« Monsieur le Président, avec l’Association d’élus et parlementaires Centre-Ville en Mouvement, qui existe depuis près de 15 ans, et dont j’ai été élu Président récemment, je vous sollicite pour labéliser le centre-ville comme Grande Cause Nationale 2018". Ainsi débute le courrier adressé par Patrick Vignal, député de l'Hérault – et donc Président de l'association Centre-Ville en Mouvement – à l’attention d’Emmanuel Macron.
Patrick Vignal et les 253 collectivités adhérentes – dont Agen s’honore de faire partie – ont raison d'alerter le Président de la République. Car il y a urgence et urgence nationale. Il y a le feu. Comme le souligne l’Association, « Le taux de vacance commerciale des centres-villes est en constante augmentation, passant ainsi de 6.1% en 2001 à 10,4% en 2015. Les villes de moins de 50 000 habitants sont nettement plus touchées, avec une moyenne de 11,1%. Ainsi en 2015, 55% des villes moyennes avaient un taux de vacance supérieur à 10%, contre seulement 27% des grandes villes ».
Et de citer les villes en situation critique…. «Béziers, avec 24% de vacance commerciale ; Forbach, Montélimar, Lens, Vichy, Moulins, Lunel, Perpignan, Nevers, Guéret, Vierzon, Orange, Calais… toutes avec une vacance supérieure à 16% ! "
Enfin, ça bouge…..longtemps, en tant que Maire d’Agen, avec mes collègues de la municipalité, nous nous sommes sentis bien seuls à porter ce combat que nous avons entamé au niveau local dès l’année 2010. Pour cela, nous avons coordonné toutes nos actions en faveur du centre –ville dans un plan d’ensemble que nous avons baptisé du beau nom d’Agen Cœur Battant (voir http://www.agen.fr/acb2).
Pourtant, le diagnostic du mal qui frappe les centres-villes est maintenu établi autour de trois causes principales :
- Accessibilité médiocre – notamment en automobile
- Concurrence anarchique de la grande distribution en périphérie
- Progression continue du commerce en ligne.
Partant de ce constant, au départ de toute démarche municipale, il y a une seule question qui vaille : Voulons-nous gagner la bataille de nos centres-villes ? Car il s’agit bien d’abord d’une question de volonté politique raisonnable.
J’ai en effet acquis la conviction que cette bataille des centres-villes est gagnable.
D’abord parce qu’il y a un véritable désir de centre-ville et d’abord chez les plus jeunes d’entre nous. Selon l’Association Centre-Ville en Mouvement, « l’attachement des habitants à leur cœur de ville est conséquent : le deuxième baromètre CSA des centres-villes montre ainsi 59% des français (64% des 18-25 ans) sont attachés à leur cœur de ville. Enfin, et c’est très important : 9 sur 10 ont le sentiment que leur modernisation doit être une priorité pour les maires. » A Agen, lors d’un sondage fait l’an dernier par IFOP à l’échelle de notre agglomération de 100 000 habitants, nous avons obtenu des chiffres encore plus convaincants avec 77% des agenais qui ont une bonne image de leur centre-ville.
Enfin parce qu’Internet et centre-Ville se marient bien! et oui... et c’est la vraie bonne surprise de notre époque. « Car même si le chiffre d’affaire de vente par internet augmente chaque année de 14%, 73% de grands utilisateurs du commerce en ligne déclarent venir en centre-ville et délaisser la périphérie »
Bref, un vent nouveau se lève, au milieu des difficultés que connaissent nos centres-Villes. « Fortuna audaces Juvat » ….la chance sourit- parait-il aux audacieux.
C’est donc d’abord aux Maires et aux Présidents d’Agglomération d'avoir de l'audace, de se bouger. Aide-toi et le ciel t’aidera... Comment ?
Il faut revenir aux trois causes identifiées ci-dessus :
Oser un centre-ville piéton et plus généralement un centre-ville « 4 * » ceinturé (pas trop loin, 1ère ceinture impérative) de parcs de stationnement de la dernière génération….
Imposer, au niveau de l’agglomération, que certaines activités emblématiques des centres-villes (prêt à porter, culture,….) lui soient exclusivement réservées.
