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17/02/2011 - Neutralité du net : discours de Jean Dionis au cours des débats sur la PPL de C. Paul

Publication : 17/02/2011  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Discussion Générale

PPL Neutralité de l’Internet

Jean Dionis du Séjour, porte parole du groupe Nouveau Centre

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Chers collègues,

Le 17 décembre 2009, nous adoptions la loi relative à la lutte contre la fracture numérique. Loi importante mais pourtant nous étions restés assez évasifs sur une question jour après jour plus fondamentale : celle de la neutralité de l’internet.

Aussi je tiens au nom du groupe centriste à remercier le groupe SRC et notre collègue Christian Paul de nous permettre de lancer le débat sur le fond de cette question. Le développement des technologies numériques est intrinsèquement rapide et foisonnant et il convient aux politiques de s’en emparer.

Nous pensons que cette proposition de loi est complémentaire de la mission d’information de la commission des affaires économiques. Présidée par Corinne Erhel et rapportée par Laure de la Raudière, qui procède à ses travaux en ce moment même. Nous avons pu mesurer l’investissement qui a été celui de nos deux collègues lors de la présentation du pré-rapport en Commission, unanimment salué pour sa qualité.

Enfin, la Commission des lois et la Commission des affaires culturelles conduisent actuellement une mission d’information commune sur la protection des droits de l'individu dans la révolution numérique.

Je ne doute pas que l'ensemble de ces initiatives convergera prochainement versb une loi fondatrice du nouvel Internet du 21 ième siècle.

Justement, quel est-il cet Internet du début des années 2010 ?
Il n'est pas inutile de revenir sur la genèse de ce débat sur la Neutralité du Net.

Il apparaît aux Usa au début des années 2000 à la suite de conflits opposants des FAI à des câblo-opérateurs en situation de monopoles locaux leur permettant de privilégier leurs contenus par rapport à ceux transitant par les réseaux des FAI.

Tout autre est le contexte européen. Le déclencheur du débat en Europe est clairement l'explosion de l'Internet mobile et les perspectives de saturation sur ce réseau et l'une des critiques positives que nous adressons à la Ppl de notre collègue, c'est de ne pas avoir clairement analysé ce déséquilibre et proposer des réponses législatives daptés.
Aujourd’hui, l’internet qui se dessine, est un réseau qui va devoir répondre à un déséquilibre entre offre et demande. La saturation du réseau va nous demander de gérer ce réseau à l’image de ce qui est fait sur le réseau électrique : la gestion de la pointe sera LE problème de demain.

Tous sur ces bancs nous devons prendre conscience de cet enjeu fondamental.

Nous centristes, en tout cas, souhaitons un texte qui prend acte de ce besoin de gestion éclairé. Nous souhaitons clarifier les règles de gestion avec comme ligne directrice, l’équité et la non-discrimination sur le réseau.

Si cette question est grandissante, c’est que le débat autour de la neutralité du net tient pour beaucoup à l’augmentation constante des besoins de capacité (les prévisions sur l'évolution des besoins de capacité sur l'Intenet mobile sont d'une multiplication par 30 de la demande d'ici 2015 alors que dans le même temps la capacité de l'internet mobile ne serait au mieux multipliée que par 12) et ceci notamment du fait de la croissance exponentielle de la consommation d’images vidéo et de la multiplication des interfaces consommateurs (liseuses, smartphones, etc...)

You Tube annonçait dernièrement que les deux milliards de visionnage quotidiens de vidéo sur leur site représentaient plus de 160 millions d’heures visualisées par jour! Et ce chiffre a doublé en un an !
La pénétration croissante des Smartphones l’illustre à elle seule : l’explosion de l’internet mobile nous pousse à débattre rapidement de ces enjeux.
En effet, s’ils représentent encore 25% du marché, ils devraient atteindre 50% d’ici un an ou deux, avec le poids que cela représente pour le réseau internet.

Et l’amélioration des techniques ne nous exemptera pas de ce débat. Le débat est urgent car il s’agit d’une question économique mais aussi sociétale.

Alors, on ne peut plus dire sér ieusement : circulez, il n'y a rien à voir. Il faudra gérer et ceci plus rapidement que nous le pensons au moins sur l'Internet mobile.

Et dans cette perspective incontournable, nous avons été étonnés par un texte semblant répondre à une problématique posée de manière très restreinte.

