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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Faire la loi à l’âge du numérique

Publication : 07/07/2014  |  02:22  |  Auteur : Jean Dionis

Claude Bartolone, Président de l’Assemblée nationale, a pris l’initiative forte, mais risquée compte-tenu de la complexité et de l’immensité du sujet, d’installer une commission parlementaire sur droits et libertés à l’âge du numérique pour dégager un corps de doctrine juridique utile pour chaque projet de loi, chacun d’entre eux ayant forcément une dimension numérique. Je salue la pertinence de l’initiative et j’en signale tout de suite la difficulté.

Je dois à mes amitiés fidèles dans ma famille politique, le Centre, incarnée actuellement – entre autres, nous n’avons jamais aimé les monopoles – par l’UDI d’avoir été proposé et de faire partie de cette commission. Cela me touche et cela m’intéresse. J’y retrouve avec bonheur mes anciens collègues parlementaires, investis dans les enjeux du numérique : Laure de la Raudière, Corinne Erhel, Franck Riester, Patrick Bloche, ….et bien-sûr Christian Paul qui copréside avec Christiane Feral-Schuhl notre commission.

Par où commencer ? Comment organiser notre travail ? Questions compliquées quand le numérique est partout et qu’il est un facteur absolument décisif de transformation de notre société. Certains plus lyriques que moi n’ont pas hésité à parler de numérisation du monde…… ;
En attendant, et n’étant pas à une contradiction près, je souhaite partager avec vous ma première contribution à nos travaux sur le thème de « Numérique et démocratie participative ». Je plaide pour que ce thème fasse partie de nos travaux en bonne place.

Je n’imagine pas en effet que nous laissions de côté la question de la production du droit à l’âge du numérique et que l’Assemblée se construise sur ce sujet un corps de doctrine sur tout…sauf sur ce qui la concerne immédiatement et directement : la production du droit ! …et pourtant, il ya urgence !
J’ai été député de manière active pendant 10 ans de 2002-2012 et j’ai pu voir de près l’essoufflement de la démocratie représentative (les députés noyés sous les centaines d’amendements produits par les différentes parties prenantes, les lobbys, etc.…..) ainsi que l’irruption du numérique dans les débats parlementaires (débats en direct sur les réseaux télévisés, députés présents et pris à partie en direct sur les réseaux sociaux, etc.….).

Le beau cadre de la démocratie représentative tel qu’il a été pensé par les penseurs des Lumières Françaises (Montesquieu, Rousseau, …) est en train d’exploser sous nos yeux :
On est bien loin du peuple souverain passant contrat au moment des élections avec ses représentants à qui il délègue pendant la durée de leur mandat son pouvoir législatif et exécutif.

Prenons garde cependant à ne pas jeter le bébé de la démocratie représentative avec l’eau du bain trouble de la vie politique actuelle.

La représentation permet le choix démocratique de citoyens préparés à cette tâche complexe qu’est le gouvernement de la cité et à qui la cité s’en remet pour une gestion durable et sage.
Je suis de ceux qui sont très réservés sur le modèle « référendaire helvétique». Je lui fais deux critiques de fond. Il fait la part belle au populisme et à la dictature de l’émotion et de l’immédiateté vu le caractère réducteur des questions posées. Et il est encore plus contestable que la démocratie représentative car le corps électoral en général se fatigue très vite de ces consultations sectorielles….et les boude très majoritairement.

Nous voilà donc avec l’ardente obligation d’améliorer la démocratie représentative. Et là, le numérique peut jouer un rôle décisif…..

Avant de détailler quel rôle nouveau le numérique pourrait jouer dans l’élaboration de la loi, je voudrais éclairer le débat d’un exemple de bonne pratique législative et d’un contre-exemple.

L’exemple de bonne pratique, ce fut pour moi les lois Grenelle de l’environnement.
Le Grenelle Environnement se plaçait dans la lignée du Pacte écologique proposé par Nicolas Hulot et signé par Nicolas Sarkozy au cours de sa campagne électorale.

Le terme « Grenelle » renvoie aux accords de Grenelle de mai 68 et a désigné par analogie le débat qui a réuni à l’été et automne 2007 des représentants du gouvernement, d'associations professionnelles et d'ONG.

Le Grenelle Environnement a donné lieu à un projet de loi dit « Grenelle I » adopté à la quasi-unanimité à l’Assemblée en octobre 2008 avant que cette loi-cadre ne soit définitivement adoptée par le parlement lors de sa deuxième lecture au Sénat le 23 juillet 2009.

L’exemple a contrario de mauvaises pratiques démocratiques, c’est clairement ce qui se passe sous nos yeux avec la loi territoriale : Aucune concertation avec les parties prenantes, le Sénat en opposition ouverte avec ce texte, délai couperet de Décembre 2014 pour l’adoption de ce texte majeur qui ne va pas manquer de détériorer la qualité du texte en final produit par le parlement.

Identifions ce qui permet les véritables avancées législatives à la lumière de loi Grenelle I.

C’est d’abord le fait qu’elle soit dans le programme du candidat, qu’elle fasse donc partie du mandat reçu par le candidat au moment de son élection et, ainsi, du contrat liant le peuple à ses représentants. Bref, c’est le grand retour des vrais programmes après le vide des années des campagnes « communicantes ». Et le numérique peut être décisif pour favoriser l’échange et la mise au point des programmes électoraux entre les citoyens, les corps intermédiaires, et le candidat.

C’est ensuite la fameuse conférence des parties prenantes, mettant en situation de dialogue tous les acteurs d’un même enjeu : gouvernement, syndicats, ONG, etc.…..là encore, le numérique peut être décisif pour systématiser cette démarche tout en l’élargissant aux citoyens avertis et intéressés. Il faut que le Parlement soit bien entendu associé à cette phase situé en amont de la vie du projet.

Enfin, les travaux du Parlement au moins dans sa phase d’auditions (rapporteur, commissions, …) doivent s’ouvrir à une gestion participative des citoyens intéressés.

Le numérique de ce début du 21ième siècle doit permettre l’accueil en bonne et due forme de la démocratie participative en amont du travail du parlement, irremplaçable dans son rôle d’arbitre final. Avec le numérique, nous allons faire du peuple des internautes, le conseiller du Prince. Machiavel doit s’en retourner dans sa tombe…..





Les réactions

commission sur le numérique

Je suis satisfait de vous savoir dans cette commission pour y défendre un point de vue que je peux partager...il y a beaucoup de commissions et de comités, beaucoup trop avec des effets secondaires !
Souhaitons que la votre aboutisse favorablement...

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