Le site officiel
Actualités

› Voir toutes les actualités

Toute l'actualité de Jean Dionis

13/10/04 - Extraits de l'intervention de Jean Dionis sur le coefficient multiplicateur

Publication : 14/10/2004  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

ART. 4

M. Jean Dionis du Séjour - Comme nul ne l'ignore, la filière fruits et légumes connaît une crise violente, dont les causes sont structurelles. L'une, récurrente, tient au rapport de forces entre producteurs et grande distribution. Nous présenterons donc une proposition à ce sujet, car nous tenons pour anormal qu'un kilo de pommes payé, à Agen, 0,4 euro le kilo au producteur, soit vendu 2,4 euros au consommateur. Cette multiplication par six marque un dysfonctionnement grave dont la grande distribution est responsable, puisqu'elle a choisi de faire de ces produits un secteur de vente à forte marge. Ma femme m'a fait observer que la crise persisterait aussi longtemps qu'elle pourra acheter deux yaourts pour le prix d'une pomme. Un oligopole se livre à des ententes de fait : il revient donc à la représentation nationale de mettre fin à une situation qui crée tant de drames. On me dira certainement qu'il n'y a là rien de neuf, mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire.
Par ailleurs, on assiste désormais à une redoutable concurrence intracommunautaire. Pour citer le seul cas de l'Allemagne qui, il y a deux ou trois ans encore, n'était pas productrice, on constate que le coût horaire saisonnier y est de 6,15 euros contre 8,52 euros en France, que la durée hebdomadaire du travail y est de 40 heures pour 35 heures en France, que la filière fruits et légumes y emploie une main-d'œuvre étrangère estimée à 243 000 personnes, soit 22 % de l'ensemble, alors que la filière française n'en emploie que 10 000, c'est-à-dire une proportion de 0,9 %. Tout cela s'explique, certes, par les accords conclus entre l'Allemagne et la Pologne, mais la France doit se défendre en s'attaquant au coût du travail agricole sur son territoire ; nous ferons une proposition en ce sens.
L'article 4, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4

