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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Constitution : Pourquoi j'ai (finalement) voté oui !

Publication : 24/07/2008  |  16:30  |  Auteur : Jean Dionis

J’ai voté oui au projet de réforme constitutionnel, hier à Versailles. Jusque là - me direz-vous - rien de très anormal pour un député de la majorité présidentielle … certes, sauf que j’ai bien failli m’abstenir.

Je l’avais fait en première lecture à l’Assemblée Nationale. J’ai considéré très sérieusement le fait de confirmer ce premier vote, ce qui, rétrospectivement, au vu du résultat définitif « à une ou deux voix près » n’aurait pas manqué de déclencher une certaine agitation sur ce vote qui finalement n’a pas eu lieu …
Mais oublions le scénario romanesque et revenons au débat.

Le débat opposait les partisans de la réforme constitutionnelle proposée par N.Sarkozy à ses opposants. Tout le monde ou presque était d’accord sur le diagnostic initial.

Le Général de Gaulle en 1958 avait eu la main lourde vis-à-vis du parlement en inspirant la Constitution de la Vième République. Il avait ses raisons, bonnes et plus discutables. Bonnes d’abord avec l’incapacité mortelle de la IVième République à résoudre la très douloureuse crise algérienne ; raisons plus discutables, ensuite, l’homme du 18 Juin ayant toujours considéré que le régime parlementaire à son apogée lors de la 3ième République avait été une des causes de l’effondrement national de 1940. Bref, en 1958, le Général de Gaulle donne à la France des institutions modernes et stables qui ont clairement été une des clés de la brillante réussite française dans la deuxième partie du XXième siècle. Mais cette constitution fait une victime : Le Parlement, marginalisé dans le système gaulliste.

L’évolution de la constitution de la Vième république n’arrange rien dans ce domaine. Ni l’élection du Président au suffrage universel adopté en 1962, et qui va vite devenir la clé de voute du système politique français, ni l’adoption du quinquennat en 2000 et l’inversion du calendrier électoral qui font des élections législatives le troisième tour de l’élection présidentielle, accroissant la dépendance du parti majoritaire par rapport à l’exécutif, ne vont arranger les choses en matière d’équilibre du pouvoir entre l’exécutif et le législatif.

Or, nous le savons bien en Aquitaine, nous qui sommes des fils spirituels de Montesquieu, pour qu’une démocratie fonctionne bien, il faut que ses pouvoirs principaux soient séparés et équilibrés. Ce n’était plus le cas en France. La dynamique historique et institutionnelle de notre pays avait abouti à un pouvoir présidentiel excessif et à un parlement singulièrement plus faible que ses équivalents dans les grandes démocraties mondiales. Or, ce pouvoir personnel du Président n’est pas sain. Tout le monde en convenait.

La réforme s’imposait donc et fort de mes six années d’expérience de parlementaire studieux, je l’appelais clairement de mes vœux, espérant y voir le début de la renaissance du Parlement.

N.Sarkozy confia donc à E.Balladur le soin de débroussailler le sujet en animant d’ailleurs fort bien une commission parlementaire rassemblant toutes les sensibilités de notre parlement. Tout commençait sous les meilleurs auspices. Alors me direz-vous pourquoi diable t’es tu abstenu à l’Assemblée Nationale ?

Tout simplement parce que la constitution est notre loi suprême et qu’elle doit être là pour régler les problèmes majeurs de notre période historique. Les Allemands en 1949 ont eu raison d’adopter une constitution littéralement vaccinée contre les rechutes de nazisme (avec notamment l’adoption d’un état fédéral et l’interdiction de l’usage du référendum). Le Général de Gaulle avait raison de construire la constitution de la Vième république autour de l’idée d’un pouvoir exécutif fort pour sortir de l’impuissance qui caractérisait la IVième république face à des crises de la gravité de celle que traversait la France en Algérie.

Et aujourd’hui ? Je considère que la priorité absolue est de retrouver l’équilibre de nos finances publiques et d’arrêter de vivre à crédit de la génération de nos enfants, que ce soit sur le budget de l’Etat ou celui de la sécurité sociale. Et c’est une revendication majeure des centristes que de faire de l’obligation d’équilibre de nos finances publiques un impératif constitutionnel. Très vite, on baptisa cet impératif du nom un peu magique de …. « Règle d’or » qui imposait qu’à partir de 2012 ce fameux équilibre de nos finances publiques soit enfin atteint.

