin au dimanche 15 juin à Agen. Je me permets d’inviter dès à présent toutes celles et tous ceux qui s’intéressent à l’Allemagne. Nous vous communiquerons bientôt le programme détaillé.
De retour à Agen, nous avons des convictions renforcées et les idées claires. Jean Monnet avait raison : il faut continuer à se vacciner contre les extrêmes, il faut que les citoyens s’engagent activement pour préserver la paix.
Vive Dinslaken, Vive Agen
Vive l’Allemgane Vive la France,
Vive l’amitié franco-allemande
Et vive l'Europe bien-sûr !
PS : retrouvrez le texte de mon discours, prononcé à l'Hôtel de Ville de Dinslaken durant la cérémonie anniversaire de nos 50 ans.