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29/05/06 - «Nos gouvernants perdent le sens commun» - Interview de François BAYROU sur l'amnistie de Guy DRUT

Publication : 29/05/2006  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Le président de l'UDF, François Bayrou, fustige la décision «arbitraire» de Jacques Chirac, une preuve de plus de «la déliquescence du régime».


Amnistier Guy Drut en pleine affaire Clearstream, est-ce bien judicieux de la part de Jacques Chirac ?

La question qu'on se pose, c'est : «Sont-ils devenus fous ?» Notre pays est secoué par des relents d'affaires, Clearstream, frégates de Taiwan, et on en rajoute dans l'inacceptable ! Jacques Chirac plaidait en 2002 pour la «tolérance zéro», et voilà qu'il choisit d'effacer de sa propre autorité la condamnation, non pas d'un champion sportif, mais d'un député du parti majoritaire dans une affaire d'emplois fictifs, liée à des trafics d'influence au bénéfice de ce même parti. Il n'y a plus rien de raisonnable dans l'attitude de ceux qui prennent une telle décision. Cela signifie qu'ils considèrent qu'ils ont tous les droits, que nous sommes désormais dans une monarchie absolue, un régime dans lequel la justice appartient au pouvoir.

Cette décision est-elle significative de l'atmosphère de fin de règne qui gagne le sommet de l'Etat ?

Ceux qui nous gouvernent perdent le sens commun. Ce n'est pas seulement propre à une fin de règne, c'est symptomatique de la dérive du régime. Pendant le débat sur la motion de censure, j'ai dénoncé cet absolutisme régnant. Tout dans l'attitude des gouvernants montre qu'ils considèrent qu'il n'y a plus de règles, plus de principes, plus de comptes à rendre et plus de limites. Le pire, c'est qu'ils ne voient même pas le rejet et l'indignation qu'ils sont en train de faire naître au sein du peuple français.

Pour rompre avec «l'absolutisme», vous seriez favorable à ce que le Président ne dispose plus du droit de grâce ?

Je ne confonds pas cette amnistie arbitraire et le droit de grâce. L'UDF n'a pas voté la loi d'amnistie en 2002 parce qu'elle dénonçait ce risque d'arbitraire. Mais le droit de grâce, c'est autre chose. Il peut arriver dans une société qu'une décision de justice, juridiquement fondée, entraîne un trouble tel qu'il est utile qu'une autorité puisse la remettre en cause pour ramener le calme. Imaginez par exemple que Mme Humbert ait été condamnée pour avoir mis un terme à la vie de son fils. Juridiquement, cela aurait pu arriver. Dans ce cas, l'émotion aurait été si grande qu'il aurait sans doute été justifié de faire grâce, au nom du peuple français, pour mettre un terme à un trouble dans la nation.

Redoutez-vous que l'attitude du pouvoir serve le Front national ?

Arrêtons de nous comporter devant l'extrémisme comme le poulet devant le boa. Reconstruire la République, ce n'est pas l'affaire des extrêmes, c'est celle des républicains. C'est notre affaire de réagir, de refuser, de rendre impossibles ces dérives. S'il fallait une preuve de la déliquescence du régime que je dénonçais à la tribune de l'Assemblée lors du débat de censure, la voilà ! Le premier principe de la République, c'est l'égalité de droits et de devoirs devant la loi. Même ceux qui avaient voté au début des années 90 la loi d'amnistie sur le financement politique qui a créé tant de tumultes et décrédibilisé la démocratie avaient pris la précaution d'exclure les députés du champ de la loi. Ce qui est fou, ce n'est pas tant que Guy Drut essaie d'échapper à sa condamnation, recherche toutes les voies de recours, c'est que le président de la République et ceux qui l'entourent ne se rendent pas compte que, en faisant bénéficier d'une telle faveur un homme qui, en tant que député, est chargé de faire la loi, un homme de leur parti, ils portent atteinte aux principes les plus élémentaires de séparation des pouvoirs et d'impartialité de l'Etat. Ne croyons pas que le peuple français va accepter ces pratiques et ces moeurs sans rien dire. D'une manière ou d'une autre, il va tourner la page sur ces temps décomposés

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