Ça y est c’est fait ! Nous avons enfin rempli notre engagement n°6 pour faire mémoire de Michel Serres. Pour cette première des Rencontres Philosophiques Michel Serres sur la thématique « les 5 sens », je suis particulièrement fier de cette réussite culturelle qui a su toucher les grands comme les petits, d’Agen et d’ailleurs. Nous renouvèlerons ce moment de partage convivial et particulièrement instructif. Vous pourrez retrouver ci-dessous le discours que j’ai pu prononcer à l’occasion de l’inauguration Vendredi soir :
Chère Hélène, Cher Jacques, Cher Jean-François, chers amis membres de la famille de Michel Serres,
Monsieur le président de l’association des amis agenais de Michel Serres, cher David et tous les membres de votre association, Cher Pierre Chollet qui a présidé la commission municipale Michel Serres, le lieu où sont nés et où ont été travaillés toutes les propositions et tous les différents chemins de mémoire de Michel, Chers amis d’Agen et d’ailleurs qui ont répondu à notre invitation.
Je salue chacune et chacun d’entre vous, je vous souhaite chaleureusement bienvenue à Agen et vous remercie pour ce que nous allons vivre ensemble pendant cette fin de semaine.
Michel Serres est avec nous ce soir, merci aux organisateurs pour ce beau portrait qui nous accompagnera pendant tout le festival. Dans ce théâtre qu’il aimait tant, dans cette ville qu’il aimait tant.
Je le revois sur cette scène, le 8 mars 1991. Après son élection à l’Académie Française, il nous faisait l’honneur de partager avec tous les agenais un magnifique texte intitulé « Terre et eau : de l’exil à l’émigration ». Je l’entends encore nous dire « je n’ai jamais mangé que le pain dur de l’exil ».
Cette journée du 8 mars restera pour tous les agenais comme une journée exceptionnelle et ce soir, j’ai une pensée toute particulière pour le Docteur Paul CHOLLET, qui, en tant que Maire d’Agen et en tant qu’ami intime, avait organisé un hommage à la hauteur de Michel SERRES.
Comment sont nées ces rencontres philosophiques Michel Serres d’Agen ? Il n’est pas inutile de raconter leur jeune histoire.
Tout commence par une parole donnée : « La Ville veillera à faire mémoire de toi ». Tel était l’engagement solennel que j’ai pris lors des obsèques de Michel le 8 juin 2019 à la Cathédrale d’Agen.
« Nous ferons mémoire de notre illustre agenais Michel Serres en s’appuyant sur les propositions émises par la commission municipale présidée par Pierre Chollet ».
Tel fut en conséquence, l’engagement n°6 de notre programme de mandat, sur lequel la municipalité d’Agen que j’ai l’honneur de conduire, s’est fait élire en mars 2020. Et comme vous le savez, nous ne badinons pas avec le concept de programme municipal. C’est pour nous un véritable contrat citoyen qui nous lie au peuple agenais.
Nous nous sommes donc mis au travail pour tenir parole, pour mettre en œuvre cet engagement de « faire mémoire de Michel ».
Et comme parfois les élèves un peu indolents nous avons commencé par le plus facile.
Le plus facile, c'était la toponymie d’Agen. C’était de mobiliser le pouvoir régalien de la municipalité de baptiser selon sa volonté un certain nombre de nos lieux emblématiques du beau nom de « Michel Serres ».
Agen s’est donc donnée une avenue Michel Serres, un campus universitaire Michel Serres, notre commune sœur d’Estillac a baptisé son école Michel Serres. Avec nos collègues du Passage d’Agen, le 1er juin dernier, nous avons baptisé la Passerelle qui enjambe Garonne au niveau du Gravier, qui était sans nom, comme si elle attendait d’être adoptée par Michel.
Nous devions le faire et nous sommes fiers de l’avoir fait. Ces noms de baptême répandus à travers la ville ne sont pas là par hasard. Ils renvoient à Michel le professeur, à Michel l’enfant de Garonne… chaque fois, à un de ses multiples talents ou à une des pages de sa belle vie.
Mais, le plus dur restait à faire !
Le plus dur, c’est de transformer la mémoire d’une personne et de son œuvre, en une nourriture, une source de conviction, d’inspiration dans nos parcours de vie personnels, pour nos politiques publiques et nos engagements citoyens.
La commission municipale présidée par Pierre Chollet s’est saisie de ce défi à la fois par fidélité filiale mais aussi parce que nous sommes convaincus que notre époque a besoin de ces instants profonds de respiration collective. Merci Pierre, à toi et aux membres de la commission pour votre travail fondateur.