Dans les arbitrages politiques qui suivirent la Commission Balladur, N.Sarkozy pencha d’abord en faveur de l’inscription de cet impératif dans notre constitution … pour finalement accepter son « détricotage » au Parlement lors de séances parlementaires où le consensus droite-gauche pour refuser les efforts nécessaires au retour à l’équilibre apparut de manière éclatante … et où au passage notre famille politique centriste fut carrément humiliée.

Ce jour-là, je décidai que je n’approuverai pas une constitution qui n’intégrait pas en son sein les remèdes pour le principal problème de notre époque politique : à savoir les déficits publics. Logiquement, je fus un des 6 centristes à m’abstenir à l’Assemblée Nationale.

Vint ensuite le vote du Congrès, hier. Jusqu’au bout, j’ai été tenté par l’abstention qui aurait prolongé mon vote à l’Assemblée Nationale. Mais très vite, chacun des parlementaires sut que le vote allait être serré … et la question devenait alors toute simple : Fallait-il renoncer au rééquilibrage des pouvoirs entre le parlement et le Président parce que le problème de l’équilibre des finances publiques avait été évacué de la constitution ? Ce fut mon débat interne, mené aussi avec un petit groupe d’amis parlementaires.

L’autre débat, le débat officiel, celui qui se déroula dans la salle du Congrès à Versailles ignora complètement l’enjeu de la constitutionnalisation de la réduction du déficit, montrant en cela un véritable consensus entre l’UMP et le PS.

Le débat revint sur le rééquilibrage des pouvoirs en faveur du Parlement, le premier Ministre François Fillon, tonique quoi qu’encore handicapé, insista sur le fait qu’il n’y aurait pas d’autre occasion avant longtemps pour accroître les droits du Parlement et renforcer la démocratie en France en rappelant que « la démocratie est le cœur de la vocation universelle en France ».

Les orateurs de l’opposition, Bernard Friemat d’abord et surtout Arnaud Montebourg, furent brillants mais finalement assez peu convaincants. Il y eut quand même des moments forts et justes dans leurs interventions, le passage où Arnaud Montebourg déclare « la première victime de cette réforme, M. le Premier Ministre, c’est vous et votre gouvernement ! Et la deuxième, c’est nous, l’opposition Nationale ! », n’était pas sans force au niveau de l’art oratoire et sans consistance au niveau du fond de l’argumentaire mais au final, après avoir pris le temps d’écouter tous les orateurs, j’étais pour ma part convaincu que cette réforme rassemblait un ensemble de mesures qui déplaçait significativement le fléau de la balance des pouvoirs en faveur du Parlement.

En dernière minute, je me convainquai de voter pour cette réforme et de ne pas la prendre en otage de ma colère de centriste devant le consensus français qui nous fait préférer les déficits aujourd’hui et les sacrifices pour nos enfants demain aux efforts que notre génération devrait faire. J’étais persuadé que la réforme passerait à plus d’une dizaine de voix d’écart. Le reste de l’histoire, vous le connaissez, une seule voix d’écart pour cette réforme. Jack Lang pris dans l’œil du cyclone.

Rétrospectivement, je me dis que si j’avais maintenu mon vote initial…
Comme le dit la chanson de Gustave Nadaud , « Si la Garonne l’avait voulu, Lanturlu, lanturlu, elle aurait coupé la Seine dans Paris »…
Cet épisode clôture notre première année parlementaire.

Merci d’avoir été sur le blog avec nous pendant toute cette période. Je pars maintenant en vacances pour trois semaines, je mettrai fin août en ligne mon carnet de vacances,

Bonnes vacances à vous tous,
@ +

Les réactions

La dette publique

Monsieur Arnaud Montebourg, interrogé par France-infos, met en avant le renforcement du pouvoir du chef de l'état par cette réforme constitutionnelle et déclare qu'aucun membre du parti de l'opposition ne votera pour, ce qui fait maintenant douter du vrai fondement de ses paroles. Il est bien dommage en effet que le redressement de la dette publique soit passée sous silence...Il faut croire que le gouvernement, devant les difficultés économiques actuelles, veut se donner plus de souplesse et de marge afin de ne pas exaspérer les français par trop de restriction budgétaire . Espérons cependant que le remboursement de la dette publique, s'il doit se faire plus en douceur, ne fera pas marche arrière...A interroger les personnes, on a vraiment l'impression que beaucoup de Français n'ont pas vraiment conscience de l'importance de cette dette publique et de ses répercussions futures sur nos enfants et que seul compte leur confort personnel actuel. Sur les chaines de télévision et de radio, on met tellement bien en avant la question du pouvoir d'achat que l'on ne cesse de rabaisser le moral des Français, alors qu'il serait plus normal et plus responsable d'insister sur la situation préoccupante de l'avenir de nos enfants. Nos situations d'adultes responsables actifs seraient plus motivantes que celles d'adultes infantiles plaignants.

