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Les réflexions d'un élu engagé au service de sa ville et de son territoire

Adieu à Michel Serres

Publication : 03/06/2019  |  15:42  |  Auteur : Jean Dionis

J’ai failli dire « Adiu, Michel » comme un dernier clin d’œil malicieux à ton patriotisme du Sud-Ouest.

Mais je te connais assez pour savoir que ta patrie linguistique, ton combat et tes amours littéraires, c’est la langue Française……j’ai encore en mémoire ta réponse cinglante alors que je te proposais d’être le parrain de notre festival municipal, le très célèbre Pruneau show.

« Jamais ! »  m’avais-tu répondu, sèchement ;  « Jamais ? mais pourquoi ? » avais-je résisté.  Et la sentence définitive tomba « parce que ton nom de festival est franchement nul, Jean, du franglais de bas étage …. » 

Pour Michel, pas question de badiner ni avec le Français, ni avec la  signature d’Agen.

Pour reprendre un peu la surprise totale de Charles Péguy devant les vertus théologales, la science encyclopédique de Michel, cela ne m’étonne guère. C’est tout simplement, l’excellence et le talent Agenais portés jusqu’à cette pointe rare et incandescente que l’on appelle le génie.

Son optimisme, sa bonne humeur communicative, son humour gascon, cela ne m’étonne pas non plus. Après tout, il marche dans les pas des meilleurs d’entre nous se ralliant au panache blanc d’Henri de Navarre et de Nérac…   

Ce qui m’étonne, ce qui me bouleverse, chez Michel, c’est la fierté d’être Agenais, cette fidélité agenaise à toute épreuve d’un adolescent qui quitta Agen à dix-huit ans pour préparer l’Ecole Navale et aller vers les sommets atteints dans son parcours de vie et qui n’y revint, en tant qu’adulte, que ponctuellement et brièvement. Michel Serres a vécu comme citoyen d’Agen et comme citoyen du Monde. Cette double citoyenneté, voilà ce qui m’étonne et me bouleverse…

Depuis l’annonce de son décès, je lis avec fierté et tristesse les réactions de ses pairs, académiciens, philosophes, penseurs et je partage avec eux leur analyse de l’œuvre considérable de Michel Serres. 

Oui, Michel est un géant de l’histoire des Sciences et, plus largement, du discours sur les sciences, de l’épistémologie et plus spécialement des sciences de la communication. La profondeur de sa pensée lui a fait comprendre, bien avant tout le monde, qu’Internet changeait tout et ce fut la naissance de la Petite Poucette, formidable parabole des transformations en cours chez l’homme numérique.

Oui, Michel, avec « le contrat naturel », a participé aux fondements de la pensée écologiste. Mais, il l’a toujours fait avec un optimisme raisonnable, en défendant toujours le présent (et l’avenir…..) contre  les zélateurs du passé, en nous épargnant à la fois les vieux oncles ronchons (« c’était mieux avant »……tu parles !) et les prophètes de malheur et de fin du monde.

Toute cette œuvre de Michel Serres, depuis samedi soir, elle est devenue le bien commun des citoyens du monde.    

Mais, pour nous, Agenais, Michel Serres nous parle de manière privilégiée de l’identité Agenaise.

Michel nous rappelle qu’elle est indissociablement culturelle et géographique.

Identité culturelle d’abord : Ecoutons-le nous dire avec une emphase toute gasconne : «  Je suis d’Agen par le XV d’Agen, c’est mon totem, moi et mon appartenance, mon groupe et moi ensemble, notre religion, notre histoire et nos Dieux ! »  

Identité géographique enfin et surtout : j’ai encore dans les yeux et le cœur notre promenade un jour d’hiver sur les berges de Garonne. Pour lui, Agen devait fermer au plus vite la parenthèse de la voie sur Berge, qu’il n’aimait pas parce que coupure du lien fusionnel entre Agen  et sa matrice. Lui, plus que tout autre, a construit mon regard sur Garonne, chance à jamais pour Agen, mère source de vie et non pas, comme on veut nous le faire croire, danger de tous les instants.

Et maintenant, après son départ ?

 D’abord lui dire Adieu, à Agen, ensemble, le samedi 8 Juin à 15 h en la Cathédrale Saint-Caprais, à deux pas du lycée Saint-Caprais fréquenté par Michel,  avec ferveur et avec sobriété lui pour qui « Dieu est notre pudeur ».

Ensuite, nous veillerons à faire mémoire de lui à Agen dans sa ville au-delà de l’Avenue et du Campus qui portent fièrement son nom. Cela mérite un travail collectif consensuel. Nous le démarrerons sans tarder.

Enfin et surtout, nous le lirons et sa pensée fera de nous des citoyens d’Agen… et du Monde.

Les réactions

 Merci  - beau message pour un grand homme -

Merci pour ce bel hommage à Michel SERRES, lui qui n'a jamais oublié sa ville, son département, sa région. Son immense culture, sa simplicité, son humanisme sont la fierté des Aquitains. Honneur à lui

Merci pour ce bel hommage . Je rajouterais ceci, car le coeur me le demande.  