Faire de votre centre-ville - avec vos commerçants – un espace d’innovation et d’excellence numérique (wifi gratuit, bonus numériques - voir l’appli http://bonicity.fr/, stratégie « dernier kilomètre » pour optimiser les livraisons en magasin et à domicile en centre-ville.)
La volonté municipale, indispensable, peut-elle être suffisante ? Non, clairement.
Les nouveaux conseils régionaux, chefs de file de la compétence économique, doivent se saisir de cet enjeu et financer les efforts coûteux de modernisation urbaine.
L’Etat et le parlement devront mettre en chantier une réforme audacieuse du droit de l’urbanisme commerciale. La loi actuelle est une vraie passoire en matière d’autorisation d’ouverture commerciale. La preuve ? en 2016, le volume des surfaces commerciales autorisées a encore augmenté de 22% (dont 90% ont été installées en périphérie) quand le pouvoir d’achat a augmenté de 1,6% sur la même année. Les célèbres commissions départementales d’aménagement commercial sont de véritables machines à toujours dire « oui » ……lentement. Plutôt que de répéter des moratoires illusoires, la nouvelle loi devra consacrer le pouvoir du maire de réserver certains types de commerce (prêt à porter, culture….) pour le centre-ville.
Alors, oui, la bataille des centres-villes mérite d’être « grande cause nationale 2018 ».
Pourquoi ? Entendons les mots forts de notre Association :
« Au-delà de simplement réparer nos centres-villes, il s’agit d’inventer la ville du futur. Davantage qu’une problématique de commerçants, nous soutenons un projet de société"
« Il n’est jamais trop tard pour bien faire » dit le proverbe. Sauf que, comme l’avait constaté un cabinet d’étude des centres-villes, lorsque dans une rue plus de 20% des commerces sont fermés, la rue perd son activité commerciale et les autres magasins périclitent inexorablement. Heureusement, nous n’en sommes pas arrivés là dans les principales rues commerçantes d’Agen, hormis le « haut du boulevard de la République de Castex au Pin ». Espérons que la rénovation réussie de cette partie de rue et sa situation entre Pin et « 4 boulevards » la sauveront.
Et félicitations pour les projets 2018 de rénovation du boulevard Carnot et du marché couvert, d’implantation de la « locomotive commerciale H&M » et de l’extension en silo du parking de la gare (la liaison piétonne entre ce parking et la Place du Pin et ses cinémas est cependant à améliorer, ainsi que celle entre le parking maintenant gratuit des Îles et la place Jasmin). Agen est maintenant sur la bonne voie, à mon avis !
Bonjour Monsieur Le Maire,
Faire vivre les centres-villes, c'est y maintenir, mais surtout y faire venir des habitants: la ville doit être habitée...
Elle ne peut pas et ne doit pas être un lieux vide de vie, dès lors que les clients des magasins repartent dans leur habitat situé à l'extérieur de la ville (autres villes ou villages ou lotissements).
Le seul moyen est l'amélioration de l'habitat qui doit répondre aux nouveaux modes d'habiter : espace, lumière, terrasses, balcons, et jardinets, mais aussi des espaces publics de qualité qui peuvent devenir des espaces partagés multigénérationnels...
Il faudra peut-êre envisager de "curer" quelques batiments insalubres pour :
- "aérer" un quartier, augmenter la porosité des patés de maison en favorisant les déplacements doux : marche à pied, vélos...
- ouvrir de nouvelles fenêtres, aménager des terrasses et permettre aux enfants de "jouer en bas".
Il est temps que toutes les villes moyennes de France redécouvre l'art de vivre des "Faubourg", des quartiers "village" où il fait bon vivre et renconter son voisin en allant faire ses courses dans son quartier...
Utopique?... Non, quand les habitants sont biens dans leur quartier, ils y restent...
En vrac, et à chaud, quelques idées d'une architecte qui observe les villes moyennes dans sa pratique professionnelle mais aussi en tant qu'habitante.
Au plaisir d'en reparler... les architectes ont beaucoup à faire partager.
Sylvie Raoux - Architecte