Nous avons la chance d’avoir deux bons amis de longue date : Catherine et Bernard Lusset. Or, ceux-ci ont fait un choix de vie pour le moins original pour leur retraite professionnelle : aller s’installer au Sénégal, sur la côte Atlantique à 80 km au sud de Dakar. Et Marie-Agnès, mon épouse et moi avions vraiment envie d’aller leur rendre visite et de passer, auprès d’eux, une semaine de vacances.
Pourquoi ? Pour y retrouver de vrais amis, pour comprendre leur choix et voir sur place comment cela se passait et enfin et surtout, pour retrouver l’Afrique avec laquelle j’ai partagé plusieurs pages de mon parcours de vie, notamment comme coopérant en Côte d’Ivoire.
Rien de mieux que le voyage et le choc thermique qu’il comprend pour finir de vous convaincre que vous changez de « monde » : même au travers d’un hublot d’avion, voir en cinq heures de voyage, les Pyrénées, l’Andalousie espagnole, la Méditerranée, l’Atlas marocain, le Sahara, la Maurétanie, et enfin le Sénégal, tout cela en passant d’un 10°C bordelais clément à un 35 °C à Dakar, suffit à vous faire comprendre … que vous avez quitté l’Agglomération Agenaise.
Pour notre séjour (1 semaine, c’est court…) Bernard et Catherine nous avaient concocté un programme « sprint » qui permettait de concilier le repos bienvenu et la satisfaction de notre envie de découverte.
Aperçu en survol :
Mardi 23 : Atterrissage en début d’après-midi. Bernard vient nous chercher en voiture, à l’heure comme toujours, malgré un pneu explosé. Une heure de route environ dont la moitié d’autoroute pour rejoindre leur maison Keur Camape, village de Nianing, depuis l’Aéroport. Installation tranquillement à la maison et une balade sur la plage pendant le coucher de soleil (magique, la lumière, les pirogues, les pêcheurs…). Puis diner d’une brochette de zébu (délicieux…). Dans un petit bistrot du village où Bernard et Catherine ont leurs habitudes.
Mercredi 24 : Le mercredi est le jour où se tient le marché hebdomadaire de brousse de Nguéniène. Nous sommes allés nous perdre dans ce marché dépaysant (1/2 heure de piste en latérite) où vous trouvez littéralement de tout : vous pouvez acheter un âne ou un moteur… L’après-vente n’est visiblement pas comprise dans le prix. Nous poursuivons la journée vers le village de Fadiouth, « l’île aux coquillages » qui annonce déjà le delta des fleuves Siné et Saloum. Nous sentons pour la première fois que nous quittons la brousse sahélienne pour aller vers la forêt équatoriale.
Jeudi 25 : Visite de l’île de Gorée, dans la baie de Dakar. Il faut partir un peu tôt (7h00 du matin) pour rallier en voiture le port de Dakar (1h30 de trajet essentiellement autoroutier jusqu’aux portes de Dakar) et nous attrapons la première chaloupe du matin à 10h00. La traversée en bateau dure 20 minutes environ. Dommage, à cause de la pollution urbaine de Dakar et surtout d’un vent d’Harmattan qui nous ramenait la poussière rouge du Sahara, nous ne voyons pas grand-chose pendant la traversée. Mais à l’arrivée, visite de la Maison des Esclaves. Le lieu n’est pas trop impressionnant, à l’exception du quai du « Non-retour ». Les chiffres le sont : en 350 ans (1500-1850), ce sont plus de 12 millions de femmes et d’hommes qui sont arrachés à l’Afrique pour être envoyés dans des conditions absolument inhumaines qui au Brésil, qui dans les Antilles, qui aux Etats-Unis… Déjeuner dans un restaurant sur place. Nous enchaînons par une visite passionnante au Musée des civilisations noires de Dakar. Nous y passons l’après-midi. Nous aurions pu y passer la semaine. Le passé de l’humanité fut Africain. Une grande partie de son avenir le sera aussi.
Vendredi 26 : Journée Vélo en Afrique et oui !!!! Pour moi, Bernard a monté le matin à la fraîche une virée en vélo dans la brousse avec un copain à lui et son fils (mais sans Bernard !). 3 heures de vélo avec des pneus « spécial pistes et sables » (extra-larges et extra-gonflés !) au milieu des baobabs, des zébus et … des enfants ! L’après-midi, baignade et longue balade le long de la plage...
Samedi 27 : Impossible de passer chez Bernard et Catherine sans découvrir le Sine Saloum, paysage magnifique et unique de delta fluvial tropical ! Après une heure de bonne route vers le village de Ndangane, nous avons, pour nous seuls, une pirogue (motorisée) pour une belle balade dans la mangrove, découverte en charrette du village de l’île de Mar Lodj, baignade et déjeuner d’un poisson grillé sur le bord d’un des bolongs (bras de mer) du delta.
Dimanche 28 : Messe à 9h30 dans la belle église de Nianing. Vitalité de la communauté catholique locale (église pleine, liturgie joyeuse …) dans un pays pourtant très majoritairement musulman (95 % de sénégalais sont musulmans et les inch’allah rythment les conversations quotidiennes). Déjeuner à la maison et farniente plus ou moins obligatoire l’après-midi avec des températures entre 35°C et 40°C.
Lundi 29 : C’est déjà fini !! Nous quittons la maison à midi pour être à l’heure pour notre vol retour de 15h00 à Dakar. La matinée consacrée à la dernière baignade et à l’achat de quelques derniers souvenirs au village.
Tout ça entrecoupé de longs moments de discussion (tout y est passé : la France, la mairie d’Agen ! les paysans) dans le jardin, sur la plage, autour de la piscine et de franches rigolades lors de nos parties de TOK, la découverte « jeu de société » du voyage ...
Pourquoi Bernard et Catherine sont partis là-bas ? C’est leur secret. Mais les indices sont leurs souvenirs de vacances réussies juste à côté, avec leurs enfants jeunes, le soleil, la vie très accessible et tranquille avec une forte assistance ménagère, et une vraie affection pour les sénégalais et leur gentillesse proverbiale.
Le Sénégal, un petit coin de paradis pour les Français ? Oui, pour toutes les raisons rappelées ci-dessous et non, pour l’autre vérité.
L’autre vérité, c’est que le Sénégal est toujours un pays émergent avec les problèmes dantesques de ces pays-là (les déchets partout !!!, les routes défoncées par le passage des poids lourds, etc.). L’autre vérité, c’est que comme tous les pays d’Afrique Occidentale, le Sénégal a vu sa population quadrupler en 60 ans et qu‘il est engagé dans une course « contre la montre » difficile, mais gagnable développement/population. La vérité, c’est que ce pays, référence démocratique de l’Afrique, traverse actuellement une crise politique grave : report des élections présidentielles, etc.
En ce qui concerne ma modeste personne, ce bol d’air sénégalais m’a fait du bien pour me rappeler que, comme nous le rappelait si souvent Michel Serres, nous sommes « tous embarqués » sur le même « bateau spatial » qu’est la Terre.
Je suis parti amoureux et ami de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique. Je reviens, amoureux et ami de la Côte d’Ivoire, du Sénégal et de l’Afrique.
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Jean Dionis, Maire d’Agen