Régime parlementaire ou présidentiel

Je n'ai personnellement aucune compétence en la matière et préfère laisser les spécialistes en décider ; c'est pour cela qu'on élit des "corps intermédiaires" et c'est bien ainsi.

Ceci n'est pas un aveu de désintérêt pour la chose publique, au contraire. J'ai donc lu avec un grand intérêt votre explication de vote et vous en remercie. Je voudrais cependant, Monsieur le député, pousser un cran plus loin ou un cran plus haut, votre raisonnement : au sujet de la dette publique, le parlement bronche et rebronche devant l'effort, c'est vous qui l'écrivez en substance. Etait-ce vraiment le moment de renforcer son pouvoir d'arrêt ? (Dans certaines entreprises, et dans certains cas, on parle même de pouvoir de nuisance, mais j'imagine que vous rayerez cette parenthèse qui n'est que pour vous). Alors ? retour progressif vers l'impuissance de la défunte quatrième ? Grave question.

Croyez, Monsieur le député, à ma très haute considération. -PR-

De nouveaux pouvoirs, vraiment ?

Mon cher Jean,

J'avais noté avec intérêt ton abstention lors du vote à l'Assemblée nationale du projet de loi constitutionnelle. Tu expliques maintenant ton vote "pour". Chacun peut évidemement changer d'avis et tes arguments sont intéressants et bine netendu recevables.
Pour autant, ce n'est pas le renforcement du pouvoir du Parlement que tu as ainsi voté, mais celui de la majorité parlementaire. Ce n'est pas la même chose. Et la majorité parlementaire, avec le quinquennat et l'élection du président de la République au suffrage universel, c'est la majorité présidentielle avec des députés qui, pour la plupart, ont la "trouille" de ne pas recevoir la bénédiction du chef la fois d'après.
Si on veut de véritables contre-pouvoirs à un exécutif tout-puissant - ce qui le conduit à faire parfois des bêtises d'ailleurs -, il n'y a que deux solutions : soit revenir sur cette élection du président au suffrage universel, soit passer au fédéralisme en donnant de véritables pouvoirs aux régions par exemple. C'est ce qui manque dans cette révision, qui n'est que de la poudre aux yeux de parlementaires qui se sont fait à la fois peur et plaisir en imaginant être encore utiles à la République.
Ce régime politique méprise et néglige de plus en plus les corps intermédiaires, en usant et abusant de médias de plus en plus complices et parisiens. Ne nous étonnons pas du retour de l'individualisme, du déclin accéléré des services publics, de la perte de substance progressive de nombreux territoires, sous couvert du respect des fameux "critères". C'est très éloigné de l'idée que l'on peut se faire d'un pouvoir politique responsable et républicain. Pendant ce temps, le Parlement joue le suspense à Versailles. Le réveil risque d'être douloureux pour nombre de nos compatriotes, mais le pouvoir ne les entendra plus ... seuls les maires, pour un temps encore, assureront le service minimum, et puis eux aussi jetteront l'éponge, écartelés entre le manque de moyens, un Etat vélléitaire et autoritariste et les besoins immenses de la "masse".

Amitiés,

Philippe LAURENT
Maire, conseiller général

CONSTITUTION

Bj Mr Dionis,
L'analyse qui vous a conduit à voter pour le remaniement de la Constitution est irréprochable. Cependant pourquoi vous culpabiliser ?
Sans être juriste, le rééquilibrage du pouvoir Président/Parlement est bien du ressort des textes de la Constitution. Par contre celui des déficits ne me semble pas devoir en faire partie.
Le budget de l'Etat comme celui des entreprises et de tout un chacun se doit au minimum d'être équilibré et ceci ne concerne que les techniques de gestion avec il est vrai une discipline sans failles pour les appliquer....! Et cela devrait être LA GRANDE PRIORITE du gouvernement pour laquelle le Nouveau Centre devrait faire valoir son expertise et sa volonté pour enfin sortir notre pays de cette ornière.
Lorsque le nouveau Centre aura réussi par la force de ces analyses et sa fermeté à faire réduire les gaspillages et les trains de vie hahurissants de certaines de nos administrations territoriales et locales alors, c'est certain, notre pays reprendra confiance.
Pour l'instant, on attend toujours que l'exemple vienne d'en haut.
Tout un programme !
Michel SANTIN

Encore des peurs infondées

Plutôt que de théoriser à l'infini sur ce que sera les conséquences de la Réforme de la Constitution, il serait plus sage de simplement énumérer ce qui est dans le texte, et en quoi on est précisément d'accord ou opposé avec les principes qui s'y trouvent :

"Le Président

Comme aux Etats-Unis, il ne pourra pas exercer plus de deux mandats consécutifs.