Petit à petit, les rencontres philosophiques Michel Serres ont pris forme autour de quelques idées fondatrices.
La première est que chaque édition de ces rencontres, chaque rendez-vous annuel, renverrait à une ligne force de la pensée de Michel Serres.
Je trouve très belle l’idée de David Djaïz de commencer par les Cinq Sens dans cette année de sortie du Covid où toutes nos perceptions et notamment celle du goût et de l’odorat ont été bousculées par la pandémie.
Leur disparition, ne serait-ce que ponctuelle, nous faisant enfin prendre conscience du trésor d’émotions qui passait par ces chemins-là.
Je suppose qu’après les Cinq Sens viendra l’année « Contrat Naturel » où nous confronterons la pensée de Michel aux impératifs écologiques de notre période. Et puis l’année « Petite poucette » pour nous donner une boussole dans la révolution numérique qui déferle sur nos vies tous les jours plus fortement et au milieu de laquelle il faut bien reconnaître que nous sommes souvent désorientés.
Idée fondatrice aussi de confier la responsabilité, la propriété intellectuelle de ces rencontres à David Djaïz et à sa belle équipe des amis agenais de Michel Serres. Merci David d’avoir accepté ce travail, toi qui n’en manques pas.
Je le dis ce soir avec émotion : la dernière fois que j’entends la voix de Michel, c’est en mars 2019. Je suis sur les pistes de ski du Beaufortain à côté d’Albertville. Michel me remercie de lui avoir envoyé mon livre « Agen au Cœur » et il me demande expressément tes coordonnées après avoir lu le texte que tu avais gentiment écrit pour ce livre. Nous parlons de toi et il y avait dans la voix de Michel comme la volonté de te reconnaitre comme un de ses héritiers intellectuels, de surcroît fils d’Agen comme lui, à qui il voulait de manière un peu personnelle, transmettre…
Merci donc au 15 d’Agen et de David, membres de l’association, à nos partenaires institutionnels et privés mais aussi aux intervenants illustres que nous sommes heureux et honorés de recevoir à Agen : Etienne Klein, Raphael Einthoven, Brigitte Labbé et tous les autres…
Agen vous salue, Agen est honoré par votre venue. Agen est heureuse de venir débattre de manière libre et contradictoire avec vous. Nous avons d’ailleurs la passion ici de ce débat à la fois contradictoire et respectueux.
Pensez, en venant à Agen, à notre voisin toulousain Claude Nougaro qui disait du rôle de la parole dans le Sud-Ouest « ici on se traite de con à peine qu’on se traite. Ici même les mémés aiment la castagne ».
La Ville d’Agen ne sera jamais très loin de vous chers amis agenais de Michel Serres. Elle sera là pendant tout ce mandat fidèle dans ses engagements, y compris financiers. Je vous l’ai dit : nous ne badinerons avec notre engagement de faire mémoire de Michel Serres.
Elle sera là aussi pour participer à la réflexion et à l’amélioration permanente de ces rencontres. Chaque année, fais confiance à son maire, cher David, nous discuterons pied à pied du thème à retenir, des lieux à faire vivre, bref de la manière dont nous ferons mémoire de Michel.
Oui, organiser des rencontres philosophiques à Agen est à la fois une prise de risques et un défi. Le défi, c’est de pouvoir réfléchir ensemble, de pouvoir débattre ensemble, de manière contradictoire mais aussi respectueuse et bienveillante vis-à-vis de l’autre. Et cela nous fera du bien à chacune et chacun d’entre nous d’entendre autre chose qu’un débat hystérisé et manipulé. Agen, terre de modération, radicale, fille de Montesquieu et de Montaigne, est à sa place en portant cette belle ambition démocratique.
« Le savoir rend libre », ce bout de citation de Michel Serres claque comme une volonté de la Ville d’Agen et c’est très bien comme cela. Mais la citation complète de Michel, et ce soir j’enfile bien volontiers les habits du gardien du temple, c’est : « Le savoir rend heureux, le savoir rend libre ».
Je suis sûr que dimanche soir, lorsque nous nous retrouverons pour faire un premier bilan de ces rencontres, nous aurons vécu ensemble un moment de bonheur et un moment de liberté profonde.
Très bonnes rencontres philosophiques d’Agen à chacune et à chacun d’entre vous !
Vive Michel Serres !
Vive Agen !