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19/06/06 - Jean DIONIS intervient sur le Compte Administratif 2005 du Conseil Régional : "l'Aquitaine sur un petit vélo"

Publication : 19/06/2006  |  00:00  |  Auteur : Jean Dionis

Monsieur le Président,
Chers Collègues,

Je commencerai mon propos en bousculant une idée reçue à laquelle je veux définitivement tordre le cou : le Compte Administratif ne serait pas un document politique, le débat autour du Compte Administratif ne serait pas un débat politique. C’est faux. C’est très volontiers que l’UDF salue le professionnalisme de l’administration régionale. Mais il s’agit pour nous aujourd’hui de faire de la politique, de la politique régionale au sens noble du terme, non pas dans l’affichage mais dans le réel, qui est le domaine de prédilection d’un Compte Administratif, en répondant à une question précise : dans quelles conditions avez-vous réalisé votre budget 2005 ?

Alors, entrons justement dans le vif du sujet. Ce Compte Administratif 2005 est marqué par trois éléments significatifs, sur lesquels je vais m’arrêter successivement au nom du Groupe UDF :
1) Les dotations de l’Etat sont là ;
2) Vous avez peu dépensé ;
3) Vous avez augmenté en 2005 massivement les impôts, tout en continuant à désendetter.

1) Contrairement à vos allégations, les dotations de l’Etat sont au rendez-vous.
Je veux d’abord parler de la DGF, dont la part forfaitaire augmente correctement : de 220 à 226,3 millions d’euros (soit + 2,9 %) et dont la part péréquation progresse, elle, fortement de 7,9 à 11 millions (soit, excusez du peu, + 39,3 %)… voilà déjà un drôle de désengagement !
Je veux parler aussi des recettes dédiées au financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage : dotation de décentralisation au titre du transfert des primes d’apprentis (+ 5,5 millions d’euros), contribution au développement de l’apprentissage (qui correspond à une ressource nouvelle : + 9,6 millions d’euros), dotation de péréquation de la taxe d’apprentissage (+ 5,5 millions d’euros). Là, encore, les chiffres parlent. En 2004 : 345,8 M€ en dotations d’Etat, en 2005 : 371 M€, soit + 7,3%. En matière de désengagement de l’Etat on fait mieux.
Nous en arrivons à la cerise sur le gâteau : le financement des compétences transférées dans le cadre de la décentralisation. En 2005, cela correspondait, vous l’avez rappelé, aux formations et aux bourses dans les filières paramédicales et sociales, ainsi qu’à un domaine dont vous ne parlez d’ailleurs quasiment jamais mais pourtant bel et bien transféré, l’inventaire du patrimoine.
Eh bien, la compensation par la part régionale de la TIPP a eu lieu : 23, 2 millions d’euros, soit beaucoup plus que les 21 millions d’euros que vous aviez prévus. Le verrou constitutionnel a fonctionné. Tout le reste est littérature ou arguties, notamment quand vous cherchez à nous amener sur le terrain de la pluriannualité, en nous disant : « mais vous verrez, avec les années… les charges vont augmenter ». Ceci est une autre affaire : ce sera l’affaire de vos choix politiques. Ne mélangeons pas les torchons et les serviettes !
Votre discours, que nous avions annoncé comme mensonger, est donc sèchement démenti par les faits.
Pour le moment, vous avez reçu 23,2 millions et vous avez dépensé 23,5 millions : l’Etat a tenu parole sur la décentralisation, l’Etat a fortement fait évoluer à la hausse ses dotations.

2) Vous avez dépensé très peu ou l’Aquitaine, cuillère de bois de la dépense publique

Mes chers collègues, je vous propose de vous rendre à la page 74 du document.

