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16/10/06 - Chronique d'Alain DUHAMEL sur le dernier libre de François BAYROU

Publication : 16/10/2006  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis



F. Bayrou invente "l’extrême centre"...

RTL - 7h46 ~ A. Duhamel

On va parler de F. Bayrou, qui a publié cette semaine, sous le titre "au nom du
Tiers Etat", un livre autant inhabituellement violent, extrêmement critique
contre la classe dirigeante. Est-ce un changement de stratégie ?
D’abord, c’est très exceptionnel, c’est rarissime, c’est presque sans précédent, de
voir un responsable politique national, qui a été ministre, avec un ministère
important, qui est président d’un parti significatif, avec des groupes
parlementaires, qui utilise dans un livre un ton aussi violent, virulent, presque
vindicatif. En réalité, même pendant, par exemple, la campagne européenne, J.-
P. Chevènement ou P. de Villiers, avaient un ton qui était plus mesuré que cela.
Je crois que, pour trouver l’équivalent, il faut remonter à F. Mitterrand, à
l’époque du général de Gaulle, quand il avait écrit "Le coup d’Etat permanent".
Alors, évidemment, il y a plusieurs raisons à ce changement brutal de ton et de
registre. Le premier, c’est la part de la conviction : c’est-à-dire que, F. Bayrou a
réellement été, non seulement impressionné, même traumatisé, par le 21 avril
2002, par le rejet du référendum européen, par l’embrasement de certaines
banlieues l’année dernière, il a relié les phénomènes, et il en conclut qu’il y a une
crise gigantesque, et donc, qu’il faut répondre avec quelque chose de
complètement neuf. La deuxième chose, c’est la part du calcul : il a bien vu - il ne
peut pas ne pas voir - que, avec les institutions, les modes de scrutin, le Centre
est progressivement laminé, qu’il perd ses rameaux un à un, et donc, au fond, il
s’est aperçu que, l’extrême droite se porte bien, que l’extrême gauche trotskiste a
surgi, et donc, il est donc en train d’inventer l’extrême centre. Et puis, il y a une
troisième raison, qui est son tempérament personnel. C’est quelqu’un, ce qui est
assez rare aussi dans la classe politique, qui croit absolument à son étoile, à sa
prédestination politique, et puis qui a un caractère en granit ; il est comme cela,
il ira jusqu’au bout.

En ce moment, F. Bayrou insiste beaucoup sur "la confusion des pouvoirs
politique, économique et médiatique". A-t-il raison ?


Il caricature, il exagère, mais qu’il y a quand même un fond de vrai. La classe
dirigeante française, toutes composantes réunies, est beaucoup plus homogène,
et donc fermée sur elle-même que cela n’est le cas dans les pays étrangers. On
prend un exemple : il y a trois candidats officiels du PS en ce moment, il y en a
deux qui sont sortis de l’ENA et le troisième qui est un universitaire. Auparavant,
il y a eu une bataille pendant un quart de siècle entre V. Giscard d’Estaing, J.
Chirac, R. Barre, et E. Balladur. Il y en avait trois qui étaient sortis de l’ENA, le
quatrième qui était lui aussi un grand universitaire. Donc, tout cela c’est un
milieu qui est plus fermé que cela n’est le cas dans les autres pays. C’est pour cela
que l’on voit tellement de hauts fonctionnaires, soit en politique, soit à la tête de
grandes entreprises. Donc, là-dessus il a raison. D’autre part, que tout cela
suscite une énorme insatisfaction, c’est l’évidence ; autrement il y aurait moins
d’abstention, moins de scepticisme, moins d’extrémisme, et moins
systématiquement de majorité sortante battue.

Alors maintenant, est-ce que, d’une part, c’est propre complètement à la France ?

Non, évidemment non. D’autre part, est-ce que la classe dirigeante est la seule
responsable des malheurs français ? Evidemment non, non plus. Et puis, pardessus
le marché, il est bien clair que, si on lui impute tout ce qui va mal
systématiquement, quand quelque chose va bien, il faudrait peut-être aussi à ce
moment-là le mettre à son crédit, et cela, je n’ai pas l’impression que ce soit le
cas.

Mais ce durcissement de ton et de méthode est-il efficace ?

Ses militants sont enchantés, ses électeurs sont dubitatifs, ses élus sont plutôt
inquiets. Il n’a jamais été aussi populaire. Il n’a pas encore fait de vraie percée
électorale, on verra s’il y a un déclic. Ce qui est sûr, c’est que l’on parle déjà
beaucoup plus de son livre-là que de ses livres précédents, y compris quand ils
étaient meilleurs.

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