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16/10/07 - Vers un régime présidentiel ? Table ronde animée par Jean-Louis Bourlanges, Député européen Nouveau Centre

Publication : 16/10/2007  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis


Compte-rendu
A- Introduction par Jean-Louis Bourlanges :
« Le problème institutionnel est aujourd’hui mis à l’ordre du jour à l’initiative de N.Sarkozy, alors que c’est depuis longtemps une priorité de notre famille politique centriste. Les auditions déjà faites de la commission Balladur montre la force des réticences à l’UMP et au PS, alors que le Centre est à l’avant-garde de ce débat par ces propositions constructives. Il était d’ailleurs significatif que les deux auditions au contenu le plus audacieux faites à ce jour par notre commission furent celles de F.Bayrou et d’Hervé Morin.
Si l’on parle de réforme de la constitution, c’est parce qu’il y a constat d’échec ou d’insuffisance de nos institutions actuelles et en effet, le constat de l’essoufflement des institutions de la 5ième république est largement partagé : nos institutions permettent l’élection d’un président, produisent une majorité au parlement pour le soutenir,…… et échouent très largement à faire des régimes forts, stables et évolutifs, faisant même preuve de faiblesse coupable devant la mobilisation de la rue.
Dés lors, il y a trois débats majeurs :
• Quel équilibre des pouvoirs entre le Président et le Parlement ?
• Quels nouveaux pouvoirs donnés aux assemblées législatives françaises ? C’est une véritable priorité car un parlement puissant est le seul vrai contre-pouvoir à la technocratie, véritable pouvoir montant et illégitime de nos sociétés complexes ?
• Quels nouveaux pouvoirs donner directement aux citoyens, au peuple, à l’exemple du défenseur du peuple espagnol, sorte de super-médiateur de la république ?
La situation actuelle en ce qui concerne nos institutions et la manière dont elles sont mises en œuvre est hypocrite et insupportable. L’hypocrisie, c’est l’écart entre le rôle dévolu au premier ministre dans la constitution –« le premier ministre gouverne la politique de la France »- alors que, depuis l’élection du Président de la République au suffrage universel, c’est bien le Président de la république qui gouverne et c’est un des mérites de N.Sarkozy d’avoir amené un peu de vérité dans le discours en assumant clairement la direction de l’action gouvernementale.
Alors que faire pour sortir de ce constat d’essoufflement et d’hypocrisie ?
Le retour au régime primo-ministériel, tel que prôné par A.Montebourg ou A.Duhamel, est une impasse. Les Français sont attachés à l’élection du Président de la République et l’élu, le Président de la république – dont le concours est indispensable dans toute réforme constitutionnelle – ne voudra jamais se sortir du jeu du pouvoir.
La deuxième piste est le régime présidentiel. Il vous sera proposé par P.Fauchon. Le Président est élu au suffrage universel et n’est plus responsable devant personne pendant la durée du mandat.
La troisième piste conserve un président responsable devant le parlement. Mais on peut imaginer un système de responsabilité limité et mesuré par rapport à l’existant : limites au droit de dissolution de l’Assemblée par le Président, limites au pouvoir de censure du gouvernement par le Parlement.
La voie proposée par Bourlanges est, pour l’essentiel, de garder les textes tels qu’ils sont et de changer la loi électorale. En effet, les lacunes et les dérives majoritaires ont été mises en évidence par la crise du CPE, avec comme vrai arbitre la rue. L’objectif est donc d’améliorer la représentation nationale (extrême-droite, extrême-gauche, verts,….) pour que les affrontements, les débats et les compromis nécessaires se déroulent dans l’hémicycle et non pas dans la rue. Avec cet objectif, le problème central de l’introduction de la proportionnelle est d’empêcher l’émergence d’une majorité hostile, et le remède est sans doute de trouver la bonne dose de proportionnelle.
L’urgence est de sortir de la relation pathologique qui existe actuellement entre le parlement et le gouvernent. Celle-ci est mise en exergue par le 49.3, véritable exercice de la terreur, exercé par le gouvernement à l’encontre du parlement. Or la vraie réforme, c’est de considérer que la loi est faite autour d’un accord entre le parlement et le gouvernement et non pas dans un rapport de soumission de l’un par rapport à l’autre. En ce sens, ce qui est fait avec le mécanisme de codécision à Bruxelles, est beaucoup plus proche de notre idéal que la réalité Française.
Nous sommes, nous centristes, pour une démocratie de négociation, et non de confrontation.
