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Projet de loi d'orientation sur la Justice

Publication : 01/08/2002  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Monsieur le Président, Monsieur le Garde des sceaux, Mes chers collègues,


Je voudrais ici d’abord apporter le témoignage d’un citoyen récemment élu après une campagne d’écoute, longue et patiente, comme nous avons du être nombreux à le faire dans cette assemblée.

Cette campagne nous a permis de rencontrer des milliers de personnes très diverses, qui nous ont par contre mandaté sur des orientations parfaitement claires : « Soyez plus durs avec les voyous et les tricheurs et respectez ceux qui travaillent » . Voilà ce que nous avons tous entendu des centaines de fois…..et voilà pourquoi le remarquable travail législatif fait par le gouvernement sur la sécurité et sur la justice est profondément légitime. C’est pour cette raison de fond que Pierre Albertini, au nom du groupe UDF, a apporté notre soutien à votre texte, Monsieur le garde des sceaux.

Oui, il y avait urgence, symbolique, au sens fort du terme à changer de politique dans ce domaine.

« En tardant à prendre la mesure des souffrances engendrées, surtout dans les quartiers défavorisés, par montée de l’insécurité, les socialistes ont trahi ce qu’ils appelaient avec emphase en 1981 « le peuple de gauche »

La réalité s’est vengée. Elle est cruelle pour la gauche : au moment de voter, les couches populaires se détournent d’elles » Ce n’est pas moi qui le dis , c’est un des vôtres , Hervé Algalarrondo, rédacteur en chef adjoint au service politique du nouvel Observateur dans un très bon livre « Sécurité : la gauche contre le peuple »….

Et les chiffres sont là têtus : en 1988, 74 % des ouvriers avaient choisi François Mitterrand au deuxième tour de l’élection présidentielle. Le 21 Avril dernier, 40 % choisissaient l’abstention, 30 % Le Pen, et 20 % à égalité Jacques Chirac et Lionel Jospin…..et quand ils étaient interrogés sur les raisons de leurs choix électoraux, ils citaient la montée de l’insécurité comme raison première de leurs choix….

Oui, nous serions bien inspirés de garder en mémoire le discours prononcé le 25 Octobre 2001 par le Président de la république à Nîmes, sur la montée de l’insécurité. Constatant qu’ils avaient franchi un palier inacceptable, que nous n’aurions jamais, imaginé atteindre dans une France d’équilibre, de mesure, d’intégration et de tradition civique, le Président de la république a tenu à préciser : « Nous avons tous été plus ou moins complices de cette évolution »…..oui, tous

Même si, la responsabilité de la gauche est plus directement engagée. Parce que elle a gouvernée plus longtemps que nous ces vingt dernières années, et puis aussi parce qu’elle a été plus directement sous l’influence des lobbys post-soixante-huitards….

J’ai, comme militant politique, en mémoire en 1996 la discussion à l’assemblée nationale du projet de loi présenté par notre Président, alors ministre de l’intérieur. Julien Dray, alors orateur du parti socialiste s’opposait à ce que les forces de l’ordre pénètrent de nuit à l’intérieur d’un domicile privé de terroriste…sauf si l’attentat avait déjà eu lieu ….

Oui, nous sommes en face d’un échec collectif des politiques publiques menées depuis 20 ans. J’espérais un consensus de la représentation nationale sur ce sujet, marquant une détermination nouvelle de la nation dans ce domaine. Il n’aura pas lieu…la gauche préférant adopter une prudence bien frileuse plutôt que de faire à cette occasion l’aggiornamento dont elle ne pourra pas faire l’économie ….

C’est dommage ! Parce qu’un certain nombre des critiques faites au texte du garde des sceaux hier soir par le même Julien Dray sont à notre avis pertinentes.

Oui, la justice de réparation est une des voies d’avenir pour faire reculer l’insécurité et le texte présenté, trop discret sur ce point, aura à être complété sur ce point. Alors que le texte est riche en ce qui concerne la réflexion sur la gradation progressive en matière d’éloignement et finalement d’enfermement , le texte nous semble faible sur la panoplie des moyens à déployer en matière de réparations : réparations financières d’abord, mais aussi réparations d’intérêt général ensuite.

J’ai peur que vous ne croyez pas assez aux vertus de ces travaux ….Or, tout tagueur ayant tenu assez longtemps le karcher et la brosse métallique pour effacer le produit de son énergie débordante pourrait vous convaincre du contraire. Reste qu’un cadre plus général, plus efficace est à créer. Il passe sans doute par les Maires ou plus largement par les collectivités territoriales, qui connaissent bien ces petits délinquants,
et qui ont les moyens d’encadrer ces travaux d’intérêt généraux avec leur services de production, d’animation, de police municipale. Oui, l’implication, pas assez forte et encore ambiguë, des élus locaux dans le nouveau paysage judiciaire et policier mis en œuvre par le gouvernement reste une des faiblesses de ce dispositif. A l’UDF, nous saisirons l’opportunité du grand débat sur la décentralisation pour compléter sur ce point les textes fondateurs proposés par M. Le Garde des sceaux et monsieur le Ministre de l’intérieur.

Enfin, Monsieur le Garde des sceaux, en tant qu’ingénieur et élu d’Agen, où est implantée l’Ecole Nationale d’Administration pénitentiaire, ayant pris le temps de discuter de votre projet de loi avec plusieurs fonctionnaires de cette administration, je voudrais vous alerter quant à la mise en place de dispositifs de brouillage des communications par téléphone portable prévus au titre V chapitre 1er article 29 de votre projet.

Il me semble que c’est une fausse bonne idée qui va coûter très cher , qui va vous poser des problèmes de fonctionnement et…..ne sera pas très efficace. La mise en œuvre de dispositifs efficaces par rapport à une technologie en permanente évolution va effectivement vous coûter très cher alors que le nombre d’évasions des prisons françaises est bas, alors que les portables permettent aussi, parfois les écoutes, qui peuvent être utiles pour agir à l’extérieur …..

Au-delà de ces remarques importantes sur le mauvais rapport coût/efficacité de cette mesure, prenons garde à ne pas sombrer dans une logique d’isolement complet par rapport à l’extérieur. Si nous interdisons les portables en prison , qu’allons nous faire pour le Web , la messagerie électronique , allons-nous l’interdire , pour réduire le risque d’évasions, certes réel, mais réduit, alors que c’est certainement une des outils de réinsertion les plus efficaces notamment pour les délinquants mineurs ….

Si vous interdisez l’accès au web en prison, alors vous fermez une voie très féconde pour la réinsertion inévitable et souhaitable des détenus …..et si vous l’autorisez, alors l’interdiction des portables n’a plus beaucoup de sens puisque des messages pourront être échangés avec l’extérieur et qu’il est même possible de téléphoner sur le Web…..

Bref, cette mesure demande à notre avis à être réfléchie en profondeur avant une quelconque mise en œuvre…..

En faisant ces remarques, l’UDF reste fidèle à la ligne fixée par P. Albertini hier soir : celle d’une volonté d’amélioration d’un texte que pour l’essentiel nous approuvons sans réserve,
Je vous remercie

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