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Jean Dionis porte-parole des centristes pour le débat sur le changement de statut de la Poste cette semaine

Publication : 18/12/2009  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

intervention de Jean Dionis sur le débat dans l'hémicycle au sujet de la Poste :

DISCUSSION GENERALE du PJL relatif à LA POSTE ET AUX ACTIVITES POSTALES


Monsieur le Président,

Monsieur le ministre,

Mes chers collègues,

Quatre ans après la loi postale de 2005, le parlement est à nouveau saisi pour délibérer d'un texte majeur concernant l'avenir de la Poste.

Qu'est-ce qui justifie sur le fond le fait de revenir aussi vite devant la représentation nationale ?

I. Ce sont les nouveaux défis auxquels la Poste est confrontée aujourd'hui.

Premier défi, s'adapter à la baisse constante du volume du courrier, son activité principale depuis plusieurs années.

Pour illustrer cette baisse, commençons par quelques chiffres :
le courrier, c’est 56% du chiffre d’affaire de La Poste.
Au total, ce sont 29 milliards de documents qui sont acheminés et distribués par an, soit 95 millions par jour
et ce par quelques 200 000 postiers sur les 300 000 que compte l'entreprise.
Aujourd'hui, l’entreprise postale doit cependant faire face à une nouvelle forme de concurrence avec les changements d’habitude des usagers, liés notamment au développement des courriers électroniques et à l’essor des télé-procédures.

La Poste prévoit maintenant un recul annuel de son activité de base de 3 % par an. Toutes les prévisions à long terme tablent sur un recul de cette activité compris entre moins 20 et moins 40 % à l'horizon 2020 par rapport au niveau 2009.

Et encore ces chiffres ne donnent pas la mesure de la fragilité de cette activité.

Savez-vous notamment que :
1°) le courrier entre particuliers représente moins de 3% du CA de cette activité
2°) que 50% du CA du courrier est réalisé seulement par 100 entreprises.
3°) que l'introduction de la carte vitale – exemple de dématérialisation de courrier menée par la puissance publique – a fait chuter le nombre de feuilles de soins de 11 millions à moins de 1 million.

Bref, le coeur de métier de La Poste est pleine mutation, nous sommes bien en face d'une transformation de fond de son activité.

Alors, si aujourd'hui personne n'est en mesure de prévoir avec précision le rythme de ce changement, ( car il n'est pas exclu que le papier reste un support moderne!), nous avons le devoir de donner à La Poste les moyens d'opérer sa mutation, à la fois à l'intérieur de son activité courrier mais également sur ses métiers en croissance.

En parlant de croissance, il est aussi nécessaire pour La Poste de trouver des relais de croissance en remontant la chaine de valeur du courrier.
Nous pensons notamment au développement des services de gestion documentaire proposant ainsi aux usagers de gérer l’ensemble des flux documentaires en plus du transport du courrier.

Second défi, l’ouverture progressive du secteur postal, engagée en 1997 et parvenant à son terme en 2011.

Le 1er janvier 2011, La Poste va se retrouver en concurrence sur le cœur de son activité : le courrier.
Le développement en Europe d’opérateurs postaux puissants et animés d’ambitions internationales est un fait.

La Poste en fait partie avec un chiffre d’affaire de 20.8 milliards d’euros, qui en fait le 2ème groupe postal européen derrière la poste allemande.

Dans ce nouvel environnement, La Poste doit être en mesure de jouer à armes égales avec ses concurrents.

Pour cela, elle doit trouver de nouveaux financements pour investir durablement et massivement.

C'est la seule voie pour une modernisation réussie et l'amélioration de sa productivité, au moment où ses concurrents vont chercher à mener une stratégie de niche sur les quelques segments rentables de l'activité courrier (publicité non adressée, grands comptes).


*************


II. Examinons maintenant les réponses possibles à ces défis

La Commission Ailleret, composée de parlementaires, dont j'ai eu l'honneur de faire partie, de représentants des organisations syndicales, de l’Etat et de la Poste, a souligné de manière quasi-consensuelle la nécessité d’engager des investissements importants pour continuer à améliorer les conditions d’exercice des différents métiers de l’entreprise postale et donc, au premier chef, de ses missions d’intérêt général.

Elle a ainsi considéré qu’un besoin de financement externe d’au moins 2.7 milliards d’euros était nécessaire pour mener à bien le projet industriel engagé par La Poste et rendu indispensable par son environnement concurrentiel à l’horizon 2012.

Au regard du droit de la concurrence, le changement de statut que nous propose le projet de loi examiné aujourd’hui, est l’unique voie pour permettre à l’Etat et à la Caisse des Dépôts d’apporter ces 2.7 milliards d’euros d’investissement.

En effet, La Poste peut difficilement accroître son endettement qui atteint 6 milliards d’euros.

