François Bayrou a rejeté toute idée de compromis avec la ligne politique du Parti socialiste choisie ce week-end au Mans. Le président de l’UDF considère que la gauche reste dans la « grande illusion » et souhaite proposer un projet alternatif au PS et à l’UMP en 2007. François Bayrou demande l’organisation d’« états généraux » pour les banlieues qui réuniraient les partis de gouvernement et les habitants des cités pour décider ensemble d’un programme de long terme. Mais le président de l’UDF considère que la France ne pourra sortir de la crise qui touche l’ensemble de la société française tant que les hommes politiques refuseront de dire la vérité aux Français sur la situation du pays.
« Il n’y aura aucune alliance, aucun compromis, aucune discussion avec ce Parti socialiste-là » a prévenu François Bayrou. Longuement interrogé sur la synthèse opérée ce week-end entre les différents courants du PS à leur congrès du Mans, le président de l’UDF a vivement critiqué le « manège à illusions » des propositions, une gauche « sans capacités d’action dans le monde tel qu’il est ». François Bayrou a estimé que la logique électorale l’avait emporté sur le réalisme : il a ainsi dénoncé « l’irresponsabilité du Parti socialiste qui pour faire bien et pour gagner des voix à l’extrême gauche » propose d’abroger la loi sur les retraites alors que tous les pays européens ont pris des décisions difficiles et courageuses dans le même sens que la France. De même, François Bayrou a ironisé sur la proposition du PS de porter le SMIC à 1500 euros brut en 2012 et l’a qualifié de « tour de passe-passe » et de « fausse monnaie » car un salaire minimum indexé sur l’inflation atteindra cette même somme de 1500 euros dans sept ans sans coup de pouce. Enfin, François Bayrou a trouvé très inquiétant que le PS ait capitulé devant Laurent Fabius et ait « signé l’arrêt de mort du Traité constitutionnel européen pour lequel il s’était battu » pendant la campagne du référendum. Le président de l’UDF s’est clairement positionné au centre de l’échiquier politique : « ce que je sais, c’est que la France a besoin d’un projet qui ne soit ni celui de l’UMP qui est appliqué depuis trois ans et demi, ni celui du PS qui se dessine aujourd’hui. Il faut un projet politique qui s’adresse à ceux qui ne veulent pas de ces injustices comme la réforme fiscale du gouvernement, ni les illusions que la gauche est en train de préparer ». Selon François Bayrou, l’élection présidentielle va créer un paysage politique nouveau, elle va ouvrir une nouvelle époque à laquelle l’UDF évidemment participera : « la nécessité d’avoir un candidat à l’élection présidentielle, crève les yeux ».
« Si on ne regarde pas le chômage comme une cause urgente de la situation dans laquelle nous sommes, si l’on ne regarde pas l’échec de l’intégration et de l’école alors on passe à côté des causes » de la crise des banlieues a analysé François Bayrou. Les trafics et le phénomène des bandes dénoncés par le ministre de l’Intérieur, ne sont, selon lui, que les symptômes des problèmes que traversent les banlieues et la société française toute entière. Le président de l’UDF a souligné le danger qu’il y a de croire qu’une politique de fermeté à l’encontre des émeutiers va répondre à elle seule à la question des banlieues. François Bayrou a mis en avant cinq questions qui sont au cœur de la crise actuelle : l’urbanisme moderne qui a consisté à faire vivre ensemble des personnes qui avaient les mêmes difficultés au lieu de veiller à maintenir la mixité sociale telle qu’elle existait autrefois lorsque les personnes de conditions sociales différentes vivaient dans le même immeuble. Le président de l’UDF a également expliqué qu’« il n’y d’intégration que par le travail ». François Bayrou considère que la société s’est organisée pour ne pas créer d’emplois et a expliqué que les charges qui pèsent sur le travail sont telles qu’il y a toujours moins de travail. Il reconnaît que l’école est dans une impasse et il souhaite que l’on imagine une éducation différente. Le président de l’UDF propose également qu’on s’occupe de la formation des familles, il souhaite en particulier qu’on fasse un grand « travail d’éducation populaire » auprès des mères qui viennent d’univers géographiques et culturels lointains et qui sortent peu de chez elles. Enfin, François Bayrou considère qu’il y a un travail à conduire avec la justice pour que l’impunité ne soient plus la règle chez les mineurs car « cette impunité est contagieuse et est un mauvais exemple pour l’ensemble de la cité ».
Lors des violences urbaines de ces dernières semaines, l’UDF avait proposé un pacte républicain autour du gouvernement pour soutenir le retour à l’ordre et c’est dans le même esprit de solidarité avec les Français que le mouvement a voté pour la prolongation de l’état d’urgence. Maintenant, François Bayrou veut aller plus loin et propose des états généraux pour les banlieues à l’image de ceux qui ont eu lieu en 1789 : il propose que le Président de la République réunisse les grands courants d’opinions et les responsables de terrain afin de mettre en place une démarche nationale pour un problème national qui existe depuis trente ans et qui va continuer à se poser pendant encore des années. Il faudrait selon lui que les partis de gouvernement se mettent d’accord sur une politique des banlieues qui se prolongerait au-delà des alternances électorales comme le fait aujourd’hui l’Allemagne. En marge de la crise des banlieues, plusieurs sujets ont émergé comme l’absence de personnes issues de l’immigration dans l’hémicycle : François Bayrou s’est déclaré en faveur d’une meilleure représentation des minorités au Parlement mais il a souligné que le scrutin uninominal empêchait la diversité contrairement aux élections sur listes. C’est pourquoi le président de l’UDF propose de changer la loi électorale pour qu’il y ait une représentation significative des minorités. Dans la lutte contre les discriminations à l’embauche, François Bayrou soutient la sélection des CV sur le profil (qui oblitère le nom du candidat) tout en admettant que ce système ne résout pas tous les problèmes dès lors qu’il y a la seconde étape de l’entretien. Enfin, François Bayrou approuve l’idée d’un service civil mais à condition qu’il soit obligatoire afin que les jeunes en difficulté qui en ont le plus besoin y participent et que ce service soit l’occasion d’un brassage entre des individus de toutes origines et conditions sociales.
François Bayrou considère que les chocs politiques du 21 avril 2002 et du 29 mai dernier comme la crise dans les banlieues, sont le signe d’un même mal : tant que les responsables politiques dissimuleront la vérité, le pays n’aura pas la volonté collective de choisir une voie pour avancer. Selon lui, « personne ne dit la vérité aux Français sur la situation du pays ». François Bayrou reproche ainsi aux gouvernements de droite comme de gauche qui se sont succédés aux pouvoir d’avoir conduit « une politique d’aveuglement dans laquelle on enfonce le pays ». François Bayrou a fait notamment référence au budget qui sera voté cette semaine à l’Assemblée dont la Commission européenne remet en cause la crédibilité des chiffres du déficit, de la dette et de la situation économique du pays. Le président de l’UDF a regretté que les responsables politiques ne prennent pas les décisions courageuses qui s’imposent.
Actualités
Toute l'actualité de Jean Dionis
21/11/05 - François Bayrou au Grand Rendez-vous Europe 1 Pour des états généraux de la Banlieue
Réagir à cet article