Jumelages entre villes : Refondation impérative

Comme je vous le disais dans ma dernière chronique, après réflexion, j’ai décidé de poursuivre la rédaction de cette chronique hebdomadaire malgré ma défaite aux dernières élections législatives. Les électeurs d’Agen-Nérac ne m’ayant pas renouvelé mon mandat national, je me recentre sur Agen et son agglomération…..et la teneur de cette chronique suivra forcément ce recentrage. J’espère que ce changement de « point de vue » continuera à vous intéresser….

Et pour commencer, à l’occasion d’un de mes voyages récents à Dinslaken, une de nos cinq villes jumelles, je veux ouvrir avec la question des jumelages et autres coopérations décentralisées. Question secondaire, voire mineure ? peut-être, sauf à remarquer que les villes, départements et régions de France y consacrent des moyens financiers non négligeables et que les jumelages sont une grande et belle idée, qui mérite mieux que mépris comptable et utilitariste. Le jumelage de nos villes vient clairement de la volonté des militants pro-européens de l’après-guerre. Ceux-ci faisaient un constat sévère de ce qui s’était passait entre les deux guerres mondiales où les vœux pieux autour de « la der des Der » ou « du plus jamais ça ! » n’avaient pas pesé lourd contre les idéologies de haine et la montée des nationalismes …. Leur réponse politique, grandiose, à la hauteur du défi, fut la construction Européenne qui reste notre grand projet collectif.

Mais les Monnet, Adenauer, De Gasperi, De Gaulle bien sûr dans son style inimitable et toutes celles et ceux qui poussaient derrière eux, sentaient bien la nécessité, pour progresser sur le plan des relations internationales et pour apaiser durablement les haines et les rancœurs, de tisser des liens au niveau le plus élémentaire, la commune, et ainsi, d'établir des relations d'échanges étroits avec ses voisins. L'objectif initial consistait à échanger des connaissances, des expériences, du savoir-faire dans tous les domaines de la vie locale. Engager les populations traumatisées de cette Europe ruinée de l'après-guerre à fraterniser, relevait du défi. Les cinquante maires européens qui, en janvier 1951, fondèrent le Conseil des communes d'Europe devenu par la suite le Conseil des communes et régions d'Europe (CCRE) firent indiscutablement partie des pionniers d'une Europe unie et donc plus forte…..

Et Agen, dans tout cela ? et bien avec un peu de retard nous avons suivi le mouvement ….et nous nous jumelons successivement avec les Allemands de Dinslaken (Rhénanie-Westphalie), les Espagnols de Tolède(Région de Madrid), les Russes de Tuapsé(Crimée), les Gallois de LLanelli…..et les Américains de Corpus Christi (Texas). Les mobiles de ces mariages sont – comme nos épousailles personnelles- un mélange unique et cocasse de politique, de ressemblance (le rugby pour Agen et Llanelli), et de rencontres fortuites….et pendant 50 ans, Agen a beaucoup reçu et beaucoup donné dans des échanges passionnés avec ses 5 villes jumelles. Le moteur de ces jumelages était clairement politique – découvrir nos voisins et participer ainsi à l’aventure européenne – et linguistique, le jumelage étant aussi vu comme un support à l’apprentissage de la langue de nos voisins……

Bref, une belle histoire et un bel héritage ….sauf que les temps changent et que les mobiles initiaux, moteurs des jumelages, politique, linguistique, ont bien vieilli. Pour un Agenais de 30 ans, par exemple, l’Europe est aussi naturelle que la lumière du soleil….ou que l’Euro dans son porte-monnaie. Exit donc la motivation politique….. De même, l’apprentissage des langues a subi bien des bouleversements. Ici, à Agen, le double apprentissage de l’Anglais et de l’Espagnol rafle la mise et a provoqué un effondrement de la demande pour l’apprentissage de l’allemand au point de mettre en danger le travail de nombreux professeurs de cette discipline. Bref, nos jumelages ont vieilli et il est devenu urgent de les refonder, sinon….ils sont en danger rapide de marginalisation et disparition.

Et bien, avec nos amis Allemands de Dinslaken, nous sommes retroussés les manches et nous avons fait du bon travail pour moderniser notre jumelage.

Première idée centrale : moins de protocole, moins de voyage d’élus, plus d’échanges de citoyens Agenais et Dinslakeners…..Mis en œuvre, cela donne une priorité forte aux échanges scolaires, notamment aux apprentis, aux stagiaires en tout genre.

Deuxième idée : partir du désir de voyage, de tourisme et de culture. Nous voulons que les habitants de notre cité jumelle qui choisiront Agen comme destination touristique aient un accueil privilégié ….et des conditions commerciales tout aussi privilégiées. Nous avons aussi décidé de jumeler progressivement nos deux fêtes municipales : Pruneau Show et Din Tage ……

Troisième idée : se risquer à la coopération économique. L’export, c’est cher en temps et donc en argent pour construire un réseau commercial. L’ensemble des liens humains tissés à l’occasion du jumelage doit pouvoir faciliter et alléger cet investissement. C’est le beau pari que la Ville d’Agen et la CCI 47 ont tenté à Dinslaken les mardi 25 Juin et le Mercredi 27 Juin ..avec une belle sélection d'entreprises lot-et-garonnaises :Garrigues (constructions métalliques),Rougeline (Négoce fruits et légumes), Vitamont (jus de fruits bio), Georgelin (confitures de luxe)
Et bien après 2 jours de visites et réunions de travail, nous pouvons affirmer que : « oui, Il y a du commerce à faire entre Dinslaken, ville de la Ruhr et AGEN, Coeur de la moyenne Garonne! »

Ces trois pistes bien sûr n’épuisent pas le sujet passionnant de la refondation de nos jumelages. Toute refondation dépendra fortement de l’identité profonde des villes jumelées. Mais, la refondation, elle, est incontournable….Ne le vivez pas comme un pensum ennuyeux ! C’est un beau chantier pour ce début de 21 ième siècle !

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