En outre, il n'est pas possible que l'Etat intervienne par le biais d'une subvention ou d'un autre type d'aide sans que l'entreprise postale tombe sous le coup de l’interdiction européenne des aides d’Etat.

Alors, oui, pour régulariser un tel investissement au regard des exigences du droit de la concurrence, l’Etat doit réaliser cet apport dans le cadre d’une société anonyme, et non d’un Etablissement public (EPIC).

Cela dit, le changement de statut ne signifie pas privatisation.

Le texte de loi, dans son article 1, alinéa 3, l'interdit en précisant « le capital de La Poste est, dans sa totalité, détenu par l'Etat ».

Ce caractère public a été confirmé par le Gouvernement, au Sénat, et dans notre hémicycle encore une fois cet après midi par M. Le Ministre.

Et pourtant, nous allons passer une grande partie de nos 30 heures de débat à instruire le procès d'intentions au sens propre et respectable du terme que va conduire l'oppostion sur les intentions à venir du gouvernement quant à une hypothétique et éventuelle privatisation future de La Poste.
Le décor du jeu de rôle est déjà campé, le scénario et la distribution sont connus.

Dans le rôle de celui qui va affirmer et réaffirmer que jamais, au grand jamais, juré, craché, nous ne privatiserons La Poste, nous aurons le Gouvernement et son Ministre.

Dans le rôle des vaillants chevaliers démasquant les sombres intentions du Gouvernement et de la majorité présidentielle, nous aurons les nombreux orateurs de l'opposition.

La réalité est beaucoup plus prosaique.

Le texte de loi actuel interdit la privatisation et j'appelle l'opposition à avoir l'honnêteté intellectuelle de le reconnaître.

Mais la réalité, c'est aussi de reconnaître que ce qu'à fait une loi, une autre peut le défaire et nous avons déjà vécu cette situation concernant la gestion d'autres entreprises publiques, je pense évidemment à la fusion GDF-SUEZ.

Le Nouveau Centre, qui soutient l'affirmation du caractère exclusivement public de La Poste contenu dans la loi appelle chacun des acteurs à une certaine sagesse dans l'éxécution de sa partition.

Nous soulignons pour finir avec ce point qui va nous occuper pendant de longues heures, la menace directe que ferait peser sur l'unité du groupe La Poste le refus de faire un apport en capital à la tête du groupe.

Tout blocage idéologique sur ce point entrainerait de fait le groupe dans la voie de la privatisation de ses métiers à croissance avec l'arrivée d'actionnaires qui refuseraient toute solidarité avec la branche en déclin qu'est le courrier.

L'enjeu de cette dotation en capital, c'est donc bien l'unité du groupe.

Celle-ci n'a rien d'évident aujourd'hui, car son activité historique est en déclin et même temps, ses activités complémentaires sont en forte croissance.

Nous appellons donc tous ceux qui sont attachés à l'unité du groupe La Poste à bien mesurer les conséquences de propositions qui peuvent paraître protectrices mais sont en fait particulièrement dangeureuses pour la Poste.


III. La transposition de la directive européenne et ses enjeux pour le service public postal


Enfin, la France, dans ce projet de loi, assure à la fois de la transposition du service universel postal tel qu'il est défini par les deux directives européennes de 1997 et 2008 et définit des missions complémentaires de service public et d'intérêt général pour la présence postale territoriale, le transport et la distribution de la presse et pour l'accessibilité bancaire.

A nos yeux, l’enjeu est ici triple.

III. a. C’est tout d’abord, un enjeu en termes d’aménagement du territoire.


Nous voulons ici rendre hommage à la vision stratégique de Jean-Paul Bailly, Président de la Poste, qui a su à la fois préserver le maillage territorial de la Poste et ses 17 000 points, tout en permettant l'émergence de formes nouvelles de cette présence avec les agences postales communales et les relais postaux commerciaux.

Ne nous trompons pas, l'enjeu des 10 ans à venir est toujours là : le courrier va continuer à reculer et nous devons à la fois continuer à assurer la présence territoriale de la Poste et dans cette perspective continuer à soutenir sa mutation.


III. b. C’est ensuite, un enjeu en termes de qualité de service.

La qualité de service doit être au cœur de nos préoccupations : et disons le franchement, le projet de loi est ici timide. La transposition de la volonté du législateur européen nous est ici proposée a minima.

La qualité du service, c'est obtenir d'abord la disparition quasi-complète des litiges sur les erreurs d'expédition et sur les pertes de plis et de colis.

Et nous en sommes loin !

Le texte est ici trop général, ne reprenant que très partiellement les exigences de l'article 19 de la directive européenne.

