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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Petite histoire des Primaires en France

Publication : 10/10/2016  |  08:43  |  Auteur : Webmaster

Un drôle de débat est en train d’enflammer la primaire de la Droite et du Centre. Il porte sur celles et ceux qui auraient la légitimité pour voter…..et celles et ceux qui ne l’auraient pas.

Alors, comme nous ne sommes pas tout à fait tombés de la dernière pluie, nous voyons bien les intérêts tactiques des uns et des autres et notamment des deux compétiteurs qui font la course en tête : l’équipe « Sarkozy» a besoin d’un corps électoral réduit, le plus à droite possible et ouvert à l’électorat du front National et celle de « Juppé » – que je soutiens – espère un corps électoral élargi, bien planté sur ses deux jambes, une à droite et l’autre au centre, avec les bras ouverts aux électeurs de gauche assez motivés…pour venir participer à cette primaire. 

Très bien pour la tactique, mais sur le fond que penser de ce débat, qui mérite que l’on s’y arrête ?

Un peu d’histoire politique pour retracer comment on en est arrivé…à ces primaires.

Tout commence en 1958, avec la constitution de la Vème république et sa révision en 1962 qui décide de l’élection du Président de la République au suffrage universel. Cette élection se déroule en deux tours, le 2ème tour voyant s’affronter les deux candidats arrivés en tête au 1er tour.  Le Général de Gaulle, inspirateur de cette réforme constitutionnelle fondamentale s’est expliqué sur cette disposition clé. Elle a pour but de rendre le Président légitime puisqu’élu par une majorité de français.

Dans l’esprit de la Vème république, l’élection présidentielle doit permettre la rencontre directe de femmes ou d’hommes candidats avec le Peuple souverain. Remarquons tout de suite que cette rencontre directe marginalise le rôle des partis politiques dans la désignation des candidats.

Et au début, ça marche bien. Nous sommes en peine guerre froide. Le clivage droite-gauche est très fort. L’extrême-droite, déshonorée pendant la 2ème guerre mondiale est inexistante. Repassons dans nos mémoires le film des 2ème tours des présidentielles : 1965 : De Gaulle-Mitterand ; 1969 : Pompidou-Duclos ; 1974 : Giscard-Mitterand ; 1981 : Mitterand-Giscard, 1988: Mitterand-Chirac

A chaque élection, le premier tour permet de faire émerger les champions de la droite et du centre d’une part et de la gauche d’autre part qui s’affrontent pour la victoire finale au 2ème tour.

Pourtant, en 1995, pour la première fois, les français vont entendre parler de primaires. Mais c’est à l’intérieur du Parti Socialiste qui va faire voter ses militants pour désigner son candidat. On parle alors de Primaire fermée. Lionel Jospin y bat Henri Emmanuelli : 65% à 35%…seuls 79 000 militants socialistes dument encartés participent au vote. Mais, la dynamique démocratique des primaires est lancée. Rien ne l’arrêtera.

Et ceci d’autant plus que lors de l’élection présidentielle de 2002, un coup de tonnerre ébranle la vie politique française : pour la première fois depuis que l’élection présidentielle est au suffrage universel, une des deux grandes coalitions de gouvernement (PS+PCF, LR+centre) est éliminée du second tour de la présidentielle, le candidat de l’extrême-droite (Jean-Marie Le Pen, 16,86%) dépassant celui du Parti socialiste (Lionel Jospin, 16,18%). Une des raisons de son élimination est clairement la division de la gauche en 5 candidatures distinctes : Jospin, Taubira, Mamère, Hue, Chevènement…

Désormais, depuis 2002, pour la gauche comme la droite, avec la montée pérenne du Front national, ne pas se diviser au 1er tour de la primaire devient une ardente obligation.

En 2007, le Parti Socialiste organise encore une primaire fermée (178 000 votants) qui investit Ségolène Royal comme sa candidate…

Mais en 2011, en prévision de la présidentielle 2012, le parti socialiste, sur proposition de son secrétaire à la rénovation de la vie politique, Arnaud Montebourg,  décide de passer d’une primaire fermée (réservée à ses seuls adhérents) à une primaire « ouverte » à tous les citoyens.  Celle-ci, avec plus de 2,9 millions de voix, est un succès populaire et une vraie innovation démocratique. Elle est aussi une vraie rupture avec la primaire fermée. On passe en effet d’un corps électoral réduit (primaire fermée PS 2007 : 178 000 personnes), mais incontestable (adhésion au PS) à un corps électoral beaucoup plus large (primaire ouverte PS 2012 : 2, 9 millions) mais contestable (les électeurs de droite ou d’extrême gauche sont-ils venus fausser le vote ?)

La droite, par essence plus bonapartiste et plus gaulliste, est d’abord hostile à l’idée de primaire, mais elle va suivre en modifiant les statuts des Républicains en 2015 qui imposent la primaire ouverte comme mode de désignation du candidat Républicain à l’élection présidentielle…car, sur le fond, la montée de l’extrême droite et l’exigence de modernisation de la vie politique lui posent le même défi qu’à la gauche.      

En mettant en perspective ce long chemin vers les primaires ouvertes, on voit bien ce qui les a rendus inévitables à gauche comme à droite : notre Constitution et son deuxième tour en forme de finale, la montée d’une extrême droite politiquement monolithique (le FN) aujourd’hui sûre (?) de se qualifier pour le 2ème tour de la Présidentielle, le fait que les partis politiques soient devenus de « petites choses » avec un nombre d’adhérents en chute libre, le désir de modernisation de la vie politique impliquant un grand nombre de citoyens…

Reste qu’il est difficile d’avoir le beurre d’une primaire fermée (un corps électoral incontestable) et l’argent du beurre (un corps électoral élargi)…. et il est vrai que la formule telle qu’elle est mise en œuvre en 2016 permet des participations « étrangères » à la famille politique organisatrice et que la signature des chartres d’adhésion aux valeurs fondamentales de cette famille est une protection bien légère contre ce genre d’intrusions….

La formule actuelle est donc à améliorer. Peut-être nous faudra-t-il regarder vers les primaires Américaines, pays inventeur du concept même des primaires. Car celles-ci se sont enracinées dans notre vie politique pour des raisons de fond. Elles y sont pour longtemps. A nous de faire avec.

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Les réactions

Je partage l'analyse. Nul doute que la formule des primaires évoluera à l'avenir. Une petite erreur à signaler : en 69, G. Pompidou affrontait au second tour A. Poher, ce qui avait conduit le communiste J. Duclos à qualifier cette alternative de "bonnet blanc ou blanc bonnet" et d'appeler ainsi à l'abstention.

Analyse ou plutôt constat bien "primaire"!!!'

Bonjour,

Merci pour cet article 

Nous pouvons peut-être vous aider : http://laprimairedesfrancais.fr/

Bonne découverte !

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