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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Chronique d’une journée peu ordinaire à Bruxelles

Publication : 12/12/2010  |  23:17  |  Auteur : Jean Dionis

J’ai hésité lorsque Nicolas mon assistant parlementaire parisien me proposa de participer au voyage d’Etudes du bureau de la Commission des affaires économiques à Bruxelles avec pour thématique , L’énergie et la politique agricole commune et puis je me suis décidé à investir ,et sur Bruxelles, et sur la nouvelle Pac(Politique Agricole Commune). La perspective de pouvoir rencontrer personnellement Dacian Ciolos, le commissaire en charge de l’agriculture et de le sensibiliser, par exemple, au pruneau d’Agen m’aida à faire le bon choix.

Me voilà donc parti de bon matin avec mes collègues du bureau de la commission : Gare du Nord, Thalys Paris-Bruxelles, accueil par F.Baron, administrateur de l’Assemblée Nationale détaché à Bruxelles…..et début de notre journée Marathon.

Première visite de la journée, avec M.Lowe, directeur général de l’Energie, un anglais d’une soixantaine d’années, parlant un bon français et qui sait faire bouger les choses, sans illusions, mais sans cynisme non plus.

Premier constat en écoutant M.Lowe: Le fameux objectif européen « 3Xfois 20 en 2020» ne sera pas atteint en ce qui concerne l’efficacité énergétique (les économies d’énergies). L’Union Européenne en sera uniquement à 8 et 9% d’économies d’énergie. Les économies d’énergie seront donc une priorité de l’Union Européenne pour les années à venir. Et pour cela, il ya une nécessité absolue de s’intéresser au parc ancien de logement pour les économies d’énergie.

La deuxième priorité de l’Union Européenne, en matière énergétique, est clairement le développement des grandes infrastructures d’interconnexion. Les priorités sont :l’ Axe Nord-Sud pour le gaz comme pour l’électricité, la connexion France-Espagne faisant partie de cette priorité tout en reconnaissant qu’il ne sera pas facile de les faire accepter par les populations locales traversées par ces infrastructures,

Le reste du discours est connu : Injecter plus de concurrence, dans le marché de l’électricité et pour cela, plaidoyer pour l’indépendance de la gestion et de l’investissement des réseaux, énergies renouvelables devant faire preuve de leur rentabilité le plus vite possible, etc..

Le discours se fait même un peu contradictoire sur la conclusion entre « L’Europe a 12 ans de retard. Il faut se réveiller ! » et « Pas d’accélération du calendrier pour respecter les débats nationaux sur leur propre mix énergétique ». Je pose à M.Lowe une question simple : « Qui paye les grandes infrastructures ? » Réponse embarrassée de M.Lowe . J’en sors avec une conviction simple : L’Union Européenne et les Etats nationaux n’auront pas d’argent pour construire les grandes interconnexions énergétiques dont l’Europe a besoin. La parole et le pouvoir resteront donc pour longtemps aux grands opérateurs énergétiques (EDF, Gasprom, etc….°

Après un déjeuner studieux avec les experts sectoriels de la représentation de la France à Bruxelles et une réunion sur la pêche avec une jeune et jolie députée européenne portugaise, nous voici au fameux bâtiment de la commission européenne tel que nous le voyons à la télévision pour une réunion avec Dacian Ciolos, commissaire en charge de l’agriculture et du développement durable. C’est clairement le « sommet de notre journée » d’abord parce que nous sommes reçus directement par le commissaire (après que Michel Barnier, commissaire français au marché intérieur, soit venu nous saluer) et parce que la PAC est actuellement en pleine refondation.

Dacian Ciolos est un Roumain, jeune (41 ans et il a été ministre de l’agriculture de son pays à 38 ans !), parfaitement francophone et manifestement francophile. C’est un ingénieur agronome, formé en France . Enfin, un commissaire européen à l’Agriculture qui connait et aime l’agriculture et celles et ceux qui la font vivre. Il va rester avec nous plus d’1h 30 en sachant animer un dialogue passionnant.

Il nous parle d’abord objectifs politiques de la nouvelle PAC et en met clairement deux en avant:
• D’abord adapter la politique commune pour donner plus de stabilité et de visibilité aux agriculteurs européens
• La rendre plus compréhensible pour l’ensemble des européens

Il nous présente ensuite l’architecture de la nouvelle PAC telle qu’elle sera sans doute présentée par la Commission Européenne (qui dans le fonctionnement européen a le monopole de l’initiative législative) en Juillet 2011.

En guise de conclusion à cet exposé préalable, un avertissement : « Dans cette Europe à 27,il y a une commission où il n’y a pas de majorité pour une régulation des marchés agricoles et une opinion publique majoritaire qui n’est pas forcèment favorable à l’agriculture et je dois savoir amener et l’une et l’autre à des positions plus positives . Sachez que je rame souvent contre le vent et contre le courant, mais il faut que je fasse attention à ne pas casser les rames. »

S’ensuit une série de questions de notre délégation sur l’élevage, sur le tabac,sur la libéralisation des AOC. Quant à moi, je pose à Dacian Ciolos deux questions : la première sur le montant du budget agricole de la PAC après la réforme, la deuxième sur le pruneau d’Agen où j’ai demandé comment allaient être pris en compte les problèmes spécifiques de certaines régions très spécialisées comme la nôtre (la filière du pruneau pèse 11 000 p ) et notamment la faculté d’octroyer un soutien couplé le temps de la mise en œuvre de plans nationaux de productivité.