Jean Cocteau le disait beaucoup mieux que cela en affirmant : « Nous devons apprendre à nous envisager, avant de nous dévisager »

B - Intervention par Pierre Fauchon (Sénateur de Loir-et-Cher):
« Pour orienter notre réflexion, nous devons effectivement partir de l’échec de la vision de la 5ième république. Le fait majoritaire n’a pas donné – ou plutôt ne donne plus- un gouvernement fort, mais le transfert du pouvoir s’est fait progressivement aux corporatismes qui s’expriment dans la rue.
Alors, oui, je suis favorable à l’installation le plus rapidement possible d’un régime présidentiel.
Mais quelle est la substance d’un régime présidentiel ? C’est un régime où a été supprimée la responsabilité du gouvernement devant le parlement (vote de la confiance, motion de censure) ainsi que celle du parlement devant le gouvernement (dissolution de l’assemblée nationale…).
Le premier mérite de ce régime, c’est la clarté, il pose l’existence de deux pouvoirs forts qui s’équilibrent. Et on obtient immédiatement une réanimation du parlement avec la disparition immédiate des mesures de contrôle et d’organisation de l’assemblée par le gouvernement. Cette séparation permet aussi l’introduction facile de la proportionnelle, puisqu’on ne vit plus dans l’obsession de dégager une majorité de la même sensibilité que le président.
Je rappelle au passage que la proportionnelle avait permis de dégager la majorité de 1986 alors que le scrutin uninominal n’avait pas réussi à le faire en 1988, comme quoi, il faut faire attention aux raccourcis intellectuels du genre :La proportionnelle ne permet pas de dégager de majorités stables. En tous cas, elle est efficace pour permettre de dégager des majorités d’idées soutenues par une large partie des parlementaires et de l’opinion publique.
Alors, on me dit : « Pierre, il y a juste un petit inconvénient : Les Français ne sont pas prêts. Ils ne sont pas prêts notamment à laisser sans contrôle un Président aux très larges pouvoirs ». Attention ! Les Français ont accepté des tas de nouveautés en leur temps qui étaient jugées monstrueuses quelques années auparavant (élection du président au suffrage universel, contrôle constitutionnel par le conseil constitutionnel).
Plus sérieusement, on me dit : « Mais, avec un tel système, il peut y avoir des situations de blocages entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif». C’est vrai. Et alors ? L’armée sortirait-elle pour autant de ces casernes ? Non, bien sûr, nous ne sommes plus au temps de la guerre froide ! L’ambiance n’est plus à l’affrontement, et, en face d’une situation de crise, il y aurait des sorties de compromis (cf l’Allemagne d’aujourd’hui et sa grande alliance démocrates-chrétiens/socialistes)
Il nous faut donc avancer résolument vers un régime présidentiel. Ce serait un choc salutaire pour la France pour réveiller la France…..et c’est le véritable intérêt de la rupture « Sarkozy ».
C - Intervention de M.le Professeur Verpeaux (Professeur de droit constitutionnel)
« Je rentre dans ce débat avec une certaine réserve. D’abord, parce que, je ne suis pas favorable à l’élection du Président de la République au suffrage universel. Je sais que je suis devenu très minoritaire dans le pays, que les français y sont devenus très attachés, mais je continue de penser qu’elle est la source de nombreuses difficultés dans la vie démocratique de notre pays.
Ceci dit, pourquoi modifier la constitution? Je partage le constat d’essoufflement de la V ième république. Mais les chocs positifs, les changements vertueux peuvent venir autant de la pratique politique et de la morale des hommes politiques que des changements constitutionnels.
Ceci dit, mettons nous dans la perspective d’une future réforme constitutionnelle puisque projet de réforme, il y a et osons nous une question simple : « Mais quels sont donc les objectifs de cette réforme ? »:
On me répond : «Aller vers un régime présidentiel, renforcer les pouvoirs du parlement ».Bien.
Première remarque, le seul pays où cela fonctionne, ce sont les Etats-Unis. Or c’est un régime très différent du nôtre (Etat fédéral, réalités sociales…..). Bref, c’est un modèle peu adaptable à la réalité Française.
Si nous devions l’adopter, faut-il maintenir le premier ministre ? Quelle responsabilité du Président et du premier ministre devant le Parlement ? L’Impeachement à l’américaine – empêchement- du Président décidé par le Parlement n’est pas un modèle opérationnel de responsabilité (Il n’a – en fait - marché qu’une seule fois lorsque le déclenchement de la procédure força le Président Nixon au départ en 1974 après le scandale du Watergate….). Il y a donc là un point central qu’il faudra bien résoudre en cas d’évolution vers un régime présidentiel parce que de toute évidence la société Française et l’opinion publique ne sont pas prêts à donner un blanc seing à un Président de la République qui aurait en charge – constitutionnellement -la conduite politique de la Nation.