Il n'y a aujourd'hui rien de précis, ni sur les déclarations de valeur, ni sur les porcédures de remboursement et d'assurance. Le Nouveau Centre veillera à ouvrir ce débat lors de nos travaux.
La qualité, c'est aussi des délais courts et des délais tenus.

C’est notamment la question de la livraison à J+1 qui se pose. Ce dispositif est un engagement du service public postal français.

En effet, si le pourcentage de plis distribués en moins de 24 heures ouvrés a très sensiblement progressé ces dernières années, passant de 67% en 2003 à 84% au premier semestre 2009, c’est aussi parce que 80% des boites aux lettres sont désormais relevées avant 16 heures et parfois même dès midi !

Les personnes et les professionnels qui vivent et travaillent dans nos territoires ruraux sont aujourd’hui excédés par cet état de fait.

Comment pour une PME en milieu rural, répondre rapidement à un appel d’offre ?
Comment pour un particulier répondre à un rappel de facture par retour de courrier dans ces conditions ?

La Poste doit améliorer et clarifier sa prestation en la matière. Car à ce jeu là, La Poste pourrait scier la branche sur laquelle elle est assise.
Je m’explique : aujourd’hui 97% du courrier a trait à l’activité économique. Mais comment persuader ses clients que le courrier reste irremplaçable si son acheminement tarde trop ?
Baisser la qualité du service ne peut que inciter à la numérisation des informations et à leur expédition par courrier électronique.

Aussi j’insisterai ici sur l’importance du rôle du régulateur pour la mesure et le contrôle en termes de qualité de service rendu par la Poste.

Mes chers collègues, N'AYEZ PAS PEUR DU REGULATEUR !

C'est une position constante des centristes, militants européens, que de soutenir le rôle central que lui donne le législateur européen, directive après directive.

Nous défendrons plusieurs amendements visant à élargir les responsabilités du régulateur, transposées a minima par ce texte de loi.

Nous vous proposerons de moderniser et d'adapter l'ensemble du système de contrôle sur le service public postal en prenant acte du nouveau statut de SA et des dispositions des deux directives européennes.

Et notamment de supprimer la commission supérieure du service public des postes et communications électroniques.

Cette instance a eu sa légitimité et son utilité dans un contexte de société publique nationale, c'est maintenant à la gouvernance de la SA, au régulateur national, l'ARCEP, et en final au Parlement d'exercer leurs fonctions de contrôle.

A titre d'exemple, il nous faut confier aussi au régulateur le bilan de la gestion de l’utilisation du fonds de péréquation.

III. c. Le troisième enjeu, faire vivre l'exignce de l'accessibilité bancaire.

La banque postale doit sans cesse renouveler ses services pour favoriser l' accessibilité bancaire.
Et notre époque est clairement marquée par le durcissement des conditions d'accès au crédit pous les plus modestes de nos concitoyens.

La gamme de produits de La Banque postale qui leur sont spéficiquement destinés doit donc être étendue.

Au-delà du Livret A, nous pensons d'abord à l’offre de microcrédit. La Poste a aujourd’hui la possibilité de faire du microcrédit social mais elle n’a pas l’autorisation de son actionnaire, l’Etat, de proposer du microcrédit entrepreneurial alors même que l’entreprise postale est leader dans l’accompagnement des auto-entrepreneurs.

Par ailleurs, vous connaissez l’engagement du Nouveau centre dans la prévention du surendettement.
Aussi, nous souhaiterions inscrire dans la loi l’exigence pour La Poste de ne pas proposer d’offre de crédit de type renouvelable parmi les produits offerts par la Banque postale.

Ces produits ont montré leur « toxicité sociale ».

La Banque postale s’est bien gardée de s'engager dans des montages de type de subprimes et elle s'en est bien portée.

Elle doit avoir la même exigence éthique et la même réserve concernant les crédits renouvelables.
J'ai noté avec plaisir le bon accueil que vous avez réservé à notre initiative cet après midi.

CONCLUSION

Les logiques de consommation changent. L’Europe économique et juridique poursuit sa construction. Le contexte concurrentiel évolue.

La Poste doit par conséquent s’adapter maintenant.

Elle doit s’adapter tout en assurant ses missions de service public qui font sa force.

La Poste a su passer d’un statut d’administration d’Etat à celui d’établissement public et commercial il y a vingt ans.
Elle réussira cette nouvelle mutation car nous lui offrirons les outils nécessaires avec ce projet de loi.
Grâce au travail des postiers et de leurs dirigeants, elle est aujourd'hui en bonne forme, en ce qui concerne sa gouvernance et ses résultats financiers.

Il y a pour elle urgence à agir.

Elle a les moyens d'agir.

Cette loi les renforce pour le personnel de la Poste, pour ses usagers et plus largement pour notre pays.

A nous de choisir l'audace du mouvement, plutôt que l'impasse du statut quo.

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