Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
F.Sauvadet, porte-parole de notre groupe UDF, vous a fait part de l'avis général porté par notre famille politique sur votre budget. Cet avis est positif….et, oui, ….Comme quoi, il ne faut pas désespérer de l'UDF.
Mais, comme l'affirme le proverbe, "Qui aime bien, châtie bien ! ".
Alors, permettez-moi, en tant qu'élu d'une des circonscriptions de France où l'agriculture est le premier secteur économique, de vous interroger sur quatre politiques dépendant du budget agricole, à la fois d'actualité et d'avenir, qui, à mon sens, sont aujourd'hui insuffisantes et ont besoin d'être activement soutenues notamment par le budget de l'Etat.
Ainsi, permettez moi d'évoquer quatre sujets :
- l'eau,
- les fruits et légumes
- les retraites agricoles
- et enfin, encore et toujours les huiles végétales pures….et, tout cela en cinq minutes ou à peu près.
L'eau d'abord.
C’est un sujet majeur pour les années à venir puisque l’agriculture moderne ne peut se passer d'irrigation et que le réchauffement climatique va contribuer à rendre cette ressource rare.
L’agriculture doit certes s’adapter - et elle fait déjà depuis de nombreuses années -en diversifiant ses assolements, en modifiant ses pratiques et en poursuivant ses recherches pour des économies d’eau. Les sols doivent être mieux protégés contre l’érosion qui emporte la terre arable. Les chercheurs doivent trouver de nouvelles variétés.
Malheureusement, les dotations pour l’hydraulique ne traduisent pas les engagements du Ministre, que ce soient les vôtres Monsieur le Ministre ou ceux d'Hervé Gaymard. Ainsi les 20 M€ annoncés par le Ministre pour financer les retenues de taille modeste ne sont pas totalement budgétés. 14,6 M€ de crédits de paiement seulement sont prévus. Nous avons donc déposé un amendement visant à remplir l’objectif initialement annoncé.
Son adoption marquerait l'importance que nous attachons TOUS à la question de l'eau.
Mais plus fondamentalement, nous devons bouleverser notre politique de l'eau nationale pour relever le défi du réchauffement climatique et des sécheresses qui vont avec.
Il pleut en France, 700 mm par an, ce qui représente 20 m3 par habitant et par jour. La pluviométrie est abondante. Si elle était correctement gérée, elle permettrait de satisfaire tous les besoins en eau. L’intelligence voudrait que l’on garde l’eau quand elle est surabondante en la stockant dans la perspective d’une multiplication de périodes sèches et caniculaires.
La loi sur l’eau va revenir sous peu en discussion à l’Assemblée et nous défendrons coûte que coûte une vraie politique de l’eau, ayant pour objectifs de constituer en hiver des réserves que ce soit en montagne, au cours de nos fleuves sans oublier les réserves de proximité.
Nous souhaitons que la France agisse sur tous les niveaux en commençant par le niveau européen en passant par l'adaptation des directives qui pèsent sur la politique de l'eau nationale et qui commencent à dater sérieusement.
Les Sénateurs ont déjà eu l'occasion de discuter du projet de loi sur l'eau et milieux aquatiques. Ils ont eu la sagesse de voter l'excellent amendement de mon collègue et ami Sénateur Daniel Soulage qui a en effet déposé un amendement pour la création de réserves en eau.
Regardons les années de sécheresse 2003, 2005, événements sans doute dus aux changements climatiques à long terme en cours aujourd'hui ! Regardez, Monsieur le Ministre, la violence de ces sécheresses, chez vous, en Poitou-Charentes, terre jusqu'ici épargnée par de tels sinistres ! Ces derniers appellent des changements considérables de nos comportements et de notre législation en la matière. Commençons, dès ce soir, en votant à cette politique hydraulique des ressources budgétaires qui commencent à marquer une vraie volonté dans ce domaine.
Passons ensuite à un sujet qui m'est particulièrement cher, en tant que fils d'arboriculteur, les fruits et légumes.
Les producteurs de fruits et légumes connaissent, depuis plusieurs années, une crise sans précédent. Au cours de l’été 2005, le comportement de la distribution qui a, encore une fois, joué la carte du prix le plus bas, les fortes importations de fruits et le poids des charges sur les exploitations ont conduit à cette catastrophe. Les pertes s’élèvent aujourd’hui à 280 M€.