Il était un Passeur incontournable, révélateur d'Eclaireurs au combien incroyables.  Il aimait la jeunesse et voulait certainement dans sa fin de vie se relier à elle plus fortement, la rassurer par ses propos optimiste. il aura donner jusqu'à son dernier souffle des conseils avisés délivrés avec humour et bienveillance pour nous donner envie de le suivre et essayer de le comprendre.  Il espèrait un Avenir plus humaniste et responsable . Tous ses ouvrages sont des pistes à suivre , pour que chacun y trouve ce qui lui ressemble .... Aujourd'hui, cher Michel  vous allez enfin gouter à la possibilité de faire et penser à la vitesse de la lumière. Vous allez avoir accès à toutes les réponses fondamentales qui ont occupées vos existence terrestre. Bon voyage vers la plénitude cher Michel ...Nos pensées vous accompagne.

un bel hommage régional. Je me permets avec le coeur de rajouter ceci

Il était un Passeur incontournable, révélateur d'eclaireurs au combien incroyables.Il n'avait pas son pareil pour nous faire reflechir sur notre Avenir qu'il espérait plus humaniste et responsable. Il aimait la jeunesse . Il s'est relié à elle plus fortement dans sa fin de vie , pour la rassurer, délivrant des conseils avisés connotés d'humour pour nous permettre de le suivre et le comprendre. Tous ses ouvrages sont des pistes à suivre... Chacun peut y trouver ce qui lui ressemble ... Aujourd'hui , il peut  goûter au plaisir de faire et penser à la vitesse de la lumière et sûrement au delà. Je souhaite qu'il  ait enfin accès aux réponses fondamentales qui l'ont préocupées toute sa vie . Bon voyage vers la plénitude cher Michel, nos pensées vous accompagnent . 

Si Michel Serres avait voulu lanturlu !

 

Le 1er juin 2019 nous apprenions avec tristesse la disparition de notre compatriote, le philosophe Michel Serres. C’est une grande perte pour sa ville, Agen et bien au delà pour l’humanité.

 Si nous partagions les valeurs humanistes qu’il développait  dans ses ouvrages dont nous saluons le caractère riche et foisonnant, nous ne partagions pas son anglophobie chronique qui le poussait à préconiser la grève de l’anglais. Il ne se rendait pas compte qu’il faisait ainsi le lit de l’ultra nationalisme français qui va du Rassemblement national à la France Insoumise.     

 

Nous regrettons vivement que Michel Serres, ait abandonné sa langue maternelle l’occitan, celle du poète agenais Jasmin (1798-1864).

Pourtant il avait dit au grand écrivain occitan, Robert Lafont, dans un colloque organisé en 1985 sur "l'identité française" qu'il ne mourrait pas sans avoir écrit un roman en occitan. Peut-être l'a t-il fait et nous allons le découvrir à titre posthume. Qui sait ?

Nous ne pouvons pas nous empêcher de rappeler ce qu’il avait dit sur France Culture le 19 mai 2013 : « Il faut savoir ce que c’est qu’une langue vivante. Une langue vivante est une langue qui peut tout dire, et une langue qui ne peut pas tout dire est une langue virtuellement morte. Par exemple les langues régionales, comme le gascon, ou la langue d’oc, le breton, etc. sont virtuellement morte parce qu’elles ne peuvent pas tout dire. Elles ne peuvent pas dire la biochimie, les mathématiques, les techniques l’informatique, etc. bon, donc si à un certain moment on enseigne en anglais les disciplines considérées, c’est-à-dire les techniques, les sciences, etc. la langue française ne pourra plus tout dire… et par conséquent, elle sera virtuellement morte comme les langues régionales ».

Ce n’est vraiment pas digne d’un homme de ce niveau intellectuel. Avec tout le respect que nous devons à cet Agenais génial et à son œuvre, il dit n’importe quoi. Une langue, quel que soit son statut peut tout dire que ce soit le français, l’occitan ou le zoulou à condition qu’elle soit transmise et socialisée. Il ne saurait y avoir de hiérarchie entre les langues de l’humanité qui font sa richesse.

Il faut croire que Michel Serres avait mauvaise conscience de renier sa langue maternelle puisqu’il avait annoncé sur ARTE que son dertnier ouvrage « Morales espiègles » serait traduit en occitan :

https://www.arte.tv/fr/videos/084764-019-A/28-minutes-samedi/

 

Au lieu de se battre contre la soi-disant invasion de l'anglais en France, Michel Serres aurait été mieux inspiré de se mobiliser pour la diversité linguistique en France et notamment pour une place digne pour l'occitan chez nous, en Lot et Garonne et dans une trentaine d’autres départements du sud de la République française.

 

Michel Serres était influent. Il aurait pu rappeler aux Présidents de la République successifs ainsi qu’à tous les présidents des Conseils Régionaux et des Conseils Généraux de nos régions occitanes la nécessité impérieuse de « faire ratifier par la France la charte européenne des langues régionales et minoritaires ».

 

Il aurait pu aussi user de son influence auprès de tous les courants d’opinion représentés à l’Assemblée Nationale afin de faire voter une loi de protection et de promotion des langues dites régionales.   

 

Monsieur Michel Serres était pour la maitrise par le plus grand nombre des technologies de l’information : Pourquoi n’a-t-il pas proposé que l'occitan et les autres langues « régionales » soient enseignées dans toutes les écoles et aux adultes grâce à ces moyens modernes d’accès à la culture.

 

Au paradis des gloires agenaises, Michel Serres va retrouver Cortète de Prades et Jasmin qui l’attendent de pied ferme. Quelque chose nous dit qu’ils vont gentiment lui demander pourquoi il n’a rien fait et rien dit sa vie durant en faveur de la langue et de la culture occitanes et la discussion ne se passera pas en français. Juste retour des choses.

 

 

Mon admiration pour Michel Serres vient d être encore confirmée après avoir eu connaissance de son commentaire sur le pruneau show.Une douzaine d années à Saint Caprais et un demi-siècle aux quatre coins du monde m avaient conduit à porter un jugement identique.

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