A chacune de nos questions, Dacian Ciolos, Le commissaire s’efforça de répondre avec conviction et précision.
Oui, la régulation n’a pas de soutien politique au niveau européen.ni au Conseil, ni au collége des commissaires.
Oui, il y a un besoin de rendre souple et régionale la politique d’intervention. Les besoins de la Roumanie n’ont pas grand-chose à voir avec ceux de la France
Oui, l’Union a la volonté de mise en place de revenu minimal assurantiel pour les agriculteurs
Non, Pour la vigne, il n’y aura pas de réouverture du dossier de la vigne et la fin du système des droits de plantation est bien programmée en 2015, avec une prolongation prévue jusqu’en 2018 par les Etats-membres.
Oui, Il y aura bien suppression de la référence historique pour les paiements directs (et tant mieux ! ce n’est pas moi qui pleurerais la disparition de ce système absurde !)
Quant à mes deux questions personnelles, il se fit encore plus précis :
Sur la question du budget de la PAC, plus personne aujourd’hui ne parle de baisse substantielle de celui-ci, mais il faut être clair. Les Etats Européens ne peuvent vouloir le beurre et l’argent du beurre, en clair, une hausse du budget de la Pac et une baisse de leur contribution au budget de l’Union. Et pour être plus précis : Soit le budget de l’Union sera maintenu à 1% du PIB européen et la conjoncture nous offrira 2% de croissance, soit il y aura un recul limité mais certain du budget PAC. A bonne entendeur, salut !

Quant au pruneau d’Agen, oui il peut être envisagé un couplage dans le cadre de l’article 68 qui sera d’ailleurs géré par l’Etat National dans le cadre d’enveloppes fixées au niveau européen. Cette réponse me satisfaisait pleinement. J’ai pris les coordonnées des membres du cabinet du commissaire. Je saurai m’en resservir.

Dernières réponses réservées sur la proposition d’utilisation de la fiscalité nationale pour financer la tabaculture française.et sur les interprofessions , perçue par le commissaire comme une spécificité française. Mais si elles interviennent dans la fixation des prix, elles seront forcément, selon lui,

L’entretien se termine. Nous enchaînons trois autres entretiens avec la COPA COGECA, Confédération générale de la coopération agricole, voix des syndicats agricoles à Bruxelles, avec Via Campésina , voix alternative ….et avec M.P.Etienne, représentant permanent de la France dans l’Union Européenne. La lassitude aidant, notre attention baisse…..

Le temps de boire une (bonne) bière et de manger quelques tartines belges à la « Mort Subite » à Bruxelles, je retrouve avec beaucoup de plaisir A.Rogalski, mon ancien assistant parlementaire, qui poursuit une brillante carrière de fonctionnaire européen (il va participer à la Présidence polonaise au sein du cabinet du ministre polonais des affaires européennes !)

Thalys retour, ralenti par la neige…..Paris complètement perturbé par 4heures de chute de neige, les mêmes discussions de café de commerce sur notre impréparation à l’hiver. Je n’écoute pas. Je pense à l’Europe, dont j’ai tant rêvé, parlé, pour laquelle, je me suis battu politiquement. L’Europe de mon idéal de militant politique et celle que j’ai rencontrée – j’allais dire en chair et en os – aujourd’hui à Bruxelles. Et bien oui, je vais vous surprendre : Que d’écart entre le rêve et la réalité, c’est vrai !, mais j’aime cette Europe réelle, technocratique, oui, mais comment faire autrement pour faire face à la complexité de vivre ensemble à 27 nations !J’aime cette Europe fragile, complexe, parfois exaspérante ! Elle continue à porter nos espoirs dans ce monde d’aujourd’hui à la fois riche en opportunités et si dur pour les plus fragiles d’entre nous !


@+

Les réactions

réaction personnelle

Je suis un fan de ton blog et sans me déplacer je me "plonge" à fond dans la lecture des lettres dinformation parfois les relisant pour bien m'en imprégnier.Je sens bien le défenseur d'une Europe que tu trouves fragile, complexe, parfois exaspérante(je te cite); je suis depuis le début un européen convaincu, et ceux qui préconisent de sortir de l'Euro, je leur dis casse cou; pauvre France si nous revenions au Franc, les dévaluations successives lorsque j'étais banquier faisaient que j'avais les cheveux qui se hérissaient et je pensais au pouvoir d'achat de mes clients et des autres français comme moi.ce serait une aberration et un "suicide";c'est une Europe soudée, solidaire qui doit se développer avec l'adhésion complète de tous les Etats membres ( y compris l'angleterre et les autres)avec comme monnaie unique l'euro fort .Merci Jean pour nous tenir informés et félicitations pour ton dévouement à la cause que tu défends.

Un coup de pouce par ci, un coup de pouce par là...

L'implication de Jean Dionis est un précieux atout pour le secteur du pruneau, qui subit une douche froide après avoir vécu plus de trente ans sous le parapluie protecteur de Bruxelles. Pour compliquer les choses les pruniculteurs et les industriels vivent cette année une tourmente conjoncturelle qui fait partie des dégâts collatéraux, sans doute nécessaires, du brutal ajustement. Plus que jamais nous avons besoin d'élus et de gens qui nous accompagnent et nous soutiennent dans nos efforts pour lever le nez du guidon et reconstruire un avenir digne du prestige de cette production.
La visite de Jean à Bruxelles, avec sa question bien ciblée au Commissaire, est un jalon de plus dans ce sens. Après Bruxelles, l'essentiel de notre avenir se jouera au niveau national, et déjà les contacts les plus positifs sont engagés avec Bruno Le Maire. Merci.

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