Juste un petit exemple Lot-et-Garonnais: le coût de production d’un kilo de pomme est en moyenne de 0,30 €. Or actuellement, les prix proposés par les acheteurs laisseront un prix final payé au producteur de 0,17 € à 0,20 € dans le meilleur des cas. La perte sera donc, dans le meilleur des cas, de 0,07 € par kg. Sachant que 1 hectare produit environ 50 tonnes, cela représente une perte de 3500 € par hectare. Le plan de soutien de 15 M€ que vous avez proposé, Monsieur le Ministre, est donc bien loin d’être à la hauteur des besoins.
Monsieur le Ministre, saisissez l'opportunité du rendez-vous du Budget pour corriger votre budget, notamment sur la filière pomme en situation véritablement dramatique cette année…..
Troisième sujet, les retraites agricoles.
Il faut que nous nous posions, les yeux dans les yeux, une question simple: est-ce que nous sommes d'accord pour nous fixer comme objectif national, à l'horizon de 10 ans par exemple, l'alignement des retraites agricoles sur les minimums sociaux vieillesse du pays ?
Notre réponse, à l'UDF, est un oui raisonnable, progressif, mais déterminé.
Nous nous rappelons tous du rapport Garnier commandé par votre prédécesseur, Monsieur le Ministre, M. Hervé Gaymard. Ce rapport montrait que cela était possible.
Les prestations d'assurance vieillesse représentent le principal poste de dépenses avec 8,35 milliards d'euros. Pour l'année 2006, la baisse des effectifs des bénéficiaires de prestations vieillesse du régime agricole engendre une diminution du montant de cette ligne budgétaire. Cela dégage une économie de 36 millions d'euros. Et cela ira en s'accentuant. Voila une marge de manœuvre budgétaire que l'on peut mobiliser pour atteindre cet objectif, si onus avons la volonté politique !
Enfin, les biocarburants. Voilà un sujet extrêmement cher à l’UDF. Et je dois rappeler combien je regrette vivement que dans le cadre de la LOA les huiles végétales pures n’aient pas été reconnues comme biocarburant à part entière. Rien ne s’y oppose pourtant : ni la législation européenne, bien au contraire d’ailleurs et je vous engage à consulter les directives 2003/30/CE et 2003/96/CE pour vous en assurer.
Clairement votre position ne s'appuie ni sur des impératifs techniques, ni même sur des raisons écologiques ou économiques.
Alors, j'enquête avec obstination sur qui peut être l'inspirateur de la politique aussi étriquée et archaïque que celle adoptée par le gouvernement - à savoir la seule légalisation à l'autoconsommation agricole -
Ce ne peut être vous, M.le Ministre. J'en suis sûr. Elu de terrain, vous avez vu bouger la société pour ne pas être l'autruche qui met la tête dans le sable.
J'ai pensé au lobby pétrolier et M.Desmaret , PDG de Total, m'a juré que pour lui tant que l'on faisait du diester - Huiles ou diester chimique- tout allait pour le mieux dans le meilleur du monde !
J'ai demandé à votre collègue François Loos, Ministre de l'Industrie, qui à Bercy torturait le Ministre de l'agriculture sur ce sujet……sa réponse n'était pas forcément convaincante….
Bref, tout le monde est très gêné et personne ne veut assumer cette politique intenable. Pendant ce temps, des collectivités locales se mettent dans l'illégalité, le nombre de personnes, dévalisant le rayon des huiles alimentaires dans nos hard-discount pour incorporation sauvage dans leurs carburants particuliers, augmente tous les jours…..
Bref, nous sommes ici devant une discrimination qui n’a vraiment pas lieu d’être et nous n'arrêterons pas de demander à ce que l’utilisation des huiles végétales pures soit étendue à tous les particuliers. Une telle décision serait une preuve de courage et surtout illustrerait parfaitement le volontarisme affiché en matière d’environnement, de biocarburants et de réduction des gaz à effet de serre affiché par le gouvernement.
Voilà Monsieur le Ministre, Monsieur le Président et mes chers collègues la contribution du Lot-et-Garonne à ce débat. Merci de vos réponses fortes et audacieuses sur chacun de ces enjeux.
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