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10/01/04 - Libération:Téléphonie. Les députés suppriment les artifices de facturation. Dernier écueil: le vote du Sénat. Le crédit-temps, arnaque patraque

Publication : 13/01/2004  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Par Catherine MAUSSION
samedi 10 janvier 2004


Mort au crédit-temps, à la première minute indivisible et à tous les artifices dont usent et abusent les opérateurs de téléphonie, fixes et mobiles, pour surfacturer les appels courts. Ainsi en ont décidé les députés avec une belle unanimité, en votant jeudi soir un amendement radical : «Toute communication téléphonique ne peut être facturée sur la base d'une unité de compte supérieure à la seconde.» Bref, tomber sur un répondeur et raccrocher ne pourra plus être taxé comme si l'appel avait duré 20, 40 ou 60 secondes...

Le petit article de loi, s'il passe le dernier écueil du Sénat, pourrait s'appeler le Dionis du Séjour, du nom du député (UDF) qui l'a défendu. «Quand les associations de consommateurs sont venues me trouver pour m'expliquer comment les clients étaient grugés, j'ai mis un peu de temps à comprendre, mais, très vite, j'ai trouvé ces pratiques inacceptables. J'ai deux ados et je vois bien qu'ils n'épluchent pas leurs factures.» L'arnaque est particulièrement évidente sur les cartes prépayées de téléphonie mobile : «On vous vend 30 minutes, mais vous disposez en réalité de 20 ou 22 minutes.» En poussant la démonstration à l'extrême, on peut même épuiser une carte SFR prépayée de 55 minutes (vendue 25 euros) en 55 secondes, renchérit l'UFC-Que Choisir, à cause de cette première minute indivisible.

Cuisine. Dans le collimateur des députés, au-delà des cartes prépayées, tous les forfaits de mobile. La même cuisine s'applique en effet à nombre de forfaits, alors même, a retenu le député, qu'«à chaque fois que les associations ont saisi la justice, elles ont gagné». D'où sa conviction qu'il fallait mettre définitivement de l'ordre.

Mais l'attention des parlementaires ne s'est pas arrêtée en si bon chemin. Les appels passés depuis un téléphone fixe sont également dans la ligne de mire à cause, toujours, de ces premières secondes élastiques baptisées, dans le jargon des opérateurs, «crédit-temps». Le principe est le même : plomber le tout début des appels en leur appliquant une tarification particulièrement absconse qui brouille les comparaisons. «C'est un problème de vérité des prix, d'identité entre la chose annoncée et la chose réellement fournie», explique encore Jean Dionis du Séjour, le rapporteur de la loi. Quatre pays européens, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède et la Norvège auraient d'ailleurs interdit ces pratiques, souligne le député.

«Ingérence». Sûrs de leur analyse, les parlementaires ne pavoisent pas pour autant. Jeudi à l'Assemblée nationale, leur plus farouche opposante s'appelait Nicole Fontaine, secrétaire d'Etat à l'Industrie. Et elle a brandi de bien curieux arguments, condamnant ainsi «l'ingérence des députés dans la politique commerciale des opérateurs». A l'entendre, la première minute indivisible est même «un élément essentiel de différenciation», favorable «à la concurrence et, in fine, au consommateur». L'affaire n'est donc pas gagnée : la deuxième lecture est programmée au Sénat le 12 février. Et, croit savoir l'auteur de l'amendement, «Bercy va essayer de regagner le terrain perdu et les lobbies vont se mettre en branle».

Effectivement, vendredi, chez SFR, on a pris au vol la perche, tendue par Nicole Fontaine, invitant les opérateurs à se concerter pour corriger les plus gros désordres. «Nous sommes tout à fait disposés à travailler avec le gouvernement», indique un porte-parole. L'opérateur rappelle qu'il donne déjà le choix au client, même sur les cartes prépayées, entre un décompte à la seconde dès la première seconde et un autre moins favorable, où la première minute est indivisible, mais ces formules sont facturées plus cher. De fait, l'opérateur se garde bien d'en faire la publicité, préférant mettre en avant le forfait meilleur marché. Chez Bouygues Télécom, en revanche, on ne semble pas du tout fâché de l'amendement : «On a banni la première minute indivisible de tous nos forfaits et de toutes nos cartes prépayées depuis le 1er janvier 2003», rappelle l'opérateur.

Profil bas. Dans la téléphonie fixe, seul Télé 2 se prononce franchement pour la suppression du crédit-temps. Lorsque l'opérateur s'est lancé sur le marché français, il avait bravement choisi une facturation transparente des appels à la seconde dès la première seconde. Mais il a dû vite renoncer : ses concurrents majoraient lourdement la première minute, pour mieux alléger et communiquer sur le coût des minutes suivantes. Jean-Louis Constanza, PDG de Télé 2, craint que la petite révolution du décompte à la seconde n'aille pas à son terme ­ «vu que France Télécom n'en veut pas et qu'elle est particulièrement active en ce moment pour défendre ses intérêts». L'opérateur préférait adopter vendredi un profil bas : «Tout ce qui va dans le sens de la transparence est bon.» Et ajoutait que, même si l'amendement va à son terme, il n'interdira pas de majorer chaque appel d'un coût d'établissement. A l'UFC-Que Choisir, on estimait vendredi que cela constituerait un énorme progrès.
© Libération

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