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25/09/06 - Intervention de J. DIONIS au nom du Groupe UDF sur l'article 10 du projet de fusion GDF SUEZ

Publication : 25/09/2006  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis



Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

Il y a un peu d'électricité dans l'air……L'UDF souhaite ramener dans l'hémicycle un peu de raison et être "la force tranquille" de ce débat, si je peux me permettre d'emprunter le temps d'un débat, cette expression célèbre.

Nous voilà, donc, maintenant arrivés à l'article 10, où le projet de loi gouvernemental nous propose de réduire la participation minimale de l'Etat de 70 % à 34 %, et ceci assorti de plusieurs dispositions complémentaires.

Il s'agit donc de décider de la privatisation éventuelle de Gaz de France.

Comment en sommes nous arrivés là en partant de deux textes de lois, celui d'Août 2004, sur le service public de l'électricité et celui de Juillet 2005, sur la loi programme portant orientations sur la politique énergétique qui tous deux ont inscrit dans le marbre de la loi l'importance stratégique du caractère public de l'entreprise Gaz de France.

La réponse tient en un mot : Suez.

C'est parce qu'il y a eu au début de l'année 2006 l'OPA hostile d'ENEL sur Suez que le gouvernement, stimulé par le management de Suez, a décidé d'accélérer l'étude puis la mise en œuvre du rapprochement entre Suez et Gaz de France aboutissant au projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui.

C'est pour cette raison que tout discours tendant à organiser le débat sur la privatisation de GDF en dehors du contexte du projet de fusion GDF-Suez est vide de sens.

Le 34 % de l'article 10, c'est la fusion GDF-Suez,
La privatisation de GDF, c'est la fusion GDF-Suez,

Alors ? Au début de ce débat, il faut mieux en prendre acte et l'UDF vous propose de nous poser ensemble une première question :

" Le jeu en vaut-il la chandelle ? "

Parce que finalement cette histoire est assez simple.
Le jeu, c'est la fusion GDF-Suez,
La chandelle, c'est la privatisation de GDF...
et pour nous à l'UDF le jeu n'en vaut pas la chandelle.

Commençons par le jeu...

Mais à quoi doit donc bien servir la fusion de GDF avec Suez ?

On nous explique, officiellement, qu’il s’agit de créer un grand groupe industriel, un géant, un champion de l'environnement et de l'énergie bien utile pour, entre autre, sécuriser nos approvisionnements. Pourquoi pas ?

Mais commençons par émettre des doutes sur l'intérêt de faire cohabiter dans le même groupe un pôle énergie et un pôle environnement. Ce modèle économique, celui des utilités urbaines, date des années 1980 et plus personne ne le défend sur le fond.

En réalité, la ligne force de votre projet est bien loin du projet industriel que vous nous annoncez. Il s’agit pour l'essentiel de protéger le capital de Suez, vulnérable car flottant à plus de 70 %.

Vous avez trouvé pour cela comme solution la fusion avec une entreprise dans laquelle l’Etat détient une participation suffisamment importante. Mais la capitalisation boursière de chacune des deux entreprises (43,2 Mds € pour Suez et 29,3 Mds € pour GDF en février 2006) a obligé l’Etat à réduire sa participation autour de 30 % du nouveau groupe ainsi constitué au terme du mécanisme de fusion…

Voilà la réalité brute qui conduit à votre projet de loi.

Voilà pour le jeu : la constitution d'un champion certes, mais sur un modèle économique très contestable ou l'on additionne deux secteurs de plus en plus divergents : celui de l'environnement et de l'énergie. A terme, la cession du pôle « environnement » est très probable … et vous le savez bien.

Regardons maintenant la chandelle …

Nous l'avons vu, le prix de la protection de Suez, de l'intégralité de Suez, c'est la privatisation de GDF.

Et quel est l’intérêt, pour GDF, de cette fusion ? Le prix à payer en vaut-il la peine ?

L’intérêt de GDF est industriel, certes avec le renforcement de son pôle gaz et l'alliance avec l'électricien qu'est Suez, via Electrabel. Mais, si l'objectif est celui-là, alors on peut envisager une fusion entre GDF et le seul pôle énergétique de Suez, c'est-à-dire ses trois filiales majeures que sont Electrabel, Fluxys et Distrigaz. Et alors, Eric Knight, qui dirige le fonds Knight Vinke AM, a raison.
Il a raison lorsqu'il affirme que des solutions alternatives existent et qu’il suffit d'examiner celle-ci par exemple :
- réduire la participation de l’Etat dans GDF à 51%, avec attribution aux actionnaires de Suez des métiers de l’environnement et de Suez Energies services,, ainsi que ses actifs d’infrastructures en Belgique. A la suite de cette procédure, GDF pourrait lancer une offre publique d’échange sur les activités « énergie » restantes. L’Etat détiendrait encore 54% du capital du nouveau groupe constitué et l’endettement du nouveau groupe ne serait pas accru.