Il pourra venir s’exprimer devant le Parlement réuni en Congrès. Les élus pourront ensuite procéder à un débat sans vote, et hors de sa présence.

Concernant le fameux article 16, qui lui permet de s’attribuer des pouvoirs exceptionnels en cas de menace pour le pays, les parlementaires -60 députés ou sénateurs- pourront saisir le Conseil constitutionnel dans les 30 jours. S’ils ne le font pas, le Conseil s’auto-saisit au bout de 60 jours d’exercice de l’article 16.

Concernant le droit de grâce, le Président ne peut plus l’exercer qu’à «titre individuel», et non pour un ensemble d’infractions. Il ne préside plus le Conseil supérieur de la magistrature. Son pouvoir de nomination est encadré: une commission composée de députés et de sénateurs doit approuver les plus importantes à la majorité des 3/5. Reste à définir par la loi quelles sont ces nominations qui seront soumises à contrôle."

Quelqu'un est contre, pour quelle (s) raison (s)?


"Le gouvernement

Les ministres issus du Parlement retrouvent automatiquement leur siège en cas de démission ou renvoi. Aujourd’hui, celui qui occupe le siège doit démissionner, pour qu’une élection législative ou sénatoriale soit ensuite reconvoquée.

Le Premier ministre

L’utilisation de l’article 49-3 est restreinte au Budget de l’Etat, de la Sécurité sociale, plus «un autre texte par session». Cet article permet au Premier ministre d’engager sa responsabilité sur un texte sans que le Parlement ne puisse déposer d’amendement. L’opposition dispose alors de 24h pour déposer en réponse une motion de censure, qui si elle est votée, provoque la démission du gouvernement."

Combien de tonnes d'amendements stupides qui sont autant de mesures dilatoires et tacticiennes purement politique dans l'hémicycle sans autres buts autres que de freiner le travail de réforme du gouvernement? Un acte de démocratie.

"Le Parlement

Jusque-là représentés uniquement pas des sénateurs, les Français de l’étranger auront également des députés. Le nombre de sénateurs passe à 348, contre 331 actuellement. La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l’action du gouvernement.

Hormis le budget, les projets et propositions de loi examinées en séance sont celles adoptées par les commissions parlementaires, et non plus par le gouvernement. Il y aura «une séance au moins» de questions au gouvernement par semaine, même durant les séances extraordinaires.

L’Assemblée nationale et le Sénat maîtrisent chacun la moitié de l’ordre du jour, c’est-à-dire les textes qui vont être examinés. Une fois par mois, c’est l’opposition qui fixe entièrement l’ordre du jour.

Dans chaque assemblée, le nombre de commissions permanentes passe de six à huit.

En cas d’engagement des forces armées à l’étranger, le Parlement est informé dans les trois jours. Mais il ne peut pas voter sur la question avant 4 mois, où il autorise ou non la prolongation de l’opération.

Le président de l’Assemblée peut soumettre une proposition de loi au Conseil d’état, qui rend un avis."

Où est le problème?

"Europe

La nouvelle adhésion d’un Etat à l’Union européenne est soumise soit à référendum, soit à approbation des 3/5e du Parlement réuni en Congrès.

Participation des citoyens

Création d’un défenseur des Droits, nommé pour 6 ans par le président de la République, qui recueille les «réclamations» des personnes s’estimant lésées par un service public. Ses pouvoirs seront définis ultérieurement par la loi.

Un référendum d’initiative populaire peut être organisé à par 1/5e des membres du Parlement, soutenus par 1/10e des électeurs.

Le Conseil économique et social pourra être saisi par le biais d’une pétition citoyenne. Il avise ensuite le Gouvernement et le chef de l’Etat.
Tout citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel, après que le Conseil d’Etat ou la Cour de Cassation l’a jugé utile."

Excellent, si ça ce n'est pas une avancée significative du Droit des personnes face aux institutions toutes puissantes ...

"Principes

Reconnaissance de l’appartenance des langues régionales au patrimoine de la Nation, égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. Enfin, la loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation."

Pareillement, Bayrou devrait-être plutôt content en prime.

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