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21/10/03 - Jean Dionis s'adresse à Hervé Gaymard lors de la discussion générale pour le vote du Budget Agriculture 2004

Publication : 22/10/2003  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis



Monsieur le Ministre, Monsieur le Président, mes chers collègues,


Je profite de la discussion générale sur le budget agricole pour vous dire, et à travers vous à l'ensemble du gouvernement, quelles sont les attentes des agriculteurs lot-et-garonnais, terre rurale et agricole, en matière de politique gouvernementale agricole pour l'année 2004.

Les attentes qui m'ont paru les plus fortes :

* C'est d'abord la solidarité nationale en ce qui concerne les agriculteurs, en difficulté notamment à la suite des orages particulièrement violents du 4 Juin et à la sécheresse de cet été.

* C'est ensuite l'appel à la réforme en matière d'application des 35 heures en matière de saisonniers agricoles qui est directement responsable d'une hausse très forte des coûts de main d'œuvre notamment dans les filières fruitières et légumières, fortement consommatrices de main d'œuvre

* C'est enfin les attentes des céréaliculteurs et des tabaculteurs en matière d'application des dispositifs de découplage dus à la mise en œuvre de la nouvelle PAC


1 - La solidarité nationale vis-à-vis des agriculteurs en difficulté

Le projet de budget 2004 – dans son chapitre 80 – 21 – prévoit une diminution de 42 % de la ligne "Fonds allégement des charges des agriculteurs et actions en faveur des agriculteurs en difficulté" du Ministère. Cette baisse conjuguée à la diminution de 50 % de la ligne consacrée à l'allégement des cotisations sociales sur le BAPSA déstructure totalement le dispositif.

L'argument mis en avant face à une réduction du FAC de 17 millions d'euros en 2004 est le déblocage de 25 millions d'euros dès 2003 pour répondre à la sécheresse.

Monsieur le Ministre, en Lot-et-Garonne la baisse de revenu du à l'impact de la sécheresse atteint jusqu'à 30 % du produit agricole pour les grandes cultures. C'est dire si cette baisse justifiait à elle seule le déblocage des aides sécheresse et dire aussi qu'on ne peut pas faire jouer un double rôle à ce financement – sécheresse et agriculteurs en difficulté….

La réduction "Agri-Diff" et la réduction des moyens inscrits sur le BAPSA- fragilisent le redressement d'exploitations qui exigent des mesures spécifiques s'appuyant sur des aides à la couverture sociale, au redressement et au suivi qui doivent exister à côté de dispositifs de crises. Le dispositif "Agri-Diff" notifié à Bruxelles n'a pas encore été validé par la Commission et il présente des rigidités ne permettant pas de répondre à la réalité des difficultés. Néanmoins, la refonte de ce dispositif ne peut se résumer à la diminution de la ligne, d'autant que l'impact de la sécheresse ne se terminera pas à la fin de l'année. L'extrême fragilité des exploitations les rend vulnérables au moindre aléa, naturel ou économique, et exige que les moyens ne soient pas réduits pour 2004.

Monsieur le Ministre, les agriculteurs Lot-et-Garonnais et Français sortent K.O et durablement affaiblis par la sécheresse, bien au-delà des 25 millions dégagés pour les aider de manière conjoncturelle….Ils seront très nombreux à basculer dans des difficultés structurelles si nous ne les aidons pas. Monsieur le Ministre, entendez cet appel !

2 – L'impact de 35 heures sur le coût du personnel saisonnier

Monsieur le ministre, un débat s’engage au niveau national sur le coût réel des 35 heures pour notre économie et les moyens de modifier ce dispositif législatif visiblement anti-économique et très injuste socialement.

Parmi les métiers où les 35 heures sont de toute évidence une aberration, il y a celui de travailleur saisonnier agricole.

Que veut un agriculteur lorsqu’il emploie un travailleur saisonnier ? Rentrer ses récoltes le plus vite possible, et dans les meilleures conditions de qualité, chaque jour de météo convenable étant une opportunité pour mettre à l’abri une partie de l’effort de l’année. Ici, la nature commande et pas nos absurdes contraintes bureaucratiques.

Que veut un travailleur agricole saisonnier lorsqu’il signe un contrat de ce genre ? Travailler beaucoup pour gagner beaucoup d’argent en peu de temps.

Et nous sommes allés mettre un accord 35 heures dans cette relation très spéciale entre agriculteurs et saisonniers ? Le résultat est catastrophique, au mieux les agriculteurs et les saisonniers trichent, et les faux contrats foisonnent….au pire, les coûts salariaux s’envolent, fragilisant encore ce secteur d’activité.

Nous vous demandons donc de ne pas appliquer les 35 heures tant que les autres pays européens ne sont pas à 35 heures dans ce domaine d’activité.

Aujourd’hui le passage aux 35 heures, l’alignement du SMIC et son évolution annuelle représente une augmentation de charges de main d’œuvre de 15 % !!!!. Il est urgent que le secteur agricole puisse bénéficier des abattements loi Fillon diminuant le plus possible les charges patronales, certes déjà allégés par les abattements existants pour les travailleurs occasionnels mais qui laissent encore à la charge des employeurs entre 15 % et 23 % des cotisations patronales.