Votre texte s’attache surtout aux fournisseurs d’accès au réseau. Or, si la neutralité d’un réseau renvoie à l’idée que toutes les données sont traitées et transportées de la même manière d’un point de vue technique d’un point A à un point B, la neutralité de l’internet ne saurait se réduire à un objectif de non discrimination dans l’acheminement du trafic sur le réseau Internet public.

En effet, la problématique est plus large en ce qu’elle renvoie aussi à la neutralité du réseau mais aussi des pratiques de la part du moteur de recherche, des éditeurs, des fabricants de terminaux, des opérateurs d’accès, etc.

Les FAI semblent être les seuls concernés par votre texte : soyons clairs, la PPL est trop centrée FAI.

Nous ne voyons pas dans votre texte se dessiner l'architecture d'avenir qui se décomposerait en un internet service universel, reconnu comme utilité essentielle et les services gérés proposés de manière commerciale par chacun des prestataires techniques de l'Internet.

Or, plus que des contraintes à poser aux FAI, c'est de cette architecture qu'il convient de parler? Quelle définition pour l'Internet service Universel? Quelle réglementation pour les services gérés pour éviter toute discrimination inacceptable? Voilà quel est le débat central. Or il est absent de votre proposition de loi et c'est d'abord pour cette absence que nous ne la soutiendrons pas alors même que les centristes font de la définition d'Internet comme service universel un de leurs combat majeurs pour les années à venir.

Il est, en effet, essentiel que nous, élus, préservions le formidable outil qu’est internet, et garantissions à l’ensemble des consommateurs un accès équitable à l’information, à la communication et à la culture.

Enfin, votre PPL est muette sur les enjeux de financement du déploiement des capacités nécessaires pour répondre à la demande croissante de bande pasante et plus largement de réseau. Quel partage de la valeur ajoutée à un moment où celle-ci est captée de manière prépondérante par les services (moteur de recherche, réseaux sociaux.....) s'appuyant sur les recettes de la publicité en ligne alors que les opérateurs voient leurs recettes relativement plafonner dans un modèle économique d'abonnement des usagers finaux.

Enfin, Cela pose la question des dispositifs de blocage et de filtrage de certains contenus. La Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique permet aujourd’hui à l’autorité judiciaire d’imposer aux prestataires techniques de l’internet de filtrer l’accès à certains contenus.

Dans l’article 4 de votre proposition de loi, chers collègues, vous prévoyez de restreindre les capacités d’envoi et de réception de données des abonnés, après accord explicite de l’ARCEP, dans un délai de 90 jours, ou en cas d’urgence sous 48 heures sur décision d’une autorité judiciaire compétence.

C’est une vraie question. Nous l’avons déjà abordée lors de la Loi Création et Internet. Et la réponse avait été claire : dans la décision du Conseil Constitutionnel, les juges ont considéré que l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) de 24 Juin 1789 (celui qui affirme que « la liberté des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme, tout citoyen peut donc parler, écrire et imprimer librement ») impliquait, aujourd'hui, la liberté d'accès à internet.

Le filtrage sous autorité judiciaire, voici la bonne perspective pour les centristes mais je ne m’étendrai pas davantage car vous connaissez l’engagement qui est le mien, constant depuis les lois davssi, hadopi et Lopssii 2. Je suis heureux de voir se créer sur tous les bance de ce parlement un consensus autour de la nécessité de faire appel à l'autorité judiciaire avant tout mise en oeuvre de filtrage des contenus. Cette Ppl sur ce poit participe heureuseement à la construction de ce consensus auquel nous vous appelons, M.le Ministre à participer.

Alors oui, les Centristes seront des militants de la neutralité du Net jusqu'à ce qu'elle trouve une traduction législative forte. Cela veut dire pour nous la reconnaissance dans tous les textes européens et français d'un internet de qualité comme service universel et utilité essentielle.

Cela veut dire aussi des services commerciaux gérés à l'initiave de chaque prestataires de l'internet selon des principes législatifs garantissant l'absence de discrimination inacceptable notamment sur la nature du contenu.

Les problématiques liées à l'économie numérique sont complexes et à évolution très rapides, elles sont donc par définition difficiles à appréhender par le législateur. L'évolution des débats parlementaires de la loi sur l'économie numérique en 2004 à la loi HADOPI en 2009 montre l'évolution croissante du poids politique de ces débats.

La Ppl de C.Paul a le mérite de lancer, dans notre hémicycle, ce débat majeur. Mais elle ne répond pas aux questions clès qu'il soulève.
La question posée ce jour est bonne.Mais la réponse est trop hative et partielle. Nous ne voterons donc pas cette PPL.

Je vous remercie.

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