Pour autant, je suis favorable à la modification du scrutin législatif avec l’introduction d’une dose de proportionnelle. Cela va clairement dans le bon sens, celui d’une meilleure représentation de la réalité nationale. Par contre, je dis fortement : « Attention au pouvoir juridictionnel à propos du Conseil constitutionnel !». En effet, ce pouvoir, sans autre légitimité démocratique que son inscription dans la constitution et sa désignation par le pouvoir exécutif, et donc par définition qui n’est pas issu du suffrage universel, doit toujours, à mes yeux, rester dérogatoire et exceptionnel ».
D - Intervention de J.C.Lagarde (député de Seine Saint-Denis):
« Je commencerai par faire remarquer au professeur Verpeaux que les Etats-Unis font évoluer régulièrement leur constitution par le biais d’amendement, mais ne la révolutionnent jamais. Attention, à ce titre, à faire des bilans équilibrés de la IIIième et de la IVième république ainsi que des constitutions et des institutions de ces deux républiques. On s’apercevra bien souvent que les défauts majeurs de ces périodes politiques de notre pays ne sont pas imputables à la Constitution des ces époques.
Par exemple, la 4ième république (1946-1958), c’est un pouvoir parlementaire fort et sa faiblesse, ce n’est pas la constitution, c’était la loi électorale dominée par la proportionnelle. Je crois néanmoins que le Parlement Français peut mieux fonctionner en instaurant une dose de proportionnelle.
Pour ce qui est d’aujourd’hui, je fais tous les jours l’expérience du bilan de l’abaissement du parlement. Alors, oui, Sarkozy a raison. Il faut faire du Président de la République le patron constitutionnel et mettre fin à l’hypocrisie actuelle du texte de la Constitution de la Vième république.
N.Sarkozy, de fait, n’est pas venu spontanément, le premier, sur ce terrain de la nécessaire réforme constitutionnelle. Il s’est fait imposer ce débat dans la campagne présidentielle et n’y est venu que sous la double pression des campagnes de Ségolène Royal et de François Bayrou, faisant sur ce sujet la même démonstration de pragmatisme et d’efficacité dans la récupération de ce texte.
Alors, venons en maintenant au cœur de la question : « Un régime présidentiel est-il souhaitable pour la France ? »
Un régime présidentiel peut fonctionner en France. Mais, soyons clair, ce n’est pas à l’ordre du jour. N.Sarkozy n’en veut pas et les grands partis non plus. Il faut d’ailleurs que le Nouveau Centre affine puis fixe sa doctrine à moyen terme de ce point.
Le cœur du sujet, ce n’est pas d’aller vers la présidentialisation de notre vie politique. A ce sujet, j’estime normal que le Président assume son pouvoir, et par voie de conséquence, je pense qu’il faut supprimer la responsabilité du gouvernement devant le parlement.
Non, le cœur du sujet, c’est de mettre un terme à la vassalisation du Parlement. Permettez-moi de faire un ensemble de propositions précises, concrètes permettant d’aller dans ce sens.
J’ai déjà dit qu’à mon avis, notre parlement doit être plus représentatif et mon accord quant à l’instauration d’une dose de proportionnelle. Mais, ce sera bien insuffisant pour commencer à rendre sa force au Parlement. Il faudra pour cela :
1. Limiter le recours à l’article 49.3 à la seule loi de Finances.
2. Donner à l’opposition le droit d’ouvrir des commissions d’enquête parlementaires.
3. Donner au Parlement la maîtrise d’une partie de l’ordre du jour.
4. Exiger que l’engagement des forces armées françaises soit donné devant et par le Parlement.
5. Donner à une commission des affaires Européennes qu’il nous reste à créer le pouvoir de donner des mandats de négociation au gouvernement.
6. Ouvrir la saisie du conseil constitutionnel au citoyen.
7. Faire approuver les autorités indépendantes de ce pays par une majorité qualifiée avec des deux-tiers.
Voilà un paquet de propositions qui vont toutes dans le même sens et qui, ensemble, sont susceptibles de redonner le pouvoir au Parlement qui lui a été enlevé par l’instauration de la Vième république ».

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