3 – La mise en œuvre de la Pac dans les filières du Maïs et du tabac


Le maïs d'abord…..filière devenue déterminante dans l'ensemble du Sud-Ouest

Monsieur le ministre, la France va avoir à prendre des choix sur la formule de découplage (total ou partiel et date de mise en œuvre sur cette filière). Je voudrais plaider très vigoureusement la préservation et la pérennité des compensations spécifiques maïs et notamment celles liées à l'irrigation.

Enfin, il manque dans ce budget un vrai signal de démarrage d'une politique en faveur des biocarburants. Nous vous demandons d'être le ministre d'une politique volontariste notamment en remontant le niveau de défiscalisation au niveau qui a permis de lancer la filière (50 €/hl)

Par ailleurs, la défiscalisation de l'éthanol en incorporation directe n'est toujours pas officiellement reconnue en France. En conséquence, il est urgent qu'un texte législatif – pourquoi pas la loi de développement des territoires ruraux – soit adopté sur ce point. Lancer l'incorporation directe est un enjeu national, c'est une décision politique que la France se doit de prendre. Nous vous proposons de le faire dès le début 2004.

Le tabac enfin …..pour vous transmettre les plus vives inquiétudes de cette filière dans le département de Lot-et-Garonne comme dans l’ensemble de la région Aquitaine depuis qu’elle a pris connaissance des projets de la commission Européenne dans ce domaine :

Selon leurs informations, la commission va vraisemblablement se positionner sur une approche radicalement différente du système actuellement en vigueur.

Il est aujourd’hui question d’un découplage total des aides avec un prélèvement destiné à promouvoir des politiques de reconversion et à compenser les pertes d’emplois générées dans les régions tabacoles.

Le découplage total est certes un des fondements de la nouvelle PAC en général, mais il présente déjà des aspects discutables pour les grandes cultures et l’élevage comme vous l’avez souligné, Mr le ministre, lorsque vous vous êtes battus pour obtenir un découplage partiel.

En revanche, ce mécanisme est totalement inadapté pour des cultures spécialisées, exigeantes en main d’œuvre comme le tabac.

Il faut mesurer concrètement le caractère un peu fou du découplage total :

Aujourd’hui, un tabaculteur avec le système de prime lié à la production, dégage une marge brute de 4700 € par ha, entraînant toute une activité économique derrière lui de travail saisonnier, de fournitures, etc. Alors que si le système bascule en découplage total, il touchera 5220 € par ha !!! Qui continuera à travailler dans ces conditions ?

Ce point est fondamental et nous comptons sur vous pour le souligner lors du Conseil des Ministres de l’Agriculture.

L’adoption de telles propositions conduirait inéluctablement à la désorganisation de ce secteur d’activité et à la disparition de cette production en France.
En Aquitaine par exemple, 2000 exploitations produisent du tabac et en retirent de 30 à 80% de leur revenu.
Ces exploitations sont de taille petite ou moyenne, génèrent de l’emploi et participent à la vitalité économique du tissu rural régional.
La moyenne d’age des producteurs de la région est de 43 ans et nombre d’entre eux ont un avenir professionnel à construire.

C’est donc une filière jeune, une filière refuge pour de nombreux agriculteurs ayant été en sérieuses difficultés dans les grandes cultures ou dans le secteur des fruits et légumes.

Dans le paysage agricole actuel les possibilités de reconversion sont inexistantes du fait des difficultés déjà rencontrées dans d’autres filières.

Les producteurs sont aujourd’hui désabusés devant des propositions visant à l’élimination de cette production alors que :

Aucune relation ne peut être sérieusement faite entre la production et la consommation en Europe (Arrêter de produire n’aurait aucun impact sur la consommation).
Les tabacs Européens et Français en particuliers sont produits dans des conditions sanitaires contrôlées et connues.
Les industriels n’ont aucune obligation d’achat en Europe (contrairement aux USA) alors que c’est la zone la plus profitable pour eux dans le monde.
La production Européenne « primée » ne va pas concurrencer déloyalement les exportations de pays émergeants.

Au niveau Européen, l’ensemble des producteurs sont mobilisés fortement contre ces propositions et débattent avec leurs ministères respectifs pour mettre en place des propositions constructives pour l’avenir de ce secteur.

Du fait de l’importance de la tabaculture dans son pays, Mr le Ministre de l’agriculture Italien va vraisemblablement proposer un rapprochement des Ministres des pays concernés. Des alliances et des soutiens sont donc mobilisables pour soutenir la position, très appréciée, que vous avez défendue devant le congrès national des producteurs de Tabac et dont ils ont gardé une mémoire très précise.

J’espère donc de votre part une défense vigoureuse de nos tabaculteurs et le rejet de propositions calquées maladroitement sur la PAC Grandes cultures et qui mettraient en grand danger une des filières dynamiques de notre agriculture, spécialement dans le département dont je suis l’élu.

Monsieur le ministre, au-delà la mécanique budgétaire et des appels qui vous viennent des paysans lot-et-garonnais, nous approuvons le pilotage global de la politique gouvernementale agricole, même si ce budget 2004 de l'agriculture en recul de 3,7 % ne nous enthousiasme pas. Mais nous savons l'état délicat de nos finances publiques et sommes, en ce qui concerne le budget agricole, pour l'essentiel solidaires des arbitrages rendus.

Nous vous entendons donc et voterons votre budget, en espérant nous aussi être entendus de votre part.

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