Le deuxième élément qui retient l’attention à la lecture de votre document est le niveau de service rendu aux Aquitains… ou plutôt mal rendu aux Aquitains puisque vous dépensez moins que toutes les autres Régions, avec des dépenses réelles de fonctionnement qui tombent à 117 euros par habitant (soit 18% de moins que la moyenne des régions).
Et si on regarde par secteur (hors action économique), en fonctionnement et investissement consolidés (source DGCL, budgets primitifs 2005 des Régions), on s’aperçoit que vous dépensez moins quasiment partout.
Vous dépensez moins sur la formation professionnelle : 21,6 euros par habitant en Aquitaine. Moyenne des Régions (métropole hors Ile-de-France) : 25,7.
Vous dépensez moins sur les lycées publics : 44 euros par habitant. Moyenne des Régions : 53,3.
Vous dépensez moins sur la culture et les sports : 7,1 euros par habitant. Moyenne des Régions : 12,5.
Vous dépensez moins sur l’aménagement du territoire : 8,2 euros par habitant. Moyenne des Régions : 17,8.
Vous dépensez moins sur les transports et la voirie : 53, 7 euros par habitant. Moyenne des Régions : 82.
Vous dépensez moins sur l’environnement : 2,4 euros par habitant. Moyenne des Régions : 6 euros.
Et je pourrai continuer…
Bien évidemment, vous allez me dire qu’il reste l’action économique et que, dans ce domaine, votre niveau de dépense est supérieur à celui des autres Régions. C’est vrai ! Encore qu’on peut observer dans ce domaine des taux de réalisation sensiblement plus faibles que sur les autres postes budgétaires : 68,66 % contre une moyenne de 86,09 % sur l’ensemble du budget.
Mais, en dehors de cette exception, vous n’en avez pas profité pour impulser une quelconque ambition, alors qu’il y aurait des politiques publiques fortes et utiles pour les Aquitains, à mener dans de nombreux domaines :
- sur l’eau, la situation est critique. Monsieur le Président, je vous invite, quand vous voulez, cet été, demain si vous voulez, à venir voir la Garonne à Agen, l’Adour à Dax, l’Isle à Périgueux. Le problème de l’irrigation n’appelle pas seulement des colloques à l’Hôtel de Région, mais d’abord et surtout de l’action concrète, à l’opposé de la diminution des crédits que vous avez votée au budget 2006. Il y a une urgence absolue à mettre en œuvre une politique nouvelle de création de ressources en eau (lacs collinaires, barrages sur nos rivières, grands barrages de montagne).
- sur l’environnement, c’est l’atonie générale. Petit bras, petit braquet. Je m’adresse à nos amis les Verts : mais où êtes-vous donc passés ? Rose-Marie, réveille-toi, ils vous ont plumés !
- sur la politique de la Ville, vous êtes restés sourds à la crise de novembre et vous vous êtes assis sans vergogne sur votre promesse de doubler les crédits. Presque rien sur l’emploi et une obsession : freiner les projets ANRU. Alors qu’il faut un élan et un souffle devant un enjeu majeur.
- sur les TIC, enjeu essentiel du XXIe siècle, vous avez beaucoup promis mais peu réalisé, vous avez diminué entre 2004 (3,3 millions d’euros) et 2005 (3,1 millions d’euros) et vous vous apprêtez à réaliser encore moins avec la révision de votre schéma à la baisse. Là encore sur ce secteur d’avenir, Où est le souffle, où est la vision ?

3)Vous avez augmenté massivement les impôts, tout en continuant à désendetter
Je rappelle votre choix fiscal en 2005 : 14,9 % de hausse sur les impôts directs, cette action sur les taux ayant produit 28 millions d’euros de recettes supplémentaires.
Or, dans le même temps, et c’est là la spécificité aquitaine dans le concert des Régions, vous avez continué à désendetter puisque vous n’avez mobilisé que 20 millions d’euros d’emprunt sur les 63 prévus (soit à peine 31 % de taux de réalisation… un record !), alors que, dans le même temps, le capital remboursé s’est élevé à 51 millions. Si bien que l’encours a baissé à 376 millions d’euros, soit – 31 millions d’euros, correspondant à une baisse de 8% de l’encours de la dette.
28 millions de surplus de produit fiscal lié à l’augmentation des taux. 31 millions de désendettement. La preuve mathématique est faite de l’inutilité de la hausse fiscale de 2005. Vous auriez pu parvenir exactement au même résultat sans recourir à la fiscalité et avec une dette stabilisée en volume.
D’autant plus que la situation budgétaire de la Région est confortable : un taux d’épargne plus élevé et des ratios d’endettement plus faibles que la moyenne des Régions. Il ne faut pas confondre la situation des finances de l’Etat et de celles de la Région : 3 ans de budget en endettement dans un cas, 6 mois dans l’autre. Se désendetter est certes une bonne chose mais cela n’est pas un but en soi. Pardonnez-moi, Monsieur le Président, et permettez à un « bleu 2004 » qui ne siège que depuis deux ans de vous le dire en face : votre baisse de la dette, arrêtez de la présenter comme un exploit olympique. C’est la conséquence mécanique de la hausse fiscale et de la faiblesse de vos dépenses.