Les solutions alternatives existent donc, qui pourraient satisfaire tant les actionnaires que les objectifs stratégiques de GDF et la nécessité de la protection de Suez. Pourquoi ne sont-elles pas envisagées ?

En outre, aujourd’hui, GDF, avec l’actionnariat de l’Etat, dispose déjà de marges manœuvre considérables. Nous l’avons tous dit, l’endettement de GDF est faible, 3 Mds €. Sa capacité d’endettement est forte et son bilan financier suffisamment solide pour investir jusqu’à 20 Mds € dans le gaz. Nous l’avons vu, un tel scénario serait une alternative crédible à la fusion pour permettre à GDF de grossir suffisamment pour sécuriser l’approvisionnement en gaz.
Et associer à cet endettement, on pourrait imaginer une augmentation de capital aboutissant à une réduction de la part de l’Etat dans le capital à 51%. Ce qui aurait permis une fusion des pôles « énergie » des deux groupes, ce qui aurait été bien suffisant.

Ce projet de fusion des pôles « énergie » apparaît comme une solution bien plus logique et si la discussion permet un recentrage sur ce scénario, nous le suivrons bien volontiers.
Dans le cas contraire, nous ne soutiendrons pas le projet proposé.


II - La privatisation de GDF aujourd'hui est une faute vis-à-vis de l'intérêt national

L’UDF n’est pas contre la privatisation en soi de tel ou tel actif de l'Etat surtout quand, comme c'est le cas aujourd'hui, l'Etat est financièrement en grande difficulté. .

Nous avons soutenu, par exemple, celle de France Télécom.

Mais une telle décision doit s’apprécier en fonction du secteur.

Et le secteur de l’énergie a sa propre spécificité : il nécessite d'y réfléchir et d'y agir sur le long terme.

Les investissements, hautement capitalistiques, exigent le long terme !
Les contrats d’approvisionnement, pour l'essentiel des contrats à long terme, exigent le long terme !
L'impact environnemental - émission de gaz à effet de serre - exige une gouvernance à long terme ! L'UDF n'arrêtera pas d'insister sur l'absolue nécessité de la mise en œuvre de cette gouvernance au long terme.

Et pour nous, le long terme, c’est l’Etat !

Il est le seul acteur à n’être pas guidé par une rémunération élevée à court terme et à avoir le poids suffisant dans les négociations diplomatiques nécessaires à la mise en œuvre d'une politique énergétique ambitieuse.

Il faut pour cela conserver à l’Etat la majorité de gestion pour le pilotage stratégique de la société. Passer de 51 à 34% revient à passer d’une maîtrise stratégique de l’entreprise de l’entreprise à une minorité de blocage sur quelques décisions seulement et en aucun cas sur les grandes orientations de la politique énergétique de l’entreprise.

Faire ce chemin d'abandon de la majorité de gestion pour se replier sur la minorité de blocage, ce chemin qui est celui que nous propose le projet de loi, c'est faire aujourd'hui une faute !


******************

Oui, mes chers collègues, dans ce contexte, aujourd'hui, la privatisation de GDF est une faute :
- c'est une faute, car dans le secteur énergétique, nous sommes devant une révolution et non une crise passagère…§..
- C'est une faute, car l'importance du gaz ira croissante (20% de l'énergie européenne consommée aujourd'hui; 40% en 2030).
- C'est une faute car il est urgent de mettre en œuvre une politique environnementale de long terme.

Alors pour finir, après notre première question "le jeu en vaut-il la chandelle ?"; le groupe UDF voudrait en poser une deuxième, plus spécialement à nos collègues UMP. Aujourd'hui, une partie très importante de l'opinion publique, la totalité des syndicats (à l'exception du MEDEF, c'est vrai), 3 groupes parlementaires sur 4, plusieurs députés UMP (10 ? 20 ? 30 ?) sont opposés à ce projet.

Permettez à un collègue, qui a mené avec vous un certain nombre de campagne politique, de vous poser cette deuxième question : "Et si tous ceux qui sont contre cette privatisation, qui sont nombreux et différents, avaient raison ?".

Mes chers collègues, je souhaite que le doute, celui des honnêtes hommes - ceux qui se méfient d'avoir la vérité à eux tout seul - s'empare de vous et qu'un débat libre puisse avoir lieu pour étudier toutes les alternatives et qu'à la fin de ce débat, chacun d'entre nous puisse s'exprimer en toute conscience.

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