M. Jean Dionis du Séjour - J'ai eu l'occasion d'exposer que la crise de la filière fruits et légumes tient pour une part aux rapports entre producteurs et grande distribution. C'est ce qui me conduit à proposer, par l'amendement 521, l'institution d'un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des fruits et légumes en période de crise. Ainsi définira-t-on une marge raisonnable entre le prix d'achat au producteur et le prix de vente au consommateur. Je n'ai pas la paternité de cette idée, qui est défendue depuis de longues années et qui a fait l'unanimité au sein du groupe « fruits et légumes » des deux Assemblées, ainsi que des organisations professionnelles agricoles de mon département par exemple, le Lot-et-Garonne : c'est en dire le bien-fondé ! Devant une crise aussi grave que celle d'aujourd'hui, il faut faire preuve d'audace. Monsieur le ministre : toute la filière attend votre réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)
M. Yves Coussain, rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.
M. François Rochebloine - Pour quel motif ?
M. Jean Dionis du Séjour - Elle n'en a pratiquement pas parlé.
M. le ministre de l'agriculture - J'ai bien entendu votre plaidoyer enflammé, Monsieur Dionis du Séjour, et je partage votre avis sur la situation difficile que connaît actuellement la filière fruits et légumes. Au-delà des mesures d'urgence prises pour aider les producteurs à passer ce mauvais cap, nous avons engagé, une action structurelle, à plus long terme, avec mon collègue Gérard Larcher, pour lutter contre les distorsions de concurrence, notamment au sein de l'Union européenne.
Pour ce qui est de l'application d'un coefficient multiplicateur, je pense, au risque de vous décevoir, que ce n'est pas ce soir qu'il faut en débattre. Il paraît de meilleure méthode d'attendre les conclusions du rapport Canivet, lequel doit être remis au ministre de l'économie dans les tout prochains jours. Mais le Gouvernement est tout à fait prêt à légiférer sur cette base lors de la deuxième lecture au Sénat, voire ici même en troisième lecture. Pour le reste, le coefficient multiplicateur n'est qu'un élément parmi d'autres à prendre en compte. Il est également essentiel de définir objectivement la situation de crise. Je vous donne donc rendez-vous un peu plus tard.
M. François Sauvadet - Monsieur le ministre, tout d'abord, je salue les mesures d'urgence que vous avez prises en faveur de la filière fruits et légumes. Avant que nous n'interrompions nos travaux cet après-midi, vous avez déclaré que le contribuable ne pourrait pas éternellement se substituer au consommateur et que tant que les relations entre les producteurs et la grande distribution ne seraient pas rééquilibrées, il ne servirait à rien de demander au contribuable de « passer à la caisse ». « Ayons le courage de le dire », avez-vous conclu. Eh bien, ayons le courage de dire qu'il faut prendre des mesures spécifiques de rééquilibrage de la situation en cas de crise, et ce sans préjudice pour le consommateur !
J'ai bien compris qu'il y aurait d'autres rendez-vous, mais inscrivons sans attendre dans la loi le principe du coefficient multiplicateur - que le groupe UDF n'est pas seul à demander. Ce sera un signe fort, et il sera toujours temps ensuite d'ajuster le dispositif au cours des navettes. Personne, Monsieur le ministre, ne comprendrait que l'on ne fasse rien au bénéfice de la filière fruits et légumes dans un projet de loi relatif au développement des territoires ruraux (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).
Mme la Présidente - Je suis saisi par le groupe UDF d'une demande de scrutin public sur l'amendement 521.
M. Jean Dionis du Séjour - Examiné en commission dans le cadre de l'article 88, cet amendement extrêmement important n'a pas pu y faire l'objet d'un débat de fond. J'avais prévenu le rapporteur que je m'expliquerai plus longuement en séance publique. Le Gouvernement nous assure avoir l'intention de légiférer en deuxième lecture au Sénat sur la base du rapport Canivet. Il est donc important que l'Assemblée puisse s'exprimer sur le sujet ce soir. Je suis absolument certain que le rapport Canivet, à l'instar de nombreux rapports précédents, conclura que l'application d'un coefficient multiplicateur n'est que bon sens.
M. François Brottes - Nous ne nous opposerons pas à cet amendement, trop heureux de constater que certains de nos collègues parmi les plus libéraux en appellent parfois à une économie plus dirigée. Ils progressent dans la bonne voie... (Sourires)
Nous avions essayé de traiter le problème dans la loi sur les nouvelles régulations économiques, en exigeant par exemple le double affichage du prix d'achat et du prix de vente et en proposant des mesures spécifiques en cas de crise. Pour autant, cette loi n'a pas tout résolu, notamment du fait d'une concurrence toujours plus rude. Le groupe socialiste a demandé la constitution d'une commission d'enquête sur les marges dans la grande distribution. J'espère que le groupe UDF soutiendra notre demande.
M. François Sauvadet - Nous l'avions faite avant vous !
M. François Brottes - La filière fruits et légumes est en crise, mais quelle filière agricole ne l'est pas aujourd'hui ? Il suffit de penser aux éleveurs, aux producteurs de lait... Tous ces problèmes devront trouver réponse dans la future loi de modernisation agricole. Pour l'heure, nous voterons l'amendement 521 car il constitue un signal. Mais nous savons aussi que l'essentiel sera de définir précisément la situation de crise. Qui en décide ? Si ce point n'est pas clair, tout le reste ne sert à rien.
M. Yves Coussain, rapporteur - Monsieur Dionis du Séjour, c'est vrai, la discussion fut rapide en commission, mais elle a eu lieu. L'idée de créer un coefficient multiplicateur est peut-être bonne, mais elle impose un dispositif complexe et difficile à mettre en œuvre, comme le disait M. Brottes. Par ailleurs, cette question touche à la réglementation communautaire de la concurrence et suppose une discussion préalable au sein de l'Union européenne sur les modalités de réforme de la PAC.
M. André Chassaigne - Je m'associerai d'autant plus au vote de cet amendement que, plus loin j'en ai déposé un analogue qui tend à la mise en place du mécanisme du coefficient multiplicateur.
M. Antoine Herth - Il s'agit là d'un sujet très important, et je donne acte à M. Dionis du Séjour et au groupe UDF d'avoir engagé le débat. C'est un sujet récurrent depuis quinze ans, mais nous avons aujourd'hui l'engagement du ministre de l'agriculture....
M. François Sauvadet - Cela fait dix ans que les ministres en prennent !
M. Antoine Herth - ....d'avancer sur ce sujet très compliqué en ce qu'il touche au droit commercial. Pour cette raison, le groupe UMP ne votera pas cet amendement, et fera confiance au ministre.

A la majorité de 33 voix contre 21 sur 54 votants et 54 suffrages exprimés, l'amendement 521 n'est pas adopté.

Réagir à cet article

Filtered HTML

  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Tags HTML autorisés : <a> <em> <strong> <blockquote> <ul> <ol> <li> <p> <br>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.