Vous venez donc d’inventer un nouveau positionnement en politique économique : vous taxez beaucoup, vous dépensez peu et donc vous vous désendettez.
Il y a avait la variante libérale : on taxe peu, on dépense peu.
Il y avait la variante socialiste : on taxe beaucoup, on dépense beaucoup
Vous, vous avez inventé la variante sociale-libérale, tranquille, pépère : vous taxez beaucoup, vous dépensez peu et donc vous vous désendettez… et les Aquitains payent doublement :
- par leurs impôts ;
- par un niveau de service moindre que dans les autres Régions.
Nous nous sommes amusés à comparer ces chiffres de dépenses par habitant avec une Région voisine, que je prendrai au hasard, sans qu’il y ait le moindre lien avec l’actualité politique nationale : Poitou-Charentes.
Dépenses réelles par habitant en 2004 en Poitou-Charentes : 154 euros. Je rappelle que l’Aquitaine est à 117.
Produit des impositions directes en 2004 en Poitou-Charentes : 49,3 euros. L’Aquitaine est à 61,3.
Cela veut donc dire que les impôts directs représentent la moitié du niveau des dépenses de fonctionnement en Aquitaine et seulement le tiers en Poitou-Charentes.
Monsieur le Président, chers collègues socialistes, Madame ROYAL vous a déjà montré la voie sur la délinquance des mineurs et sur les 35 heures. Ecoutez-la aussi sur la gestion de sa Région. Elle a des choses à vous dire et beaucoup à vous apprendre !

Globalement, ce Compte Administratif lève le voile sur l’illusion d’une Aquitaine qui serait bien gérée. La réalité est toute autre : celle d’une Région surfiscalisée et, en même temps, immobile, avec peu de politiques fortes et innovantes, avec des carences criantes sur des sujets pourtant essentiels.
Mais tout cela est habillé, enrobé dans une hyper communication, dont nous connaissons les stigmates : une convention avec France 3 qui représente, par sa démesure financière et sa nature même, un quelque chose qui n’est pas sain – j’y reviendrai lors du Budget Supplémentaire et nous ne vous lâcherons pas sur ce dossier – et un poste communication, qui fait un bond de + 56 %. Je dis bien 56 % entre les CA de 2004 et 2005. Il faudra nous expliquer, Monsieur le Président, comment vous êtes arrivés à passer de 2,22 à 3,48 millions d’euros en une seule année…

Autant vous dire, Monsieur le Président, que la simple lecture des chiffres conforte notre analyse du budget 2005.
Votre budget 2005 était construit autour d’un discours mensonger. Celui d’une compensation inférieure aux dépenses transférées. Aujourd’hui la vérité contraire est avérée, la hausse d’impôts était donc politique, uniquement politique.
Très vite, vous avez eu l’assurance que l’Etat compensait, vous auriez pu au moins en profiter pour impulser des politiques innovantes et fortes.
La tradition du groupe UDF est l’abstention. Mais, nous voulons aujourd’hui dénoncer l’hypocrisie du discours sur la décentralisation et nous prenons date pour le budget 2007. Pour dénoncer cette hypocrisie, nous ne participerons pas à ce vote.

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